Rapport de l Inspection générale de l éducation nationale : 2003
374 pages
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Rapport de l'Inspection générale de l'éducation nationale : 2003

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Description

Les analyses et les recommandations réunies dans le présent volume portent en premier lieu sur le suivi et la mise en place des différentes réformes en cours, en 2001-2002, dans le primaire, le secondaire ainsi que dans l'enseignement professionnel. Une étude distincte est faite sur l'école et les réseaux numériques. Le rapport présente ensuite différentes évaluations menées conjointement avec d'autres inspections : rôle et fonctionnement des services académiques d'inspection de l'apprentissage, bilan des établissements régionaux d'enseignement adapté, prise en charge des troubles complexes du langage. On trouvera également des monographies sur les académies de Créteil, Montpellier, Nantes et Nice ainsi qu'un panorama des missions conduites hors de France et une présentation des spécificités de quelques systèmes éducatifs étrangers.

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Publié par
Publié le 01 septembre 2003
Nombre de lectures 43
Licence : En savoir +
Paternité, pas d'utilisation commerciale, partage des conditions initiales à l'identique
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

MAIRE
L’École aujourd’hui
Études
PREMIÈRE PARTIE
CHAPITRE 1 École primaire : observation et suivi de deux grands chantiers
CHAPITRE 2 La classe de sixième : état des lieux et réformes en cours
CHAPITRE 3 Le suivi de la mise en place de la réforme des lycées
CHAPITRE 4 L’enseignement professionnel
CHAPITRE 5 L’École et les réseaux numériques
DEUXIÈME PARTIE Évaluations menées conjointement avec d’autres inspections
CHAPITRE 1 L’évaluation de l’enseignement dans les académies
CHAPITRE 2 Les établissements régionaux d’enseignement adapté
CHAPITRE 3 Rôle et fonctionnement des services académiques d’inspection de l’apprentissage
CHAPITRE 4 La mise en œuvre du plan pour les arts et la culture
CHAPITRE 5 La prise en charge des troubles complexes du langage
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TROISIÈME PARTIE Missions à l’étranger
CHAPITRE 1 Panorama général des missions en 2001-2002
CHAPITRE 2 Principales caractéristiques, principaux enseignements
CHAPITRE 3 Regards sur quelques systèmes d’éducation étrangers
QUATRIÈME PARTIE Études des groupes de discipline et de spécialité et des commissions spécialisées
CHAPITRE 1 Suivi du dispositif d’évaluation des personnels de direction
CHAPITRE 2 L’internat scolaire public
CHAPITRE 3 Les professeurs de langue vivante débutants : entre formation initiale et formation continue
CHAPITRE 4 L’enseignement du français au collège
CHAPITRE 5 Les groupes départementaux Handiscol’ en 2001
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L’École aujourd’hui
Ce rapport 2003, proposé par l’inspection générale de l’éducation nationale (IGEN), est intermédiaire entre la présentation traditionnelle et l’esquisse d’une nouvelle. Depuis 1991, et conformément à l’article 25 de la loi d’orien -tation du 10 juillet 1989, l’IGEN rassemble dans un rapport, publié par La Documentation française, des extraits et des résumés des textes qui consti -tuent sa production annuelle. Ces textes ont déjà bénéficié, dans leur version complète, d’une diffusion restreinte au sein de l’institution ; le rapport annuel représente leur synthèse publique. Deux pistes sont, aujourd’hui, simultanément explorées : ne serait-il pas opportun, d’une part, alors que s’esquisse un rapprochement avec l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR), que les deux inspections proposent un rapport com-mun ? La nature des missions de l’IGEN, d’autre part, et sa capacité d’auto-saisine n’incitent-elles pas à tenter de construire une synthèse qui propose, à partir de l’ensemble de ses observations, de ses expertises et de ses évalua-tions, une analyse de la situation de l’institution éducative et quelques pro-positions pour l’amélioration de son efficacité ? L’introduction de ce rapport tente, modestement encore, de répondre à cette deuxième direction. Nous avons choisi d’identifier quelques problèmes et de proposer quelques recommandations. Les sujets – la lecture, le collège, l’orientation, la cohérence des différentes voies du lycée, les rapports nécessaires entre l’autonomie, l’évaluation et l’encadrement pédagogique – se sont imposés d’eux-mêmes.
Apprendre à lire, faire aimer la lecture
Les données sont connues : évaluations conduites chaque année en CE2 et en sixième, davantage destinées à aider les enseignants à prendre en compte les acquis et les lacunes qu’à mesurer dans l’absolu les compétences en lec -ture, enquêtes internationales (PISA, PIRLS) qui situent les résultats fran -çais dans la moyenne des pays comparables, évaluation menée lors des journées d’appel pour la défense selon laquelle à 17 ans, entre 9 % et 12 % des jeunes qui se sont présentés aux journées ont de réelles difficultés de compréhension ; pour la moitié d’entre eux, ces difficultés peuvent conduire à l’illettrisme. Ces données doivent être regardées lucidement, d autant plus
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que les échecs au collège et les sorties sans qualification touchent en grande majorité des élèves qui ont connu, dans leur scolarité primaire, des difficul -tés d’apprentissage. Elles ne doivent pas cependant entraîner les exagéra -tions que la médiatisation du concept récent d’illettrisme a contribué à répandre souvent abusivement. On oublie parfois de souligner que les demandes de l’institution ont changé avec l’allongement de la scolarité puis la généralisation de l’accès au collège : les difficultés des élèves sont aussi nées d’exigences nouvelles. Aujourd’hui, l’effort doit porter sur la prise de conscience des finali -tés : l’école doit amener les élèves à savoir lire, à aimer lire, à lire différem -ment selon le support et l’intention de lecture. Le nouveau programme de l’école primaire se met progressivement en place. Dans les mois qui vien -nent, l’inspection générale veillera donc à l’essentielle continuité et à la nécessaire progressivité des apprentissages de la lecture tout au long de l’école primaire, puis au collège et peut-être au-delà. Apprendre à lire, ce ’ t n effet établir une base acquise une fois pour toutes, il faut cons -n es pas e truire dans la durée : apprentissage du langage oral et familiarisation avec l’écrit en maternelle, puis, au cycle 2, acquisition des mécanismes de base afin de conduire à une pratique automatisée de la lecture, tout en aidant progres-sivement les élèves à affronter seuls de vrais textes. Si la diversité des métho-des et des démarches est encore grande au cours préparatoire, si l’on hésite encore parfois à mettre l’accent sur l’i tance du déchiffrement et de mpor l’automatisation de l’acquisition du code, il est exceptionnel de rencontrer un usage de méthodes globales qui ne s’accompagnerait pas d’un travail sys-tématique d’écriture. Le plus souvent les méthodes utilisées sont mixtes. L’apprentissage de la lecture doit être poursuivi avec détermination au cycle 3, où la lecture est loin encore de constituer le centre du travail. L’ bjectif est alors de stabiliser le travail sur le code, de faciliter l’adaptation o à des types de textes diversifiés, de développer le désir et donc le plaisir de lire. Un travail de persuasion et d’encadrement sera nécessaire pour que l’attention à l’écrit dans toutes les disciplines et l’introduction de la littéra -ture à l’école primaire soient effectives. Il faudra aussi veiller à en mesurer les effets. Envisager en continuité les apprentissages au cycle 3 et au collège n’est pas encore acquis, et persuader chacun qu’on n’a jamais fini d’apprendre à lire demeure d’actualité. Dans ce domaine, les professeurs de collège auront tout particulièrement besoin d’aide et de conseil.
Donner la priorité au collège
Redéfinir le collège
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Le « collège unique » des années 75, devenu le « collège pour tous » des années 95 puis le « collège pour tous et pour chacun » des années 2000, est présenté, dans la circulaire de rentrée 2003, comme le « collège réellement pour tous ». Ces glissements sémantiques successifs, comme l’insistance volontariste marquée par l’adverberéellement, révèlent les difficultés perma -nentes pour caractériser ce niveau d’enseignement pourtant essentiel. Le collège est une structure récente, mal définie à ses origines et à la recherche d’un équilibre entre l’école et le lycée. Il accueille des élèves – qui quittent l’école primaire en étant de plus en plus différents les uns des autres – dans des établissements très variés (collèges ruraux et urbains, grands et petits, de banlieue ou de centre-ville) sans qu’on se soit jamais véri -tablement mis d’accord sur les objectifs poursuivis. Il a donc éprouvé et éprouve encore de très grandes difficultés à affirmer son identité. De plus, des formes defiliarisationrampantes ou déclarées (dérogations à la carte scolaire, choix des langues, choix des sections, par exemple européennes) viennent encore, d’un collège à l’autre ou au sein d’un même collège, brouil-ler le paysage. Ainsi certains collèges se veulent essentiellement « pour tous » et d’autres avant tout « pour chacun ». L’enseignement dispensé est, à l’origine, calqué sur celui du lycée d’enseignement général, avec la prédominance de disciplines juxtaposées et des tentatives constantes, parfois maladroites, pour développer des formes d’interdisciplinarité et des démarches pédagogiques (du projet, du détour) qui se mettent difficilement en place car elles sont exigeantes et appellent des formes de concertation. Ainsi le collège se caractérise-t-il par un tronc commun de disciplines qui apparaissent indispensables pour poursuivre, au lycée d’enseignement général, le cursus secondaire et, à la périphérie, des actions de contourne -ment, travaux croisés, parcours diversifiés et, aujourd’hui, itinéraires de découverte. La succession de ces dispositifs montre l’incapacité persistante à construire de manière cohérente la structure et les contenus des savoirs enseignés au collège.
Comment répondre à l’hétérogénéité ?
On a voulu gérer l’hétérogénéité en multipliant les aides ponctuelles et les mesures de discrimination positive, mais l’a-t-on suffisamment analysée ? N’a-t-on pas, par exemple, confondu, pendant de nombreuses années, les élèves en difficulté, ayant besoin d’aide mais ne refusant pas le système sco -laire, et les élèves en échec, qui sont en situation de décrochage et de rup -
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ture ? Le même type de réponse a souvent été apporté à ces deux catégories, avec des formes d’aide et de soutien, parfois juxtaposées, mais le plus sou -vent peu efficaces car dépourvues de sens et dispensées par des professeurs préparés à l’enseignement des disciplines et non à la pratique de l’aide indivi -dualisée et du travail en petits groupes. On a ainsi laissé s’installer de vérita -bles « spirales de l’échec ». L’aide et le soutien tels qu’ils ont été expérimentés sous diverses for -mes n’ont pas donné les résultats escomptés ; on a donc pris conscience de la nécessité de proposer des réponses spécifiques. La mise en place de dispositifs de formation en alternance peut ainsi constituer une réponse pour certains élèves, à condition de prendre un cer -tain nombre de précautions. Il est d’abord indispensable de veiller à une lisibilité externe de l’ensemble des dispositifs proposés au collège. Outre les SEGPA, ces dispo -sitifs sont nombreux, de plus en plus nombreux (certains qui auraient dû dis -paraître, comme les CPA, existent encore ici ou là), et plus ils s’adressent aux élèves en difficulté, plus ils apparaissent compliqués aux familles les plus démunies. La conséquence, c’est que se dessinent souvent, pour les élèves les plus en difficulté, des trajectoires scolaires qui les conduisent d’un pro-gramme allégé à un autre programme allégé, d’un dispositif à un autre, alors que chaque dispositif a été conçu de façon isolée. Dans d’autres cas, on peut se demander si les élèves relèvent réellement des dispositifs dans lesquels ils ont été placés. La diversité des parcours constitue certes une réponse néces-saire mais elle doit rester lisible et cohérente. En second lieu, les établissements doivent effectivement organiser des dispositifs qui offrent des parcours singuliers plutôt que des structu-res-classes. Ces structures, en effet, évitent difficilement les dérives, comme on a pu le voir dans un passé récent avec les CPPN, fermées i l y a treize ans parce que précisément, elles étaient devenues des filières de relégation. Il faut, enfin, veiller à ce que les établissements soient effectivement aidés par les corps d’inspection pour définir ce que la circulaire de rentrée 2003 appelle « le socle de connaissances et de compétences ». On peut diffi -cilement, en effet, laisser les équipes de professeurs définir seules ce socle. Réduire les horaires, supprimer des enseignements, remanier des program -mes, sont des choix qui pèsent de façon déterminante sur les acquis fonda -mentaux des élèves concernés. Dans l’intérêt des élèves d’abord, des enseignants ensuite, on ne peut pas laisser les établissements tout réinventer dans ce domaine. Il est, aussi, indispensable de mettre en place un pilotage départemen -tal ou académique. Ce pilotage est-il compatible avec l’autonomie des éta -blissements ? La réponse est évidemment positive si l’on ne commet pas de t esens s ’ st l’autonomie d’un établissement. Une diversifica -con r ur ce qu e tion des parcours qui ne serait pas pilotée ne conduirait pas à la diversité mais à la disparité dans les établissements et entre les établissements. Former et
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conseiller les équipes, favoriser les échanges entre elles, intervenir en cas de dérapage (par exemple, il faut que le nombre de semaines passées à l’exté -rieur du collège reste compatible avec l’objectif affiché par la circulaire de rentrée 2003 de renforcement « des acquis de base dans les disciplines fonda -mentales »), ce n’est pas aller contre l’autonomie des établissements. Beau -coup d’équipes de collège n’ont pas aujourd’hui le sentiment, sur ce point, d’être autonomes, mais plutôt d’être abandonnées par leur tutelle. Il faut, enfin, veiller à ce que les services académiques accordent une priorité aux collèges dans l’attribution des moyens. Les moyens ne sont pas tout, mais les dernières années ont montré que les collèges ne sont pas convenablement traités, malgré leurs lourdes difficultés. Les dispositifs relais, observés par un récent rapport conjoint des deux inspections générales, constituent une autre réponse possible pour les élèves en situation de rupture. Les classes relais scolarisent actuellement un peu plus de 3 200 élèves. Elles s’adressent aux jeunes en situation de « décro -chage », elles ont pour objectif de les réinsérer dans le cursus scolaire ou dans un processus de formation. À la rentrée 2002, le ministère a signé des conventions permettant l’extension du dispositif par la création d’ateliers relais et par l’expérimentation d’internats relais. Ces dispositifs ne ris-quent-ils pas d’apparaître comme de simples moyens de relégation ? Pour éviter ce risque, il est indispensable d’organiser la collaboration entre l’édu-cation nationale, d’une part, l’éducation spécialisée et la protection judiciaire de la jeunesse, de l’autre. La resocialisation et la rescolarisation doivent aller de pair. Comme pour la formation en alternance enfin, ces dispositifs doi-vent bénéficier d’un solide encadrement pédagogique.
Construire le pilotage pédagogique du collège
Les observations de l’inspection générale montrent, à côté de maladresses ou même de risques de dérives graves, un foisonnement d’initiatives et un engagement des équipes éducatives qu’il faut saluer. Mais on ne peut man -quer d’être frappé par la déperdition subie sur le terrain par les directives nationales qui ne sont pas toujours lisibles et qui parfois se superposent. Certains établissements prennent, de fait, une très grande liberté avec les orientations ministérielles. Les enquêtes de l’inspection générale signalent ainsi fréquemment des cultures d’établissement peu soucieuses des directi -ves diverses, et relèvent des façons de faire locales, tolérées ou ignorées par les instances académiques. La circulaire de rentrée insiste sur la nécessité de « conforter l’auto -nomie des établissements ». Cette autonomie appelle un suivi encore plus attentif des corps d’inspection. Autrement dit, l’autonomie, qu’elle concerne les dispositifs en alternance ou la conduite quotidienne des établis -sements, doit être accompagnée par l’encadrement pédagogique. Or, le col -lège est souvent isolé matériellement et culturellement, les IA-IPR ne
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peuvent être aussi présents dans les collèges que dans les lycées, la collabora -tion entre les corps territoriaux d’inspection et les IA-DSDEN est insuffisante.
Trois recommandations
• Le collège ne doit plus être l’oublié de l’institution éducative, il doit béné -ficier de moyens, et d’un pilotage pédagogique conduit en cohérence par l’équipe de direction et les inspecteurs territoriaux. • Le collège a besoin, pour ne plus être un « petit lycée », que soit définie une culture partagée. • Les dispositifs d’aide et de diversification sont nécessaires, ils ne doivent pas s’empiler et doivent constituer des réponses individuelles aux besoins des élèves.
Du collège aux lycées
L’orientation
Lorsqu’ils quittent le collège, les élèves s’orientent (faut-il écriresont orien-tés?) soit vers la formation professionnelle – sous statut scolaire ou sous statut d’apprenti –, soit vers une formation générale ou technologique. Au sein du lycée professionnel, ils choisissent une filière, un CAP ou un BEP ; au lycée d’enseignement général, ils choisissent, en seconde, une option dite de détermination puis une des voies (L, ES, S, STT, STI, etc.) du cycle termi -nal. Théoriquement, cette orientation repose conjointement sur les compé -tences de l’élève évaluées par les enseignants et sur son projet professionnel. Force est de constater que l’orientation, telle qu’elle est mise en œuvre, est mal préparée et peu éclairée. L’orientation est mal préparée car les appréciations des enseignants sur l’élève ne prennent le plus souvent en compte que les résultats scolaires d’évaluations écrites. Quand évalue-t-on ses performances orales, ses habi -letés manuelles, ses savoir-faire, sa capacité à s’investir, à participer à des tra -vaux collectifs ? Quelles occasions le collège lui a-t-il donné de se valoriser, de mieux se connaître ? Les appréciations des enseignants sont donc incom -plètes parce qu’elles sont construites par rapport au niveau supposé néces -saire, discipline par discipline, pour poursuivre des études dans la voie générale. Ainsi, immuablement, l’orientation vers le lycée professionnel ne peut être vécue par les élèves et leurs familles que comme une relégation, voire une exclusion.
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Non seulement l’orientation est mal préparée par l’institution, mais elle ne permet pas à l’élève d’être éclairé sur ses choix : peut-il comprendre les spécificités des voies professionnelles, générales et technologiques, les exigences et les apports de chacune, les passerelles possibles ? Les sigles eux-mêmes (MSMA, ISP, SMS, etc.) sont-ils transparents ? L’information sur les champs d’activité et les métiers repose sur l’action des conseillers d’orientation psychologues, sur les apports familiaux complétés ponctuelle -ment par le professeur principal, les ministages, les semaines des métiers, ou les documents présents au CDI. Une information structurée supposerait une action collective et coordonnée de l’ensemble de l’équipe éducative du collège. L’institution sait pourtant permettre au lycée une très grande variété de parcours individuels : redoublements, réorientations en fin de seconde vers des BEP en un ou deux ans, passage d’un BEP à un bac professionnel d’une autre filière, première d’adaptation qui permet le retour à l’enseigne -ment technologique long, accès aux STS après le bac professionnel. Il est donc possible de trouver des réponses adaptées à chacun. Cette heureuse flexibilité en aval met d’autant plus en lumière l’incapacité à traiter correctement, en amont, l’orientation des collégiens et à accueillir convenablement chacun dans la voie qu’il a choisie.
La double mission du lycée professionnel
Le lycée professionnel peut-il assumer, comme une vocation, le double rôle que, de fait, il joue aujourd’hui ? Le lycée professionnel forme, d’une part, les travailleurs hautement qualifiés dont notre société a besoin ; il accueille, d’autre part, des jeunes que le collège considère en échec scolaire. Ces deux fonctions sont parfois difficiles à concilier : c’est au lycée professionnel qu’une grande part des 60 000 élèves conduisant chaque année à leur terme un processus de déscolarisation « décrochent » du système éducatif ; mais le lycée professionnel permet aussi à des milliers d’élèves de s’insérer dans la société, voire de retrouver, avec la confiance en soi et un projet personnel, un nouvel élan pour une poursuite d’études. Les évolutions constantes du lycée professionnel permettent-elles d’améliorer son efficacité ? Le bac professionnel est de création récente, il joue déjà pleinement son rôle puisque son niveau d’insertion professionnelle est reconnu et apprécié des milieux professionnels. Il a aussi l’intérêt de « tirer vers le haut » le lycée professionnel. Mais, conséquence de cette réus -site, le BEP se scolarise et risque de ne devenir, au moins dans certaines spé -cialités professionnelles, qu’un simple signal scolaire autorisant le passage en bac professionnel. Il faudra évaluer rigoureusement les expérimentations de bac pro en trois ans : stimulantes et convaincantes ici, elles risquent, ailleurs, de réduire la part des enseignements généraux dans l’équilibre de cette for -mation. Cette expérimentation, comme la demande de poursuite d’études
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des bacheliers professionnels en STS retentissent sur la lisibilité de la voie technologique et du rôle des premières d’adaptation. Il devient donc indis -pensable d’envisager conjointement les évolutions des voies professionnel -les et les voies technologiques. Enfin, une réflexion d’ensemble sur les enseignements généraux dans la voie professionnelle est nécessaire.
Le lycée d’enseignement général et technologique
Moins atteint en apparence par les difficultés qui touchent le collège et le lycée professionnel, le lycée d’enseignement général et technologique doit cependant faire face à trois types de problèmes : la crise parallèle des voies scientifiques et littéraires, la dispersion des enseignements qui tend à orien -ter le lycée autour d’une logique de l’offre à la carte, l’équilibre, enfin, comme cela vient d’être vu, entre les voies technologiques et les voies pro -fessionnelles. La réforme des lycées avait pour objectif le rééquilibrage des voies et, en particulier, le renforcement des séries littéraires et scientifiques. Il n’est pas certain que les options proposées en seconde de détermination aient, dans ce domaine, joué leur rôle. La voie littéraire (A puis L) fournissait 17,7 % des bacheliers en 1990, mais 13,9 % en 2001. Dans le même temps, la voie scientifique (C, D, E puis S) passait de 34,1 % à 31,1 %. L’accroisse-ment a porté sur la voie économique (B puis ES) de 16,6 % à 18,6 % et sur des voies à plus faible effectif (SMS, par exemple) de 4,2 % à 8,4 %, alors que la voie tertiaire (G puis STT) se maintenait autour de 20 % des bacheliers et que la voie industrielle (F puis STI) progressait légèrement de 7,5 % à 8,8 %. La diminution des vocations tant littéraires que scientifiques, sensible au lycée, s’aggrave de manière inquiétante dans l’enseignement supérieur. Les conséquences des retouches actuellement mises en place (réintégration d’une option mathématiques en L, nouveaux programmes, prise en compte des compétences expérimentales en sciences au baccalauréat) devront être évaluées avec soin ; il n’est pas certain qu’elles suffisent à inverser les tendan -ces constatées. L’allongement général de la durée des études ne devrait-elle pas entraîner une réflexion sur la possibilité de maintenir plus longtemps un tronc commun ou au contraire de renforcer les profils de chaque voie ? La multiplication des options (européenne, artistiques, etc.), de l’offre de langues anciennes et vivantes, les nouvelles modalités d’enseigne -ment comme les travaux personnels encadrés (TPE) et l’éducation civique, juridique et sociale (ECJS) ont pour première conséquence d’amoindrir la lisibilité des voies proposées et donc de favoriser ceux qui ont la maîtrise des méandres de l’institution. Ces choix obligent, d’autre part, l’équipe de direc -tion des lycées à opérer des regroupements indépendants des classes ; ils accroissent le nombre des demi-groupes ; dans ces conditions, l’emploi du temps de la classe n’existe guère ou, plus exactement, il existe autant d’emplois du temps que d’élèves. Cette dispersion est-elle souhaitable ?
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