L'ambition de ce numéro spécial de la Lettre du Pôle est de proposer une vue en contrechamp des résultats des sportives françaises aux jeux olympiques et paralympiques de Pékin. Rédigée à partir d'une multitude de sources d'informations et étayée par des paroles d'hommes et de femmes, entraîneurs de terrain, l'analyse qui est conduite ici se veut objective quant aux performances des athlètes féminines... composent ce numéro spécial "Jeux Olympiques et Paralympiques au féminin".
Jeux olympiques Parité Un bilan mitigé pour le CIO et le mouvement olympique PEKIN - Même si un nombre record de fem-mes participent aux JO de Pékin, le mouve-ment olympique est toujours sous le feu des critiques sur la question de la parité, accusé d'avoir échoué à réduire l'omnipré-sence des membres masculins dans ses propres rangs et de tolérer des pays qui écartent toute présence féminine au sein de leurs délégations. Sur les plus de 11.000 athlètes réunis à Pékin, 42% sont des femmes. Elles étaient un peu moins de 26% en 1988, ce qui illus-tre le succès d'une campagne agressive menée depuis cette date par le Comité international olympique pour atteindre une parité réelle. Cependant le CIO lui-même, ainsi que ses fédérations affiliées, n'ont pas fait aussi bien, avec un résultat assez éloigné de leurs propres objectifs. Parmi les 100 membres du CIO, 16 sont des femmes et une seule fait partie de la puissante commission exécu-tive, la Syrienne Nawal EL-MOUTAWAKEL, ancienne championne olympique du 400m haies. Une importante majorité des 205 comités olympiques nationaux ont un exé-cutif composé à 80% d'hommes, et seules deux des 35 fédérations sportives olympi-ques ont des femmes pour présidentes. “Je suis profondément déçue”, avoue Anita DEFRANTZ, membre américaine du CIO et dirigeante de la commission femme et sport. Mme DEFRANTZ fait notamment partie de ces nombreuses militantes du droit des femmes à faire du sport qui perdent quel-que peu patience face à l'Arabie saoudite, la dernière nation majeure à priver ses ci-toyennes des Jeux. Elle souhaite que les Saoudiens - qui ont envoyé une délégation de 17 hommes à Pékin - soient exclus des Jeux de 2012 à Londres à moins qu'ils n'abandonnent leur politique 100% mascu-line. “Peut-être qu'après ces Jeux il sera clair qu'ils seront la seule exception et qu'ils seront contraints de permettre aux femmes de concourir”, espère Mme DEFRANTZ. Les opposants soutiennent que le CIO ne respecte pas sa propre charte, qui affirme que toute discrimination basée sur le sexe est “incompatible avec le mouvement olympi-que”. Certains laissent entendre que le CIO a une politique du deux poids, deux mesures, ce qui expliquerait pourquoi l'institution est plus tolérante avec les discriminations sexuelles qu'elle ne l'avait été avec la sé-grégation raciale qui avait entraîné l'exclu-sion de l'Afrique du Sud durant l'ère de l'apartheid. Néanmoins, beaucoup de membres du CIO pourraient hésiter à barrer la route de Londres aux Saoudiens.
“Je serais surpris et déçu si nous venions à prendre une décision aussi draconienne”, confie le vice-président du CIO Kevan GOSPER. “Le seul résultat serait la souf-france des athlètes de ce pays”. L'apartheid “était considéré comme un crime contre l'humanité”, rappelle M. GOS-PER. “Je ne pense pas que cela puisse être comparé aux efforts menés pour assurer aux femmes une égalité parfaite”. Que l'Arabie saoudite change de son propre fait reste encore à voir. D'ordinaire, le royaume wahhabite évite de mettre en colère le puissant clergé islamique, même si le problème de la place des femmes dans le sport a surgi récemment dans les médias locaux. Actuellement l'Arabie saoudite interdit l'éducation physique et sportive dans les écoles publiques réservées aux filles. Des femmes ont discrètement formé quelques équipes sportives de leur côté, mais leur ni-veau de compétition est jugé très éloigné des standards olympiques. Le Qatar a imité l'Arabie saoudite cette an-née en envoyant une délégation 100% masculine à Pékin. Mais plusieurs pays arabes qui excluaient auparavant les femmes ont cédé, comme le sultanat d'Oman, le Yémen et les Emirats arabes unis (EAU). Ces derniers ont même désigné une femme comme porte-drapeau, cheikha Maitha AL-MAKTOUMA, une membre de la famille royale qui dispute les épreuves de taekwondo. Ibrahim Abdul MALEK, le secrétaire géné-ral du comité olympique émirati, a confié à un journal local qu'il s'agissait d'un message destiné à “l'ensemble du Golfe et à tout le monde arabe. Tout le monde, hom-mes et femmes, devraient simplement s'entraîner très dur dans leurs disciplines. Il n'existe pas de barrières”. Parmi les autres femmes musulmanes en lice figure Robina MUQIMYAR, originaire d'un pays déchiré par la guerre, l'Afghanistan, qui avait été exclu des Jeux lorsque les talibans étaient au pouvoir. Cette coureuse de 100m dispute sa seconde olympiade après être devenue il y a quatre ans l'une des deux premières Afghanes à participer aux Jeux. “Je veux marquer l'histoire de l'Afghanistan”, annonce-t-elle. “Je veux que les autres femmes me voient et m'imitent” . Même à l'intérieur du domaine des compé-titions olympiques, il existe des limites pour les femmes. Deux sports - le saut à ski et la boxe - demeurent réservés aux hommes, malgré le vigoureux lobbying exercé par les femmes pour obtenir le droit d'y concourir. par David CRARY Tous droits réservés : Associated Press -French Online - Jeudi 14 août 2008
Les femmes à Pékin
39,13% des athlètes présent(e)s au JO étaient des femmes. Si elles n’ont pu ob-tenir la parité sur les pistes et terrains de Pékin, malgré tous les efforts du CIO dans ce sens (165 épreuves masculines, 125 épreuves féminines, 10 épreuves mixtes), elles ont néanmoins fait parler d’elles. Chez certaines nations comme la Chine, l’Australie, les Pays-Bas ou encore la Roumanie, elles battent leurs camarades hommes. Ainsi, 3/5 des médailles chinoi-ses sont des médailles féminines (57/100) . Pour les Pays-Bas, les filles ont gagné 4 fois plus de médailles que les hommes (11/3) . Si on devait faire un classement des médailles féminines, la Chine devancerait les Etats-Unis, la Russie serait troisième, suivie de l’Australie, la Grande-Bretagne, l’Allemagne. Les françaises seraient loin derrière mais si la performance d’ensem-ble n’a pas été tout à fait au niveau où on l’attendait, individuellement, il y a eu de grandes satisfactions. Les nouvelles “stars” du BMX, Anne-Caroline Chausson et Laetitia Le Corguille, n’ont pas fait dans le détail en rapportant l’or et l’argent. Les deux jeunes femmes multiplient les entrainements et les tours de piste au CREPS PACA, site d’Aix-en-Provence. Le BMX, nouvelle épreuve au programme des jeux olympiques, mar-que ainsi de sa gomme, le tableau des médailles françaises à Pékin. Aussi, Virginie Arnold, Sophie Dodemont et Berengère Schuh remportent le bronze au tir à l’arc. Marie Delattre et Anne-Laure Viard en canoë-kayak sur 500 m (course en ligne). En taekwondo, Gwladys Epangue rafle également le bronze. En judo, Lucie Decosse gagne l’argent dans la catégorie des moins de 63 kg et Stéphanie Possa-Mai, le bronze, en moins de 78 kg. Aux Jeux Paralympiques, les filles repré-sentaient 32% des athlètes français(es) à Pékin. Elles ont remporté 35% des mé-dailles et la France se classe 9 ème avec 3 médailles d’or. Soulignons aussi les nou-veaux records du monde et paralympi-ques établis par Assia El‘Hannouni en athlétisme (800 m et 1500 m) et par Elodie Lorandi, en natation (100 m papil-lon). Les multi médaillé(e)s : Chez les filles, les performances des trois australiennes Rice, Trickett et Jones (natation) sont à souligner. Elles totalisent à elles trois 10 médailles. Ou encore les prouesses de ces deux améri-caines, Liukin et Johnson à la poutre, barre asymétrique et aux exercices au sol (2 d’or, 6 d’argent, 1 de bronze). Newsletter SFPF - septembre 2008
PRN “Sport, famille et pratiques féminines” - numéro spécial “Jeux au féminin” - p 2
Les athlètes françaises aux JO La contre performance en question ? Les athlète f ançaises ont -deds'suonuespdeurfsotramnadnarcdepproéndictt.uIlellpeemutesn’tageinrsportifréeldeMurielHURTIS(prévisible s r avant les JO) et son potentiel médiatique. remporté 7 des 40 médailles d’un problème précis inhérent à la gestion A l’inverse, même si Jeannie LONGO-CI-au JO de pékin. dmeaul’véaviséenegemsetinotnpdaerslaaprséppoarrtiavtieonofiunaulne.ePRELLIbénéficied’uneauramédiatique incontestable, peu d’observateurs, quelle Ce chiffre illustre le déséquilibre de la que soit leur connaissance du milieu spor-réussitehommes/femmeslorsdesJOpCueytteersaunralleyssedodnenféoensddneéscdeirsesictteiodnestse'cahp--tif,voyaientenelleunepossibilitédemé-2008. Sur un plan mondial, la France ap- niques des fédérations et sera menée par daille. Vice-championne olympique du paraît alors au 22 e rang au classement des contre la montre en 1996 à Atlanta (titrée médailles féminines selon le nombre de la Préparation Olympique et Paralympique. encourse en ligne la même année), à 49 médailles d'or (1 er titre en cyclisme BMX). Il est possible de se cantonner à une ana- ans, ses derniers résultats en champion-Alorsqu'environ45%dessélectionnéslsypsoert“ipvleussleàscphlauusdm”éddeisatipqeurfeosrmancesdesnatdumondeplaidaientensadéfaveur: français étaient des femmes, (42% au plan . 7 ème en 2007, 19 ème en 2006 et 14 ème en mondial), elles représentent 37% des fina-Les observables 2004. Néanmoins, sur le parcours péki-listes français (Cf. tableau des palmarès … nois, la Française échoue à 1"63 du po-mondiaux et répartition sexuée). dium après environ 36’00 de course. Cette En comparaison, aux Jeux d’Atlanta Les sportives les plus médiatiques telles fois, c’est le modèle de prédiction des po-(1996),lesfrançaisesavaientremporté8qMueieLlaureHUMRATNIAS,UDOCUh,riLsatiunreaFLAERSRSOENL,,tentielsdemédaillesquiestmisendéfaut. titres, soit la moitié des médailles d’or de la ur Cependant, cette performance, dans un France.Commentexpliquerl’érosiondesJFeraanncnieeféLmOiNniGneOdoeuheanncdobraelll'oénqtuiéptéejdue-sporténergétiqueoùl’âgedesmédaillésà françaises au fil des olympiades ? tendance à diminuer, reste hors norme ! Questionner ces résultats jugés, par cer- gées par leurs pairs ou par la presse spor-tains, comme décevants, doit s'envisager tive comme potentiellement médaillables. Ces trois illustrations montrent que l’expo-comme une étape d’une réflexion plus Sil'on étudie la performance de ces sporti- sition médiatique des sportives n’est pas globalesurlaplacedelafemmedanslevdeess,ilpearpfparaaîtn,cpeosuracuerrtaeignaersd,udnuenbiaviessaeunécessairementenphaseavecleurpoten-sport.atteintlorosrdmessélectionlympitieldemédailles.Cettemiseenlumière Ce débat sur les médailles, reste d'actua- s o ques. des sportives est à double tranchant. lité même s’il ne s’agit que de la partie visi- Laure MANAUDOU s’est présentée au Elle permet de faire évoluer le regard sur ble de la présence des femmes à tous les la femme sportive en général et sur sa niveaux. Ces performances méritent néan- Championnat de France à Dunkerque, place dans le dispositif du sport de haut ni-moinsd'êtrequestionnéesetanalyséesfqouramlificatifpouériePuérkiàn,càeluuinqnui’veellaeuadaettpeeinr-tveauenparticulier.Acontrario,la“sur-mé-objectivement. Mais quelle grille d’analyse ance sup r diatisation” de sportives emblématiques utiliserpourproduiredesbilanschiffrésaduexJcoO.mPpaoruerrillluesstrertecmelpas,ilreésatlispéossibluer(LauraFLESSELétait,elleaussi,cham-standardisés?l'éuvedu200mètresdosàcessdesuxpionneolympiqueen…1996!),indépen-pre damment de leur réel potentiel sportif, tend thode à renforcer le sentiment de contre-perfor-Du point de vue de la mé c Ta o b m le p a é u t it c i i-o d n e s s : sous : comparaison des perfor-mance des filles aux JO. Les résultats des françaises dépendent mances de L. MANAUDOU JO/CF sur 200 dos d’un tème : celui du niveau de perfordmouabnlceesyqsu’ellesontproduitsurlaDunkerque-Pékin-ccoapmapcéittiétiso,netolcyelmuipidqeuleaacuornecgurarredndceeilnetuerrs-ChampionnatsdeFrance(200dos)PlacetJ0mapvecJeuxOlympiques-(200dos) ce e s 25/04/2008 Place CF Temps Place JO Temps nmaétieosn.alCeetdtaensdolauqbuleelléevealllueastisoenscoontnsetxitpurie-Elim.2 ème 2’10”07 5 ème (qualifiée) Elim. 3 ème 2’09”39 un niveau d'analyse indispensable. 1/2 finale 1 ère 2’08”01 2 ème (qualifiée) 1/2 finale 8 ème 2’12”04 Il est possible de parler de contre perfor- Finale 1 ère 2’06”64 Méd de bronze élimination mance dans la mesure où la performance réalisée aux JO est clairement inférieure au niveau attendu (avec les réserves d’usage sur le fait que chaque résultat est réalisé dans des conditions uniques et non standardisées). Les résultats féminins à Pékin entrent-ils dans cette catégorie ? Pour répondre, il convient d'étudier les éventualités : - d’un potentiel insuffisant des sportives françaises au regard de celui attendu pour atteindre le podium : ce qui renvoie à l’en-vironnement mis en place par les fédéra-tions de la détection à la sélection, en pas-sant par l’entraînement ; - d’une mauvaise estimation du niveau nécessaire pour être médaillé. Malgré l’in-certitude des résultats sportifs, il s’agirait d’une inefficacité des modèles statistiques de prévision de l’évolution des performances ;
photo:creativecommons
Si Laure MANAUDOU avait nagé au même niveau sur ces 2 échéances sporti-ves, elle aurait pu monter sur le podium Muriel HURTIS : olympique. Aussi, son statut de sportive Meilleure perf. 2008 : 22’50 potentiellement médaillable était réel. JO 2008 Temps 1 er tour (2 ème ) : 22’72 En athlétisme, Muriel HURTIS, considérée Temps 2 ème tour (2 ème ) : 22’89 ebllleeapruésssienptaaritl,easvamnétdlieassJceoumxmOelymmépidqauilleas-,Tempsdemi-finale(5 ème ): 22’71 , une meilleure performance de l’année de 22’50 sur 200m. Cette performance, Finalistes du 200m à Pékin même si elle avait été réalisée à Pékin ne CAMPBELL-BROWN Veronica 21’74 lui aurait donné que le 7 ème rang des demi- FELIX Allyson 21’93 finales et de la finale. De même, pour at- STEWART Kerron 22’00 teindre le podium olympique, il lui aurait LEE Muna 22’01 fallu battre son record personnel (22’31) HOOKER Marshevet 22’34 obtenu en 1999 (tableau ci-contre) . SIMPSON Sherone 22’36 Au regard de ces chiffres, il apparaît un FERGUSON-McKENZIE Debbie 22’61 décalage certain entre l’analyse du niveau MOTHERSILL Cydonie 22’68
PRN “Sport, famille et pratiques féminines” - numéro spécial “Jeux au féminin”- p 3