La formation des partis uniques africains - article ; n°1 ; vol.2, pg 51-94
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Description

Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée - Année 1966 - Volume 2 - Numéro 1 - Pages 51-94
44 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1966
Nombre de lectures 11
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Odile Debbasch
La formation des partis uniques africains
In: Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée, N°2, 1966. pp. 51-94.
Citer ce document / Cite this document :
Debbasch Odile. La formation des partis uniques africains. In: Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée, N°2, 1966.
pp. 51-94.
doi : 10.3406/remmm.1966.930
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remmm_0035-1474_1966_num_2_1_930LA FORMATION DES PARTIS UNIQUES AFRICAINS
La formation du parti unique apparaît comme un phénomène gé
néral en Afrique. L'analyse des causes de cette formation intéresse
évidemment l'observateur de la vie politique africaine. C'est en effet,
en étudiant les causes de constitution des partis uniques africains
que l'on peut situer exactement ce parti et ses chances de survie.
Est-il dû simplement à des contingences ? Est-il au contraire le résul
tat d'une action délibérée des chefs africains ? En réalité, les causes
historiques semblent jouer un rôle prédominant tandis que la doc
trine, appuyée sur des facteurs sociologiques, n'a eu qu'une fonction
seconde.
I. — LES FACTEURS HISTORIQUES
Certains facteurs rencontrés par tous les pays africains ont con
tribué avec énergie à la constitution de fronts partisans uniques; les
causes historiques ont été évidemment prédominantes : la décoloni
sation avec les épreuves qu'elle a entraînées pour les nationalistes a
favorisé leur regroupement. Elle a en même temps servi à l'ascension
d'un leader qui a pris en charge le mouvement national.
1°) PARTI UNIQUE ET DÉCOLONISATION
La décolonisation ne peut, en elle-même, que marquer profondé
ment les partis politiques. Même lorsque les titres du colonisateur
ne sont pas encore contestés, celui-ci se sent obligé de contrôler ou
même de s'assujettir les partis politiques locaux. Il tente de les façon
ner de manière à ce qu'ils représentent tous l'idéal d'unité avec la 52 ODILE DEBBASCH
métropole. Au stade de la colonisation incontestée, une seule ten
dance peut être reconnue; un seul parti peut être légitime, celui qui
défend la politique du colonisateur. L'unité d'expression politique
de la masse autochtone, conditionnée par le colonisateur, s'impose
alors. • ' .
Lorsque se font jour, dans l'Afrique dépendante, des désirs d'au
tonomie, puis d'indépendance, on va retrouver le même phénomène
d'unité non plus conçu au bénéfice du colonisateur mais à son détri
ment. Les leaders des mouvements de décolonisation se rendent compte,
en effet, que l'unité est la condition de leur succès dans l'épreuve qui
s'engage. Comment réussir à extirper la présence coloniale sans serrer
les rangs ? Le phénomène du parti unique apparaît alors étroitement
conditionné par la phase décolonisatrice. Tout au long du passage du
stade de l'administration coloniale à celui de l'indépendance, on cons
tate les mêmes rassemblements de mouvements jusqu'alors rivaux
ou émiettés. On perçoit que, progressivement, ils sentent ce qui les
unit — la lutte contre le colonisateur — beaucoup plus que ce qui
les divise. Aucune entreprise autre que la décolonisation ne conduit
sans doute un peuple à oublier davantage ses contradictions et ses
divergences. Le phénomène de regroupement des partis produit par
la décolonisation, lui-même absolument général, est év
idemment susceptible de degrés. Plus la décolonisation sera dure et
longue, plus l'unité sera affirmée. Plus la se déroulera
de manière pacifique et rapide, moins les tendances au regroupement
auront l'occasion de s'épanouir. Décolonisation pacifique et décolo
nisation violente sont les deux variables qui commanderont la plus
ou moins grande division, le regroupement plus ou moins réel.
Mais il faut éviter de voir là autre chose que des tendances pou
vant être mises en échec par d'autres facteurs : la décolonisation paci
fique ne conduit pas inéluctablement au multipartisme et la décoloni
sation violente n'entraîne pas en toute hypothèse l'existence d'un seul
parti. La classification présentée est toute relative et, à ce titre, il
n'est pas faux d'affirmer que les modalités du processus d'indépen
dance interviennent sur le nombre des partis.
La décolonisation pacifique
II y a des décolonisations à dominante pacifique et le cas de
l'Afrique noire illustre bien cette hypothèse. Cette forme de décolo- FORMATION DES PARTIS UNIQUES AFRICAINS 53
nisation se réalise lorsque le colonisateur accepte, dès l'abord, un
certain dialogue avec les élites locales. Elle implique un
usage de la liberté d'expression. Lorsque les oppositions peuvent
s'affirmer au grand jour, elles se font moins virulentes et le meilleur
moyen de favoriser cette liberté d'expression est d'accorder à l'élite
locale un droit de représentation dans des assemblées politiques.
La décolonisation « parlementaire » est sans aucun doute celle
qui contribue le moins à la formation d'un parti unique. Il n'y a, en
cela, rien qui puisse étonner. En effet, la France a offert sa tribune
aux élites politiques africaines et, du fait de l'extrême division parti
sane de son Parlement, les a conduites à s'intégrer dans un système
de multipartisme, à observer son maniement, à profiter des ressources
de son utilisation. D'autre part, instruits à l'école du Parlement fran
çais, les partis africains vont appliquer chez eux cet exemple. Ils
vont se souvenir des leçons du multipartisme qui, d'un côté, leur a
dévoilé des possibilités d'action, d'intervention et, d'un autre côté,
leur paraît seul compatible avec l'idéal de démocratie libérale dont
ils ont acquis le goût. En 1946, les élus africains ne sont pas encore
appelés à gérer leurs propres affaires. Cependant, ils sont invités à
participer à la gestion des affaires communes parmi les élus métrop
olitains. Il apparaît qu'à ce moment, les députés africains s'adonnent
plus à la recherche d'une stratégie parlementaire qu'à celle d'une
véritable opinion politique.
En ce qui concerne l'opinion, ils ne manifestent aucun natio
nalisme tranché. Ils n'expriment pas une idée originale, proprement
africaine. Ils ne forment pas un parti africain appelé à jouer un rôle
au sein d'une assemblée politique multipartisane. Au contraire, ils se
répartissent, presque selon le hasard, entre les trois grands partis po
litiques français de l'époque : P. C, S. F. I. O., M. R. P. Les liens per
sonnels présentent aussi une grande importance et l'amitié d'un député
métropolitain, la présence d'un député africain au sein d'une forma
tion métropolitaine suffisent à l'inscription de nouveaux élus, heureux
de bénéficier au sein de cet univers d'une sorte de parrainage. De cette
façon, quelques députés d'Afrique Noire, comme M. Houphouet-Boigny,
se trouvent apparentés au Parti communiste français. Les tendances
des élus d'outre-mer, leurs affinités les conduisent ainsi, soit vers la
S. F. I. O., soit vers le P. C, soit vers le M. R. P. (Indépendants
d'outre-mer). Bientôt, la présence des divers partis français suscite la
constitution de partis locaux dans les Territoires d'outre-mer (par
exemple, en Haute Volta). Mais leurs élus vont encore grossir les
groupes métropolitains, non seulement les trois grands partis déjà ODILE DEBBASCH < 54
cités, mais encore le Parti radical, le R. P. P. ou PU. D. S. R., à la
quelle s'allie le R. D. A., après avoir rompu en 1950 ses liens avec
le P. C. Dans cette période d'incorporation des partis africains à la
vie politique française, non seulement ces partis acquièrent une con-
naissance profonde du mécanisme parlementaire, mais encore leurs
positions stratégiques vont leur permettre de s'intégrer dans le gouver
nement de la France.
Peu à peu, le souffle du nationalisme vient pourtant toucher
électeurs et élus africains. Ce n'est pas l'idée d'un combat, d'une
hostilité violente contre le colonisateur qui se fait jour. C'est plutô

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