Delicatessen de Jeunet Jean-Pierre, Caro Marc
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Fiche produite par le Centre de Documentation du Cinéma[s] Le France.
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Langue Français

Extrait

Delicatessen FICHE FILM
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D O C U M E N T
rouge. Et pourtant il s'agit bien dÕu film d'anticipation, sur une pÈriode pos-tapocalyptique, o˘ la tÈlÈvision trËs annÈes soixante est munie dÕune bie moderne tÈlÈcommande. C'est comme si l'on se trouvait ‡ l'intÈrieur dÕun ÒbulleÓ, un recoin temporel o˘ l'Histoir patinerait. Cette paritÈ entre un passÈ rÈfÈrentiel et un futur dÈglinguÈ est une des facettes d'un film qui repose entiËre-ment sur la dualitÈ. Ainsi, quoi de plus normal que le tandem Caro-Jeunet ait choisi de confier ‡ des ÈlÈments doubles tous Ies cÙtÈs positifs ou poÈtiques de ce monde dÈsespÈrÈment individualiste et cruel : les garnements farceurs sont deux, comme l'Ètaient Livingstone et Louison ; celui ci ne tardera pas ‡ refor-mer un duo musical (ÒsingÈÓ par lesdit gamins) avec la musicienne Julie ; laquelle, parce qu'elle casse tout, pos-sËde Òtout en doubleÓ ; les grincement du sommier, qui inspirent ‡ Louison un ballet involontaire et hilarant, ne rÈson-nent que Òquand on est deuxÓ, selo mademoiselle Plusse qui en connaÓt un rayon en matiËre d'accouplement ; quant ‡ monsieur Potin, le seul dans l'immeuble ‡ ne pas se livrer ‡ l`immon-de cannibalisme, il doit son autarcie ali-mentaire ‡ lÕincroyable prolifÈration d ses escargots, animaux hermaphrodites, comme chacun sait, c'est-‡ dire bisexuÈs... Dans le mÍme ordre dÕidÈes, et pou montrer comme ce monde est retors, les auteurs ont permutÈ la plupart des pÙles habituels, ‡ l'image des robinets de la chambre de Louison : c'est bien entendu la riche madame Interligator qui cherche ‡ en finir, c'est en graines de cÈrÈales que le trËs carnassier boucher accumule sa fortuneÉMÍme la traditionnelle opposition entre les diaboliques entrailles de la terre et les cieux dÈments est inversÈe. Le sous-sol, monde chtonien par excellence, vidÈ des rats qui n'ont cessÈ dÕÍtre une menac que pour Ítre mangÈs jusquÕau dernie est le refuge des troglodistes, c
rebelles vÈgÈtariens parce que refusant l'anthropophagie pratiquÈe en surface. Ceux-ci viendront au secours des deux seuls poËtes de l'immeuble au sommet duquel, sous les Èclairs, le Mal est ‡ deux doigts de triompher. Quand tout sera rentrÈ dans lÕordre, la poÈsi reprendra ses droits sur Ies toits de ce b‚timent dont Ies planchers auront ÈtÈ effondrÈs et l'escalier purifiÈ par les flots. La construction mÍme de ce film poÈ-tique se devait de suivre ce modËle binaire, et opter pour une progression par rimes visuelles et associations d'idÈes, formulÈes parfois en jeux de mots mais toujours relatives ‡ la nourri-ture, comme de bien entendu. Rime visuelle : le programme tÈlÈvisÈ passe d'une comÈdie musicale de mauvais go˚t pastichant lesmusicalsWarner des annÈes trente (m‚tinÈs d'opÈrette ( hawaÔenne) ‡ un interlude offrant le spectacle d'un plateau de fromages ‡ Ètages, parodie grotesque des cho-rÈgraphies dÈlirantes de Busby Berkeley. Jeux de mots : le boucher dit ‡ made-moiselle Plusse qui Èchange ses (charmes contre une entrecÙte, quÕell finira Ò‡ ses crochetsÓÉAssociation d'idÈes : les frËres Kube fabriquent des boÓtes qui font meuh, alors que leur nom Èvoque une marque de bouillon de bÏufÉPanachÈ : Julie, myope Òcomme une taupeÓ, fait appel aux voleurs d graines du sous-sol, Iesquels lui procu-rent des lentilles de contact pour mieux voir et, pour quÕelle communique ave eux lors de l'opÈration de sauvetage de Louison, une radio camouflÈe en moulin ‡ cafÈ alors quÕelle lui a dÈj‡ permi dÕÈchapper aux couteaux de son pËr gr‚ce ‡ des tisanes soporifiques. Autant de symboles, de rÈfÈrences, de jeux avec les mots et les idÈes, qui, s'ils ne sont pas tous volontaires, traduisent une profonde harmonie entre les auteurs et leur sujet. Il y a peu, un autre grand graphiste de BD, propulsÈ metteur en scËne sans avoir jamais touchÈ une
SALLE D'ART ET D'ESSAI C L A S S … ER E C H E R C H E 8 ,R U ED EL AV A L S E 42100 SAINTETIENNE 04.77.32.76.96 R…PONDEUR : 04.77.32.71.71 Fax : 04.77.32.07.09
ÒtrËs visuel et presque sans histoireÓ, mettant en scËne une petite communau-tÈ vivant en huis clos aprËs un cataclys-me Ècologico-militaire et troublÈe par une intruse. Par son thËme,Bunker Palace HÙtel(tiens, tiens...) Ètait assez proche deDelicatessen. Mais le film de Bilal Ètait surtout lÕexemple ‡ ne pas suivre (Delicatessenest dÕailleurs ‡ Bunker Palace HÙtelet ‡Soleil Vert ce queBrazilest ‡1984). Si la bande dessinÈe est pour quelque chose dans leur premier long mÈtrage, cÕest surtout lÕexpÈrience du ÒcourtÓ, du film publici-taire et du clip musical qui a appris ‡ Jeunet et Caro lÕart de manier la rime et de condenser les idÈes. Gageons quÕensemble ou sÈparÈs, cultivant le ÒrÈalisme poÈtique cradeÓ ou sÕen dÈmarquant, ces deux nouveaux venus nÕont pas fini de nous ÈtonnerÉ Gilles Ciment Positif n∞364 - juin 1991
CÕest le climat qui compte le plus dans le film, et lÕintrigue aurait au fond bien peu dÕimportance si elle ne dÈterminait pas un changement de rythme et de ton dans la seconde partie. Tant que dure la prÈsentation, on est sensible ‡ tout ce que les auteurs ont visiblement le plus travaillÈ. La plupart des acteurs (‡ lÕexception peut-Ítre de Karin Viard, la fille lÈgËre), semblent avoir ÈtÈ choisis pour leurs visages mobiles, irrÈguliers et grimaÁants, des ÒgueulesÓ qu'on imagi-ne aussitÙt croquÈes par un crayon agressif. La distorsion des images trans-forme en cauchemar le plan le plus insi-gnifiant ; on est au royaume de la lai-deur, de la crasse envahissante et du morbide. Ce n'est pas la premiËre fois que des cinÈastes plus ou moins appa-rentÈs au fantastique prÍtent ‡ leur monde ces couleurs sinistrement drola-tiques. On pense dans le dÈsordre ‡ Eraserhead, ‡Element of crime, ‡ -
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ou, dans un tout autre genre, ‡ certain Monty Python et ‡Brazil. La trouvaill de Jeunet et Caro consiste ‡ tÈlescope l'avenir et le passÈ proche, en utilisan un dÈcor rÈtro type annÈes 60, qui sou ligne la rÈgression profonde de tous ce Ítres, uniquement inquiets de se nourrir de survivre. Enfin, la musique de Carlo d'Alessio (le compositeur des films d Duras!) adhËre aussi bien ‡ la form qu'au propos. Les choses se g‚tent un peu avec l Òpassage ‡ l'actionÓ proprement di L'univers devient secondaire, au profi d'une lutte d'un schÈmatisme mani chÈen. AgressivitÈ et provocatio s'Èmoussent. MÍme si tout le film four mille de remarquables idÈes visuelles e de loufoqueries renversantes (il serai trop long de les citer ici !), mÍme si l'ar de la saynËte n'a pas de secret pour de auteurs venus du film court, il est clai que Jeunet et Caro n'ont pas domin Delicatessenjusqu'au bout. Ils se son laissÈs emporter par la furie des images par les comportements clichÈs de per sonnages semblables aux marionnette de leurs dÈbuts, et y ont sacrifiÈ le poin de vue d'ensemble, I'insolence, la solidi tÈ du propos. Dire qu'ils n'ont pas ten la route parce que ce sont des court mÈtragistes, ce serait facile et bÍte. Retenons au contraire deDelicatesse ce bouillonnement, cette vigueur visuel le qui font son originalitÈ, et tranchen sur la morne sagesse de tant de jeune cinÈastes franÁais. Jacqueline Nacach La revue du cinÈma n∞471 - mai 199
Entretien av
Quelles furent vo visuelles ? Pour les coule Hopper nous a b extÈrieurs dans l quai des brume dÕune photo de en couverture d les costumes, R notre rÈfÈrence o Dans la thÈmati sujets, comme l mutilation, que C dans ses bandes A une Èpoque, C sur les choses un queDelicatesse chose. Ce nÕest et nÈo-punk com derniËre rafal depuis le premi mÈtrage que no nous nous Ètions essayer de cons Chier sur tout Construire, provo spectateur, cÕes renions pasLe b rafale.
La bande dessinÈ t-elle jouÈ un rÙl Delicatessen? Je lis peu de Goossens et Ville ne nous ont guËre Bien s˚r, il y a T rÈfÈrences vien dÕavant-guerre. citer Bicot ou S Rube Goldberg : nismes pour le Interligator, Áa a dÈcouvert Gold moment o˘ je rÍv dispositifs.
SALLE D'ART ET D'ESSAI C L A S S … ER E C H E R C H E 8 ,R U ED EL AV A L S E 42100 SAINTETIENNE 04.77.32.76.96 R…PONDEUR : 04.77.32.71.71 Fax : 04.77.32.07.09
CÕest vrai, mais il est difficile de dÈtermi-ner ce qui nous a rÈellement influencÈ. Ce sont des choses quÕon a aimÈes et qui ressortent. Le jeu des rÈfÈrences, on le fait ‡ la fin, exceptÈ pour Doisneau et les films de CarnÈ que nous prÈsentions comme modËles aux techniciens.
EtBrazil? Les tuyaux et les costumes des troglos rappellent Èvidemment ceux des plom-biers deBrazil, mais quand nous nous en sommes aperÁus, nous Ètions plutÙt ennuyÈs. Cela dit, ces tuyaux se trou-vaient aussi dans les dessins de Caro, et il ne faut pas oublier que Gilliam vient comme nous de lÕanimation. Ses rÈfÈ-rences ne sont donc pas exclusivement cinÈmatographiques. DÕautre part, Brazil propose la caricature en profondeur dÕune sociÈtÈ, alors que nous nous sommes davantage attachÈs aux senti-ments. Dans nos prÈcÈdents scÈnarios, nous voulions aussi crÈer des mondes, mais comment faire sans moyens ? Nous sommes restÈs dans un univers assez rÈaliste, mÍme si le fantastique dÈborde un peu. Nous nÕavons dÕailleurs pas situÈ lÕhistoire dans le temps.
On pense ‡ lÕËre postatomique avec le look annÈes quarante et aussi annÈes soixante pour les citations de la tÈlÈvi-sion. CÕest un univers parallËle, comme sÕil y avait eu dÈrapage ‡ un certain moment. Nous sommes heureux que cela fonction-ne ainsi car au dÈpart les gens qui lisaient notre scÈnario nous reprochaient son caractËre intemporel. Pour leur faire plaisir, nous lÕavions datÈ :AÒubervilliers 2015Ó. Mais nous ne lÕavons pas laissÈ dans le film. Nous Èvitions de la sorte que le film soit cataloguÈ Òfilm histo-riqueÓ. Si nous avions situÈ lÕaction pen-dant lÕOccupation, on nous aurait prÍtÈ un discours sur la guerre. Nous nÕavons pas faitUranus! Nous pouvions donc librement faire intervenir les troglodistes
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Le plateau de fromages qui tourne lÕintÈrieur de la mire ‡ la fin des pr grammes est une belle trouvaille. Nous avons trouvÈ ce plateau de fro mages dans de vieilles rÈclames. Comm il nous Èvoquait les interludes, nou lÕavons intÈgrÈ dans une mire. Cel donne un dÈcalage de plus. On imagin trËs bien que dans cette sociÈtÈ o˘ il nÕ a plus rien ‡ bÈqueter, la tÈlÈ diffuse longueur de temps des images de bouffe Pour faire rÍver les gens ou les fair chier, on ne sait pas. Nous avons veillÈ la cohÈrence du moindre dÈtail, car sino les choses deviennent gratuites.
Au dÈbut, quand on voit le boucher ave un air menaÁant, on peut se dire : ÒVoil un effet.Ó, mais on apprend plus tar quÕil avait des raisons de paraÓtre men Áant. De mÍme, ce nÕest quÕaprËs co que lÕon comprend la nÈcessitÈ des tr vellings dans les tuyaux. Il y a des maÓtres dans ce registre. Sergi Leone, un roi de lÕesbrouffe, mais do lÕesthÈtisme est toujours au service de l dramaturgie. Scorsese, aussi. Il en fai quinze tonnes ‡ chaque fois et personn ne sÕen rend compte.
LÕhumour, omniprÈsent jusque dans l gÈnÈrique, traduit-il une volontÈ de ras surer par rapport au sujet ? La volontÈ, cÕest de ne pas se prendre a sÈrieux. DËs quÕon part sur quelqu chose de tragique, on dÈsamorce.
Est-ce pour cela que lÕunique sÈquenc gore est onirique ? Nous voulions la placer le plus prËs pos sible du dÈbut. Il fallait tout de mÍm quÕ‡ un moment le spectateur ait l trouille au premier degrÈ. En basculan trop dans lÕhumour noir, le boucher ri quait de ne plus paraÓtre dangereux.
LÕogre, la pelote de laine :Delicatesse est truffÈ de rÈfÈrences aux contes. Effectivement, le boucher est un or comme dans lÕhistoire de saint Nico et la pelote de laine renvoie ‡ la fois
fil dÕAriane et au Petit Poucet avec s cailloux. Caro et moi adorons les contes Le premier scÈnario que nous avons Ècrit La citÈ des enfants perdus, nÕÈtait p loin des contes de Perrault illustrÈs pa Gustave DorÈ. Gilles Ciment, Philippe Rouyer, Paul Loui Thirar Positif n∞364 - juin 199
Les rÈalisateurs
NÈ le 2 avril 1953, Marc Caro a conÁ des courts mÈtrages, des illustrations des gÈnÈriques, des clips et a beaucou oeuvrÈ dans la vidÈo, principalemen comme directeur artistique. En 1976 1977, il place ses dessins dans de revues commeMÈtal HurlantouCharli Hebdo. Contrairement ‡ lui, Jean-Pierre Jeune (3 septembre 1953) a fait de nombreu films publicitaires, mais aussi des court mÈtrages et des clips. PassionnÈ de des sin animÈ, il signe des films d'animatio commeManËge(Caro y a sculptÈ le marionnettes). "Nous avons un cÙtÈ trË pratique. «a, c'est lÕÈcole du cou mÈtrage. PourLe bunker de la derniË re rafale, nous avons passÈ un an e demi tous les deux ‡ fabriquer l moindre flingue, le moindre costume affirme Jeunet. CorÈalisÈ, ce surprenan court mÈtrage en noir et blanc a glan de nombreux prix dans les festivals. Pui les deux hommes continuent ‡ prouve leur talent imaginatif et leur humour cor rosif dans des films courts fondÈs su l'ÈtrangetÈ, Ies effets visuels et les per sonnages fantasques (Pas de repo pour Billy Brakko,Foutaises). Pendant des annÈes, tout en vaquant leurs divers travaux, ils Ècrivent des scÈ narios fantastiques nÈcessitant de dÈcors fabuleux, mais ne parviennen
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un nombre limitÈ de personnages et de dÈcors. Ce sera l'aventure du premier long mÈtrage,Delicatessenl'un des films les plus inventifs du cinÈma fran-Áais de ces derniËres annÈes.
Filmographie
LÕÈvasion1978 Le manËge1980 Le bunker de la derniËre rafale1981 Pas de repos pour Billy Brakko1984 Foutaises1989 Delicatessen1991 La citÈ des enfants perdus1995 Alien : rÈsurrection1997 Le fabuleux destin dÕAmÈlie Poulain
Documents disponibles au France
Positif n∞364 - juin 1991 La revue du cinÈma n∞471 - mai 1991
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