La dictée de Diane Peylin

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• Publié par: NRCO
• Publié le: 28 novembre 2016
• Nombre de lectures: 311
• Langue: Français

Extrait

Dictée écrite par Diane Peylin pour l'IUT d'Issoudun

C'est ici que les hommes vivent

C'est une scène.

Carré noir pour nuits blanches, pour la musique et le tempo, le corps et le danseur, le poète et ses échos. C'est une scène. Avec un rideau rouge.

Cube intemporel où respirent les âmes. Pour murmurer ou crier. Pour que les mots se vivent et s'échappent par les coulisses, la salle, les grandes portes. Pour résonner dehors.

Dehors.

C'est une scène. Sans rideau rouge. Ouverte et sans limite. Comme un désert, une mer, où l'horizon n'est qu'un trait dans l'infinité. Sur cette scène du dehors, où il n'y a ni estrade ni fauteuil d'orchestre, les drames de la vie se succèdent sans entracte, sans souffleur. Le sang est bien réel et les corps avec les cœurs dedans aussi. Les corps avec les cœurs dedans marchent sur les trottoirs, dans les rues, le long des quais, dans les couloirs, sur les ponts, sur le sable, les graviers ou le bitume.

Dehors.

Les silhouettes se croisent et se frôlent dans une immense chorégraphie. Les voix se mêlent et s'harmonisent dans une chorale universelle. Les regards se cherchent et s'évitent, s'évitent et se cherchent dans un

insensé dialogue.

Dehors, une scène.

Brouhaha immense où les pouls palpitent à la recherche de l'ultime frisson. Regardez! Il y a cette femme au chapeau qui rencontre cet homme au pas mal assuré, cette fillette qui tire sur la robe de sa mère, ce cycliste qui passe entre ces deux voitures serrées, ce garçon qui marche de travers avec son ballon contre son ventre, ce chien qui avance et se gratte, avance et se gratte, avance et se gratte, cette adolescente aux baskets roses et au casque rose et ce vieillard qui regarde tout cela, immobile. Ce vieillard, spectateur invisible du dehors.

Dehors, une scène. Sans rideau rouge.

Musiciens, danseurs, comédiens, illusionnistes, chanteurs, humoristes, ils sont tous là, avec ou sans costume, discrets ou outrageusement maquillés, bruyants, sauvages, dociles, silencieux, insolents,lumineux, farouches, provocants, sombres, déterminés… Visages aux multiples facettes, ils occupent les places et les rues. Les cités et les immeubles. Les montagnes et les plaines. Ils occupent le monde. Les gens occupent le monde. Les passant ne font que passer et pourtant leurs traces s'infiltrent dans les interstices et marquent le temps. Leurs empreintes dessinent dans l'espace des arabesques. Comme des tableaux. Des scènes.

Dehors, une scène. Sans rideau rouge. Valse lente sans demi-mesure où les grands cherchent à mener les petits. Tango sensuel et chatoyant aux multiples rebondissements. Le rythme n'est jamais le même, il change d'accord jour et nuit, saison après saison, lune après lune.

Un regard, un rire, une étreinte suffisent à ce que la magie opère. Que le spectacle commence! Maintenant! Car il n'y a qu'une seule vie et que la scène est immense. À chacun d'y trouver sa place pour que le show soit grandiose.

Dehors, une scène. Sans rideau rouge. C'est ici que les hommes vivent.