La problématique de la détention provisoire face au principe d un procès équitable
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La problématique de la détention provisoire face au principe d'un procès équitable

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Dans ses réflexions sur les conditions de détention, l'auteur ressort la prééminence de lu procès équitable que ne doit pas inhiber la problématique de la détention provisoire.

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Publié le 18 juin 2012
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Langue Français

Extrait

Stratégies sur les prisons ou la problématique du maintien de la population carcérale en prison.
Par Anatol Clément BANNEM Directeur de projet ABA ROLI Projet SGBV MANIEMA
Juillet 2010
Depuis la Seconde Guerre mondiale, le combat contre l'impunité est devenu une cause universelle, spécialement après que des violations majeures des droits de l'homme ont eu lieu. Malgré les appels pour la justice et l'obligation de rendre des comptes, certaines autorités gouvernementales ont souvent choisi d'accorder l'amnistie aux personnes responsables de ces violations, jugeant que c'était le seul moyen d'aider leur société à assurer une transition stable vers la paix. Ce n’est heureusement pas le cas de la RDC qui a choisi, délibérément, à la suite de la signature d’un certain nombre de 1 lois , de combattre une impunité dont les méfaits sont néfastes pour la société. Au cours des dernières années, l'un des changements les plus importants du droit international (et la RDC a bien réagi par rapport à cela) a été l'abrogation des lois d'amnistie et la levée d'autres restrictions, dont l'immunité des autorités, qui sont des obstacles aux poursuites des auteurs de certains crimes ». La problématique dans les lignes qui suivent est « que faire pour maintenir les prisonniers en prison et ainsi lutter efficacement contre l’impunité ? » Le rôle de la prison a évolué. Partout dans le monde aujourd’hui, de simple outil de rétention en l'attente d'un jugement, il est devenu une peine en soi. Dans certains pays, la prison est considérée comme un moyen de protéger la société de ses éléments dangereux et de les réinsérer. Mais contrairement aux quatre fonctions jadis qu’on trouvait à la peine pénale, il y a lieu aujourd’hui d’attribuer six principes à la prison : (correction, classification, travail, éducation, contrôle, institutions annexes). En développant in absentia ces principes, on en arrivera à déterminer les véritables stratégiesàadopter pour un maintien efficace des prisonniers dans les « centres de détention » :cela ne peut se faire objectivement qu’après avoir fait un état de lieux objectif et actuel du système carcéral du Maniema(I), avant de réfléchir sur les stratégies a à adopter (II) pour améliorer un tant soit peu les conditions de détention et parvenir ainsiàmaintenir les prisonniers dans leur « maison ». DelétatdeslieuxdusystèmecarcéraldansleManiema.I-
 Il est question ici de développer dans un premier paragraphe le système carcéral dans son ensemble et dans une deuxième partie, de ressortir les réalités actuelles vécues dans les prisons. A-syètuDscéarcmelra
1 Lois Nº 06/018 du 20 Juillet 2006 portant modification du code pénal congolais et loi Nº09/001 du 20 janvier 2009 portant protection de l’enfant en conflit avec a loi.
L’ambition de ABA est de lutter contre l'impunité des auteurs d'actes criminels et plus particulièrement contre les auteurs de violence sexuelle. Mais, ce travail est effectué dans un contexte où les systèmes juridiques et pénitentiaire sont faibles pour le premier et quasi inexistants pour le second. Les prisons datent de l'époque coloniale et ne remplissent plus aucune de leurs fonctions : il n'existe pas un vrai corps de l’administration pénitentiaire; ce qu'on appelle la prison est conservée par les agents de police et les soldats qui n'ont pas de formation dans ce domaine. Aucune activité de réinsertion sociale n’existe ; les prisonniers peuvent passer plusieurs jours sans manger, ni boire ; les soins médicaux relèvent de l’utopie, les architectures internes des prisons sont préhistoriques et ne répondent pas du tout aux standards internationaux (il n’y a aucune séparation entre les mineurs et les adultes, entre les civils et les militaires) et les populations semblent, dans leur majorité rejeter l'institution pénitentiaire. Dans l’absolu, on est tenté à leur donner raison tant cette impression est entretenue par ceux - là mêmes qui sont censés donneràcette institution ses lettres de noblesse : mais c’est une véritable gageure, car pour prendre l’exemple de Kindu actuellement, des 28 employés qui travaillent dans la prison, seuls 04 (quatre) sont officiellement reconnus par l’état congolais. On est donc amené àse poser des questions ou mieux,à tirer des conclusions par rapport à l’intérêt des autres. Cette précarité amène donc forcement à des évasions qui peuvent être attribuées certes à l’obsolescence des bâtiments, mais plus au fait des hommes.
B-
Desévasionsmultiples.
 Le tableau dressé plus haut a des conséquences néfastes sur l’état d’incarcération. Les prisonniers, las d’attendre que la manne leur tombe du ciel et fatigués de regarder par ciel ouvert un hypothétique plat de nourriture, pensent à une seule chose : s’évader. Les policiers et agents pénitentiaires commis à la garde des prisonniers, las d’attendre leur salaire du reste insuffisant, facilitent ou occasionnent ces évasions. Chacune de ces prisons a connu des périodes angoissantes. Les évasions multiples sont facilitées par les policiers et les soldats à cause de la corruption et en raison de l'impéritie qu’ils ont, de l'objectif de l'institution pénitentiaire. Mais les évasions sont aussi causées par la misère qui prévaut dans ces prisons. A titre illustratif :
B1- Evasions a la prison de Kindu.
2 Après deux émeutes en novembre et décembre 2009 à Kindu , la prison de céans s’est vidée de sa substance. En effet, le 4 novembre 2009, la prison centrale comptait en son sein 137 personnes (détenues et condamnées) dont 94 se sont évadées, parmi lesquelles 19 personnes condamnées et poursuivies pour violences basées sur le genre.
 Sur 192 prisonniers de la prison dont 34 condamnés/prévenus pour violences sexuelles, tous sont partis 2
Le 08 décembre 2009, des 92 prisonniers et prévenus que comptait la prison 89 se sont évadées, laissant 2 militaires et 1 civil dans un enclos béant et vidé de sa substance. Parmi ces évadés, 15 intéressaient ABA, dont 2 militaires condamnés. Au total donc, 34 auteurs/présumés auteurs de violences sexuelles se retrouvent ainsi libérés par un système, déversant à nouveau leur rancœur sur la partie saine de la population. Depuis le début de l’année 2011, des évasions multiples ont été enregistrées, mais la solidité des bâtiments et la nouvelle du méthode stratégique de sécurisation adoptée par l’Association du Barreau Américain ont empêché qu’elles aient la même envergure que celles qui les ont précédé.
B2- Pour la prison de Punia
Rien qu’au cours du mois de juin 2010 soit entre la date du 15 au 30, quatre évasions ont été enregistrées dans la seule Cité de Punia dont 1 à la prison centrale de Punia (6 détenus évadés) ; 1 au cachot du Parquet (4 détenus évadés ); 1 au cachot de l’état major du district nord Maniema ( 6 détenus évadés) et un autre d’un détenu qui suivait les soins médicaux à l’hôpital de référence de Punia alors qu’un gardien avait été commis pour la surveillance. Les statistiques dans un espace seulement de 15 jours sont effrayantes lorsqu’on constate que parmi les 17 personnes évadées, 5 étaient poursuivies pour l’infraction de violence sexuelle. Et ces évasions récentes édulcorent les chiffres, car les évasions antérieures sont plus graves.
B3- En ce qui concerne la prison de Kasongo
Près de 40 auteurs présumés de violences sexuelles se sont dilués 3 dans la nature à cause de multiples raisons dont les principales sont la complicité des hommes en uniforme. Il vient d’être démontré que suite à ces innombrables évasions, la capitale de la province du Maniema n'avait plus de prison jusqu'à sa réouverture, depuis Juin 2010 suite à la réhabilitation en cours par ABA, d’une prison provisoire qui a en ce jour, une capacité de 300 condamnés/prisonniers. Actuellement, elle est aux 4 trois quarts remplie . ABA tente de "donner vie" à cette prison en luttant d’une part contre l'impunité par le biais de la lutte contre les évasions, d’autre part contre l’inertie et l’immobilisme des 5 décideurs et de certains partenaires. Mais dans un contexte aussi difficile que le Maniema, il est difficile d'arriver à des équilibres rendant possibles un fonctionnement normal de la prison. Force est cependant de reconnaitre que sans la volonté et la
Voir rapport a ce sujet rédigé par le superviseur de la clinique juridique de Kasongo (Annexe F) 3
4 A la date de rédaction du présent rapport, il y a 204 pensionnaires dans la prison, dont près de 40 présumés auteurs de violences sexuelles
Il est par exemple démontré que le Directzur de la prison est d’une incompétence exceptionnelle dans le cadre de ses attributions, mais tous 5 les plaidoyers des acteurs du secteur de la Justice n’ont pas encore réussi à ce jour à le remplacer.
responsabilisation des uns et des autres, sans une base solide et des stratégies fortes, l’impunité ainsi prônée sera un slogan. Dans les lignes qui suivent cependant, nous allons tenter de démontrer que nous pouvons aller au delà du slogan en ressortant les stratégies, tant théoriques (A) que pratiques et concrètes (B) pour le maintien des prisonniers en place.
A-
Des stratégies théoriques de maintien des prisonniers
Elles participent de la sécurité des bâtiments (A2), de l’animation de la prison (A3), mais surtout de la présence d’un personnel recruté, formé, encadré et rompu a la tâche (A1).
A1- Du personnel de l’administration pénitentiaire
La responsabilité de l’Etat congolais est interpellée à ce niveau de la réflexion, car toutes les bonnes dispositions prises par des individus/ONGs/OSC seraient vouées à l’échec si le potentiel humain n’est pas valorisé. De plus il est difficile de repenser le système pénitentiaire si on ne place pas l’homme à l’avant de la scène. Pour cela, il faudra donc procéder à un recrutement du personnel (sélection rigoureuse), lui donner une formation initiale et s’assurer de l’« actualisation » de cette dernière par des formations continues, le mettre dans des conditions de vie décentes en le motivant régulièrement. On pourrait même aller jusqu'à penser, dans le cadre de la législation, à créer un organisme autonome appelé à gérer les 6 prisons du Maniema ou alors en confier la gestion a la Mairie .
A2- De la sécurité dans les prisons
La première chose qui vient à l’esprit quand on parle de sécurité dans un établissement pénitentiaire, c’est la sécurité périmétrique et matérielle : c’est la sécurité passive (A21). Mais au fur et à mesure qu’on évolue dans la pensée, on se rend compte qu’elle ne suffit pas. Le personnel à qui on essaie de fournir le maximum « d’aides » matérielles a un rôle prépondérant à jouer. En effet la sécurité dans un établissement pénitentiaire ne peut être efficace si le personnel chargé de cette sécurité est compétent : c’est la sécurité active (A22). Après avoir développé ces deux qualités de sécurité, nous expliquerons quelles peuvent en être l’implication et l’apport de ABA (A23).
A21-De la sécurité Passive:
C’est celle des bâtiments, des enceintes, des miradors et des voies d’accès.
a-
des miradors
6 La centralisation de la gestion des prisons est un obstacle insurmontable à la gestion de celles – ci.
Au delà de l’érection des murs, la sécurité du périmètre des établissements pénitentiaires est à envisager sous deux aspects ; celui des enceintes avec miradors, celui des enceintes sans mirador. L’existence ou non de miradors conduit, en effet, à évaluer comme à repenser la sécurité du périmètre des établissements différemment. Mais dans le contexte de la prison de Kindu, ABA se prononce pour le principe de deux miradors. Mais le mirador présente plusieurs variantes ; celui dit du vitrage sans tain a retenu l’attention de ABA. En effet, plusieurs raisons ont conduit à cette option. Ce vitrage présente en effet un certain nombre d’avantages. Il évite les reflets solaires et les inconvénients que ceux-ci peuvent occasionner pour le tir.
Il a comme intérêt de dissimuler l’agent de sécurité, ses mouvements et son action ; ce qui, en matière de tentative d’évasion, présente un avantage tactique de tout premier plan.
Par ailleurs, il ôte aux détenus toute possibilité d’observer l’agent en poste au mirador comme son comportement.
Le vitrage sans tain renforce le sentiment de sécurité de l’agent qui n’a plus ainsi l’impression d’être une cible, et accroît l’efficacité de son intervention.
Il règle par ailleurs des questions de confort, celles des sanitaires notamment.
b-
des concertinas
ABA préconise également la mise en place sur le haut des murs d’enceinte extérieurs d’un double rouleau de concertina (de type « detainer »). Ce principe commun applicable à tous les établissements s’est révélé à plus d’un titre efficace quand il est couplé avec la surélévation des murs d’enceinte intérieurs qui eux-mêmes, sont bardés de concertina, afin de pallier aux jets extérieurs ou aux escalades qui peuvent s’avérer dangereuses, parfois même meurtrières.)Cela s’envisagerait beaucoup dans le cas de quartiers différents dans une même prison (civils, militaires, VIP etc.
c-
la sécurité des portes d’entrée.
La sécurisation des prisons et des personnels qui y travaillent est conditionnée par le fonctionnement de la porte d’entrée principale. En effet, au sein du dispositif global de sécurité, la porte d’entrée occupe une place prépondérante, à la fois seul point de franchissement de l’enceinte et premier comme dernier contrôle dans l’établissement. En outre, les établissements étant de plus en plus ouverts sur 7 l’extérieur, les flux piétons et véhicules dans certains cas sont de
7 Toutes les prisons du Maniema sont desservies par des routes carrossables
plus en plus importants et demandent une gestion mieux adaptée à leur volume comme à leur nature. Aussi, une évaluation de la sécurité des établissements ne saurait faire l’économie d’une réflexion sur la porte d’entrée. Un système type donnant à la physionomie de ces portes une rationalité nécessaire et souhaitable, semble être la condition-même de toute amélioration du contrôle et de la sécurité dans cette partie de l’établissement. Ainsi, ABA recommande, par rapport à la porte d’entrée, le principe d’une séparation des flux. Cela implique un passage entrée et un passage sortie, distincts l’un de l’autre, et communs à toutes les catégories de piétons. des salles d’attentes avant et après contrôle avec une séparation physique aidant à canaliser le flux en créant des zones d’attentes distinctes. Un renforcement du caractère hermétique du poste de garde de la porte d’entrée principale.
Delaccèsauxvéhiculesd-L’expérience en la matière a démontré que les véhicules constituent une cause réelle de distraction des gardiens de prison et des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire. Ces derniers, au lieu de s’occuper des tâches qui sont les leurs, n’hésitent pas à les abandonner pour s’occuper du futile, sans compter ceux qui, par des « ordres » donnés par leurs chefs, seraient tentés de monter la garde des véhicules au lieu de celles des hommes pour lesquels ils doivent leur présence. Compte tenu également qu’il convient de prendre en considération, pour la gestion des véhicules, les espaces utiles et disponibles, ABA est pour qu’un périmètre de sécurité soit tracé autour de la prison et au delà duquel aucun véhicule ne doit aller. A22- De la sécurité Active. La sécurité pénitentiaire doit être institutionnalisée, nous entendons par là qu’elle doit reposer sur des structures bien repérées à tous les niveaux, constituées de personnes qualifiées ; ces structures étant chargées par ailleurs de susciter la discussion aussi bien au niveau local, que national. L’objectif étant de définir une sécurité partagée et reconnue par tous comme la plus adaptée au lieu de travail qui est le sien .Elle est par conséquent basée sur un personnel formé, drillé avec des gestes professionnels précis et des procédures exactes. a-Desgestesprofessionnelsprécis
La sécurité active, celle qui va être le fait des hommes, demande à ce que chaque geste professionnel soit défini par une procédure claire qui en fixe en détail le mode opératoire. La tenue d’un poste de travail s’analyse dans le respect d’un nombre connu de procédures, la maîtrise de ces procédures étant, en elle-même, génératrice d’identité professionnelle car elle donne un sens au métier que l’on accomplit. La situation aujourd’hui dans l’Administration Pénitentiaire ne peut s’analyser ainsi. Au contraire, l’absence de procédures dans toutes
les prisons du Maniema, des procédures mal connues ou inapplicables, rendent difficile l’exercice de la sécurité active qui, dès lors, se résume en une routine (voulue ?) créatrice d’insécurité aussi bien pour l’établissement que pour les personnels. Desproceduresinfalliblesb-D’une manière générale, si les procédures sont fondamentales, c’est parce qu’elles sont une garantie de la sécurité et de la sérénité des personnels, et qu’elles leur apportent le cadre juridique qui légitime et donne du sens à leur métier. De même, ces procédures, comme leur respect, assurent aux détenus un traitement adapté à leur situation. Il est nécessaire, que ces procédures soient déclinées au regard de la classification des prisons, des quartiers et de la mise en sécurité qu’ils justifient. La connaissance et la maîtrise des procédures comme des gestes professionnels sont l’une des conditions essentielles d’une véritable sécurité pour les personnels, les établissements, l’institution toute entière. Mais elle ne peut être efficace que si cette connaissance et cette maîtrise sont intégrées et approfondies au cours de formations adaptées à chaque stade de la carrière par le personnel ; d’où leur cohésion. c- Une cohésion bétonnée de tous les acteurs de la détention La sécurité est l’affaire de chacun et de tous. Elle se doit d’être transversale, complémentaire et partagée. En effet, la sécurité d’un poste ne peut s’envisager qu’en fonction de celle mise en place dans les autres postes. L’agent est garant de la part de sécurité dont il a la charge dans le souci des autres et en fonction des autres. Il arrive très souvent qu’une application non uniforme du règlement soit à l’origine d’un incident générateur d’insécurité pour le 8 personnel. Tel agent autorise en effet ce que l’autre refuse . Cette place trop grande laissée à l’initiative personnelle dans l’application des règles est souvent créatrice d’une perte de repères chez les détenus et occasionne un très fort sentiment d’injustice. Cette frustration engendrant la violence. Pourtant, ces initiatives personnelles sont une grande richesse ; en apportant du lien social, elles permettent bien souvent de désamorcer des crises et sont essentielles pour le bon fonctionnement de la détention. Aussi, le problème réside dans l’absence de régulation. En effet, il s’agit d’actes individuels, dont personne n’est informé, et qui sont d’autant plus dangereux qu’ils peuvent être obtenus sous la pression des détenus compte tenu du contexte actuel des détentions. Cette difficulté rend nécessaire le travail en équipe, car seule l’équipe peut permettre de réfléchir aux écarts ainsi créés entre la norme et son application.
Dans cette perspective, ABA insiste sur la nécessité de repenser le rôle et les responsabilités de l’encadrement intermédiaire, notamment celui du chef surveillant, trait d’union essentiel entre les agents et leur hiérarchie. Son rôle de chef d’équipe doit être renforcé. Plutôt que d’occuper la position qui est la sienne aujourd’hui, où il est surtout chargé de contrôles, il doit devenir un référent pour les agents qui
8 L’achat et l’introduction du chanvre indien dans la prison par certains gardiens et non par d’autres en est une parfaite illustration
doivent trouver auprès de lui conseil et soutien. Le recours à son arbitrage en cas de difficulté doit être banalisé. Ceci nécessite bien entendu qu’il soit lui-même rompu aux tâches du management et soit aussi disponible que possible, dans un contexte où L’administration pénitentiaire est encore dans ses balbutiements. Mais quoiqu’on dise, aucune prison quelque soit la sécurité dont elle bénéficie, quelque soit le réseau d’information qui y est institué, ne peut être viable ni sécurisée que si une animation réelle y est instaurée, qui permette aux prisonniers de se sentir « libres », occupés et utiles pour eux-mêmes et pour le reste de la société. A3- De l’animation interne des prisons Une animation efficace ne peut être envisagée que si elle a une approche holistique, c’est-à dire qu’elle envisage à la fois des activités stabilisantes à l’intérieur autant qu’elle prépare à des activités de réinsertion socio-économique à l’issue de la peine. Desactivitésstabilisantesa-Elles peuvent être développées en de nombreuses pages, mais il faut tout simplement retenir qu’elles participent en les créations d’activités à la fois génératrices des revenus et de confort personnel des prisonniers. La maxime «le travail éloigne de nous trois grands maux : le vice l’ennui et le besoin» n’a jamais été autant démontrée. Dans ce cadre, on peut citer, sans être exhaustif : de l’assistance judiciaire aux détenus par la mise en place de cliniques juridiques de la création d’activités agro-pastorales afin d’atteindre l’autosuffisance alimentaire, socle de l’équilibre alimentaire des prisonniers de l’acquisition de jeux de société de la création d’activités sportives de la création d’activités génératrices de revenus (lavage, repassage, coiffure etc.) de la prise en charge psycho-socio-médicale des détenus etc.
b-
delaréinsertionsocio-économiquedesprisonniers
La prison a deux fonctions principales. La première est une fonction punitive. C’est celle que le commun des mortels connaît le mieux. Mais la prison a également une fonction de réinsertion sociale. On doit profiter du séjour en prison du délinquant pour obtenir son amendement en vue de favoriser sa réinsertion sociale une fois libéré. La réinsertion sociale nécessite que certains programmes soient offerts aux condamnés. Il s’agit par exemple de la formation professionnelle, de l’alphabétisation, des mesures d’individualisation de la peine comme le placement à l’extérieur, la semi-liberté, la libération conditionnelle. Toutes ces activités et mesures doivent concourir à la resocialisation du délinquant. S’il est vrai que la chance de resocialisation du délinquant dépend de sa volonté de réinsertion, (quels que soient les moyens que l’Etat et les partenaires vont mettre à la disposition du délinquant pour assurer sa formation professionnelle, s’il n’a pas la volonté de s’en sortir, l’effort restera vain), Il n’en demeure pas moins
qu’une perche doit lui être tendue, même si les activités de réinsertion coûtent excessivement cher.
En réalité, la kyrielle de mesures envisagée pour l’animation et la réinsertion ne peut être valablement exécutées que si un suivi constant est effectué et si un plaidoyer constant est fait, doublé d’un appui en termes d’accompagnement: c’est ce rôle qui peut être assigné à ABA. A23- L’apport de ABA dans la sécurisation des prisons du Maniema. En dehors de ce qu’il fait déjà pour lutter contre l’impunité et les évasions, ABA a développé de nouvelles stratégies pour une lutte acharnée contre les évasions. Ainsi elle voudrait appliquer les méthodes suivantes : Eliminer ou déplacer tous les points identifiés comme étant des 1) tremplins pour grimper et accéder à la toiture, notamment le réservoir d’eau interne ;
2)
3)
4)
5)
6)
Barricader tout autour de la toiture avec les concertinas de manière à rendre presqu’inaccessible le mur érigé,
Renforcer toutes les portes métalliques en les lissant de manière à ce qu’elles ne servent pas d’échelles,
Condamner lesdites portes afin qu’elles ne soient pas ôtées lors d’éventuelles émeutes.
Protéger les murs de séparation des quartiers à l’intérieur de la prison,
Enfin ériger un mur de 04 m derrière la prison, le ceinturer de Concertinas en hauteur comme à la base aux fins de compliquer encore plus une évasion par escalade ; mais ce faisant, créer également un espace sécurisé pour un maraichage interne qui permettrait de lutter contre l’ennui des détenus
A côté de ces stratégies infrastructurelles, ABA ROLI continuera dans son plaidoyer pour arriver à un véritable équilibre dans la lutte déjà engagée contre l’impunité. Ainsi, ABA devra arriver à convaincre les partenaires nationaux et provinciaux pour que le système de contrôle et des conditions de la détention préventive soit renforcé, pour appuyer la mise en œuvre d’un programme de formation pour les acteurs du secteur de la justice et ceux agissant dans le cadre des prisons afin d’améliorer les conditions de détention. Une réflexion interne est par conséquent faite pour arriver à appuyer l’alimentation des détenus, créer des activités génératrices de revenus, appuyer la prévention des maladies et la prise en charge des malades.
ABA se propose également d’appuyer l’amélioration des structures pénitentiaires en termes d’une part de réhabilitation /construction des prisons/centre de détention des enfants en conflit avec la loi, mais aussi en termes de plaidoyer pour une allocation d’espace pour activités agro – pastorales et sportives. Enfin ABA pourrait soutenir efficacement le fonctionnement des institutions pénitentiaires. Mais Les efforts fournis par ABA ne devraient pas inhiber la responsabilité première de l’état congolais ; ceci entraine les recommandations suivantes : 1. AlégardduGouvernementprovincialduMANIEMAetduGouvernementdelaRépublique
Assurer l’application effective dans les différentes prisons des dispositions de l’ordonnance n°344 du 17 septembre 1965 portant régime pénitentiaire congolais. Cela implique que : Un personnel pénitentiaire comprenant un personnel de garde et d’administration, un personnel de surveillance, un personnel éducatif et un personnel de santé soit recruté, formé et affecté dans les différents établissements pénitentiaires du Maniema ;
 Les visites de contrôle de différents établissements pénitentiaires du Maniema soient assurées de manière régulière par les différentes autorités citées par l’ordonnance susmentionnée afin que celles-ci puissent se rendre compte des problèmes qui se posent dans ces différents établissements ;
L’admission des détenus dans ces établissements se fasse dans le strict respect des normes en la matière ;
La répartition des détenus dans les différents locaux se fasse conformément aux normes prescrites en la matière ;
L’aménagement des installations hygiéniques dans les différents établissements pénitentiaires du Maniema et la prescription des mesures relatives à leur entretien et à leur maintien dans un état de propreté ;
L’approvisionnement régulier des prisons opérationnelles en nourriture saine ;
L’utilisation des détenus condamnés aux travaux publics disponibles (chantiers du Gouvernement provincial ou central) afin de leur permettre de se constituer un pécule qui leur sera remis conformément aux normes en la matière ;
L’application effective des peines disciplinaires prévues par l’ordonnance susvisée aux détenus qui violent les règlements de la prison ;
2.
Les détenus très dangereux soient systématiquement transférés vers des prisons de haute sécurité qui ont vocation à les héberger.
Al’égard des partenaires intervenant dans le domaine pénitentiaire
Intervenir dans la réhabilitation et/ou construction de prisons répondant aux normes dans la Province du Maniema ;
Intervenir dans le domaine de renforcement des capacités du personnel œuvrant dans les prisons du Maniema, préalablement affecté par le Gouvernement, à travers l’organisation des sessions de formation.
Mais pour être réellement efficace, l’impunité dans le Maniema, vue sous l’angle du maintien de la population carcérale dans les prisons ne doit pas faire l’économie d’un financement autonome à la hauteur des attentes des bailleurs.
Conclusion.
Au terme de notre analyse, force est de reconnaitre que la question des prisons et des prisonniers est à l’évidence sensible pour le gouvernement du MANIEMA, et pourtant elle ne reçoit pas de celui-ci l’attention qu’elle mérite. Ici, elle est considérée de manière négative et parfois laissée pour compte. L’opinion publique est mal informée et refuse d’accepter la prison comme instrument de redressement social. Il n’y a pas de programmes ou de règles pour soutenir la réinsertion sociale des prisonniers une fois qu’ils ont purgé leur peine. Par conséquent, il y a lieu de souligner la nécessité d’une réelle appropriation des questions pénitentiaires par l’Etat, avant de faire le plaidoyer de la réinsertion sociale. Ici, il s’agira de clarifier le rôle de l’Etat dans la recherche d’emploi pour des anciens détenus et d’indiquer que les détenus qui ont purgé leur peine ou ont été libérés sur parole soient soutenus dans leur réinsertion, et que ce soutien devrait être apporté, par exemple, par les antennes de la Sécurité sociale, toutes choses qui donneront aux prisons leur lettres de noblesse. Cette tâche de plaidoyer, sera le cheval de bataille de ABA pour une meilleure durabilité de ses acquis en cette période de clôture de projet. L’enveloppe sollicitée pour une reprise en mains de la sécurisation de la PCK semble certes exorbitante, mais elle constitue, à n’en point douter, le laissez passer que ABA se dotera pour sortir grandi de ce labyrinthe qu’a constitué jusqu’à maintenant la réhabilitation de la prison.
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