[sic 00392069, v1] Rumeurs et emballements. Comment les décrire,  comment leur résister ?
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Manuscrit auteur, publié dans "MédiaMorphoses, 10 (2004) 5-20"médiamorphosesconfrontations5Daniel Schneidermann, Pascal Froissart, Guillaume SoulezRumeurs et emballementsComment les décrire,comment leur résister ?Daniel Schneidermann, journaliste (Arrêt sur images, France 5 et Libération)Pascal Froissart, Université de Paris 8avec Guillaume Soulez, Université de Paris 3sic_00392069, version 1 - 5 Jun 2009médiamorphoses confrontations6Rumeurs et emballementsDaniel Schneidermann, Comment les décrire, Pascal Froissart, Guillaume Soulez comment leur résister ?Comment les décrire,comment leur résister ?Débat entre Daniel Schneidermann, journaliste (Arrêt sur images, France 5 et Libération)et Pascal Froissart, enseignant-chercheur (Université de Paris 8)Animé par Guillaume Soulez (Université de Paris 3) eux livres récents analysent ces moments fait brutalement vaciller les valeurs et les croyances particuliers où une certaine effervescence les mieux établies. Le livre est une critique – et une Ds’empare des médias, à l’occasion d’une autocritique – de la profession de journaliste et D.actualité particulièrement vive, surprenante ou polé- Schneidermann y étudie les mécanismes par lesquels,mique, conduisant à une sorte de « discours unique » par une succession de reprises, la presse et ses acteursdans les médias sur cet événement (affaire « Grégory », les journalistes font circuler de fausses informationsLoft Story, affaire « Meyssan », couverture ...

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Manuscrit auteur, publié dans "MédiaMorphoses, 10 (2004) 5-20"
médiamorphosesconfrontations
5
Daniel Schneidermann, Pascal Froissart,
Guillaume Soulez
Rumeurs
et emballements
Comment les décrire,
comment leur résister ?
Daniel Schneidermann, journaliste (Arrêt sur images, France 5 et Libération)
Pascal Froissart, Université de Paris 8
avec Guillaume Soulez, Université de Paris 3
sic_00392069, version 1 - 5 Jun 2009médiamorphoses confrontations
6
Rumeurs et emballements Daniel Schneidermann, Comment les décrire,
Pascal Froissart, Guillaume Soulez comment leur résister ?
Comment les décrire,
comment leur résister ?
Débat entre Daniel Schneidermann, journaliste (Arrêt sur images, France 5 et Libération)
et Pascal Froissart, enseignant-chercheur (Université de Paris 8)
Animé par Guillaume Soulez (Université de Paris 3)
eux livres récents analysent ces moments fait brutalement vaciller les valeurs et les croyances
particuliers où une certaine effervescence les mieux établies. Le livre est une critique – et une Ds’empare des médias, à l’occasion d’une autocritique – de la profession de journaliste et D.
actualité particulièrement vive, surprenante ou polé- Schneidermann y étudie les mécanismes par lesquels,
mique, conduisant à une sorte de « discours unique » par une succession de reprises, la presse et ses acteurs
dans les médias sur cet événement (affaire « Grégory », les journalistes font circuler de fausses informations
Loft Story, affaire « Meyssan », couverture médiatique de mais aussi des peurs ou des croyances délétères pour
l’insécurité avant l’élection présidentielle de 2002, etc.), aller au-devant de prétendues attentes du public, tout
et peut-être au sein d’une partie, plus ou moins grande, en se refusant à une certaine transparence sur ces pra-
du public. tiques.
Le cauchemar médiatique (Denoël, octobre 2003), est Dans La rumeur. Histoire et fantasmes (Belin, 2002),
écrit par un journaliste, Daniel Schneidermann, qui, Pascal Froissart, chercheur et enseignant à l’université
depuis plusieurs années, se trouve dans la position de Paris VIII (et membre de la rédaction de
inconfortable d’observateur de ses confrères ; l’analyse MédiaMorphoses), vise à faire une sorte d’archéologie
de la polémique autour de La face cachée du Monde de ce « concept » de « rumeur ». Il montre comment ce
(Pierre Péan et Philippe Cohen) qu’il mène dans la terme, qui a longtemps renvoyé à la simple « réputation »,
conclusion de son livre lui a valu son récent licencie- a pris le sens de phénomène collectif, voire « populaire »,
ment du Monde où il tenait une chronique dans le sup- de propagation irrationnelle d’un récit à la suite de sa
eplément « Radio-Télévision », il assure depuis une chro- construction « scientifique » entre la fin du XIX siècle et
enique « Médiatiques » dans Libération. On connaît aussi la première moitié du XX , en lien avec l’émergence des
D. Schneidermann pour son émission Arrêt sur images sciences sociales et des médias, (ces derniers seraient
qui, chaque dimanche, entreprend un travail patient de aujourd’hui les principaux fabricants de la rumeur, tant
« décryptage » de l’information médiatique. Le cauche- par la désignation de son « existence » que par sa
mar médiatique analyse la genèse d’une série d’« embal- propagation par voie de presse). La « rumeur » apparaît
lements » médiatiques comme ceux que nous citions ci- comme un concept mou, un mot-valise, qui sert à certains
dessus, et vise à sérier quelques paramètres pour recon- « experts » ou à certains journalistes à décrire des réali-
naître un « emballement » afin d’y mieux résister. Par tés qui n’existent pas, comme en particulier cette idée
exemple, D. Schneidermann isole une période de « fou- d’une propagation incontrôlée de croyances dans les
droiement » auquel un tel emballement donne lieu, chez couches populaires à laquelle s’opposerait la calme
les journalistes comme au sein du public, c’est-à-dire rationalité des gens informés.
une forme de « tétanisation » devant l’événement qui La discussion a donc d’abord porté sur l’existence ou
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Rumeurs et emballementsDaniel Schneidermann, Comment les décrire,
Pascal Froissart, Guillaume Soulez comment leur résister ?
non des « rumeurs » ou des « emballements » côté Pascal Froissart – Si on lit bien l’étude de Morin, la piste
public, puis elle a naturellement évolué vers l’analyse des médias est évoquée en réalité dès les premières
des pratiques médiatiques dont l’« emballement » est un pages. Mais elle est aussitôt oubliée. Pourtant, bien
révélateur, avant de se conclure sur les moyens de avant l’explosion médiatique ou l’emballement comme
mettre en place des « verrous » ou des garde-fous pour vous dites, on parle de plusieurs sources textuelles : un
prévenir de tels phénomènes. magazine de fait divers, un roman populaire, voire
Guillaume Soulez même des faits de folklore. La rumeur ne sort pas de
nulle part, il y a bien une diffusion médiatique préala-
ble ! Certes, après l’éclatement de la bulle, les médiasLa « rumeur »
au sens strict ont été très agissants. Ce que je trouve
donc intéressant chez Morin, c’est qu’il est représentatifexiste-t-elle ?
d’une époque où l’on considère que la rumeur commen-
Pascal Froissart – Savoir si la rumeur est première, ou si ce sans médias et avant les médias, dans l’interstice,
elle est le produit des médias, la question est centrale entre deux moments médiatiques. Or, ce que j’essaie de
pour moi, naturellement. On ne cesse de dire partout montrer, c’est que ce moment « sans médias » n’existe
que la rumeur préexiste aux médias, qui n’ont qu’un rôle pas. Dans tous les cas, on trouve toujours des médias,
de révélateur ou d’observateur… J’en doute largement : pour une raison toute simple : c’est que notre société est
au mieux, dans le mariage contre-nature de la rumeur et immergée dans les médias – et les génère ! Il serait
du journalisme, il s’agit d’une « fertilisation croisée » ; au étonnant qu’on puisse y échapper. Dans La rumeur
pire, un moyen rhétorique qu’ont les journalistes pour se d’Orléans, les sources médiatiques sont citées et, trois
dédouaner… Le meilleur exemple est l’ouvrage princeps pages plus loin, il est écrit que c’est une rumeur qui a
d’Edgar Morin, La rumeur d’Orléans, paru en 1969. fonctionné sans aucun média… Symptomatique, non ?
Même si Morin a pris de la distance par rapport à son
livre, je trouve intéressant qu’il y considère la rumeur Daniel Schneidermann – Je pense, sans vouloir interpré-
comme un phénomène quasiment sans médiation tech- ter sa pensée, qu’il prend « média » comme moi, au sens
nique. Un pur produit de l’oralité. C’est une considéra- étroit. Il appelle média ce qu’on appelle dans le langage
Daniel Schneidermann Guillaume Soulez Pascal Froissart
tion reprise textuellement dans le livre de Daniel courant un média, un journal, une radio, un mass
Schneidermann (« dans La rumeur d’Orléans, ni les auto- media. Ce qui ressort du domaine de la fiction, je
rités ni les médias ne jouent le moindre rôle de propa- n’appelle pas ça les médias. C’est une question de
gation »), ce qui constitue pour moi un premier point de terminologie.
désaccord entre nous.
PPaassccaall FFrrooiissssaarrtt –– Vous simplifiez peut-être. Le récit qui a
DDaanniieell SScchhnneeiiddeerrmmaannnn –– Morin dit en effet que la été donné pour vrai et colporté au moment de l’affaire
rumeur n’a pas besoin des médias pour exister. d’Orléans est un récit qui se trouve antérieurement dans
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Rumeurs et emballements Daniel Schneidermann, Comment les décrire,
Pascal Froissart, Guillaume Soulez comment leur résister ?
des œuvres de fiction. À partir du moment où il entre infernal dans lequel sont plongés les journalistes dans
dans la sphère publique, dans le jeu médiatique, il n’est ce type de cas. Par exemple, nous n’avons rien fait sur
plus très important de savoir si c’est vrai ou si c’est l’affaire « Meyssan » à Arrêt sur images, ou seulement
faux… L’enjeu se d

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