La correspondance de Theodor Mommsen avec les savants français - article ; n°1 ; vol.8, pg 48-58
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Description

Mil neuf cent - Année 1990 - Volume 8 - Numéro 1 - Pages 48-58
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 19
Langue Français

Extrait

Dominique Bourel
La correspondance de Theodor Mommsen avec les savants
français
In: Mil neuf cent, N°8, 1990. pp. 48-58.
Citer ce document / Cite this document :
Bourel Dominique. La correspondance de Theodor Mommsen avec les savants français. In: Mil neuf cent, N°8, 1990. pp. 48-58.
doi : 10.3406/mcm.1990.1012
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mcm_1146-1225_1990_num_8_1_1012La correspondance
de Theodor Mommsen
avec les savants français
DOMINIQUE BOUREL
Je me rappelle que quand j'avais vingt ans, c'était un jeu de
répondre à un questionnaire dont une des formules portait :
« 5/ vous pouviez choisir votre destinée, quel homme vou-
driez-vous être ? » Je répondais simplement : Théodore
Mommsen *.
Cette trop rapide présentation de l'énorme correspondance de
Mommsen ne concerne qu'une petite partie de ses lettres adres
sées à des Français. Nous donnerons quelques dates de la vie de
ce grand savant, évoquerons la correspondance très peu exploitée
puis présenterons quelques destinataires de ces lettres.
Theodor Mommsen 2 est l'archétype du savant allemand dont
la carrière impeccable mène jusqu'au prix Nobel ! Latiniste,
1. Sauf indication contraire, toutes les citations viennent du
Nachlass Mommsen de la Deutsche Staatsbibliothek, Berlin (RDA) .
Je remercie beaucoup le Dr U. Winter de la Handschrif ten-Abtei-
lung pour son hospitalité répétée ainsi que la fondation Alexander
von Humboldt qui, depuis longtemps, m'aide dans mes recherches ;
ces dernières doivent tout à la RCP 845 du CNRS dirigée par
Michael Werner et Michel Espagne sur les « transferts culturels
entre la France et l'Allemagne ».
2. L'ouvrage de référence sur les débuts de la vie de Mommsen
(il s'arrête à sa venue à Berlin mais compte déjà quatre volumes !)
est celui de Lothar Wickert, Theodor Mommsen. Eine Biographie,
Frankfurt a. M., 1959-1980. Voir l'élégante synthèse d'Alexander
Demandt, « Mommsen in Berlin », in : Wolfgang Treue und Karl-
fried Grunder (Hg.), Wissenschaftspolitik in Berlin, Berlin, 1987,
pp. 149-173.
48 éditeur, manager de la science, professeur, académicien, juriste,
son originalité réside dans son engagement politique, assez rare
dans la profession, et qui tranche sur la notion d'intellectuel apo
litique forgée par Thomas Mann. Né en 1817, étudiant à Kiel,
docteur de l'université de Breslau, il enseigne à Leipzig, Zurich
et Berlin. Elu à l'Académie des Sciences en 1857, professeur en
1858, les mille cinq cent treize entrées de sa bibliographie laissent
dans la stupeur, alliant notes, articles et ouvrages en plusieurs
volumes. Secrétaire de l'Académie de Prusse entre 1874 et 1895,
il met en place le Corpus Inscriptionum Latinarwn qu'il dirigera
après 1853, la revue Hermes (1866 sq.), collabore au Corpus In
scriptionum Graecarum, joue un rôle central dans la naissance du
Deutsches Archâologisches Institut de Rome puis de la Romisch-
germanische Kommission, sans oublier la commission des Monu-
menta Germaniae Historica. Enfin son édition du Corpus Juris
Civilis et du Codex Theodosianus fait toujours autorité. C'est
donc un savant d'exception doublé d'un génie de l'organisation
au service de la Wissenschaft en Prusse — la Science fait partie
de l'arsenal dont dispose la nation pour se régénérer après la
défaite napoléonienne et unifier l'Allemagne 3. Député au Landt
ag de Prusse entre 1863-1866 et 1873-1879, il est aussi élu au
Reichstag, 1881-1884. Il n'hésite pas à rompre des lances avec
Heinrich Treitschke afin de défendre les juifs et le judaïsme. Il ne
mâchera d'ailleurs pas non plus ses mots lors de ses altercations
avec des Français. Il meurt en 1903, prix Nobel de littérature en
1902. C'est donc un véritable monstre sacré qui domine le monde
des sciences historiques et philologiques en Europe pendant une
moitié de siècle. Savant, politique, grand organisateur de projets
de plusieurs dizaines de volumes, sa correspondance permet de
saisir toute cette activité.
Classée par ordre alphabétique — avec un catalogue manusc
rit — , la plus grande partie est à la Deutsche Staatsbibliothck
de Berlin en RDA. Mais il faut naturellement, comme toujours,
3. Parmi les ouvrages traduits, Histoire de la monnaie romaine,
Paris, 1865-1875, quatre volumes, vient d'être réédité chez A.
Forni. Le gigantesque Manuel des antiquités romaines, Paris, 1887-
1907, dix-neuf volumes (où on trouve Le droit public romain et Le
droit pénal romain. Son Histoire romaine a été plusieurs fois réédit
ée, la plus récente avec une introduction de Claude Nicolet) . Voir
aussi la superbe préface de Yann Thomas, « Mommsen et l'Iso-
lierung du droit » dans la réédition (Paris, 1984) du Droit public
romain, pp. 1-52.
49 faire des sondages dans la totalité des bibliothèques européennes
et même au-delà afin d'avoir au moins un ordre d'idée de la
masse de ces lettres. Ce travail n'a pas encore été fait ! Corres
pondance d'abord d'un savant, d'un érudit, truffée de citations,
de conjectures, elle est aussi le lieu par excellence de la réfexion
sur la science, les hommes, la politique, la situation internatio
nale. Il faudra donc une équipe vraiment pluridisciplinaire pour
l'estimer à sa valeur. Ensuite seulement viendront les décisions
de publication, d'abord d'un catalogue, puis de Regesten, et enfin
des morceaux les plus topiques. Beaucoup lui demandent des
conseils, soumettent des hypothèses, se racontent, et tout n'a donc
pas le même intérêt pour l'épigraphiste ou l'historien de la
Prusse. Quelques-uns des échanges sont déjà édités, comme ceux
— on ne s'en étonnera pas — avec Ulrich von Wilamowitz-Moel-
lendorf 4, autre grande figure de l'érudition allemande et dont les
rapports avec la France ont fait l'objet d'un superbe article
récent 5. De même la correspondance avec Camille Jullian 6. En
effet, parmi les milliers de lettres écrites et reçues, c'est la France
qui se trouve, de loin, la plus représentée des nations étrangères 7.
Il est vrai qu'il s'est rendu souvent en France, dès 1844. Il en
parle et en écrit parfaitement la langue8. Son premier prix à
l'Académie des inscriptions et belles-lettres date de 1850 ; il ob
tient la Légion d'honneur en 1860 et vient plusieurs fois travail
ler à la Bibliothèque nationale (1866, 1884, 1889), laissant même
sa fille à Paris pour quelques mois en 1889. Il est évident que la
guerre franco-prussienne divisera profondément les deux mondes
scientifiques. Il sera même radié de la Société nationale des anti-
4. Il était son gendre. F. und D. Hiller von Gaetringen (Hg.),
Mommsen und Wilamowitz. Briefwechsel 1872-1903, Einl. yon
E. Schwartz, Berlin, 1935 ; Jiirgen Malitz, « Nachlese zum Brief
wechsel Mommsen-Wilamowitz », Quaderni di storia, 17, 1983,
pp. 123-150.
5. Jean Bollack, « M. De W.-M. (en France) . Sur les limites de
l'implantation d'une science », in : William Calder III et alii (Hg.),
Wilamowitz nach 50 Jahren, Darmstadt, 1985, pp. 468-512.
6. Olivier Motte, « Camille Jullian, élève de Mommsen à l'uni
versité de Berlin », lus Commune, 1980, pp. 315-453, et sa thèse
Camille Jullian. Les années de formation (1880-1890), Paris I,
1983, dactyl. ; Lothar Wickert, Theodor Mommsen - Otto Jahn.
Briefwechsel 1842-1868, Frankfurt a. M., 1962.
7. Dominique Bourel, « René Cagnat et Theodor Mommsen »,
in : Marcel Le Glay (éd.) , et l'Année épigraphique,
Paris, 1990.
8. T. Mommsen, Tagebuch der franzôsisch-italienischen Reise
18é4-1845, hg. von G. und B.Walser, Frankfurt a. M., 1976.
50 quaires de France. Sa malheureuse « Lettre aux Italiens » avait
blessé inutilement ses collègues d'outre-Rhin et retardé son élec
tion comme associé étranger à l'Académie des inscriptions 9, qui
n'interviendra qu'en 1895 ! Ces lettres, dont nous donnons quel
ques extraits, renseignent sur la traduction de ses livres, la récep
tion de son œuvre en France. Puis sa relation avec Renan montre
la hauteur que peut prendre un échange épistolaire ; mais avec le
père Duchesne l'humour n'est pas absent de missives pourtant
assez austères !
Le Lyonnais Auguste Allmer10 — qui

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