Conscience esthétique et expertise : la collaboration entre Dewey et Barnes - article ; n°1 ; vol.14, pg 39-51
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Description

Publics et Musées - Année 1998 - Volume 14 - Numéro 1 - Pages 39-51
La fondation Barnes fut une des expériences pédagogiques les plus originales tentées jusqu'à ce jour, notamment par la collaboration du collectionneur avec un grand philosophe, John Dewey. Sans lui (et le pragmatisme), Barnes n'aurait pas conçu la dimension pédagogique de sa fondation, et sans Barnes (et son approche de l'art), Dewey n'aurait pas développé sa puissante théorie esthétique. Certes la théorie et son application échappent à la contradiction; du moins a-t-elle le mérite de diriger l'attention sur des problèmes habituellement éludés.
La fundación Barnes fue una experimentación pedagocica de las mas interesantes, especialmente por la colaboración entre el coleccionador y el gran filosofo John Dewey. Sin este (y el pragmatismo) Barnes no hubiera sacado la dimensión pedagogica de su fundacion, y sin Barnes, Dewey no hubiera desarollado su teoria estética. No es que la teoria y su aplicación no presentan contradicciones, paro a lo menos, trata problemas que generalmente se eluden.
The Barnes Foundation was one ofthe most original educational experiences up to now, especially because ofthe collectons cooperation with a great philosopher, John Dewey. Without his help and his philosophical System (pragmatism), Barnes would never have conceived the educational dimension of his foundation and, conversely, without Barnes, Dewey would never hâve developed his remarkable theory of aeshetics.
Though the theory as well as its application are not without contradictions, they have the merit of attracting attention to usually neglected problems.
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Dominique Chateau
Conscience esthétique et expertise : la collaboration entre
Dewey et Barnes
In: Publics et Musées. N°14, 1998. pp. 39-51.
Résumé
La fondation Barnes fut une des expériences pédagogiques les plus originales tentées jusqu'à ce jour, notamment par la
collaboration du collectionneur avec un grand philosophe, John Dewey. Sans lui (et le pragmatisme), Barnes n'aurait pas conçu
la dimension pédagogique de sa fondation, et sans Barnes (et son approche de l'art), Dewey n'aurait pas développé sa puissante
théorie esthétique. Certes la théorie et son application échappent à la contradiction; du moins a-t-elle le mérite de diriger
l'attention sur des problèmes habituellement éludés.
Resumen
La fundación Barnes fue una experimentación pedagocica de las mas interesantes, especialmente por la colaboración entre el
coleccionador y el gran filosofo John Dewey. Sin este (y el pragmatismo) Barnes no hubiera sacado la dimensión pedagogica de
su fundacion, y sin Barnes, Dewey no hubiera desarollado su teoria estética. No es que la teoria y su aplicación no presentan
contradicciones, paro a lo menos, trata problemas que generalmente se eluden.
Abstract
The Barnes Foundation was one ofthe most original educational experiences up to now, especially because ofthe collectons
cooperation with a great philosopher, John Dewey. Without his help and his philosophical System (pragmatism), Barnes would
never have conceived the educational dimension of his foundation and, conversely, without Barnes, Dewey would never hâve
developed his remarkable theory of aeshetics.
Though the theory as well as its application are not without contradictions, they have the merit of attracting attention to usually
neglected problems.
Citer ce document / Cite this document :
Chateau Dominique. Conscience esthétique et expertise : la collaboration entre Dewey et Barnes. In: Publics et Musées. N°14,
1998. pp. 39-51.
doi : 10.3406/pumus.1998.1115
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pumus_1164-5385_1998_num_14_1_1115Dominique Château
CONSCIENCE ESTHÉTIQUE ET EXPERTISE :
LA COLLABORATION ENTRE DEWEY ET BARNES
L'idéal est déjà à l'œuvre dans chaque personnalité.
John Dewey
îfugié aux États-Unis, le
roi Shahdov imaginé par
Chaplin (Un roi à New York,
1957) affronte diverses
manifestations du modern
isme. Il visite, notamment,
un établissement d'éducat
ion ultra-moderne: il s'agit
de l'une des nombreuses
écoles Dewey, «et cela n'est
pas le fruit du hasard»
comme le souligne Jean-
Louis Cometti (in Meyer,
1994, p. 417). En effet, la
philosophie pragmatique
telle que l'entend John
Dewey non seulement
revendique d'introduire r
adicalement l'expérience hu
maine concrète dans la
théorie, comme son critère
principal, mais encore induit
un engagement dans la réal
ité — à commencer par la
sphère pédagogique — qui
peut être considéré à la fois
comme une mise à
l'épreuve de cette théorie
en général et comme un
test des propositions parti
culières qu'elle produit.
Évidemment, cela ne va pas sans difficultés. Comme le suggère Paul
Valéry (1973, p. 600), la philosophie de l'expérience doit surmonter une
tendance profonde de la «qui est contraire à l'expérience» —
ce fut là l'obsession de toute une vie pour Dewey. Et, lors même qu'il
affirma avec force que les conflits de la philosophie avec l'expérience
réelle doivent se régler non pas à coup de généralités pragmatiques, mais
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Conscience esthétique et expertise
publics & musées n°14 dans la transaction empirique, sa participation à la vie publique attesta
autant la fragilité de son point de vue que son efficacité pratique. La col
laboration avec le collectionneur Alfred Barnes en fut un exemple part
iculièrement frappant : à la fois une expérimentation pédagogique unique,
conformée aux options intellectuelles, morales et politiques du pragmat
isme selon Dewey, et un puissant révélateur de ses contradictions ou, du
moins, des contradictions que rencontre la philosophie pragmatique
lorsqu'elle prétend s'appliquer.
Alfred C. Barnes, docteur en médecine, non seulement fait fortune
en exploitant dans sa propre compagnie (fondée en 1908) l'Argyrol — un
médicament destiné au traitement de certaines maladies oculaires —
mais, séduit par le pragmatisme, décide d'appliquer cette philosophie
dans l'organisation et la vie de sa petite entreprise: il inaugure de nouv
elles formes de gestion, structure le travail selon un principe coopératif
— chaque employé doit s'adapter à la tâche commune en élaborant ses
propres méthodes — et propose aux employés, à l'heure de la pause, de
participer à des groupes de réflexion sur les textes de W. James, J. Dewey
et divers autres auteurs. On retrouve dans cette généralisation du pragmat
isme à tous les paramètres socio-culturels — organisation du travail, rela
tions interpersonnelles, éducation, etc. — une caractéristique de cette
philosophie, et singulièrement de la version qu'en donne Dewey.
Ultérieurement, Barnes se libère de son entreprise et emploie sa for
tune à l'édification d'un sanctuaire de l'art moderne, la fameuse fondation
définie en 1925 non point comme un simple musée, bien qu'il s'agisse
d'abriter l'une des plus grandes collections du monde, mais comme une
véritable institution éducative — sa finalité explicite est de «promouvoir
le progrès de l'éducation et de l'appréciation des beaux-arts» (Greenfield,
1987, p. 86). Barnes ne se contente pas, en effet, d'accroître sa collection
au fil de ses voyages en France et en Europe ; il réalise une sorte de phal
anstère, un cercle fermé sur lui-même et fondé sur des règles rigides (y
compris alimentaires) où est censé pouvoir s'expérimenter le principe du
libre épanouissement des individus, à l'écart des institutions sociales, à
commencer par les institutions artistiques.
L'intérêt de Barnes pour l'art remonte à 1910. Sous l'influence de son
ami, le peintre William J. Glackens, il commence une collection de pein
ture française et se met à étudier «scientifiquement» les toiles, partageant
ses découvertes avec les employés de son entreprise. En 1915, il
embauche un ancien élève de Dewey, Laurence Buermeyer, qui l'aide à
mener à bien l'explicitation de la pensée de James et l'oriente vers le
séminaire de Dewey à l'université Columbia ; il s'y rend, assiste à la série
des cours du philosophe et sympathise avec lui. Dewey nourrit l'ambition
théorique de Barnes; en retour, Barnes initie Dewey à l'art1.
Barnes identifie chez Dewey une philosophie congruente avec ses
convictions. L'un des textes-phares de la réflexion initiée par le collec
tionneur dans son entreprise était How We Think, un livre de vulgarisa
tion adressé aux instituteurs, qui repose sur l'idée que «l'attitude naturelle
et pure de l'enfance, marquée par une curiosité ardente, une imagination
fertile et l'attrait pour la recherche expérimentale, est proche, très proche,
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Conscience esthétique et expertise
publics & musées n°14 l'attitude de l'esprit scientifique. » (Dewey, 1910). Le docteur en médecde
ine est évidemment prédisposé à s'inscrire dans cette perspective où le
processus éducatif est assimilé à la démarche scientifique et où celle-ci
fonctionne comme modèle de pensée et d'action (dans l'optique pragmat
ique pensée et action se renvoient mutuellement: la pensée est de
l'action potentielle et elle se juge dans l'action).
Le collectionneur conçoit également un vif intérêt envers la pensée
politique de Dewey, notamment dans Democracy and Education (1916)
où ce dernier expose le type d'éducation convenant, à ses yeux, à une
société démocratique du vingtième siècle, en relation avec les principes
des sciences biologiques et psychologiques. C'est dans ce livre qu'il déve
loppe la critique des dualismes (homme /nature, esprit /corps, théorie/
pratique, individu /société, etc.) qui reviendra de manière obsédante
dans sa théorie esthétique; en p

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