Le grain de Rome et la crise de l Annone dans la seconde moitié du XVIIIe siècle - article ; n°1 ; vol.84, pg 201-281
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Le grain de Rome et la crise de l'Annone dans la seconde moitié du XVIIIe siècle - article ; n°1 ; vol.84, pg 201-281

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Description

Mélanges de l'Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes - Année 1972 - Volume 84 - Numéro 1 - Pages 201-281
81 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1972
Nombre de lectures 26
Langue Français
Poids de l'ouvrage 6 Mo

Extrait

Jacques Revel
Le grain de Rome et la crise de l'Annone dans la seconde moitié
du XVIIIe siècle
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes T. 84, N°1. 1972. pp. 201-281.
Citer ce document / Cite this document :
Revel Jacques. Le grain de Rome et la crise de l'Annone dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. In: Mélanges de l'Ecole
française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes T. 84, N°1. 1972. pp. 201-281.
doi : 10.3406/mefr.1972.2265
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5110_1972_num_84_1_2265GRAIN DE ROME ET LA CRISE DE L'ANNONE LE
DANS LA SECONDE MOITIÉ DU XVIIIe SIÈCLE
PAR
Jacques Bevel
Membre de l'Ecole
Le problème du grain est au centre des préoccupations économiques
de l'administration pontificale jusqu'en plein XIXe siècle. Assurément,
la chose est vraie de toute économie d'ancien type, dominée par les in
certitudes annuelles de la production vivrière. Mais à Eome, ce caractère
archaïque acquiert une dimension et une gravité toutes particulières.
Car voici l'envers de la cité sainte, dont la Contre-Eéforme a achevé
de diffuser l'image idéale: une énorme ville parasite, posée au centre
d'une campagne désolée et improductive, à la tête d'un Etat pauvre et
compartimenté; une capitale qui vit mal des prélèvements de l'Eglise
sur toute la chrétienté, redistribués par la munificence des papes et les
dépenses de l'aristocratie curiale. Pour répondre aux exigences massives
de la consommation urbaine, Eome n'offre que les ressources, nécessair
ement limitées, du pèlerinage et de la dévotion. Bien plus, au moment
où l'Europe occidentale tend à s'affranchir, inégalement d'ailleurs, des
contraintes d'une économie de subsistance, l'Etat Pontifical paraît s'en
foncer dans le passé. L'activité commerciale, la banque, la mise en valeur
agricole entrent à la fin du XVIe siècle dans une sorte de léthargie qu'at
testent encore les grandes enquêtes de l'époque napoléonienne.
L'Annone est une tentative de réponse autoritaire aux difficultés
nées de cette situation. Il faut y voir, certes, une poursuite des vieilles
traditions paternalistes qui unissent le prince à ses sujets. A Eome, cette
attitude trouve une justification supplémentaire dans la nature tout en
semble politique et religieuse de l'Etat Pontifical. Mais sans doute la
préoccupation politique est-elle prédominante: la crainte des émotions
populaires commande fondamentalement l'activité annonaire. 202 JACQUES REVEL
Une très lourde littérature a été consacrée à l'Annone depuis le
milieu du XVIIe siècle 1. Dès l'origine, elle oppose les partisans de l'i
ntervention publique et les défenseurs de la libre entreprise. Dans un pays
où le prix « politique » du pain a été très longtemps une réalité quoti
dienne, l'expérience romaine n'a pas cessé de servir de référence discutée.
Les mêmes questions lui ont été posées, des disputes entre dirigistes et
libéraux du XVIIIe siècle jusqu'aux controverses sur les cours forcés.
et les stocks publics, au lendemain de la première guerre mondiale 2.
A cet intérêt théorique n'a pourtant pas correspondu la recherche de
données nouvelles; économistes, historiens ou politiques se sont con
tentés de puiser dans la polémique économique des années 1750 les mê
mes arguments à l'appui des mêmes thèses, sans que la compréhension
des mécanismes annonaires y gagne beaucoup. Depuis l'admirable en
quête de Mcola Maria Nicolai, en 1803, l'histoire de l'Annone est rar
ement sortie des généralités 3.
Pourtant les sources d'une telle histoire existent. Pour les XVIIe
et XVIIIe siècles, V Archivio di Stato de Rome conserve les archives de
l'Annone proprement dites; elles sont malheureusement inaccessibles pour
le moment4. D'autre part, les archives de la Chambre Apostolique com-
1 Elle a été recensée systématiquement jusqu'au début du XXe siècle par
C. de Cupis, Saggio bibliografico degli scritti e delle leggi sull'Agro Romano, Rome,
1921, complété par un Supplemento al saggio bibliografico..., Caserta, 1926.
2 Une bonne analyse critique de cette historiographie et de ses présup
posés idéologiques dans le recueil de Luigi Dal Pane, Lo Stato Pontificio e il
movimento riformatore del Settecento, Milan, 1959, en particulier p. 1-61.
3 Ν. M. Nicolai, Memorie, Leggi ed Osservazioni sulle campagne e sull'An
nona di Roma, 3 volumes, Rome, 1803. Le 4e volume inédit, qui d'ailleurs ap
porte peu aux précédents, a été publié par Alberto Canaletti- Gaudenti en
pendice à son livre La politica agraria ed annonaria dello Stato Pontificio da
Benedetto XIV a Pio VII, Rome, 1947.
Parmi les recherches originales récentes, il faut faire une place particul
ière au livre cité de L. Dal Pane, Lo Stato Pontificio . . ., qui s'insère dans une
enquête plus vaste, que l'auteur a consacré au commerce des grains l'
Italie moderne; à la thèse de Jean Delumeau, Vie économique et sociale de Rome
dans la seconde moitié du XVIe siècle, 2 vol., Paris, 1959-1961, très précieuse
pour la période pré-annonaire (plus spécialement, II, p. 521-649); enfin à l'
étude d'Enzo Piscitelli, La riforma di Pio VI e gli scrittori economici romani,
Milan, 1958. Il y a peu de choses à prendre, en revanche, dans le très médiocre
livre de V. Franchini, Gli indirizzi e le realtà del Settecento economico romano,
Milan, 1950, par ailleurs très apologétique.
4 II s'agit du très gros fonds de la Presidenza dell'Annona e Grascia, qui
comporte plusieurs milliers de pièces de la fin du XVIe au début du XIXe siècle LE GRAIN DE ROME ET LA CRISE DE L'ANNONE 203
portent une section Annona, au demeurant fort composite: on y retrouve,
essentiellement pour la seconde moitié du XVIIIe siècle, les documents
administratifs qui paraissaient assez importants pour être communiqués
par le Préfet de l'Annone au cardinal camerlingue, son supérieur imméd
iat. Ce sont surtout des lettres, des morceaux de comptes, des mémoir
es rédigés à "Occasion d'une mesure nouvelle ou d'un événement excep
tionnel, et dont un certain nombre ont déjà été utilisés dans une per
spective d'histoire institutionnelle. On y trouve surtout, pour les années
1744-1797, une comptabilité complète de l'Annone. C'est elle qui a servi
de point de départ à cette étude.
Ges Stati e Bilanci x sont probablement issus de la réforme générale
de la comptabilité publique ordonnée par Benoît XIV en 1746 2. Il s'agit
de petits volumes annuels compilés par le comptable de l'Annone sur les
Libri Mastri. Ils détaillent régulièrement les postes qui composent le
bilan: frais généraux (personnel salarié, bâtiments, redevances), bilan
des grains (en prix et en quantités), service de la dette. D'autre part,
ils comportent une récapitulation générale en dare e avere qui incorpore
au bilan annuel le solde issu des exercices antérieurs; dans cette rubrique
figurent les différentes catégories de débiteurs et de créditeurs de l'a
dministration dont le compte est régulièrement mis à jour. L'ensemble
de ces données est comptabilisé dans le cadre de l'année-récolte, du pre
mier juillet au 30 juin suivant, de façon à faire coïncider les exercices de
l'Annone avec le rythme saisonnier de la production céréalière, comme
c'est souvent très précocement le cas des administrations frumentaires
(cf. Archivio di Stato di Roma, Inventare, 165). Longtemps en dépôt, et inac
cessible au moment de cette recherche (1971), il devrait être transféré à Y Ar
chìvio Centrale dello Stato dans un délai non précisé.
1 Archivio di Stato di Roma (ASR), Camerale II, Annona, b. 110 (1744-
1752), b. Ili (1753-1764), b. 112 (1765-1774), b. 113 (1775-1782), b. 114 (1783-
1792), b. 115 (1793-1797).
2 Sanctissimi Domini Nostri Benedicti Papae XIV Bullarium, II, voi. 4,
p. 72 sq. La bulle Apostolicae Sedis Aerarium, de mars 1746 établissait un mod
èle uniforme de comptabilité pour tous les services contrôlés par la Chambre
Apostolique: ceux-ci devaient résumer chaque

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