Abd el-Kader souverain d un royaume arabe d Orient - article ; n°1 ; vol.8, pg 15-30
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Description

Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée - Année 1970 - Volume 8 - Numéro 1 - Pages 15-30
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 61
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Charles-Robert Ageron
Abd el-Kader souverain d'un royaume arabe d'Orient
In: Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée, N°8, 1970. pp. 15-30.
Citer ce document / Cite this document :
Ageron Charles-Robert. Abd el-Kader souverain d'un royaume arabe d'Orient. In: Revue de l'Occident musulman et de la
Méditerranée, N°8, 1970. pp. 15-30.
doi : 10.3406/remmm.1970.1028
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remmm_0035-1474_1970_hos_8_1_1028ABD EL-KADER
SOUVERAIN D'UN ROYAUME ARABE D'ORIENT
Abd el-Kader souverain d'un royaume arabe d'Orient, Abd el-
Kader vice-roi ou gouverneur de Syrie, tels sont les thèmes d'une
campagne politique qui se développa en France de 1860 à 1865 et
même au-delà. Cette candidature était liée chez la plupart des publi-
cistes et journalistes à l'idée d'une résurrection de l'empire arabe ou
à l'affirmation des droits de la « nationalité arabe ». Bien qu'il existât
à Paris un journal nationaliste arabe, le Bvrgys, on a pu se demander
s'il ne s'agissait pas d'une « idée napoléonienne », voire d'un thème de
la politique de Napoléon III. Bonaparte ayant été le premier parmi
les chefs d'états occidentaux à avoir cru à la possibilité de faire
renaître un empire arabe au milieu des ruines de l'empire ottoman,
il n'est pas impossible que Napoléon III ait pensé qu'il était peut-être
du destin des Napoléonides et de l'intérêt de la France d'aider à sa
reconstitution. Napoléon Ier avait subordonné l'existence de cet état
arabe à l'action d'un homme capable de le diriger. Abd el-Kader pouv
ait-il être le champion de cette grande cause et le fut-il réellement
aux yeux de Napoléon III ?
Pour pouvoir répondre à ces questions, il faut déterminer d'abord
si le gouvernement français en intervenant en Syrie en 1860 avait
envisagé de créer pour Abd el-Kader un royaume arabe ou un simple
commandement ; mesurer ensuite si Napoléon III, à supposer qu'il ait
été personnellement attaché à ce dessein, avait tenté de le reprendre
après 1861. Enfin il paraît indispensable de voir ce qu'a été l'attitude
de l'émir Abd el-Kader en face d'éventuelles propositions françaises. 16 CHARLES-ROBERT AGERON
LA CANDID ATUEE ABD EL-KADER
II pourrait être tentant de faire remonter cette idée à 1852, en
invoquant un passage connu des Mémoires de Mac-Mahon1. Pour
celui-ci, Napoléon III songeait peut-être déjà à la résurrection d'un
Etat arabe d'Orient, «lorsqu'il avait libéré Abd el-Kader et l'avait
envoyé à Beyrouth avec des subsides considérables, cherchant à lui
donner de l'influence sur les populations arabes de la région ». Mais
ce texte contient vraiment trop d'erreurs pour que l'hypothèse de
Mac-Mahon apparaisse plausible. Rappelons que c'est à Brousse, au
milieu de Grecs et de Turcs, qu'Abd el-Kader avait été installé, loin
des régions arabes de l'Empire, ce qui tranche le débat. D'autre part
ce fut Abd el-Kader qui demanda à aller vivre à Damas en 1855 pour
y retrouver d'autres Maghribins en exil, et son prestige ne dépassa
pas, semble-t-il, le milieu des muhâjirîn.
Aussi bien le Prince-Président avait assez de générosité naturelle
et de sens de l'honneur pour vouloir tenir spontanément et sans
arrière-pensées les promesses faites à l'Emir lors de sa reddition.
Les faits l'attestent : dès son élection, le neveu du captif de Sainte-
Hélène manifesta son intention de libérer Abd el-Kader et, ne pou
vant le faire face à l'hostilité de son gouvernement, il établit une
correspondance personnelle avec le prisonnier d'Amboise. En venant
lui annoncer lui-même sa libération, il lui répéta que sa captivité lui
avait causé une peine véritable, car elle lui rappelait sans cesse que
le gouvernement qui l'avait précédé n'avait pas tenu les engagements
pris envers un ennemi malheureux : « Rien à mes yeux n'est plus
humiliant pour le gouvernement d'une grande nation que de méconn
aître sa force au point de manquer à sa promesse. La générosité est
toujours la meilleure conseillère » 2.
Ce furent seulement les massacres du Liban et de Syrie (21 900
victimes selon les auteurs catholiques, 11 500 selon les sources otto
manes)8, qui en 1860 attirèrent à nouveau l'attention sur < Abd el-
1. Mémoires du maréchal Mac-Mahon, duc de Magenta. Souvenirs d'Algérie,
Paris, 1932 (p. 130).
2. Azan (Général Paul), L'émir Abd el-Kader (1803-1883), P., 1925 (p. 257).
3. Fr. Lenormant, Les derniers événements de Syrie, Paris, 1860. —
Richard Edwards, La Syrie (1840-1862), Paris, 1862. — P. de la Gorge, His
toire du Second Empire, t. III. — P. de Rochemonteix (S.J.), Le Liban et
l'expédition française en Syrie (Paris, 1921). ABD EL-KADER SOUVERAIN D'UN ROYAUME ARABE D'ORIENT 17
Kader. On sait comment lors des tueries de Damas (de 5 000 à 10 000
victimes selon les sources), l'intervention courageuse d'Abd el-Kader
permit à plusieurs milliers de chrétiens d'échapper à la mort.4 Les
Algériens d'Abd el-Kader, 800 hommes armés environ, dont quelques
cavaliers, mirent à l'abri quelque 8 000 chrétiens et convoyèrent
ensuite à Beyrouth ceux qui ne voulaient plus rester dans leur cité.
Or l'attitude d'Abd el-Kader a été d'objet en 1952 d'une explica
tion originale qui mérite examen5. Selon M. Emerit, Abd el-Kader
agissait en fait comme agent de la politique française et il en donne
deux preuves : le ministre de la guerre avait autorisé le recrutement
en Algérie d'une nouvelle smalah au profit de l'Emir et « l'autorité
locale donna aux emigrants toutes facilités pour gagner la Syrie »«
D'autre part, peu avant les massacres, le 19 juin 1860, le consul de
France à Damas promit à Abd el-Kader l'argent et les fusils néces
saires à l'armement de 1 000 Algériens. Pour intéressante qu'elle soit,
cette interprétation nous paraît forcer la réalité. A lire les rapports
du général de Martimprey, on voit bien en effet que l'émigration
n'était pas favorisée par les autorités militaires qui s'efforçaient au
contraire de l'empêcher et que les départs ne répondaient nullement
à un appel d'Abd el-Kader. A notre connaissance, aucun texte ne
permet donc d'écrire que « le ministre de la guerre autorisa le recru-
ment d'une smalah », composée de 1 000 à 1 200 Kabyles. Quant aux
armes dont disposa Abd el-Kader, celui-ci reconnut en 1861 qu'une
partie d'entre elles lui avaient été confiées par les autorités ottomanes,
et c'est pourquoi il accepta de les restituer, refusant en revanche de
céder celles que lui-même ou le consul Lanusse avait achetées, pour
ses Algériens8.
L'attitude d'Abd el-Kader ne paraît point pour autant mystér
ieuse. Que le pieux Abd ait obéi aux suggestions de sa foi
religieuse T, qu'il ait voulu aussi manifester à Napoléon III des sen-
4. La communauté chrétienne de Damas était évaluée à environ 8 000
Grecs orthodoxes, 8 000 Grecs uniates et S 000 Maronites.
5. M. Emerit, La crise syrienne et l'expansion économique française en
1860. Revue historique, 1952 (p. 211-232).
6. Résumé des appréciations d'Abd el-Kader sur la situation à Damas
faites au commandant Cérez. Jointe à une lettre du général Beaufort au Mi
nistre de la Guerre du 14 février 1861. Archives du Ministère de la Guerre, G 4 2.
7. Chamyl, interné à Kaluga, écrivit le 1" août 1860 au «juste *Abd el-
Kader > : « J'ai été content de toi. Tu as fait revivre la parole du Prophète et
tu as mis un frein à ceux qui violent ses décrets ». L'Emir lui répondit le
15 août : < Ce que nous avons fait en faveur des Chrétiens a été un devoir de
religion et d'humanité ». 18 CHARLES-ROBERT AGBRON
timents de reconnaissance, qu'il n'a cessé de lui témoigner, me semble
aussi naturel qu'à tous les historiens contestés par M. Emerit. On
devrait cependant insister aussi sur un dernier mobile. L'Emir, qui

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