Un document d'histoire constantinienne dans la cité d'Alba : le nouveau milliaire du Teil (Ardèche) - article ; n°1 ; vol.4, pg 177-204

Roger Lauxerois

Description

Revue archéologique de Narbonnaise - Année 1971 - Volume 4 - Numéro 1 - Pages 177-204
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: REVUE_ARCHEOLOGIQUE_DE_NARBONNAISE
• Publié le: 01 janvier 1971
• Nombre de lectures: 51
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 3 Mo

Extrait

Roger Lauxerois
Un document d'histoire constantinienne dans la cité d'Alba : le
nouveau milliaire du Teil (Ardèche)
In: Revue archéologique de Narbonnaise, Tome 4, 1971. pp. 177-204.
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Lauxerois Roger. Un document d'histoire constantinienne dans la cité d'Alba : le nouveau milliaire du Teil (Ardèche). In: Revue
archéologique de Narbonnaise, Tome 4, 1971. pp. 177-204.
doi : 10.3406/ran.1971.932
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ran_0557-7705_1971_num_4_1_932UN DOCUMENT D'HISTOIRE CONSTANTINIENNE
DANS LA CITÉ D'ALBA :
LE NOUVEAU MILLIAIRE DU TEIL (Ardèche)*
Un nouveau milliaire, découvert au Teil (Ardèche), est venu récemment augmenter
la liste des bornes romaines de la cité d'Alba, connues autrefois ou conservées encore
de nos jours. Grâce à leur témoignage, le regretté P. Arnaud est parvenu à reconstituer
le réseau des voies romaines de cette cité, en s'aidant aussi des indications que
pouvaient fournir la toponymie, les documents médiévaux, les cadastres, ou les
vestiges de la voirie encore visibles. A la page 78 de son étude sur les Voies romaines
en Helvie, imprimée au Teil en 1966, il fait état de la découverte : « par le chemin
de Fontenouille, où en février 1966, des terrassiers occupés à la villa Audigier décou
vrirent une colonne inscrite aux deux extrémités : il semble que cette double inscription
se rapporte aux deux empereurs Constance Chlore et Constantin le Grand (fin du
me siècle et premier tiers du ive siècle) ». Depuis lors, aucune publication n'a été
faite de ces inscriptions. Leur étude, qui est proposée ici, va permettre de confirmer
et surtout de préciser le rapide commentaire qui en avait été donné.
Le milliaire a été trouvé en février 1966 au cours des travaux d'aménagement
du jardin de la propriété de M. Y. Audigier (1), située Chemin de Fontenouille, dans
la section G du cadastre, parcelle n° 523P (cf. fig. 1) (2). D'après les inventeurs,
l'emplacement précis de la découverte se trouvait au-dessus de ce chemin, peu après
l'entrée du jardin, à proximité des limites de cette terre. Aujourd'hui le milliaire
est dressé au sommet de l'allée qui mène à la villa ; il n'a donc subi qu'un déplacement
de 10 à 20 mètres.
* Cette étude est présentée en hommage à notre regretté ami P. Arnaud, Curé de Valvignères, qui
m'avait conduit auprès du milliaire dont il fut si heureux de connaître le déchiffrement, et d'apprendre l'impor
tance historique. C'est aussi pour moi un devoir agréable de remercier M. Leglay qui m'a assisté de ses nombreux
conseils.
(1) Je tiens à exprimer ici tous mes remerciements aux propriétaires de la villa, Mme et M. Audigier
qui m'ont accueilli avec bienveillance et sympathie au cours des nombreuses visites que la lecture de ce milliaire
a exigées.
(2) Le tracé des voies romaines est inspiré de l'étude de l'abbé P. Arnaud, Voies romaines en Helvie, Le
Teil, 1966. ;
:
178 R. LAUXEROIS
vers CRU AS
vers VIVIERS vers VIVIERS
••• voie romaine
Fig. 1. — Carte schématique de la région du Teil (Ardèche) 1. Hue de la République ; 2. Cimetière du Teil ;
3. Église Saint-Étienne de Mêlas ; 4. Borne au 4e mille d'Alba ; 5. Borne au 6e mille d'Alba (nouveau milliaire) ;
6. Chemin de Fontenouille 7. Rue Kléber.
Le lieu où il a été mis au jour peut être tenu pour son emplacement originel.
Le site en est remarquable ; il domine la vallée du Rhône et la ville du Teil qui se
développe au pied des dernières hauteurs du Massif Central, près du confluent
rhodanien d'un petit ruisseau, le Frayol, dont la vallée conduit vers l'amont à Alba.
Aujourd'hui des villas s'établissent sur les premières pentes, au contact des deux
régions géographiques. A mi-côte, circule le chemin de Fontenouille qui relie la
rue Kléber, proche du cimetière du Teil, à l'église de Mêlas. Nous verrons plus loin
l'importance historique de cette situation (1).
(1) Cf. p. 197-198. LE NOUVEAU MILLIAIRE DU TEIL 179
Fig. 2. — La colonne milliaire dominant Le Teil (Cliché R. Lauxerois).
Le milliaire est une ancienne colonne réemployée (fig. 2). Il est en calcaire
jaune et porte des reflets rouges-violets. Le sommet du fût est surmonté d'un astragale à
double tore, malheureusement mutilé. La partie centrale présente un renflement bien
marqué. Des éclats ont également endommagé la base de la colonne, qui amorce un profil
concave. La pierre a en effet souffert de nombreux accidents, qui par chance n'affectent
pas trop les textes épigraphiques ; plusieurs éclats ont d'ailleurs été recueillis à côté
du milliaire et il semble que leur dislocation soit ancienne et ne doive rien aux condi
tions de la découverte. Deux de ces fragments dispersés appartiennent aux
inscriptions ; ils ont été également reproduits avec elles dans le fac-similé (fig. 3).
D'autres ont été recollés à leur place primitive. A ces dégradations, on peut ajouter
tous les accidents ou les défauts qui sont imputables à la qualité de la pierre ; elle 180 R. LAUXEROIS
PERffïvi
bonne Fig. 5,5 cm 3. graphie. — x 2 Fac-similés cm. b a2, et éclat c, sur du milliaire de la la colonne pierre du renversée; ïeil appartenant : a, sur actuellement la à colonne la première dressée elles inscription se à lisent l'endroit à ; l'envers dimensions ; lettres ; leur gravées maximales zone profondément de chevauche: 14 cmx ;
ment se trouve approximativement à la verticale de a. Quelques signes (graphiques ou accidentels) compliquent
la lecture de b ; écritures moins soignées, d, éclat de la pierre, dont la place primitive n'a pu être déterminée ;
dimensions maximales : 9 cm X 7,5 cm ; hl, 4 cm. NOUVEAU MILLIAIRE DU TEIL 181 LE
se raie en effet facilement et des traits plus accusés peuvent être pris, si on n'y prend
garde, pour des signes épigraphiques réels. Le polissage de la pierre n'a pas supprimé
les trous qui criblent sa surface.
Le tableau suivant donne les dimensions actuelles du milliaire (1).
Hauteur colonne avec astragale.
de l'astragale
Circonférence au centre (renflement)..
à la base
Diamètre astragale
Cette colonne, à la silhouette si fine et élancée, avait dû être retirée des ruines d'une
maison rurale voisine ou d'un autre monument, abandonné ou détruit vers la fin
du ine siècle. Est-il besoin de rappeler que ces remplois furent pratique courante
dès cette époque et encore au ive siècle. On relève beaucoup de cas semblables à
l'époque constantinienne (2). Ces colonnes, épaves de monuments renversés, n'étaient-
elles pas en effet le matériau idéal pour une borne milliaire ou une simple borne
honorifique ? La colonne du Teil illustre une nouvelle fois cette solution de facilité
et vient s'intégrer dans la liste des milliaires d'emprunt de cette époque, aux côtés
du milliaire de Cruas {?»).
L'étude de la pierre conduit rapidement à distinguer trois inscriptions dont
les caractères épigraphiques traduisent l'œuvre de plusieurs mains, d'habileté tech
nique inégale, bien que deux des inscriptions soient quasi contemporaines.
(1) Ces proportions donnent à la colonne une allure élancée ; ce qui frappe c'est en effet son faible diamètre.
Pour des comparaisons nous renvoyons aux exemples choisis par M. Labrousse, Un milliaire inédit de Constantin
à Castelnau-Magnoac (Hautes-Pyrénées ), Annales publiées par la Faculté des Lettres de Toulouse, 1956, Pallas IV,
p. 67-86. Les circonférences indiquées sont de l'ordre de 1 m, 1,20 m, 1,40 m à la base, et de 1,13 à 1,20, 1,32,
1,60 m au sommet.
(2) M. Labrousse, l.l., en a donné plusieurs exemples (p. 70-71) relevés sur la route de Narbonne à
Toulouse; à Villenouvelle : C.I.L., XII, 5673 (deux inscriptions dont l'une à Constantin César) et C.I.L.,
XII, 5674 (Constantin II ?) ; à Ayguesvives : C.I.L., XII, 5675 (trois inscriptions dont la plus ancienne est
de Constantin Auguste) ; à Baziège : C.I.L., XII, 5676 (trois inscriptions dont la seconde est dédicacée au nom
de Galère). L'auteur cite encore C.I.L., XIII, 8891 et 8888 datant de la dynastie constantinienne (l'un sur une
route reliant Toulouse et