Idéologie et plastique. I : L expression des énergies divines dans le monnayage des Grecs - article ; n°1 ; vol.71, pg 65-106
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Idéologie et plastique. I : L'expression des énergies divines dans le monnayage des Grecs - article ; n°1 ; vol.71, pg 65-106

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Mélanges d'archéologie et d'histoire - Année 1959 - Volume 71 - Numéro 1 - Pages 65-106
42 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1959
Nombre de lectures 20
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

J. Bayet
Idéologie et plastique. I : L'expression des énergies divines dans
le monnayage des Grecs
In: Mélanges d'archéologie et d'histoire T. 71, 1959. pp. 65-106.
Citer ce document / Cite this document :
Bayet J. Idéologie et plastique. I : L'expression des énergies divines dans le monnayage des Grecs. In: Mélanges d'archéologie
et d'histoire T. 71, 1959. pp. 65-106.
doi : 10.3406/mefr.1959.7443
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-4874_1959_num_71_1_7443IDÉOLOGIE ET PLASTIQUE
ι
L'EXPRESSION DES ÉNERGIES DIVINES
DANS LE MONNAYAGE DES GRECS
PAR
M. Jean Bayet
Ancien membre de l'École
II y a beau temps que l'histoire des religions ne compte plus
ce qu'elle doit à l'archéologie; moins reconnu est l'apport de
la phénoménologie religieuse aux recherches proprement archéo
logiques. Il nous a semblé que, sur ce dernier plan, l'interprétation
de certaines monnaies grecques des νΐθ et ve siècles — dont les
plus instructives sont de Caulônia, dans le Bruttium — permettait
de préciser quelques aspects du développement de la plastique chez
les Hellènes, en concordance ou en opposition avec des idéologies
religieuses très archaïques.
Pour ce genre d'enquête, les représentations monétaires offrent
des avantages exceptionnels : d'indubitable intention religieuse
pour la plupart, et nécessairement influencées par la grande sculp
ture (elle-même, en ces temps anciens, de caractère sacré ou votif),
elles sont plus propres qu'elle à enrichir de détails explicatifs
l'image principale, et l'habileté précoce des graveurs de coins se
complaît volontiers à ces minuties ; au surplus, le caractère
poliade de ces effigies en garantit la conformité à une mentalité
populaire commune ; et la multiplication des émissions, due à
des nécessités techniques, nous permet de suivre de très près
Mélanges d'Arch. et d'Oui. 1969. 6 J. ΒΑΥΕΤ 66
l'évolution conjointe des croyances et de leurs figures sen
sibles.
Fixation idolâtrique des puissances du monde
Une vue séduisante propose comme éléments formateurs de
la plastique grecque une synthèse du « polysymbolisme minoen »
et de V « aniconisme post-néolithique »x : d'une part, la révérence
à une foule d'objets, armes, arbres, animaux, accompagnant
ou non des figures divines anthropomorphes ; de l'autre, le rel
igieux respect de pierres brutes dressées, vocation au pilier stabi
lisateur, aux caryatides ou atlantes, aux raides idoles que nous
appelons « xoana ». Mais ce n'est là qu'une approximation péda
gogique, détachée des réalités psychologiques et sociales, et dont
la vertu est toute formelle. L'évolution grecque ne combine pas
consciemment deux passés aussi différents ; elle suit sa courbe
phénoménologique propre (comme l'avait fait, avant elle, la rel
igion minoenne), réalisant aux différents stades de ce développe
ment des équilibres humano-divins, dont les analogues s'étaient ren
contrés ou devaient se rencontrer dans la suite historique d'autres
religions. Quant à parler d' « aniconisme » ou de « polysymbolisme»,
gardons que les mots ne simplifient arbitrairement des situations
complexes. L'aniconisme, en une population et à une date données,
peut être impuissance non de l'imagination, mais de l'exécution
matérielle d'une image anthropomorphe : ainsi en est-il au temps
d'Homère ; et les Celto-Ligures d'Entremont se représentaient
nettement leurs « héros » assis « en tailleur » bien avant qu'à
l'école des Grecs ils pussent en tailler l'originale image dans la
pierre. Quant à l'expression « polysymbolisme », elle peut soit r
ecouvrir le simple étalage d'attributs divins (pour ainsi dire la
garde-robe d'une idole), qui sont de valeur magique, soit suggérer
1 Ch. Picard, Manuel d'archéologie grecque : la sculpture, I (Paris,
1935), p. 46-50. ÉNERGIES DIVINES ET PLASTIQUE GRECQUE 67
que tel objet signifie ou évoque la divinité, ce qui est un effort
d'abstraction de valeur spirituelle.
On gagnera plus de certitude à partir du principe phénomén
ologique de la religion : « Toute chose peut porter une puissance
[ou énergie ou « mana »] et, pour cette raison, être adorée ; toute
partie du corps en détient une, même [ou surtout] les excréments 1. »
Les dévotions à telle pierre, telle grotte, tel arbre, se perpétuent
jusqu'à la fin de l'Antiquité 2, et au delà. De la puissance mystér
ieuse d'un végétal la croissance suffit à être garante ; sans parler
de la fructification, dont les rites religieux ne font que généraliser
les bienfaits8. Celle des animaux est à la fois plus inquiétante
et plus « divine », du fait de leur mobilité qui les rapproche et
soudain les rend invisibles, de leur sensibilité qui les mêle aux
passions humaines, de leur force ou de leur vitesse, qui les vouent
à être les maîtres ou les conducteurs des hommes, ou les rivaux
dont il importe de s'approprier les vertus (par consommation
ou déguisement -mascarade) : en plein âge classique, chez les Grecs,
la croyance au déterminisme des présages donnés par les animaux
(les oiseaux en particulier) atteste la durée de cet état de sensi
bilité4. Quant aux outils, et spécialement les armes, ils sont aussi
1 G. van der Leeuw, La religion dans son essence et ses manifestations :
Phénoménologie de la religion (Paris, 1955), p. 29 (cf. Tertullien, Idol.,
4 : Omnia igitur colit humanus error, praeter ipsum omnium conditorem.
On connaît la valeur magique de la salive, le « dieu » romain Stercutus. . .) .
— Ces aspects archaïques et ceux que nous évoquerons par la suite
sont généralement reconnus sous des aspects plus ou moins nets dans
les religions grecque et romaine : voir par exemple Martin P. Nilsson,
Gesch. der griech. Rel.,.1* (1955), passim ; Fr. Taeger, Charisma : Studien
zur Gesch. des antiken Herrscherkultes (Stuttgart, 1957), p. 21-28.
2 Tib., I, 1, 11 s. ; Ovid., F., II, 641 s. ; Apul., Flor., 1 ; — Arnob.,
Adu. Gentes, I, 39 (cf. VI, 11-12 [ex Clement. Protrept.]).
8 Cf. l'épigramme grecque de Γείρεσιώνη (rameau consacré par des
bandelettes) fructiflcatrice : A. Dieterich, Kl. Sehr. (1911), p. 324 ss.
(citée par G. van der Leeuw, o. L, p. 95) .
* J. Bayet, Présages figuratifs déterminants dans V antiquité gréco-
latine {Mélanges Fr. Cumont, I, Bruxelles, 1937). — Sur les « dieux » J. BAYET 68
considérés comme animés : à cause de leur efficacité, même famil
ière, à plus forte raison héroïque 1. L'épopée et la tragédie grecques
gardent souvenir de l'arc et des flèches d'Héraclès, de la lance
d'Achille, du bouclier d'Ajax, « armes-fées » ; les Romains vénèrent
Yancüe et guettent le mouvement spontané des lances de Mars dans
la Regia ; religion ou légende magnifient le trident, le caducée, le
trépied 2, la porte, le four : témoignages, là encore, de persistance.
Dans ces conditions, nous sommes autorisé à formuler une solu
tion religieusement unique du problème herméneutique posé par
les plus anciennes monnaies incuses de Grande-Grèce (vers 530-
510 av. J.-C). Ces grandioses effigies, l'épi de Métaponte, le tau
reau de Sybaris, le trépied de Crotone (PI. I, fig. 1), ont été inter-
thériomorphes en général, voir là note bibliographique de St. Pease,
dans sa récente édition du De natura deorum de Cicéron (I, 43), p. 289-
291 (Cambridge, Mass., 1955).
1 Deux référencés suffiront, notables par leur éloignement dans le
temps et l'espace : le sceptre égyptien muni de bras, qui lui permettent
en particulier de maîtriser un scorpion monstrueux, en reliefs sur
des stèles-fausses portes de la pyramide à degrés de Saqqarah (J.-Ph.
Lauer, dans Mon. Piot., XLIX, 1957, p. 1-15 : pi. II, 1-2 ; fig. 10-11) ;
les coupes-encensoirs des Indiens Lacandons (Mayas), à masque divin
(du Soleil en particulier) et auxquelles on offrait des bouillies de maïs
(J. Soustelle, dans Histoire générale des Religions, I, Paris, A. Quillet,
1948, p. 179-181, et flg.). — Sur le stade de pensée où la puissance
propre des objets domestiques

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