Les conditions sociales de l'intensification - article ; n°1 ; vol.146, pg 3-13

C. Grignon

Description

Économie rurale - Année 1981 - Volume 146 - Numéro 1 - Pages 3-13
Beyond the main outlines it allows to draw, research of historical conditions under which a culture shared by peasants of a given country has been produced points out social inequalities between groups ; these inequalities are evicted as well by the technocratic criticism of traditional mentality as by the populistic celebration of peasant wisdom. By comparing agriculture of Brittany which is an exemplary case of conversion of peasantry to intensification, with agriculture of department of Sarthe which is an impoverished variant of the Norman agricultural pattern, the author shows that resistances to innovation both are the expression of habits imbedded in regional cultures and the product of handicaps - not only economic ones - very inequaly shared out among the various farmers categories.
Par delà les traits généraux qu'elle permet de dégager, la recherche des conditions de production de la culture commune aux paysans d'une région donnée fait apparaître ce qu'évacuent aussi bien la critique technocratique de la «mentalité traditionnelle» que les célébrations populistes de la «sagesse paysanne», à savoir l'existence d'inégalités entre les groupes. La comparaison entre l'agriculture bretonne,icas exemplaire de conversion de la paysannerie à l'intensification, et l'agriculture sarthoise, variante appauvrie du «modèle- normand», montre que les résistances à l'innovation sont à la fois, et indissociablement, l'expression d'habitudes inscrites dans les cultures régionales et le produit d'un ensemble de handicaps — pas seulement économiques — très inégalement répartis entre les différentes catégories d'agriculteurs.
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: ECONOMIE_RURALE
• Publié le: 01 janvier 1981
• Nombre de lectures: 65
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 2 Mo

Extrait

Claude Grignon
Les conditions sociales de l'intensification
In: Économie rurale. N°146, 1981. pp. 3-13.
Résumé
Par delà les traits généraux qu'elle permet de dégager, la recherche des conditions de production de la culture commune aux
paysans d'une région donnée fait apparaître ce qu'évacuent aussi bien la critique technocratique de la «mentalité traditionnelle»
que les célébrations populistes de la «sagesse paysanne», à savoir l'existence d'inégalités entre les groupes. La comparaison
entre l'agriculture bretonne,icas exemplaire de conversion de la paysannerie à l'intensification, et l'agriculture sarthoise, variante
appauvrie du «modèle- normand», montre que les résistances à l'innovation sont à la fois, et indissociablement, l'expression
d'habitudes inscrites dans les cultures régionales et le produit d'un ensemble de handicaps — pas seulement économiques —
très inégalement répartis entre les différentes catégories d'agriculteurs.
Abstract
Beyond the main outlines it allows to draw, research of historical conditions under which a culture shared by peasants of a given
country has been produced points out social inequalities between groups ; these inequalities are evicted as well by the
technocratic criticism of "traditional mentality" as by the populistic celebration of "peasant wisdom". By comparing agriculture of
Brittany which is an exemplary case of conversion of peasantry to intensification, with agriculture of department of Sarthe which is
an impoverished variant of the "Norman agricultural pattern", the author shows that resistances to innovation both are the
expression of habits imbedded in regional cultures and the product of handicaps - not only economic ones - very inequaly shared
out among the various farmers categories.
Citer ce document / Cite this document :
Grignon Claude. Les conditions sociales de l'intensification. In: Économie rurale. N°146, 1981. pp. 3-13.
doi : 10.3406/ecoru.1981.2809
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ecoru_0013-0559_1981_num_146_1_2809.
;
:
ÉCONOMIE n° 146 nov.-déc. RURALE 1981
LES CONDITIONS SOCIALES
DE L'INTENSIFICATION
Claude GRIGNON
INRA Économie et Sociologie Rurales, Paris.
Résumé
Par delà les traits généraux qu'elle permet de dégager, la recherche des conditions de production
de la culture commune aux paysans d'une région donnée fait apparaître ce qu'évacuent aussi bien la critique
technocratique de la «mentalité traditionnelle» que les célébrations populistes de la «sagesse paysanne»,
à savoir l'existence d'inégalités entre les groupes. La comparaison entre l'agriculture bretonne,icas exemplaire
de conversion de la paysannerie à l'intensification, et l'agriculture sarthoise, variante appauvrie du «modèle-
normand», montre que les résistances à l'innovation sont à la fois, et indissociablement, l'expression
d'habitudes inscrites dans les cultures régionales et le produit d'un ensemble de handicaps — pas seulement
économiques — très inégalement répartis entre les différentes catégories d'agriculteurs.
Summary :
SOCIAL CONDITIONS OF INTENSIFICATION
Beyond the main outlines it allows to draw, research of historical conditions under which a culture shared
by peasants of a given country has been produced points out social inequalities between groups ; these
inequalities are evicted as well by the technocratic criticism of "traditional mentality" as by the populistic
celebration of "peasant wisdom". By comparing agriculture of Brittany which is an exemplary case of
conversion of peasantry to intensification, with of department of S ar the which is an impoverished
variant of the "Norman agricultural pattern", the author shows that resistances to innovation both are the
expression of habits imbedded in regional cultures and the product of handicaps - not only economic ones -
very inequaly shared out among the various farmers categories.
Le traditionnalisme paysan : habitudes ou handicaps ? d'agriculteurs ont des chances inégales d'accéder aux moyens,
matériels et intellectuels, de la modernisation, que le degré auquel
celle-ci se traduit par un surcroît de contraintes et de risques, ou Il ne suffit pas, pour renouveler la sociologie du développe
ment agricole, de prendre le contre-pied de l'idéologie du Progrès, au contraire par une augmentation des ressources et des profits
et de fétichiser en tant que symboles de la résistance populaire à la varie considérablement selon les couches de la paysannerie, et
domination culturelle, les écarts qui séparent la pratique (ou le d'escamoter, du même coup, l'étude des effets sociaux de
discours) des agriculteurs des «modèles» qui leur sont «imposés». l'innovation et notamment des mécanismes de sélection et
Sous peine de faire de la culture sur laquelle s'appuient les d'élimination qui lui sont liés. Comme le montrent les études de
réactions des l'émanation d'une «sagesse paysanne» cas présentées dans la dernière partie de ce texte, la résistance à
intemporelle et extra-lucide, à laquelle viendraient miraculeu l'innovation n'est pas seulement l'expression d'habitudes inscrites
sement achopper les aliénations conjuguées du capitalisme, de la dans les cultures paysannes régionales ou locales ; elle est aussi,
science et de la bureaucratie, il faut au moins en esquisser indissociablement, le résultat d'un ensemble de handicaps — pas
l'analyse, se demander d'où viennent les habitudes de pensée et les uniquement économiques — très inégalement répartis entre les
systèmes de valeurs communs aux paysans d'une région donnée, différentes catégories d'agriculteurs.
comment ils se sont constitués et diffusés, à quel degré et de
Cet article repose essentiellement sur une série d'entretiens quelle manière ils infléchissent les choix et les comportements
approfondis et de monographies réalisés auprès d'une vingtaine professionnels des différents groupes, etc. ; c'est ce que l'on s'est
de familles d'agriculteurs sarthois (l). On ne peut rendre raison efforcé de faire , en partant de l'étude de la paysannerie sarthoise,
des particularités que présente chaque étude de cas que si l'on se dans la première partie de cet article. En outre, les analyses faus
donne les moyens de construire la famille de cas dont elle fait partsement radicales qui, dans le sillage du Foucault de Surveiller et
ie et de la replacer ainsi dans la série complète des cas de figure Punir, se bornent à assimiler l'encadrement de la paysannerie à
analogues, voisins ou opposés. C'est pourquoi on ne s'est pas une action de contrôle, de normalisation et de répression,
contenté de procéder à l'enquête ; à toutes les étapes de celle-ci — - risquent de faire oublier que les différentes catégories
1 Cette recherche a été menée dans le cadre de l'INRA (Paris, Économie et Sociologie Ch. Grignon. On trouvera un compte-rendu complet de ce travail in C. GRIGNON, rurales), à la demande et avec le concours des Organisations agricoles de laSarthe. Note sur les conditions sociales de l'intensification de la production agricole. Les entretiens ont été réalisés, de février à mai 1980, par Ch. Chrétienneau, Paris, INRA, 1981. C. Raguin et l'auteur le travail de documentation a été assuré par A. Fertré et .
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élaboration des instruments, définition des critères de sélection «témoignages» susceptibles d'illustrer une «théorie» a priori, il
fallait se donner les moyens de comparer l'attitude actuelle des des «terrains» et des enquêtes, réalisation des interviews, analyse
de Contenu — ont été associées d'autres techniques de recherche : agriculteurs sarthois à l'égard de l'intensification à d'autres cas
plus typiques et plus purs, plus proches des cas idéaux que le. raanalyse des données statistiques disponibles, travail de document
ation, recherches bibliographiques ; s'agissant de la Sarthe, on isonnement permet de construire, et qui se rencontrent ailleurs et
à d'autres époques, par exemple en Bretagne, dans les années cinavait la chance de disposer d'un fonds particulièrement riche de
travaux d'économistes, de démographes, de géographes et d'his quante, ou encore en Normandie, dans la seconde moitié du dix-
toriens. C'est aussi pour cette raison qu