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Histoire turque et ottomane

M. Gilles V, professeur

COURS:Les « esclaves de la Porte» ottomane. I. Introduction

Durant une longue partie de l’histoire de l’Empire ottoman – en gros de la fin du
ee
 audébut dusiècle –, de hautes fonctions de l’Etat ( mais non pas toutes)
et lapartie laplus renommée des forces militaires (mais non latotalité, ni même le
plus grand nombre de ces dernières) sont occupées non par des sujets libres du
sultan, mais par des esclaves de ce dernier.Ils sont désignés comme les « esclaves de
la Porte» (kapı kulları) ou les «esclaves du souverain »(hünkar kulları). Ce
phénomèneafrappé les observateurs occidentauxcontemporains quiyontvu une
spécificité de l’empire turc,àlafois repoussoir et objet de fascination.Les peuples
conquis dont ces esclaves étaient issus pour une grande partyreconnaîtront
rétrospectivement l’une des manifestations les plus odieuses du « joug ottoman ».

Desréactionsaussivives ont pu donner naissanceàdes déformations historiques
et il paraît utile de reprendre cette question, bien qu’elleait déjàbeaucoup retenu
l’attention des historiens.Ces derniers, en effet, nous semblent en être restésàdes
notions trop générales et encore limitées.Un examenattentif des sources ottomanes
disponibles dont certaines sont demeurées jusqu’ici entièrement inédites –
notamment ces registres dedevchirme, c’est-à-dire de levées de jeunes garçons
chrétiens destinésàdevenir des esclaves du sultan, dont quelques exemplaires ont
subsisté – permettrade mieuxconnaître lanature et le fonctionnement des
institutions liéesàcette pratique, et d’enapprécier plus précisément lasignification
et laportée.Les modalités de recrutement et de formation de ce personnel et les
usages que l’Etat en fait nous intéresseront particulièrement.Nos recherches sur ce
point prendront place dans un projet de l’International Institute ofSocial History
(Amsterdam), dirigé par leProfesseurE.-J.Zürcher (Leyde) :Fighting fora living.
Origins, practices and consequences of differentforms of militaryemploymentin
Europe,the Middle Eastand Asia(1500-2000).

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GILLESVEINSTEIN

Dansquelle mesure ces « esclaves de la Porte» sont-ils des esclavesstrictosensu,
par rapportau statut servile tel que le définit le droit musulman ?Quelles sont les
continuités et les spécificités de l’esclavage militaire et plus largement
« gouvernemental »(R.Brunschvig) ottoman, par rapportauxprécédents
discernables dans l’histoire desEtats musulmans dont lesOttomans sontàbien
des éga?rds les héritiersQuelle est laplace des troupes de statut servile dans
l’ensemble des forces de l’Etat ottoman qu’onvoit, dans laseconde moitié du
e
siècle, mettre en place une multiplicité d’institutions militaires reposant sur
des principesvariés,apparaissant commeautant d’expériences pour concilier les
besoins militairesavec les ressources disponibles, en richesses et en hommes ?Voilà
autant de questions récurrentes liéesànotre thème.Pouryrépondre, il est
nécessaire de disposer de référents et de points de comparaison.Les misesau point
nécessaires sur ces sujets ont occupé le cours de cetteannée.

Homme libre, esclave, esclave « gouvernemental »
L’islam, comme d’ailleurs lesautres grandes religions,areconnu l’esclavage et les
juristes des différentes écoles ont défini le statut de l’esclaveàtravers un ensemble de
dispositions ; beaucoup d’entre ellesassimilent l’esclaveàun objet ou unanimal ;
d’autres mettentau contraire enavant son humanité.L’affranchissement est
recommandéau maître comme une bonneaction, et les modalités en sont fixées.Un
lien subsisteracependant entre l’affranchi et son maître,voire les descendants de ce
dernier.C’est un point de grande conséquence sociale et même politique dans le cas
des esclaves gouvernementaux.D’une manière générale, le statut et lacondition de
l’esclave en islam sont très semblablesàceuxde l’Antiquité gréco-romaine.Ces
dispositions du droit musulman classique restent, bien entendu, envigueuràl’époque
ottomane ; c’est laversion hanéfite de ces dispositions qui faitautorité, le hanéfisme
étant l’école officielle de l’Etat ottoman.Toutefois, laterminologie ottomane relative
auxesclaves présenteraquelques particularités, par rapportàses précédents
islamiques : si les termes consacrés pour désigner les esclaves, tels que‘abd, mamlûk,
esîr, ghulâmet, pour les femmes,djâriye, restent usités, d’autresappellations seront
également mises enavant :kuloukölepour les hommes;oglanpour les jeunes
garçons.On trouveraencore un équivalent persan plus recherché :bende.

Parmi toutes les dispositions relativesau statut servile, nousavonsattiré
particulièrement l’attention sur celles qui seront de conséquence dans l’appréhension
de lasituation des esclaves gouvernementaux: par exemple, un musulman libre ne
peut être réduit en esclavage ; le maître peut disposer des biens se trouvant entre
les mains de son esclave ;un esclave enfant ne peut être séparé de samèreavant
l’âge de septans.D’autres dispositions en revanchevont clairementàl’encontre
de ce que nous savons de lasituation des esclaves étatiques, notamment chezles
Ottomans : par exemple, leszimmî(sujets non musulmans protégés du sultan) ne
peuvent être réduits en esclavage ;toutes fonctions d’autorité publique ou privée
sont interditesàl’esclave.R.Brunschvig écrivaitàce propos dans l’Encyclopédie de
l’islam: «l’esclave n’est pas plusapteàoccuper une magistrature religieuse (par

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