Le paysage spirituel de l occident - article ; n°257 ; vol.45, pg 449-468
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Le paysage spirituel de l'occident - article ; n°257 ; vol.45, pg 449-468

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Description

Annales de Géographie - Année 1936 - Volume 45 - Numéro 257 - Pages 449-468
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1936
Nombre de lectures 28
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Léon Aufrère
Le paysage spirituel de l'occident
In: Annales de Géographie. 1936, t. 45, n°257. pp. 449-468.
Citer ce document / Cite this document :
Aufrère Léon. Le paysage spirituel de l'occident. In: Annales de Géographie. 1936, t. 45, n°257. pp. 449-468.
doi : 10.3406/geo.1936.11354
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-4010_1936_num_45_257_11354257. — XbV* année. 15 Septembre 1936. №
ANNALES
DE
GÉOGRAPHIE
connaître La LE géographie l'unité PAYSAGE d'un est science domaine SPIRITUEL d'enchaînements qu'elle se DE constitue L'OCCIDENT chargée par de des nous rattachefaire
ments effectués sur le terrain des disciplines voisines. C'est une opé
ration de ce genre que nous voudrions essayer aujourd'hui aux dépens
de l'histoire de l'art.
Les monuments dominent le paysage rural comme le paysage
urbain. Parler d'une agglomération sans en tenir compte, c'est décrire
une chaîne de montagne sans s'occuper des sommets. Ils forment un
dépôt supérieur laissé par l'activité humaine et survivant aux géné
rations qui les ont édifiés. Ce sont des réalisations collectives que la
beauté habituellement accompagne comme une obligation morale ou
comme une perfection nécessaire dans l'exécution. Même s'ils ont
une destination personnelle, ils rentrent tôt ou tard dans le patri
moine ou sous le contrôle de la communauté. Ils sont des centres d'ac
tion et d'influence qui relient le présent au passé. Ils contribuent à
l'unité morale des générations. Avec eux, le temps qui s'éloigne garde
son actualité. Ils exercent une influence posthume quand ils cessent
de remplir le rôle pour lequel ils ont été bâtis. La pensée de Phidias
conserve sa puissance inspiratrice dans les ruines du Parthenon,
comme aux plus beaux jours d'Athènes.
Les monuments vivent dans un cadre choisi ou préparé pour eux.
Ce sont des centres d'organisation topographique réglant les trans
formations qui s'effectuent autour d'eux. Ils garnissent habituelle
ment un paysage humanisé. Ils couronnent cet effort d'humanisat
ion. Ils spiritualisent le paysage. Nos buildings ont la même fonction
qu'une termitière, mais Angkor et Stonehenge représentent quelque
chose qui relève de la géographie humaine pure et qu'on ne peut rap
procher d'aucune autre manifestation que la nature puisse nous offrir.
Les historiens n'évitent pas les préoccupations géographiques
pour expliquer la répartition ou la transmission des formes d'art.
ANN. DE GÉOG. XLVe ANNÉE. 29 450 ANNALES DE GÉOGRAPHIE
Mais on peut essayer autre chose, donner aux arts plastiques une place
dans les enchaînements géographiques et engager le paysage monum
ental dans l'activité des sociétés où il s'est constitué parmi les
grandes unités culturelles qui se sont partagé le monde. Nous nous
en tiendrons aujourd'hui aux groupes de l'Occident (et du Proche-
Orient) qui représentent une continuité ininterrompue dans le temps
et dans l'espace et qui semblent devoir imposer leurs idées au reste
de la Terre.
Le paysage préhistorique. — C'est peut-être la défense du sol qui
a inspiré les premières constructions collectives. Les enceintes pré
historiques sont des camps improvisés sur le terrain pendant les
guerres ou utilisés en cas d'alerte et destinés à abriter les populations
avec les défenseurs. Dans le principe, elles ne sont peut-être pas
toujours différentes des dunum, des oppida ou des acropoles qui furent
sans doute souvent des refuges plus ou moins fortifiés avant d'être
des villes-refuges. On les compte par milliers. Il est souvent im
possible de les dater, et elles ont pu être édifiées ou utilisées à des
époques très différentes. Il est possible que les habitudes romaines
aient représenté une tradition beaucoup plus ancienne aussi bien
qu'une solution imposée ou suggérée par une conduite de la guerre
peu différente. Mais, en somme, ces constructions nous apprennent
peu de chose, sinon qu'il y avait des guerres, des populations sédent
aires qui défendaient leur sol et des souverainetés morcelées, comme
dans beaucoup de sociétés primitives.
Beaucoup plus significatifs sont les monuments mégalithiques.
Les dolmens sont des sépultures. Si l'on nous enterre, ce n'est pas
pour nous faire disparaître, mais pour nous conserver. Une tombe
est une demeure faite pour un être devenu immortel comme un dieu.
Si le peuple des dolmens a construit des tombes mégalithiques qu'un
tumulus protecteur rendait presque inviolables, c'est qu'il croyait
à une vie future, non pas à une existence glorieuse et triomphante,
mais à une vie matérielle, réduite ou crépusculaire qu'on retrouve
dans les premières croyances indo-européennes et que la théologie et
la philosophie viendront un jour spiritualiser. Les origines de notre
métaphysique sont peut-être beaucoup plus anciennes que
histoire.
Les dolmens étaient des tombes de luxe réservées à quelques pri
vilégiés. A côté d'eux s'élevaient des sanctuaires destinés à tous. L'en
ceinte mégalithique correspond au « temple » dans son acception pri
mitive. Elles sont particulièrement imposantes dans notre Bretagne
où le paysage préhistorique est toujours présent. Il y en a de rectan
gulaires et surtout de rondes. C'est peut-être là que se trouvent les
sanctuaires les plus vénérables et les plus impressionnants de la Terre. LE PAYSAGE SPIRITUEL DE L'OCCIDENT 451
Les alignements de Carnac se terminent du côté du couchant par
une enceinte semi-circulaire comme l'abside d'une église et qui devait
être comme le naos ou le Saint des Saints de cette construction primit
ive. Les alignements sont séparés par des intervalles égaux. Les
mégalithes sont régulièrement espacés. Ils sont d'autant plus grands
qu'on se rapproche du cromlech terminal. Le peuple qui les a édifiés
a su décomposer l'espace avec ces grandes pierres et introduire une
composition spirituelle dans un espace rythmé. A la composition
géométrique, il savait joindre la composition expressive. C'est bien
un paysage à la fois artistique et religieux que la civilisation des mégal
ithes a laissé sur la Terre sainte de notre histoire.
Les mêmes sanctuaires se retrouvaient de l'autre côté de la Manc
he. L'unité morale des deux pays était vivante encore aux jours de
Vercingétorix et de Cassivellaun. Au-dessus du même paysage agraire
se dressait le même paysage spirituel. Avec une architecture plus évo
luée que celle des cromlechs bretons, Stonehenge est le grand sanc
tuaire préhistorique des Iles et l'un des plus remarquables du monde.
Les mégalithes représentent l'effort simple et grandiose des vieux
peuples qui ont voulu exprimer leurs idées dans des constructions
dé pierre. Ce sont les premières pensées que l'homme ait écrites dans
notre paysage. Les alignements de Carnac n'ont pas été édifiés
des solitudes inhabitées. Ce sont des œuvres collectives auxquelles
ont dû collaborer des foules entières. Ils évoquent une civilisation
fixée au sol, des terres cultivées, des chefs obéis, des peuples nom
breux et prospères, mangeant assez pour se livrer à de grands tr
avaux en dehors de ceux qui devaient assurer leur subsistance. Il y
avait une économie fortement constituée, bien supérieure à l'écono
mie précaire de certaines sociétés primitives de l'Afrique noire. Dans
Je peuple des mégalithes, on peut déjà voir un épanouissement cul
turel autonome, une civilisation ayant assez d'opulence et de sécu
rité pour élever des monuments impérissables à ses dieux et à ses
morts et pour abandonner une partie de ses richesses dans les tom
beaux.
On se trouve sans doute en présence de plusieurs cultures plus ou
moins apparentées entre elles. Le culte des morts est un vieux fonds
commun aux sédentaires de l'Europe et de l'Asie. Il a ses racines dans
la préhistoire. Carnac et Stonehenge suggèrent aussi une centrali
sation religieuse comparable à celle qui réunissait les Grecs autour de
Delphes et d'Olympie. Les grandes unités anthropogéographiques
étai

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