Bérard - La résurrection d’Homère, 1930
151 pages
Français

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Description

La Résurrection d’Homère
Victor Bérard
1e édition, 1930
Premier volume : Au Temps des héros
Deuxième volume : Le Drame épique
Bérard - La résurrection d’Homère, 1930 : 1
La Résurrection d’Homère
Volume 1
Au Temps des héros
Victor Bérard
1e édition, 1930
PRÉFACE
Au printemps de 1888, une rencontre de hasard me mit en présence des héros
homériques. Membre de l’École française d’Athènes, je fouillais en Arcadie les
ruines de Mantinée et recherchais le tombeau d’Épaminondas sur le champ de
bataille voisin ; le Joanne de la Grèce romaine, Pausanias, était mon guide : il
me conduisit sur la colline où les Arcadiens, nous dit-il, plaçaient l’étrange
aventure de Pénélope et du dieu Pan. Il en est résulté pour moi quarante et une
années d’études odysséennes.
De mai 1888 à décembre 1929, — sauf les cinq années de la grande angoisse
(1914-1919), — il est peu de jours où je n’aie pas consacré plusieurs heures à
ces études. J’en ai publié les résultats derniers en douze volumes qui, malgré
leur technologie, ont trouvé des lecteurs, même en dehors des érudits et des
hellénisants.
Dans les trois volumes de l’Odyssée, Poésie homérique, j’ai tâché de donner une
édition
ecritique et une traduction en français du XX siècle de ce texte traditionnel, dont
les trouvailles de manuscrits grecs en Égypte et de monuments préhelléniques
en Crète et en Grèce ont renouvelé la connaissance et doivent renouveler la
compréhension.
Dans les trois volumes de l’Introduction à l’Odyssée, je me suis efforcé ...

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Langue Français
Poids de l'ouvrage 12 Mo

Extrait

La Résurrection d’Homère
Victor Bérard
1e édition, 1930
Premier volume : Au Temps des héros
Deuxième volume : Le Drame épique
Bérard - La résurrection d’Homère, 1930 : 1
La Résurrection d’Homère
Volume 1
Au Temps des héros
Victor Bérard
1e édition, 1930
PRÉFACE
Au printemps de 1888, une rencontre de hasard me mit en présence des héros
homériques. Membre de l’École française d’Athènes, je fouillais en Arcadie les
ruines de Mantinée et recherchais le tombeau d’Épaminondas sur le champ de
bataille voisin ; le Joanne de la Grèce romaine, Pausanias, était mon guide : il
me conduisit sur la colline où les Arcadiens, nous dit-il, plaçaient l’étrange
aventure de Pénélope et du dieu Pan. Il en est résulté pour moi quarante et une
années d’études odysséennes.
De mai 1888 à décembre 1929, — sauf les cinq années de la grande angoisse
(1914-1919), — il est peu de jours où je n’aie pas consacré plusieurs heures à
ces études. J’en ai publié les résultats derniers en douze volumes qui, malgré
leur technologie, ont trouvé des lecteurs, même en dehors des érudits et des
hellénisants.
Dans les trois volumes de l’Odyssée, Poésie homérique, j’ai tâché de donner une
édition
ecritique et une traduction en français du XX siècle de ce texte traditionnel, dont
les trouvailles de manuscrits grecs en Égypte et de monuments préhelléniques
en Crète et en Grèce ont renouvelé la connaissance et doivent renouveler la
compréhension.
Dans les trois volumes de l’Introduction à l’Odyssée, je me suis efforcé de
légitimer, une à une, les nouveautés, plus apparentes que réelles, qui pouvaient
surprendre le lecteur de mon édition et traduction : choix et orthographe des
mots, suppressions et corrections de vers, répartition de la « Poésie » unitaire en
poèmes ou drames séparés et en épisodes dialogués, etc.
Dans les deux volumes des Phéniciens et l’Odyssée, j’ai voulu dresser le tableau
complet de l’histoire et des navigations au Levant, depuis les origines les plus
lointaines jusqu’à l’apparition de ces premiers des Hellènes qui portaient le nomd’Achéens et qui devinrent les héros de l’épopée.
Les Phéniciens tenaient le grand rôle en cette Méditerranée préhellénique :
vassaux ou alliés, courtiers ou correspondants de l’Égypte et de la Chaldée, ces
Sémites de Tyr, de Sidon et de Byblos avaient installé leurs comptoirs et leurs
colonies sur tout le pourtour des îles et des terres égéennes. Leur influence
e eremontait au III , peut-être même au IV millénaire avant J.-C. ; elle fut
souveraine durant le second, de 1600 à 1200 environ. Il est impossible de rien
comprendre aux habitudes, aux techniques et théories, à la vie, à la langue de la
Grèce achéenne, si l’on ne fait pas d’abord la part de ces éducateurs, de leurs
enseignements en toutes matières et de leurs apports en toutes marchandises.
Dans les quatre volumes des Navigations d’Ulysse, j’ai traité de la géographie et
de l’histoire des pays achéens, étudié l’apparition des héros dans les eaux
levantines, leur descente et leur installation en Grèce, leurs royaumes et
principautés de Thessalie, du Péloponnèse et des Iles, leur vie matérielle sur
terre et sur mer, leurs manoirs, leurs flottes, leurs voyages, croisières et aventures
tant sur les côtes civilisées du Levant qu’en cette mer des merveilles et des
monstres, qui s’enfonçait au couchant d’Ithaque et d’où le seul Ulysse était jamais
revenu : étape par étape, j’ai suivi le fils de Laerte chez les Kikones, les
Lotophages, les Cyclopes, les Lestrygons, Circé, les Sirènes, de Charybde en
Skylla et chez Calypso : je l’ai ramené de Calypso à Nausicaa et de Nausicaa à
Pénélope.
On trouvera dans ces douze volumes la preuve détaillée, minutieuse de chacune
de mes assertions. Je crois avoir poussé jusqu’à l’extrême et peut-être au delà le
souci de ne jamais produire mes conclusions sans l’exposé le plus complet de
mes considérants.
Je voudrais aujourd’hui m’adresser au grand public et lui soumettre en une sorte
de résumé mes opinions et conceptions sur les poèmes homériques, tout
particulièrement sur l’Odyssée. J’écarterai tout appareil d’érudition, toute
démonstration et discussion. Je procéderai par affirmations aussi brèves et nettes
que je pourrai les formuler : après quarante années d’analyse, mon maître Fustel
de Coulanges m’aurait concédé cette journée de synthèse.
Nous assistons, depuis vingt ans, à la résurrection d’Homère. L’érudition
egermanique du XIX siècle, mise au service du romantisme, avait dépecé,
esupprimé cet ancêtre de toute notre poésie. La science du XX siècle est en train
d’en rétablir la statue au seuil du temple commun des littératures occidentales.
J’ai connu le temps où le dernier du ridicule pour un homérisant était de croire à
l’existence d’un auteur dont on lisait les ouvrages. On est aujourd’hui le dernier
des ignorants si l’on ose mettre en doute que l’Iliade et l’Odyssée, de leur premier
vers au dernier, ont été rédigées par le Poète aveugle.
Le ridicule et l’ignorance sont, assurément, de grands maux. Il en est de pires :
« Ce qui distingue à jamais l’Hellène du Barbare, disait Hérodote, c’est qu’il fut
toujours raisonnant et dégagé de crédulité sotte ». Les Barbares de l’Epire, — les
prédécesseurs de nos Albanais, — prenaient pour la voix de l’oracle le son de
leurs marmites : « A Dodone, des marmites en grand nombre sont rangées à
côté l’une de l’autre : vient-on à toucher la première, toutes se mettent à résonner
à la suite », ἐν Δοδώνῃ (c’est la seule citation grecque que je ferai en ce volume)
πολλῶν παρ’ ἀλλήλων κειμένων λεϐήτων, εἴ τις ἕνος ἅψεται, φασὶν ἐκ διαδοχῆς
πάντας ἠχεῖν. Je suis allé jadis à Dodone. Mais voici quarante ans que j’en suis
revenu.
Janvier 1930.
I
CALENDRIER HOMÉRIQUE
Depuis un siècle et demi, Homère est en proie à tous les artisans d’histoireancienne et générale, de critique littéraire et philologique, de mythologie,
d’archéologie et même de sociologie : des milliers de dissertations et d’ouvrages
scientifiques ont soulevé la controverse sur chaque épisode, chaque vers, — on
peut dire : chaque mot, — de l’Iliade et de l’Odyssée ; authenticité, longueur et
disposition des épisodes, légitimité et teneur des vers, orthographe et lecture des
mots, vocabulaire et versification, ensemble et détail, fond et forme, il n’est pas un
recoin, pas un abord des deux poèmes homériques, qui ne soit devenu un champ
de fouilles ou de bataille pour les deux écoles d’homérisants que les temps
modernes ont mises aux prises, l’une croyant à l’existence d’Homère, à l’unité et à
la vénérable antiquité de chacun de ses
poèmes, l’autre niant ces deux dogmes de l’ancienne foi.
Tant de travaux ne nous ont rien appris sur l’existence du Poète et l’époque où il
vécut, selon les uns, où il ne fut créé, suivant les autres, que par la fantaisie de ses
soi-disant disciples et descendants. Mais nous pouvons dresser, désormais,
comme en une sorte d’annuaire, la suite des changements par où ses œuvres ont
passé dans les conceptions et l’estime de quelque cent générations.
eX-IX siècles (1000-800) avant J.-C. — Période homérique. Hérodote (II 53)
écrivait vers l’an 450 avant notre ère : « Homère n’a vécu que quatre siècles avant
moi »

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