Sémantique et psychologie - article ; n°40 ; vol.9, pg 3-29
28 pages
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Description

Langages - Année 1975 - Volume 9 - Numéro 40 - Pages 3-29
27 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1975
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Jean-François Le Ny
Sémantique et psychologie
In: Langages, 9e année, n°40, 1975. pp. 3-29.
Citer ce document / Cite this document :
Le Ny Jean-François. Sémantique et psychologie. In: Langages, 9e année, n°40, 1975. pp. 3-29.
doi : 10.3406/lgge.1975.2296
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1975_num_9_40_2296Jean-François LE] NY
Université de Paris VIII
Équipe de recherches
« Étude des acquisitions chez l'homme »,
associée au CNRS.
SÉMANTIQUE ET PSYCHOLOGIE
II existe bien des façons d'aborder les problèmes de sémantique, d'autant
plus, peut-être, que l'on dispose de moins de connaissances assurées en ce
domaine. On peut donc considérer que l'angle de vue psychologique n'est
qu'un de ceux qu'il est possible d'y adopter ; on peut aussi, et certains
auteurs ne s'en font pas faute, aller au-delà de ce relativisme et affirmer qu'il
n'est pas utile, voire qu'il est dommageable, de prendre, si peu que ce soit, la
psychologie en considération pour traiter de sémantique.
L'opinion que nous défendrons ici s'écarte bien entendu largement de
celle qui précède ; elle pose qu'une analyse psychologique des phénomènes
sémantiques est non seulement utile mais nécessaire et que, plutôt qu'un
point de vue parmi d'autres, elle constitue un point de passage obligé pour
toute explication complète. Cela ne signifie pas, naturellement, que cette
analyse exclut celles qui relèvent d'autres démarches, par exemple linguis
tique, logique ou informatique, mais que l'articulation de ces différents
modes d'étude doit être soigneusement considérée. De cette articulation il
faut se contenter de dire ici qu'elle doit être fondée dans la réalité des faits à
analyser : c'est dans la mesure où la réalité sémantique est telle ou telle qu'il
convient de l'étudier de telle ou telle façon, ou, pour être plus précis, que
telle ou telle façon de l'étudier réussira. Mais, malheureusement, comme on
ne sait pas aujourd'hui quelle est la nature exacte de la réalité sémantique,
on ne peut pas dire par avance quelle est la meilleure façon de l'étudier.
C'est une situation qui n'est pas parfaitement confortable, mais c'est celle
de tout champ de recherche : le risque lui est, par définition, inhérent.
La démarche expérimentale — au sens large du terme, c'est-à-dire celle
qui repose sur la triade hypothèse 1 — mise à l'épreuve — hypothèse 2 —
est justement destinée à trouver une solution à ces situations. C'est elle qui
inspire le présent travail ; peut-être faut-il, pour éviter toute méprise, dire
qu'à nos yeux elle ne se traduit pas dans tous les cas par la mise en place
d'une expérimentation spécifique, capable de trancher immédiatement sur
« la » question posée. En fait, mettre en avant un certain nombre de concepts
et de conceptions, contribuer à inventer — ce qui est sans doute la phase la
plus difficile du processus entier — les meilleures procédures de collecte de
faits pertinents, réaliser ou voir se réaliser celle-ci en même temps que les
analyses correspondantes, et finalement établir, souvent plusieurs années
plus tard, le bilan critique de cette activité, c'est aussi appliquer la méthode
expérimentale.
La signification comme activité psychologique.
C'est donc dans cet esprit que nous poserons ici à titre de postulat
général que (1) les faits sémantiques sont, dans leur analyse ultime, de nature
psychologique. Pour être plus précis, et en adoptant d'emblée un mode de
caractérisation qui nous servira plusieurs fois par la suite, nous dirons : les activités sémantiques sont, considérées en extension, une sous-classe des (2)
« activités psychologiques ».
Ce faisant on est conduit à poser dans toute sa netteté la question :
quelle sorte d'activité psychologique est la signification ? Pour le moment
toutefois, il importe seulement de souligner qu'elle prend sa place parmi
toute une classe d'autres activités psychologiques : perceptives, motrices,
intellectuelles, imaginatives, mnésiques, etc., sur lesquelles un certain
nombre de connaissances ont été établies ; c'est dans ce contexte qu'il s'agira
d'étudier l'activité psychologique particulière que l'on qualifie de séman
tique et les phénomènes qui s'y rattachent.
Dire cela n'est aucunement aborder la signification sous sa face subjec
tive : « activité » et « phénomène » sont pris ici au sens qu'ils ont dans les
sciences de la nature.
La signification, pour autant qu'elle est objet d'investigation scienti
fique, est donc, dans cette optique, considérée comme une classe d'événe
ments « matériels » en ceci qu'ils ont une réalité objective, indépendante de
l'observateur. La condition essentielle pour que puisse être adoptée cette
façon de voir est que ce dernier soit dissocié, de façon réelle ou à tout le
moins conceptuelle, de celui chez qui la signification est étudiée. On ne peut
certes échapper totalement à la difficulté que la signification possède aussi
une face purement subjective, par laquelle elle est un « phénomène » au
second sens du terme, à savoir un événement essentiellement singulier et
privé qui n'a d'existence partielle que pour celui qui en est l'auteur ou la
victime. De cela, par nature, rien de scientifique ne peut être dit. Par le
même mouvement qui nous conduit à affirmer le caractère psychologique de
la signification se trouve donc récusée toute approche phénoménologique.
A vrai dire, pour le chercheur familier avec la psychologie objective,
le problème tel qu'il se pose à l'égard des phénomènes sémantiques n'est pas
d'une nature différente de ceux qu'il rencontre dans de nombreux autres
secteurs de la psychologie : on ne peut pas plus, mais pas moins, pénétrer
dans la subjectivité ď autrui pour connaître de l'intérieur de quelle façon il
comprend un poème de Pablo Neruda, qu'on ne peut savoir comment il
perçoit une plage colorée de 650 mjx de longueur d'onde, communément
désignée comme « rouge », ou éprouver ce que ressent un nourrisson qui
entend la voix de sa mère. A la psychologie scientifique il suffit, pour qu'elle
estime disposer d'un objet d'étude, qu'outre cela, dont chacun sait qu'un
observateur extérieur ne peut rien en dire de vrai, existent aussi des aspects
de la réalité susceptibles de révéler des invariants, sous forme de caractéris
tiques stables ou de lois générales.
On notera qu'en excluant, comme inconnaissable, l'aspect subjectif des
phénomènes sémantiques, nous n'entendons nullement renoncer à prendre en
compte leurs caractéristiques idiosyncrasiques, c'est-à-dire individuelles, qui,
elles, relèvent bien de la psychologie. La démarcation qui est établie entre ce
que l'on reconnaît comme objet d'étude et ce que l'on renonce à connaître
dans un cadre donné est ainsi, évidemment, autre pour la psychologie
qu'elle n'est pour la linguistique : c'est cela, et rien d'autre, qui fonde la
différence entre les deux sciences.
L'hypothèse (2) telle que nous l'avons énoncée ci-dessus détermine just
ement le cadre dans lequel une étude psychologique de la signification peut
être conduite ; elle définit aussi la possibilité d'accéder à une connaissance
qui soit « vraie », au sens que donnent à ce mot les sciences de la nature, par
opposition avec ce qui peut être le souci des auteurs, phénoménologues,
psychanalystes du langage, critiques littéraires orientés vers la subjectivité,
qui se proposent de transmettre ce qu'on est convenu d'appeler le « vécu » de
la signification tel qu'il s'épanouit tout au creux du « sujet ». De cela nous ne
contestons pas qu'on puisse — et un grand poète, voire un grand critique, un homme qui y réussit — parler, voire parler bien. Ce que nous ne est
pensons pas c'est qu'il soit possible d'en dire quelque chose de vrai, au sens
indiqué plus haut. A l'inverse, si une théorie objective

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