La lecture à portée de main
Description
Informations
Publié par | bibebook |
Nombre de lectures | 37 |
EAN13 | 9782824710457 |
Langue | Français |
Extrait
HONORÉ DE BALZA C
U N MÉNA GE DE
GARÇON
BI BEBO O KHONORÉ DE BALZA C
U N MÉNA GE DE
GARÇON
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1045-7
BI BEBO OK
w w w .bib eb o ok.comLicence
Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
Except where otherwise noted, this work is licensed under
h tt p : / / c r e a ti v e c o m m on s . or g / l i c e n s e s / b y - s a / 3 . 0 /
Lir e la licence
Cee œuv r e est publié e sous la licence CC-BY -SA, ce qui
signifie que v ous p ouv ez lég alement la copier , la r e
distribuer , l’ env o y er à v os amis. V ous êtes d’ailleur s
encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.MONSI EU R CHARLES NODI ER,
Membr e de l’ A cadémie française , bibliothé cair e à l’ Ar senal.A V oici, mon cher No dier , un ouv rag e plein de ces faits soustraits
à l’action des lois p ar le huis-clos domestique ; mais où le doigt de Dieu,
si souv ent app elé le hasard, supplé e à la justice humaine , et où la morale ,
p our êtr e dite p ar un p er sonnag e mo queur n’ en est p as moins instr
uctiv e et frapp ante . Il en résulte , à mon sens, de grands enseignements et
p our la Famille et p our la Mater nité . Nous nous ap er ce v r ons p eut-êtr e
tr op tard des effets pr o duits p ar la diminution de la puissance p ater nelle ,
qui ne cessait autr efois qu’à la mort du pèr e , qui constituait le seul
tribunal humain où r essortissaient les crimes domestiques, et qui, dans les
grandes o ccasions, avait r e cour s au p ouv oir r o yal p our fair e e x é cuter ses
ar rêts. elque tendr e et b onne que soit la Mèr e , elle ne r emplace p as plus
cee r o yauté p atriar cale que la Femme ne r emplace un Roi sur le trône ;
et si cee e x ception ar riv e , il en résulte un êtr e monstr ueux. Peut-êtr e
n’ai-je p as dessiné de table au qui montr e plus que celui ci combien le
mariag e indissoluble est indisp ensable aux so ciétés eur op é ennes, quels sont
les malheur s de la faiblesse féminine , et quels dang er s comp orte l’intérêt
p er sonnel quand il est sans fr ein. Puisse une so ciété basé e uniquement sur
1Un ménag e de g ar çon Chapitr e
le p ouv oir de l’ar g ent frémir en ap er ce vant l’impuissance de la justice sur
les combinaisons d’un sy stème qui déifie le succès en en graciant tous les
mo y ens ! Puisse-t-elle r e courir pr omptement au catholicisme p our
purifier les masses p ar le sentiment r eligieux et p ar une é ducation autr e que
celle d’une Univ er sité laïque . Assez de b e aux caractèr es, assez de grands
et nobles dé v ouements briller ont dans les Scènes de la Vie militair e , p our
qu’il m’ait été p er mis d’indiquer ici combien de dépravation causent les
né cessités de la guer r e chez certains esprits, qui dans la vie privé e osent
agir comme sur les champs de bataille .
V ous av ez jeté sur notr e temps un sag ace coup d’ œil dont la
philosophie se trahit dans plus d’une amèr e réfle xion qui p er ce à trav er s v os
p ag es élég antes, et v ous av ez mieux que p er sonne appré cié les dégâts
pr o duits dans l’ esprit de notr e p ay s p ar quatr e sy stèmes p olitiques
différ ents. A ussi ne p ouvais-je mer e cee histoir e sous la pr ote ction d’une
autorité plus comp étente . Peut êtr e v otr e nom défendra-t-il cet ouv rag e
contr e des accusations qui ne lui manquer ont p as : où est le malade qui
r este muet quand le chir ur gien lui enlè v e l’app ar eil de ses plaies les plus
viv es ? A u plaisir de v ous dé dier cee Scène se joint l’ or gueil de trahir
v otr e bienv eillance p our celui qui se dit ici
Un de v os sincèr es admirateur s
DE BALZA C.
n
2U N MÉNA GE DE GARÇON
1792, b our g e oisie d’Issoudun jouissait d’un mé de cin nommé
Roug et, qui p assait p our un homme pr ofondément malicieux.E A u dir e de quelques g ens hardis, il r endait sa femme assez
malheur euse , quoique ce fût la plus b elle femme de la ville . Peut-êtr e cee
femme était-elle un p eu soe . Malgré l’inquisition des amis, le
commérag e des indiffér ents et les mé disances des jaloux, l’intérieur de ce ménag e
fut p eu connu. Le do cteur Roug et était un de ces hommes de qui l’ on dit
familièr ement : « Il n’est pas commode . » A ussi, p endant sa vie , g arda-t-on
le silence sur lui, et lui fit-on b onne mine . Cee femme , une demoiselle
D escoings, assez malingr e déjà quand elle était fille ( ce fut, disait-on, une
raison p our le mé de cin de l’ép ouser ), eut d’ab ord un fils, puis une fille qui,
p ar hasard, vint dix ans après le frèr e , et à laquelle , disait-on toujour s, le
do cteur ne s’aendait p oint, quoique mé de cin. Cee fille , tard v enue , se
nommait Ag athe . Ces p etits faits sont si simples, si ordinair es, que rien
ne semble justifier un historien de les placer en tête d’un ré cit ; mais, s’ils
n’étaient p as connus, un homme de la tr emp e du do cteur Roug et serait
jug é comme un monstr e , comme un pèr e dénaturé ; tandis qu’il obéissait
tout b onnement à de mauvais p enchants que b e aucoup de g ens abritent
sous ce ter rible axiome : Un homme doit avoir du caractère ! Cee mâle
3Un ménag e de g ar çon Chapitr e
sentence a causé le malheur de bien des femmes. Les D escoings, b e au-pèr e
et b elle-mèr e du do cteur , commissionnair es en laine , se char g e aient ég
alement de v endr e p our les pr opriétair es ou d’acheter p our les mar chands
les toisons d’ or du Ber r y , et tiraient des deux côtés un dr oit de
commission. A ce métier , ils de vinr ent riches et fur ent avar es : morale de bien des
e xistences. D escoings le fils, le cadet de madame Roug et, ne se plut p as à
Issoudun. Il alla cher cher fortune à Paris, et s’y établit épicier dans la r ue
St-Honoré . Ce fut sa p erte . Mais, que v oulez-v ous ? l’épicier est entraîné
v er s son commer ce p ar une for ce aractiv e ég ale à la for ce de répulsion
qui en éloigne les artistes. On n’a p as assez étudié les for ces so ciales qui
constituent les div er ses v o cations. Il serait curieux de sav oir ce qui
détermine un homme à se fair e p ap etier plutôt que b oulang er , du moment où
les fils ne succèdent p as for cément au métier de leur pèr e comme chez les
Ég y ptiens. L’amour avait aidé la v o cation chez D escoings. Il s’était dit :
Et moi aussi, je serai épicier ! en se disant autr e chose à l’asp e ct de sa
p atr onne , fort b elle cré atur e de laquelle il de vint ép erdument amour eux.
Sans autr e aide que la p atience , et un p eu d’ar g ent que lui env o yèr ent
ses pèr e et mèr e , il ép ousa la v euv e du sieur Bixiou, son pré dé cesseur . En
1792, D escoings p assait p our fair e d’ e x cellentes affair es. Les vieux D
escoings vivaient encor e à cee ép o que . Sortis des laines, ils emplo yaient
leur s fonds à l’achat des biens nationaux : autr e toison d’ or ! Leur g endr e ,
à p eu près sûr d’av oir bientôt à pleur er sa femme , env o ya sa fille à Paris,
chez son b e au-frèr e , autant p our lui fair e v oir la capitale , que p ar une
p ensé e matoise . D escoings n’avait p as d’ enfants. Madame D escoings, de
douze ans plus âg é e que son mari, se p ortait fort bien ; mais elle était
grasse comme une griv e après la v endang e , et le r usé Roug et savait assez
de mé de cine p our pré v oir que monsieur et madame D escoings,
contrair ement à la morale des contes de fé e , seraient toujour s heur eux et
n’auraient p oint d’ enfants. Ce ménag e p our rait se p assionner p our Ag athe . Or
le do cteur Roug et v oulait déshériter sa fille , et se flaait d’ar riv er à ses
fins en la dép ay sant. Cee jeune p er sonne , alor s la plus b elle @