Le drame, la musique et le théâtre : La conception symboliste de l homme - article ; n°1 ; vol.35, pg 191-208
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Le drame, la musique et le théâtre : La conception symboliste de l'homme - article ; n°1 ; vol.35, pg 191-208

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Cahiers du monde russe : Russie, Empire russe, Union soviétique, États indépendants - Année 1994 - Volume 35 - Numéro 1 - Pages 191-208
Maria CYMBORSKA-LEBODA, Le drame, la musique et le théâtre : la conception symboliste de l 'homme.
Le présent article se propose de dégager des textes théoriques des symbolistes (notamment ceux de Vjačeslav Ivanov et d'A. Belyj) leurs conceptions de la musique, du drame et du théâtre. Il examine la part de l'influence directe de la tradition de la culture antique, familière aux écrivains de cette époque, et celle de la pensée esthétique de Nietzsche et de Wagner, qui jouaient un rôle d'intermédiaires dans l'assimilation de l'Antiquité (catégorie du retour, désir de faire renaître les éléments primitifs du drame : le chœur et l'élément musical, dionysiaque). Ont été analysés le programme symboliste d'archaïsation du drame (présentant des analogies avec la conception du genre chez Bahtin) et la hiérarchie des arts et des genres, ainsi que la typologie du drame : Ivanov opposant le drame-spectacle au drame choral, d'origine dionysiaque. L'article présente enfin la conception philosophique de l'homme et de la culture chez Ivanov.
Maria CYMBORSKA-LEBODA, Drama, music and theater : the symbolist conception of man.
This article attempts to extract from the theoretical writings of symbolists (such as Viacheslav Ivanov and A. Belyi), their views on music, drama and theater. It traces the influence exercised directly by the traditions of ancient culture, familiar with the writers of this period, and the part of Nietzschean and Wagnerian aesthetics, as intermediary in the assimilation of antiquity (for instance, the eternal recurrence, the revival of the pristine elements in drama ; its chorus and its musical, Dionysiac element). The article examines symbolist views on the archaization of drama (partly similar to Bahtin's notion of genre) and the hierarchy of arts and genres, together with the typology of drama : Ivanov contrasts drama- performance with choral drama, of Dionysiac origin. Finally, the article presents Ivanov's philosophical views on man and culture.
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 33
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Maria Cymborska-Leboda
Le drame, la musique et le théâtre : La conception symboliste de
l'homme
In: Cahiers du monde russe : Russie, Empire russe, Union soviétique, États indépendants. Vol. 35 N°1-2. pp. 191-
208.
Résumé
Maria CYMBORSKA-LEBODA, Le drame, la musique et le théâtre : la conception symboliste de l 'homme.
Le présent article se propose de dégager des textes théoriques des symbolistes (notamment ceux de Vjačeslav Ivanov et d'A.
Belyj) leurs conceptions de la musique, du drame et du théâtre. Il examine la part de l'influence directe de la tradition de la
culture antique, familière aux écrivains de cette époque, et celle de la pensée esthétique de Nietzsche et de Wagner, qui jouaient
un rôle d'intermédiaires dans l'assimilation de l'Antiquité (catégorie du retour, désir de faire renaître les éléments primitifs du
drame : le chœur et l'élément musical, dionysiaque). Ont été analysés le programme symboliste d'archaïsation du drame
(présentant des analogies avec la conception du genre chez Bahtin) et la hiérarchie des arts et des genres, ainsi que la typologie
du drame : Ivanov opposant le drame-spectacle au drame choral, d'origine dionysiaque. L'article présente enfin la conception
philosophique de l'homme et de la culture chez Ivanov.
Abstract
Maria CYMBORSKA-LEBODA, Drama, music and theater : the symbolist conception of man.
This article attempts to extract from the theoretical writings of symbolists (such as Viacheslav Ivanov and A. Belyi), their views on
music, drama and theater. It traces the influence exercised directly by the traditions of ancient culture, familiar with the writers of
this period, and the part of Nietzschean and Wagnerian aesthetics, as intermediary in the assimilation of antiquity (for instance,
the eternal recurrence, the revival of the pristine elements in drama ; its chorus and its musical, Dionysiac element). The article
examines symbolist views on the archaization of drama (partly similar to Bahtin's notion of genre) and the hierarchy of arts and
genres, together with the typology of drama : Ivanov contrasts drama- performance with choral drama, of Dionysiac origin.
Finally, the article presents Ivanov's philosophical views on man and culture.
Citer ce document / Cite this document :
Cymborska-Leboda Maria. Le drame, la musique et le théâtre : La conception symboliste de l'homme. In: Cahiers du monde
russe : Russie, Empire russe, Union soviétique, États indépendants. Vol. 35 N°1-2. pp. 191-208.
doi : 10.3406/cmr.1994.2384
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cmr_1252-6576_1994_num_35_1_2384CYMBORSKA-LEBODA MARIA
LE DRAME, LA MUSIQUE ET LE THÉÂTRE :
LA CONCEPTION SYMBOLISTE DE L'HOMME
L'importance attachée par les symbolistes à la catégorie de la mémoire (vospo-
minanie) nous autorise, semble-t-il, à rapprocher la conception du genre littéraire
telle qu'elle apparaît dans leurs écrits théoriques — surtout dans ceux qui restent dans
la zone de rayonnement de la pensée esthétique de Vjačeslav Ivanov — de la concept
ion de certains théoriciens contemporains de la littérature, notamment de Mihail
Bahtin1. Nous pensons plus précisément à cette conviction caractéristique de la
conception génologique de Bahtin, selon laquelle
« Un genre conserve toujours des éléments c'archaïsme qui ne s'éteignent pas [...] il ne
conserve cet archaïsme que parce que celui-ci se renouvelle [...]. Le genre vit du présent,
mais il se rappelle toujours son passé, son principe. Le genre est, dans le processus de
l'évolution littéraire, porteur de la mémoire littéraire... »2.
Toute la théorie symboliste du « nouveau théâtre » et du drame — qu'il s'agisse
des essais d'Ivanov vulgarisés par Culkov ou des premiers écrits de Belyj — précon
isait un programme d'archaïsation du genre dramatique ou, plus précisément, de son
innovation archaïsante. « Nous avons salué certains 'en arrière' comme des 'en
avant' écrira plus tard Belyj3. Ce programme revendiquait en effet une renaissance »,
du drame qui se ferait grâce au retour à ses sources et au rappel de ceux de ses élé
ments constitutifs qui étaient essentiels et archaïques, à savoir le culte et le mythe4.
Soulignons toutefois que le programme symboliste d'archaïsation du drame, en
tant que genre privilégié dans la conscience de l'époque, n'équivalait nullement à un
désir d'évasion, il ne résultait pas non plus d'une foi dans la force de l'anachronisme,
contrairement à ce que suggéraient certains, pour ne citer qu'Ellis5. Il résultait de la
conviction que l'archaïsme était et devait être les contemporains une valeur tou
jours renouvelée et toujours vivante. D'où le refus des modèles offerts par la culture
existante, une culture « décadente », que les symbolistes considéraient comme
désintégrée, ce qui les amenait à rejeter celles des formes du genre dramatique qui,
telle la tragédie lyrique, sanctionnaient pour ainsi dire cette désintégration6.
Cahiers du Monde russe, XXXV (1-2). janvier-juin 1994, pp. 191-208. MARIA CYMBORSK A-LEBODA 192
La théorie symboliste du « nouveau théâtre » et du drame reste donc en rapport
direct avec une approche particulière de la catégorie du temps, que nous analysons
ailleurs ; elle est en quelque sorte une expression spécifique de cette approche. La
négation du présent — en l'occurrence, de la tragédie de type maeterlinckien — s'a
ccompagne ici d'un retour au passé, au commencement du drame, et d'une projection
vers l'avenir des modèles qu'on y aura puisés (d'un idéal de l'art tel qu'on l'aurait sou
haité).
Pour reconstituer la conception symboliste du genre dramatique — but vers
lequel tendent nos considérations — il semble nécessaire de préciser dans quelle
mesure cette conception avait été déterminée directement par la tradition de la
culture antique, proche de nombreux auteurs russes et européens de cette époque, et
dans quelle mesure elle résultait de l'action — laquelle, soulignons-le, implique tou
jours une disposition à accueillir les valeurs recherchées — « du symbolisme de la
race germanique », pour reprendre l'expression de Belyj7, c'est-à-dire de la pensée
esthétique et philosophique de Nietzsche et de Wagner, qui participait à titre d'inte
rmédiaire à l'assimilation de la culture antique.
Il est hors de doute que le principal théoricien du drame symboliste qu'était Iva-
nov, avait pris conscience de l'importance de la tradition antique grâce à ses propres
travaux et recherches commencés à Berlin, dans le cadre du séminaire du célèbre
Théodore Mommsen, ainsi qu'à ses études ultérieures consacrées au problème de la
religion d'un « dieu souffrant » lesquelles, avant d'être publiées dans la revue Novyj
puť à Saint-Pétersbourg, avaient été présentées par le futur poète dans un cycle de
conférences données à Paris. D'autre part cependant — ce que l'écrivain lui-même ne
manquait pas de souligner — l'influence du grand Nietzsche, de ce « philosophe-non
philosophe, poète-non poète, philosophe-renégat, musicien sans musique »8 y était
également incontestable. Nous pensons plus particulièrement à La naissance de la
tragédie, œuvre extrêmement importante non seulement pour le développement de
l'esthétique d'Ivanov, mais aussi pour toute la pensée esthétique tusse de son époque,
et qui a contribué dans une large mesure à l'apparition d'une nouvelle réception de
l'antiquité et d'une foi dans « la réalisation de la culture tragique dans la réalité
contemporaine »9.
« Nietzsche fut le premier à proclamer Dionysos dans la plénitude de sa grande
idée », écrit Ivanov dans « Ellinskaja religija stradajuščego boga » (La religion hel
lénique du dieu souffrant).
« Son livre sur La naissance de la tragédie marqua un tournant dans le développement de
la pensée européenne, par la profondeur et l'originalité de son exploration de la psycholo
gie du dionysiaque, tant dans son acception immuable et extratemporelle que dans son
acception historique. [...] Nous avons compris que l'ivresse dionysiaque est une abolition
des limites du moi, qu'elle démolit et

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