Rapport d'information déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur la réforme du volet interne de l'organisation commune des marchés dans le secteur de la banane
L'Assemblée nationale est saisie, au titre de l'article 88-4 de la Constitution, d'une proposition de règlement réformant le dispositif communautaire d'aide aux producteurs de banane, daté du 20 septembre 2006. Sont concernées par cette réforme quatre régions dites ultrapériphériques : les Canaries, Madère, la Guadeloupe et la Martinique. Selon le présent rapport, la production de la banane est, pour ces pays, indispensable tant au point de vue économique, qu'aux plans humain et social. Il estime cependant que l'organisation commune des marchés (OCM) est menacée, critiquée en Europe pour son coût, confrontée à des conditions de concurrence déloyales, subissant les attaques de l'OMC. Ce rapport défend le maintien de la production, sans possibilité de négociation, afin de respecter l'équilibre économique et social des territoires. Il propose des améliorations pour soutenir de manière durable la production de bananes, notamment en adoptant un plan national d'accompagnement de la filière et en maintenant la préférence communautaire.
Paternité, pas d'utilisation commerciale, partage des conditions initiales à l'identique
Langue
Français
Extrait
N° 3443 _______
ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 15 novembre 2006
RAPPORT D'INFORMATION
DÉPOSÉ
PAR LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE POUR L'UNION EUROPÉENNE (1),
surla réforme du volet interne de lorganisation commune des marchés dans le secteur de la banane, (COM [2006] 489 final/n° E 3266)
ET PRÉSENTÉ
PARM. ALFREDALMONT,
Député.
________________________________________________________________ (1) La composition de cette Délégation figure au verso de la présente page.
La Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne est composée de : Lequiller,M. Pierreprésident Elisabeth; MM. Abelin, Mme Jean-Pierre Guigou, M. Christian Philip,vice-présidents François Guillaume, Jean-; MM. Claude Lefort,secrétaires Almont, François Calvet, Mme Anne-; MM. Alfred Marie Comparini, MM. Bernard Deflesselles, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Nicolas Dupont-Aignan, Jacques Floch, Pierre Forgues, Mme Arlette Franco, MM. Daniel Garrigue, Michel Herbillon, Marc Laffineur, Jérôme Lambert, Robert Lecou, Pierre Lellouche, Guy Lengagne, Louis-Joseph Manscour, Thierry Mariani, PhilippeArmand Martin, Jacques Myard, Christian Paul, Axel Poniatowski, Didier Quentin, André Schneider, Jean-Marie Sermier, Mme Irène Tharin, MM. René-Paul Victoria, Gérard Voisin.
I. : UNE ORGANISATIONLE CONTEXTE COMMMUNE DES MARCHES (OCM) DE LA BANANE DOUBLEMENT MENACEE ........................ 11
A.Un dispositif se voulant adapté à la situation des régions productrices et soutenant des exploitations de caractère familial ..............................................................121)symbole dune solidarité jouant en faveur de toutesLe les agricultures et de tous les territoires dEurope ................. 13a) 13Le fonctionnement de lOCM ................................................b) 16Les effets positifs ...................................................................2)Un mécanisme daide générateur dinégalités, qui sous-compense les producteurs antillais........................................... 19
B. Mais menacé de lintérieur et de lextérieur .................241) ........ 24vivement critiquée en Europe pour son coûtUne OCM 2)Une OCM confrontée à des conditions de concurrence déloyales ..................................................................................... 313)Une OCM devant subir les conséquences des attaques inéquitables de lOrganisation mondiale du commerce ......... 37
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II. MAINTIEN DE LE :LE PRINCIPE A DEFENDRE LA PRODUCTION NEST PAS NEGOCIABLE ......... 43
A.Un impératif politique et juridique pour respecter léquilibre économique et social des territoires concernés................................................................................43
B.texte de la Commission permet dy répondreLe presque en totalité .................................................................481)Une phase de préparation de la réforme marquée par la mobilisation et lunité remarquables des principaux Etats membres producteurs...................................................... 492)Deux avancées majeures, qui mettent en uvre le droit à la cohésion des régions ultrapériphériques .......................... 51a)transfert opportun de laide dans le POSEI pour laUn pérenniser et donner plus de sécurité aux producteurs ........... 51b)Une enveloppe budgétaire satisfaisante.................................. 583) clauseUne « » de révision bienvenue, mais dont la rédaction nest pas assez précise pour réagir efficacement aux variations de revenus des producteurs....... 61
C.Les améliorations proposées par le rapporteur pour soutenir de manière durable la production de bananes ..................................................................................661) de clausePréciser le champ dapplication de la « révision » .................................................................................... 662)Elargir la base juridique du futur règlement à larticle 299 §2 du Traité ......................................................................... 673) ....................... 68Réussir la mise en place du nouveau dispositif4)Adopter un plan national daccompagnement de la filière ........................................................................................... 705)Maintenir la préférence communautaire en faveur de la banane......................................................................................... 71
Annexe 1 : Liste des personnes entendues par le rapporteur .............................................................................85
Annexe 2 : Bilan de lapprovisionnement de lUnion européenne 1988-2005 ..........................................................87
Annexe 3 : Place de la banane dans lagriculture des régions ultrapériphériques...................................................91
Annexe 4 : Mémorandum des Etats producteurs, de septembre 2005, sur laide à la banane ...............................93
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
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LAssemblée nationale est saisie, au titre de larticle 88-4 de la Constitution, duneproposition de règlement réformant le dispositif communautaire daide aux producteurs de bananes, datée du 20 septembre 2006, dune importance capitale, non seulement pour ces derniers, mais aussi pour léquilibre économique et social de certaines régions dEurope(1).
Sont en effet concernées par cette réforme quatre régions, dites ultrapériphériques ou RUP, ainsi définies par larticle 299§2 du traité instituant la Communauté européenne, véritables « pôles extérieurs » de lEurope dans lAtlantique et les Antilles :les Canaries, Madère, la Guadeloupe et la Martinique, auxquelles sajoutent, pour de petites quantités produites de bananes, Chypre, la Grèce et le Portugal continental.
La production de bananes est, pour les RUP, selon les mots du président de la commission de lagriculture et du développement rural du Parlement européen, M. Joseph Daul, «la colonne vertébrale, lélément structurant, tant sur le plan humain, social quéconomique».
On ne saurait mieux souligner la contribution, exceptionnelle à tous les points de vue, de cette production au développement de territoires de lUnion qui, sils sont situés à la « périphérie » du continent, font partie intégrante de laventure commune commencée avec le traité de Rome et contribuent, ainsi, dans leurs zones géographiques respectives, au rayonnement de la construction européenne.
(1)Proposition de règlement du Conseil modifiant les règlements (CEE) n° 404/93, (CE) n° 1782/2003 et (CE) n° 247/2006 en ce qui concerne le secteur de la banane (COM [2006] 489 final du 20 septembre 2006/document E 3266).
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Il convient de souligner égalementla contribution remarquable de cette production à un modèle dagriculture fondé sur le respect: respect dune agriculture à caractère familial et à visage humain, qui se soucie des droits des travailleurs, respect des dynamiques et des contraintes qui doivent façonner de manière harmonieuse les territoires, respect de la qualité,laquelle conditionne la sécurité sanitaire et alimentaire, et, enfin, respect de lenvironnement.
Cependant, malgré son rôle « multifonctionnel » si évident, lorganisation commune des marchés dans le secteur de la banane (OCM), créée en 1993, souffre dun double manque de légitimité.
Au sein de lUnion européenne, dabord : certains Etats membres éprouvent des réticences à financer une production quils jugent coûteuse et marginale, tandis que dautres sinquiètent des distorsions inéquitables quinduit le système de calcul de laide compensatoire entre les régions productrices.
Au plan international, ensuite : les protections quapporte lEurope à ses producteurs de bananes suscitent lire des pays dAmérique latine, au point que ces derniers cherchent, depuis plusieurs années, à obtenir le démantèlement de lOCM au sein de lOrganisation mondiale du commerce. Avec lappui des Etats-Unis, ils ont dores et déjà contraint lEurope à naccorder à ses producteurs, à compter du 1erjanvier 2006, quune protection exclusivement tarifaire contre les importations de bananes, et non plus contingentaire et tarifaire. Le tarif retenu de 176 euros la tonne est jugé insuffisant par les producteurs européens, mais encore trop élevé par les producteurs sud-américains et les multinationales.
A la menace que font peser les bananes dites dollar sur la production communautaire, il convient dy ajouter deux autres : celle des bananes exportéesvia les accords préférentiels liant lEurope aux pays dAfrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) et celle des bananes exportées par des pays très pauvres, les pays les moins avancés ou PMA, ainsi classés par lONU, qui entrent librement dans lUnion, sans droits de douane ni quotas, depuis janvier 2006.
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La Commission propose donc de revoir le système mis en place en 1993, dans un double souci :
- donner, enfin, une réelle légitimité au soutien à la production de bananes, en le déliant dune OCM mal aimée par plusieurs Etats membres pour lintégrer, du moins pour la plus grande partie de lenveloppe budgétaire, à un dispositif permanent, « statutaire », spécialement conçu pour aider lagriculture des RUP, qui sappuie sur larticle 299§2 du traité, lequel autorise le Conseil à adopter des mesures «tenant compte des caractéristiques et des contraintes particulières des régions ultrapériphériques sans nuire à lintégrité et à la cohérence de lordre juridique communautaire» ;
- permettre aux principaux Etats membres producteurs, dans ce nouveau cadre, dadopter des mesures qui prennent en compte les particularités régionales, conformément au principe de subsidiarité.
Aux yeux du rapporteur,les solutions avancées, dans cette perspective, par la Commission doivent être défendues, car elles sont justes et sages. Elles reflètent, de sa part, un réel engagement auprès des producteurs de bananes, notamment ultramarins, qui doit être salué : la proposition soumise à lexamen de la Délégation est loin dêtre la catastrophe annoncée, que certains échos, parvenus lors de la phase de consultation « interservices » menée par la Commission avant la publication du texte, pouvaient laisser entendre.
Il convient donc de féliciter la Commission pour la réelle compréhension dont elle a fait preuve à légard de lenjeu que représente, pour des régions confrontées à des handicaps si spécifiques, le maintien dune activité cardinale, qui peut représenter, pour le cas particulier des régions doutre-mer, jusquà 50 % de leur production agricole.
Cette approche a dailleurs été facilitée, selon le rapporteur, par la remarquable unité de vues, tant au niveau du diagnostic que des solutions avancées, montrée par les autorités et les professionnels de la filière des principaux Etats membres producteurs, avant la présentation du projet de réforme.
En ce qui concerne la France,le travail, effectué très en amont, puis continu, de concertation entre le ministère de