Des « ghettos » français : abus de langage ou réalité ? Ledébatsurlaségrégationàl’heure delaréformedelapolitiquedelavi l e Seloncertainsanalystes,unepartiedesquartierspopulairesdebanlieue,endépitdesinterventionsdontilsfontl’objetdepuisplusdetrenteans,auraitévoluéversuneformedeghe t oïsation.Leconstatneportepasseulementsurleurpaupérisationetlasurreprésentationdesimmigrésetdeleursdescendantsenleursein.Ilviseàalertersurlese f etsdurenfermementdecesquartierssureux-mêmes,e f etsd’ai l eursmoinssensiblessurlaco l ectivitéquesurlesdestinéesindividue l esdeleurshabitants(pertedechances),leursa t entes(subcultureetrejetdesinstitutions)etleurssociabilitésquotidiennes(brutalisationetracialisationdesrapportssociaux),particulièrementpourlesplusjeunes.S’ilnes’agitenaucuncasdepostulerquelesquartierspopulairesdebanlieueseraientdésormaisleségauxdesghe t osnoirsaméricains,l’usagefrançaisduterme,pourl’essentielmétaphoriqueoudérivé,peutnéanmoinsposerproblème.Au-delàdelaquere l edelexique,cerecoursinduitunrisquedestigmatisationquineseraitpassanse f etspervers;plusencore,lafocalisationsurl’hypothèsed’un«e f etquartier»risquedefaireoublierlesautresmécanismesgénérateursd’inégalités.Cesdiscussions,pourl’essentielacadémiques,sontd’ungrandintérêtdanslecontextedepréparationd’uneréformedelapolitiquedelavi l e,souhaitéeparlegouvernementàl’horizon2011.E l escontribuentàéclairerlesarbitragesàveniretàdéfinirlapartsouhaitabledelarénovationurbaineetdel’objectifdemixité;ce l edespolitiquesd’investissementsocialterritorialisées;l'adaptationdelagéographieprioritaire,entantqu'instrumentd'actionpublique,àdenouve l esformesdeprécarisationterritoriale;l’éche l e pertinented’interventionselonlesprioritésenprésence. La crainte d’une dynamique de ghettoïsation de certains territoires s’est exprimée dans notre pays dès le début des années 1970. Si le ghetto a longtemps ét é considéré comme une réalité étrangère à la société française, voire comme un contresens dans l’interprétation de ses évolutions, la question connaît une actualité nouvelle avec la publication de plusieurs ouvrages qui invitent à revenir sur ce débat 1 . Pour certains auteurs, le ghetto ne se rait plus seulement un risque ou une figure repoussoir : une partie des quartiers populaires de banlieue, en dépit des interventions dont ils font l’objet depuis plus de trente ans, aurait évolué en de véritables ghettos. Ce diagnostic reste discuté. La concentration spatiale des difficultés socioéconomiques (échec scolaire, taux de chômage, niveau de pauvreté, isolement, etc. ) ne suffit pas à transformer en ghettos les quartiers qui en souffrent. Le concept renvoie à un phénomène plus singulier, construit de l’extérieur par un 1 VoirnotammentlesouvragesdusociologueDidierLapeyronnie,Ghe t ourbain.Ségrégation,violence,pauvretéenFranceaujourd’hui,Paris,RobertLaffont,2008etdujournalisteLucBronner,Laloidughe t o.Enquêtedanslesbanlieuesfrançaises,Paris, Calmann-Lévy, 2010.