MSP2010 - Thèse Projet FR - Gouverner le climat
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Gouverner le climat ? Les villes face au risque climatique : transferts de politiques publiques et réseaux de villes dans l’Europe du début du vingt-et-unième siècle Introduction : du changement climatique à sa prise en compte politique En 1971, l’une des toutes premières conventions interétatiques directement liées au climat est signée à Ramsar. Depuis le sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992, puis Johannesburg en 2002, ou encore les différentes réunions de la Conférence des Parties (COP 14, 15, 16), les Etats cherchent à faire face au risque climatique. Ces derniers ont joué un rôle majeur dans la gestion des risques (industriels, techniques, climatiques, économiques toujours). Depuis trente ans, ils se sont dotés de programmes d’action spécifiques ou encore d’institutions publiques pour tenter de faire face à la crise climatique. Aujourd’hui, la science politique met en question la légitimité des États à gouverner le risque climatique ; étant entendu que cela se jouerait entre acteurs privés (mondialisés) et/ou organisations internationales. Cependant, peu de travaux s’interrogent sur le rôle des villes, qui cherchent depuis le 1début des années 2000 à faire entendre leur voix au niveau européen et international notamment . Nous souhaitons donc nous intéresser à cet acteur jusqu’alors négligé et qui pourtant est central des politiques liées aux risques climatiques. En effet, longtemps tenues à l’écart des décisions et des projets de ...

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Gouverner le climat ? Les villes face au risque climatique : transferts de politiques publiques et réseaux de villes dans l’Europe du début du vingt-et-unième siècle Introduction : du changement climatique à sa prise en compte politique En 1971, l’une des toutes premières conventions interétatiques directement liées au climat est signée à Ramsar. Depuis le sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992, puis Johannesburg en 2002, ou encore les différentes réunions de la Conférence des Parties (COP 14, 15, 16), les Etats cherchent à faire face au risque climatique. Ces derniers ont joué un rôle majeur dans la gestion des risques (industriels, techniques, climatiques, économiques toujours). Depuis trente ans, ils se sont dotés de programmes d’action spécifiques ou encore d’institutions publiques pour tenter de faire face à la crise climatique.
Aujourd’hui, la science politique met en question la légitimité des États à gouverner le risque climatique ;étant entendu que cela se jouerait entre acteurs privés (mondialisés) et/ou organisations internationales. Cependant, peu de travaux s’interrogent sur le rôle des villes, qui cherchent depuis le 1 début des années 2000 à faire entendre leur voix au niveau européen et international notamment . Nous souhaitons donc nous intéresser à cet acteur jusqu’alors négligé et qui pourtant est central des politiques liées aux risques climatiques. En effet, longtemps tenues à l’écart des décisions et des projets de protection ou d’adaptation au changement climatique, elles sont en première ligne pour faire face, sur leur territoire, aux conséquences, politiques, économiques et sociales des risques 2 climatiques .
Et justement, parler de risques, il y encore peu, c’était suggérer l’idée de certitude ou de probabilité statistique. Cela témoignait d’une capacité à anticiper le futur voire d’une certaine manière à le contrôler. Le risque était intimement lié à la construction d’un État moderne capable d’assurer la sécurité de sa population contre différentes menaces. Aujourd’hui, ce terme se confond avec celui d’incertitude, il suggère un avenir menaçant sur lequel nous n’aurions qu’une prise réduite et des capacités d’action limitée. Il tend à justifier une démarche de précaution dans la conduite, loin de
1 Voir à l’époque moderne avec les travaux de René Favier et dans l’entre-deux-guerres avec la loi Morizet sur les fumées. Votée en 1932, cette loi avait pour but de supprimer les fumées industrielles dans les villes, causes de trop nombreuses maladies. André Morizet a été maire de Boulogne-Billancourt. 2 Cette hypothèse a aussi très largement guidée notre enquête de Master 2.
Mili SPAHIC – Doctorant en science politique – PhD Fellow in Political science UMR 5206 TRIANGLE (CNRS, ENS, Science Po Lyon, Lyon2) http://triangle.ens-lyon.fr/spip.php?article1659
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l’image d’un État omniscient et visionnaire avec laquelle nos sociétés ont vécu durant plus d’un siècle : en quelque sorte une mise à l’épreuve du politique.
I Les politiques du risque climatique
L’approche sociologique nous invite à aborder le risque comme le fruit de nouvelles prises de conscience, stratégies politiques ou encore mobilisations sociales. Lorsque le risque se transforme en catastrophe ou crises, le politique est sommé d’intervenir car il est le garant de la sécurité des populations (Beck, 1992). Les premiers travaux français de sociologie politique vont notamment s’intéresser à la décision en situation de crise (Lascoumes, 2007). Aux Etats-Unis, un important corpus s’est attaché à décrire et analyser les mouvements sociaux qui durant les décennies 1970 et 1980 dénonçaient les risques sanitaires liées à la présence ou l’usage de substance toxiques au nom de la justice environnementale. Des accidents comme Three Miles Island (Accident nucléaire 1979) ont aussi joué un rôle déterminant dans la construction d’activités à risque (Jessanof, 1992). Enfin, d’autres travaux vont s’intéresser aux transformations de la démocratie. L’enjeu de la période est « d’agir dans un monde incertain » mais les stratégies de définition et d’action face aux dangers et aux risques passent par le développement d’une démocratie technique (Lascoumes, Callon, Barthe, 2009).
On peut alors noter que l’essentiel de ces travaux se concentre sur le rôle de l'État (Lascoumes, 2007), un État dont les politiques « environnementales » se transforment, s’institutionnalisent, notamment du fait d’une européanisation et d’une internalisation accrues (Benson, Jordan, 2010). Remarquons ainsi que, selon l’Agence européenne pour l’environnement, 85% des textes nationaux en ce domaine ont pour origine les directives ou règlements européens. Ce domaine est certainement un de ceux où les efforts pour construire de la convergence ont été les plus significatifs (Jordan, 1997). Il n’est pas possible de saisir les inflexions d’une politique nationale sans envisager en premier lieu le niveau européen. Ainsi J. Fairbrass synthétise bien les processus de décision : «complex, disordered, disputed, unpredictable and not entirely under member state national executive control» (2002).
II Les villes comme acteurs centraux de la gestion des risques climatiques
Plus de la moitié des émissions de gaz à effet de serre sont générées dans et par les villes, 80% de la population vit et travaille dans les villes, là où plus de 80% de l’énergie est consommée. Elles constituent des nœuds de communication, de transport et de circulation des personnes et des biens.
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3 Selon les dernières études réalisées ,les politiques publiques menées dans les villes, en termes de gestion des déchets, de transport ou encore de planification urbaine, ont un impact au final sur 25 à 30% de l’énergie totale consommée. Elles sont aussi les premières à être frappées par le risque économique et la crise économique actuelle l’a suffisamment démontrée: prêts toxiques en France notamment (la ville de Saint-Etienne a vu son taux d’intérêt monté à 24%), municipalités slovaques asphyxiées (105 millions d’euro de pertes en 2009). En d’autres termes, la ville est exposée au risque, mais elle en est tout aussi, la première productrice. Bien loin des corridors de Bruxelles, ou encore des antichambres ministérielles, c’est dans les villes d’aujourd’hui et de demain que frappent la crise climatique. Nous avons eu l’occasion, dans notre mémoire de Master 2, de démontrer que l’émergence de la question de l’environnement et du climat, en Europe, constitue une belle fenêtre d’opportunité pour les réseaux et les villes, qui de fait, ont réussi à se faire une place de choix dans cette nouvelle arène politique. Ainsi, il semble opportun, si l’on veut interroger la gouvernance du climat, de prendre comme angle d’attaque les villes. Il convient de saisir le travail politique municipal comme entrée dans l’étude de la régulation des sociétés urbaines. Autrement dit, en questionnant les formes de légitimité, les ressources et les capacités d’action des leaders politiques urbains et ce en croisant les travaux historiques et les travaux contemporains, nous nous proposons de nous défaire du modèle centre-périphérie. Notre hypothèse de départ est de voir le climat comme un levier de l’action internationale des villes. Notre approche consiste avant tout à observer les relations entre municipalités à travers les premiers e réseaux de villes au début du 21siècle. L’action publique urbaine est ainsi analysée à travers les circulations transnationales ou infranationales d’innovations, de techniques mais aussi de savoirs. Cette approche nous amène à mettre en valeur la capacité des pouvoirs municipaux urbains à prendre des initiatives, à mettre en œuvre des politiques et ainsi à s’emparer de nouvelles compétences.
C’est bien la question du gouvernement des villes et notamment des grandes villes qui est ici posée (Payre, 2008; Le Galès, 2002). Le gouvernement est défini comme la capacité des autorités locales (élus et agents administratifs) à mettre en œuvre de manière autonome des dispositifs d’action publique contribuant à la régulation des sociétés urbaines. Armé de ce questionnement, nous voulons discuter le lien centre-périphérie par la mise en évidence de liens complémentaires que sont les liens inter-municipaux. Les rapports entre savoir et pouvoir sont également au centre de ce travail sur la prise en compte par les villes des risques climatiques.
3 Voir ENDS Europe, Europe’s environmental news and information service , Action on climate : the role of EU regions and cities, Brussels, 31 March 2010
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III Climate action plan and smart cities : enjeux et mise en oeuvre
La ville recouvre bien sûr d’autres réalités, fort diverses: elle est à la fois un lieu privilégié de concentration des populations, un espace de production, un lieu d’intenses échanges ou encore un milieu incubateur d’innovations. Cependant, elle demeure avant tout un espace de localisation du pouvoir et de ses manifestations, un centre décisif aussi. Et étudier les risques climatiques fournit matière à une bonne lecture des inégalités socio-économiques mais aussi spatiales.
Nous voulions mettre en avant que les politiques liées aux risques climatiques constituent un axe au travers duquel les villes agissent et se légitiment aussi d’une certaine façon. Un nouveau souffle pour les villes et leur action en quelque sorte ; et nous avançons l’hypothèse d’une recomposition aussi des réseaux de villes. L’action publique urbaine se développe rapidement et l’idée est aussi d’aller voir ce qui se joue derrière ces politiques, leurs instruments, les outils municipaux mis en œuvre. Toutes ces pratiques mises au jour ne révéleront-elles pas des stratégies de recomposition du paysage urbain, de la sociologie des habitants, du développement de nouveaux secteurs économiques. Nous nous intéresserons ainsi au plan climat, aux agendas 21 (locaux), aux fonds de financements spécialement conçus par les municipalités pour promouvoir les économies d’énergie, des modes de transport plus durable.
Les villes sont par exemple très fortement impliquées dans l’initiative de la Commission européenne, Covenant of Mayors. Elles doivent mettre en place des stratégies à long terme de réduction de leurs émissions en CO2, augmenter la part des transports durables et des énergies renouvelables. Elles s’engagent aussi, au travers de leurs réseaux, à des politiques très ambitieuses. Ainsi, les villes membres d’Eurocities se sont engagées à réduire de 30% leurs émissions par rapport à 1990, d’ici à 2020. Pour y arriver, les partenaires de ces plans sont nombreux : entreprises, industriels, scientifique. Et ces pratiques nous renvoient à de nouveaux enjeux: commentle politique met-il en place ces actions collectives, associant acteurs publics, privés, lobbies, ONG, agences spécialisées, Etat. Une grille de lecture donc pour notre terrain : le poids de l’international, mais aussi celui des partenaires, sans oublier la population locale.
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IV Terrain et méthodes
Notre ambition est de travailler à partir de plusieurs sources : des archives et des entretiens mais aussi et surtout de l’observation participante. Nous souhaitons pouvoir combiner cette recherche en étant dans le même temps au sein des institutions étudiées. Comme je le fais actuellement, des stages prolongés sont prévus dans les réseaux européens et les villes étudiées.
Notre terrain s’appuiera principalement sur deux « observatoires » Un premier terrain se focalisera sur les réseaux européens de collectivité à l’assaut du climat. Eurocities est primordial mais l’ambition est aussi de voir de plus près les réseaux plus spécialisés, tels Climate Alliance ou encore ICLEI. Les réseaux de villes constituent un bon angle d’attaque pour tenter de saisir comment et pourquoi les savoirs et technologies de gouvernement circulent. Mais les réseaux en s’institutionnalisant deviennent à leur tour des acteurs collectifs producteurs d’expertise légitime à destination des grandes institutions gouvernementales et internationales (ONU et UE en particulier). Actuellement en mission auprès du Conseil des Communes et Régions d’Europe, organisation représentant les collectivités locales européennes, nous travaillons sur les problématiques liées à l’environnement et au changement climatique, en nous intéressant aux transports, à l’énergie. L’axe principal est celui du financement de ces mesures de prévention. L’objectif de la thèse est donc de regarder du côté des réseaux qui forment aujourd’hui, le «climate network» (réseau informel): Eurocities, ICLEI, Energie Cities et Climate Alliance.
Au-delà de ces étapes, cette circulation des savoirs et des pratiques sera éclairée par un second terrain constitué de trois monographies.
1/ Malmö (Suède) : c’est la ville exemplaire, en avance sur ces voisines, qui doit faire face à de gros problèmes liés aux inondations et aux sécheresses. Elle vient d’être sélectionnée pour devenir la European Green Capitalen 2011. Son maire est aussi président de la Commission Environnement du Comité des Régions. On s’intéressera notamment aux archives de la ville, pour comprendre comment elle a obtenu ce titre, de l’acte de candidature à la campagne menée. Il s’agira aussi de réaliser des entretiens avec les élus locaux et les techniciens.
2/ Nantes. De part sa politique très offensive en matière environnementale, la ville est devenue un leader européen, et son adjoint au maire (Ronan Dantec), le représentant des collectivités locales 4 auprès de l’UNFCCCet du GIECC. Nous travaillerons essentiellement à partir d’entretiens, notamment plusieurs entretiens avec Ronan Dantec. De plus, nous aurons l’occasion de faire partie, en tant qu’observateur, de la délégation menée par ce dernier auprès de l’UNFCCC lors des négociations 4 United Nations Framework Convention on Climate Change et Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat 5 Mili SPAHIC – Doctorant en science politique – PhD Fellow in Political science UMR 5206 TRIANGLE (CNRS, ENS, Science Po Lyon, Lyon2) http://triangle.ens-lyon.fr/spip.php?article1659
à Bonn et Cancun. Un travail d’archives aussi sur le rôle de Nantes dans les réseaux, et notamment le
CCRE et Eurocities.
3/ Zagreb. Capitale d'un pays de l'ex-Yougoslavie, la Croatie, candidat à l'adhésion à l'Union européenne. Les risques industriels sont très importants et la pollution est devenue un problème de santé publique. La ville a développé d'ambitieux programmes environnementaux, notamment en termes de transport public, avec 14 nouvelles lignes de tramway mises en circulations depuis la fin du conflit balkanique. La Commission européenne va aussi dès décembre 2010, lancer un appel à projet pour l'ouverture d'un Convenant of Mayors Office (CoMO, secrétariat dédié à l'aide technique), financé par des fonds IPA, totalement dédié aux Balkans occidentaux. On pourra aussi s'interroger sur les liens entre le développement économique et plan climat; car ces politiques sont génératrices de nouveaux revenus et d’emplois. Nous porterons le regard essentiellement sur le CoMO dédié aux Balkans, par de l’observation participante et des entretiens.
Bibliographie
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