Haute école de santé Fribourg - Ecole du personnel soignant Hochschule für Gesundheit Freiburg - Krankenpflegeschule Centre de recherche et prestations Forschungs- und Dienstleistungszentrum Route des Cliniques 15, 1700 Fribourg / Freiburg
Conférence de Michel Nadot Le rôle des traditions soignantes dans le développement de la discipline professionnelle infirmière Mesdames, Messieurs, chers collègues, Les ennemis actuels de la raison veulent détruire la tradition de la discipline qui s’impose de penser et de parler de manière claire (Popper 1985). La mise en conformité des systèmes scolaires selon des valeurs ultralibérales réclame des travailleurs performants et des êtres sans mémoire, sans identité, sans racines, (Bugnon, 2004). En conviant par ces citations un épistémologue américain renommé et un professeur fribourgeois, docteur ès Lettres et Essayiste en ouverture de mon exposé, mon intention est de stigmatiser le contexte dans lequel les infirmières et infirmiers d’aujourd’hui sont appelés à délivrer leurs prestations de service. Les systèmes de santé et leurs formations subissent des restructurations, tout ceci dans un contexte instable, habité de contradictions dans lesquelles les représentations symboliques sur les infirmières continuent d’occuper une place de choix. Dans ce contexte, l’innovation côtoie les enjeux scientifiques ou politiques qui accompagnent la société de la connaissance vers laquelle nous allons. Or, nos connaissances fondamentales ou appliquées et les valeurs portées par notre discipline professionnelle semblent être en difficulté pour consolider l’identité de cette dernière. Dès lors, quel rôle jouent nos traditions dans le maintien de l’identité de notre propre discipline, lorsque nous occupons stratégiquement depuis des générations le cœur du système de santé ? D’un point de vue épistémologique, lorsque je parle de traditions au pluriel, je veux mentionner cette culture qui oriente les pratiques de toute communauté professionnelle et qui représente selon la 4 e thèse de Popper (1985, 53), la source à l’évidence la plus importante en qualité comme en quantité, pour notre savoir. J’entends aussi par discipline, ces mêmes pratiques, mais vues alors comme une articulation historiquement ancrées d’éléments composites, pouvant faire sens de manière durable et se constituer comme instance rationnelle de connaissance (Berthelot cité par Vinck, 2000, 74). Donner une définition, rapide j’en conviens, de ce qu’est une discipline ne me semble pas inutile, dans la mesure ou il se trouve encore certaines infirmières, pour douter des contours de leur propre discipline professionnelle. Ce qui ne les empêche pas par ailleurs, peut-être justement par perte des repères liés à la rationalité, de déléguer une partie ou la totalité de leur culture et ceci sans trop de distinctions lorsqu’elles participent à la formation de leurs collègues de travail. Ces collègues sont entraînées périodiquement, notamment ces dix dernières années, dans une division des tâches aux nombreuses étiquettes. Comment distinguer « qui sait quoi », quand il y a autant d’acteurs pour une même discipline ?