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Publié par | bibebook |
Nombre de lectures | 30 |
EAN13 | 9782824709673 |
Langue | Français |
Extrait
HONORÉ DE BALZA C
ESQU ISSE D’HOMME
D’AF F AI RES D’AP RÈS
NA T U RE
BI BEBO O KHONORÉ DE BALZA C
ESQU ISSE D’HOMME
D’AF F AI RES D’AP RÈS
NA T U RE
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-0967-3
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D’AF F AI RES D’AP RÈS
NA T U RE
A MONSI EU R LE BARON JAMES RO T HSCH I LD ,
CONSU L GÉN ÉRAL D’ A U T RICH E A P ARIS, BANQU I ER.
mot dé cent inv enté p our e xprimer l’état d’une
fille ou la fille d’un état difficile à nommer , et que , dans sa pu-L deur , l’ A cadémie Française a néglig é de définir , v u l’âg e de ses
quarante membr es. and un nom nouv e au rép ond à un cas so cial qu’ on
ne p ouvait p as dir e sans p ériphrases, la fortune de ce mot est faite . A ussi
la Loree p assa-t-elle dans toutes les classes de la so ciété , même dans
celles où ne p assera jamais une Lor ee . Le mot ne fut fait qu’ en 1840,
sans doute à cause de l’agglomération de ces nids d’hir ondelles autour
de l’église dé dié e à Notr e-D ame-de-Lor ee . Ce ci n’ est é crit que p our les
éty mologistes. Ces messieur s ne seraient p as tant embar rassés si les é
crivains du Mo y en- Âg e avaient pris le soin de détailler les mœur s, comme
1Esquisse d’homme d’affair es d’après natur e Chapitr e
nous le faisons dans ce temps d’analy se et de description. Mademoiselle
T ur quet, ou Malag a, car elle est b e aucoup plus connue sous son nom de
guer r e (V oir la Fausse Maîtresse ), est l’une des pr emièr es p ar oissiennes de
cee char mante église . Cee jo y euse et spirituelle fille , ne p ossé dant que
sa b e auté p our fortune , faisait, au moment où cee histoir e se conta, le
b onheur d’un notair e qui tr ouvait dans sa notar esse une femme un p eu
tr op dé v ote , un p eu tr op raide , un p eu tr op sè che p our tr ouv er le b
onheur au logis. Or , p ar une soiré e de car naval, maîtr e Cardot avait rég alé ,
chez mademoiselle T ur quet, D esr o ches l’av oué , Bixiou le caricaturiste ,
Louste au le feuilletoniste , Nathan dont les noms illustr es dans la Comédie
humaine r endent sup erflue (sup erflus) toute espè ce de p ortrait. Le jeune
la Palférine , dont le titr e de comte de vieille r o che , r o che sans aucun
filon de métal hélas ! avait honoré de sa présence le domicile illég al du
notair e . Si l’ on ne dîne p as chez une Lor ee p our y mang er le b œuf p
atriar cal, le maigr e p oulet de la table conjug ale et la salade de famille , l’ on
n’y tient p as non plus les discour s hy p o crites qui ont cour s dans un salon
meublé de v ertueuses b our g e oises. Ah ! quand les b onnes mœur s ser
ontelles arayantes ? and les femmes du grand monde montr er ont-elles
un p eu moins leur s ép aules et un p eu plus de b onhomie ou d ’ esprit ?
Marguerite T ur quet, l’ Asp asie du Cir que-Oly mpique , est une de ces natur es
franches et viv es à qui l’ on p ardonne tout à cause de sa naïv eté dans la
faute et de son esprit dans le r ep entir à qui l’ on dit, comme Cardot assez
spirituel quoique notair e p our le dir e : ― T r omp e-moi bien. Ne cr o y ez
p as né anmoins à des énor mités. D esr o ches et Cardot étaient deux t r op
b ons enfants et tr op vieillis dans le métier p our ne p as êtr e de plain-pie d
av e c Bixiou, Louste au, Nathan et le jeune comte . Et ces messieur s, ayant
eu souv ent r e cour s aux deux officier s ministériels, les connaissaient tr op
p our , en style lor ee , les faire poser . La conv er sation, p arfumé e des o deur s
de sept cig ar es, fantasque d’ab ord comme une chè v r e en lib erté , s’ar rêta
sur la stratégie que cré e à Paris la bataille incessante qui s’y liv r e entr e
les cré ancier s et les débiteur s. Or , si v ous daignez v ous souv enir de la vie
et des anté cé dents des conviv es, v ous eussiez difficilement tr ouvé dans
Paris des g ens plus instr uits en cee matièr e : les uns émérites, les autr es
artistes, ils r essemblaient à des magistrats riant av e c des justiciables. Une
suite de dessins faits p ar Bixiou sur Clichy avait été la cause de la
tour2Esquisse d’homme d’affair es d’après natur e Chapitr e
nur e que pr enait le discour s. Il était minuit. Ces p er sonnag es, div ersement
gr oup és dans le salon autour d’une table et de vant le feu, se liv raient à
ces char g es qui non-seulement ne sont compréhensibles et p ossibles qu’à
Paris, mais encor e qui ne se font et ne p euv ent êtr e comprises que dans
la zone dé crite p ar le faub our g Montmartr e et p ar la r ue de la Chaussé
ed’ Antin, entr e les hauteur s de la r ue de Navarin et la ligne des b oule vards.
En dix minutes, les réfle xions pr ofondes, la grande et la p etite morale ,
tous les quolib ets fur ent épuisés sur ce sujet, épuisé déjà v er s 1500 p ar
Rab elais. Ce n’ est p as un p etit mérite que de r enoncer à ce feu d’artifice
ter miné p ar cee der nièr e fusé e due à Malag a.
― T out ça tour ne au pr ofit des b oier s, dit-elle . J’ai quié une mo diste
qui m’avait manqué deux chap e aux. La rag euse est v enue vingt-sept fois
me demander vingt francs. Elle ne savait p as que nous n’av ons jamais
vingt francs. On a mille francs, on env oie cher cher cinq cents francs chez
son notair e ; mais vingt je ne les ai jamais eus. Ma cuisinièr e ou
ma femme de chambr e ont p eut-êtr e vingt francs à elles deux. Moi, je n’ai
que du cré dit, et je le p erdrais en empr untant vingt francs. Si je
demandais vingt francs, rien ne me distinguerait plus de mes confrères qui se
pr omènent sur le b oule vard.
― La mo diste est-elle p ayé e ? dit la Palférine .
― Ah ! ça, de viens-tu bête , toi ? dit-elle à la Palférine en clignant, elle
est v enue ce matin p our la vingt-septième fois, v oilà p our quoi je v ous en
p arle .
― Comment av ez v ous fait ? dit D esr o ches.
― J’ai eu pitié d’ elle , et. . . je lui ai commandé le p etit chap e au que
j’ai fini p ar inv enter p our sortir des for mes connues. Si mademoiselle
Amanda réussit, elle ne me demandera plus rien : sa fortune est faite .
― Ce que j’ai v u de plus b e au dans ce g enr e de lue , dit maîtr e D
esr o ches, p eint, selon moi, Paris, p our des g ens qui le pratiquent, b e aucoup
mieux que tous les table aux où l’ on p eint toujour s un Paris fantastique .
V ous cr o y ez êtr e bien forts, v ous autr es, dit-il en r eg ardant Nathan et
Louste au, Bixiou et la Palférine ; mais le r oi, sur ce ter rain, est un certain
comte qui maintenant s’ o ccup e de fair e une fin, et qui, dans son temps,
a p assé p our le plus habile , le plus adr oit, le plus r enaré , le plus instr uit,
le plus hardi, le plus subtil, le plus fer me , le plus pré v o yant de tous les
3Esquisse d’homme d’affair es d’après natur e Chapitr e
cor sair es à g ants jaunes, à cabriolet, à b elles manièr es qui naviguèr ent,
naviguent et naviguer ont sur la mer orag euse de Paris. Sans foi ni loi, sa
p olitique privé e a été dirig é e p ar les princip es qui dirig ent celle du
cabinet anglais. Jusqu’à son mariag e , sa vie fut une guer r e continuelle comme
celle de . . . Louste au, dit-il. J’étais et suis encor e son av oué .
― Et la