Cette recherche, qui s’inscrit dans une perspective de collaboration internationale, a consisté à mobiliser le cadre d’analyse des "régimes institutionnels des ressources naturelles" (RIRN) développé par l’équipe de recherche de l’IDHEAP à Lausanne (Suisse). Ce cadre d’analyse, mis au point pour des ressources telles que l’eau, le sol, la forêt, etc., a été adapté à une ressource à la fois matérielle et immatérielle, le paysage, construite à partir de la combinaison de ressources naturelles et culturelles. Ce travail s’inscrit donc en prolongement de cette première application du cadre des RIRN à la ressource paysage. Il s’agissait d’utiliser cette grille d’analyse dans le cas de la France, et de produire une comparaison entre la France et la Suisse, qui constituent deux situations différentes tant en terme de politiques publiques (sectorielles mais aussi dédiées au paysage) qu’en terme de système "régulatif" (droit privé et public lié à l’usage des ressources primaires). Knoepfel (Peter), Larrue (Corinne). Tours. http://temis.documentation.developpement-durable.gouv.fr/document.xsp?id=Temis-0075712
Paternité, pas d'utilisation commerciale, partage des conditions initiales à l'identique
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
6 Mo
Extrait
Programme PAYSAGE ET DEVELOPPEMENT DURABLE
USAGES ET REGULATIONS DE LA RESSOURCE PAYS
ETUDES DE CAS ENFRANCE ET ENSUISSERapport final Janvier 2010
AGE:
Coordination scientifique : Corinne Larrue & Peter Knoepfel
Equipe Française : UMR CITERES 6173 •M. Amalric •M. Bonnefond •F. Pousset •S Servain . Avec les contributions de : C. Carreau, M Gigot, N. Lerousseau, B. Pin
Equipe Suisse : IDHEAP •JD Gerber
PREAMBULE Ce rapport soumis à lavis du Conseil Scientifique du programme Paysage et développement durable est une réécriture du rapport final préalablement soumis en mai 2009. Cette réécriture a tenu compte en grande partie des remarques du Conseil Scientifique émises sur le premier rapport. Nous avons ainsi approfondi dans le chapitre 1, la présentation des principales notions mobilisées tout au long de la recherche : le paysage comme ressource, les biens et services paysagers, les acteurs et spectateurs du paysage, les rivalités paysagères, et nous avons précisé la démarche retenue au cours de la recherche. Nous avons également complété le chapitre 2 présentant lanalyse comparative des régimes nationaux de la gestion de la ressource paysage, en accentuant les spécificités de chacun des régimes nationaux et les effets que lon pouvait en attendre dans la pratique de gestion. Le chapitre 3 qui présente les études de cas na pas été repris, sauf sur le plan de la forme. Le chapitre 4 en revanche concernant la comparaison des cas était la partie qui nécessitait le plus de refonte, compte tenu de son caractère par trop technique. Cette partie a fait lobjet dune réécriture approfondie, visant à mettre en exergue les principaux apports de la recherche. Les résultats présentés ici, correspondent aux résultats du projet proposé en réponse à lappel à projet publié en 2005. Plus généralement, il nous apparaît quun travail de recherche tel que celui entrepris dans le cadre de ce programme, doit mener à la production de nouvelles connaissances issues danalyses empiriques mises en perspectives avec les fondements théoriques mobilisés. Cest pourquoi nous navons pas pris le parti, malgré la recommandation du Conseil Scientifique de produire une note de synthèse de 50 pages, mais bien de reprendre le rapport final en le rendant plus accessible et mettant mieux en exergue les principaux acquis de la recherche. En revanche un « résumé exécutif » est proposé en marge du rapport. Sa traduction anglaise sera fournie par la suite.
Sommaire
Sommaire ....................................................................................................................... 3Introduction ................................................................................................................... 5Chapitre 1.Le cadre de la recherche menée.............................................................. 8I.Developpement durable et paysage : lapproche des régimes institutionnels de ressources naturelles (RIRN) .......................................................................................... 8A. 9Présentation du cadre danalyse des RIRN ______________________________________B.Les concepts détendue et de cohérence et qualification du Régime _________________ 12C. 13Les différentes modalités de régulation dans le cadre du RIRN_____________________ II.La ressource paysage ............................................................................................. 15A. 15Définition « ressourcielle » du paysage _______________________________________ B.Les services paysagers 16 ____________________________________________________ C. 19 : la question de la régulat _______________________Acteurs et usag rse ion des rivalités III. ................................................................................. 25Les hypothèses de rechercher s concernant létendue 25A.Premie groupe ______________________________ dhypothèse B. 26Deuxième groupe dhypothèses : cohérence ____________________________________C. ______________________________________________ 26Hypothèse sur la gouvernanceIV.Le déroulement de la recherche............................................................................ 27A. ____________________________________________________ 27Les variables danalyse_________________________________________________ B. 29Le choix des études de casC. 32Méthode de récolte de données______________________________________________ D. _____________________________ 33de léquipe et leurs taches respectivesLes membres Chapitre 2. ................. 37Les régimes nationaux de gestion de la ressource paysageI.Régime institutionnel du paysage et structure politico-administrative............. 37II.Système régulatif : droits de propriété et dusages ............................................. 40A.Limpossible propriété du paysage et « droits » sur les services paysagers ____________ 40III.et à incidence paysagère ............................................ 50Les politiques paysagères A.La place du paysage en France et en Suisse ____________________________________ 50B.Les politiques paysag __________________________________________________ 51ères .La que servitudes publiques _________________________________________ s C stion de 55D.Etendue et cohérence des régimes institutionnels de la ressource paysage dans les deux pays 56
Chapitre 3. 61Les études de cas....................................................................................I.Protocole détude.................................................................................................... 61II.Cas du Chasseral.................................................................................................... 62_______________________________________________ A.Présentation de létude de cas 62B. __________________________Analyse du régime institutionnel 65__________________ C.Effets du régime sur le paysag _____________________________________________ e 94III. 97 ..........................................................................................................Cas dAletsch_______________________________________________ A.Présentation de létude de cas 97B. ___________________________________________ 101Analyse du régime institutionnelC. _Effets du régime sur le paysage 130___________________________________________ IV.Cas de la confluence Loire/Vienne...................................................................... 135________________________________________________ A. 135Présentation de létude casB. ___________________________________________ 137Analyse du régime institutionnelC.Effets du régime sur le paysage ____________________________________________ 160
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V. ...................................................... 163Cas du Parc Naturel Régional de la Brenne______________________________________________ A. 163Présentation de létude de casB.Analyse du régime institutionnel 167___________________________________________ C. g e sur le paysage ____________________________________________ Effets du ré im 193VI.Conclusion des études de cas............................................................................... 197Chapitre 4. ........................................ 199Analyse comparative et test des hypothèsesI.Les apports et limites du recours à la notion de ressource paysagère et à ses usages.. ................................................................................................................................ 199A.Une approche qui permet 199 ____de mettre en exergue les différents usages du paysage__ B.Des usages du paysage essentiellement esthétiques_____________________________ 200C.Des services paysagers menacés par des usagers des ressources fondamentales bases matérielles du paysage _____ 201______________________________________________
II.A.B.C.III.A.B.
Les différents acteurs associés à la ressource paysage...................................... 203Des observateurs diversifiés et plutôt allochtones _____________________________ 203_ Des fournisseurs de paysage à la fois privés et publics___________________________ 204Des producteurs de paysage spécifiques aux cas étudiés _________________________ 205Les différents types de rivalités constatés dans les études de cas..................... 206Des rivalités essentiellement entre producteurs et observateurs de paysages (cf. Tableau 1en annexe 5)______________________________________________________________ 207Une analyse confirmée par lanalyse de lensemble des rivalités repérées dans les cas retenus (cf. Tableau 2 en annexe 5) _________________ 208_______________________________
IV.Les modes de régulation des rivalités paysagères ............................................. 210Les systèmes de p op _________________________________________ 210A. en actionr riété B. 212Les politiques publiques en action __________________________________________ C.paysage dans quasi tous les cas étudiés _Une régulation dun nombre croissant dusages du 2 71 _____________________________________________________________________ D. _Une cohérence substantielle qui reste limitée malgré une bonne cohérence institutionnelle 220_____________________________________________________________________ jectoires _________________________________________________________ E. 223Les tra
V.Vérification des hypothèses (discussion au regard des hypothèses) ................ 225er group hypo _____________________________ A. 225 dPremi e concernant létendue thèsesB.Deuxième groupe dhyp co hèses _________________________ ot ncernant la cohérence 227C.Hypothèse gouverna _____________________________________________ sur la nce 228Conclusion ................................................................................................................. 229Bibliographie ............................................................................................................. 233Table des illustrations................................................................................................ 239Annexe 1 : Tableau de synthèse de létude de cas du Chasseral ............................. 242Annexe 2 : Tableau de synthèse de létude de cas dAletsch ................................... 248Annexe 3 : Tableau de synthèse de létude de cas de la Confluence....................... 253Annexe 4 : Tableau de synthèse de létude de cas de la Brenne ............................. 257Annexe 5 : Méthodologie comparative ..................................................................... 262Annexe 6 : Résultats des requêtes ............................................................................. 272Annexe 7 : Tableaux de vérification des hypothèses................................................ 276Annexe 8 : Liste des publications en cours dans les cahiers de lIDHEAP............ 284
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Introduction
Les activités humaines nont jamais marqué aussi profondément les paysages que dans ces dernières décennies : changement daffectation des terrains, monocultures, étalement urbain, exode rural et enfrichement… Beaucoup déléments caractéristiques des paysages régionaux sont menacés de disparition ou ont déjà disparu. Cela se traduit par un appauvrissement sopérant de manière souvent insidieuse à lextérieur comme à lintérieur du milieu bâti. Ce sentiment de perte, qui accompagne les modifications imposées au paysage par le style de vie moderne, ainsi que lextension sociale de la sensibilité au paysage provoque un désir dintervention et de sauvegarde. Dune manière schématique, on peut dégager trois phases dans lévolution des politiques publiques de protection du paysage (Bisang et al. 2001). La première phase (jusque dans les années 1960) se caractérise par le souci de protéger des éléments ponctuels du paysage (monuments historiques et naturels). Une deuxième phase débute avec la volonté de protéger des milieux particuliers et leur biodiversité. La nature est préservée en tant que telle, mais selon des modalités dintervention encore liées à une protection par objets (zones naturelles, milieux particuliers telles les tourbières…). Enfin, à partir de la fin des années 1980, on commence à sintéresser à la mise en réseau des biotopes et à une utilisation plus mesurée de lensemble du territoire. Cette transition consacre également un intérêt plus généralisé pour le paysage. Le bilan des politiques de protection du paysage est toutefois plus que mitigé. En Suisse, les politiques dinventaire des paysages dimportance nationale ne produisent pas les résultats escomptés (Berchten & Rickenbacher, 2003). Les solutions préconisées par les politiques publiques classiques sont épuisées sans que la « banalisation » des paysages nait pu être freinée. En France, les recherches engagées dans le cadre du programme de recherche Politiques publiques et paysagesla fois la difficulté dévaluer les effetsont mis en évidence à des politiques de paysage, mais aussi limportance de ces politiques comme élément facilitant les liens entre réseaux dacteurs, institutions, professionnels, secteurs etc. (Luginbuhl, 2004). La présente recherche se base ainsi sur trois constats. (1°)Il est nécessaire de privilégier les acteursLe paysage ne peut être considéré sans faire. référence à lensemble des acteurs qui en profitent, qui lentretiennent, qui le vendent, bref qui en font usage. (2°)Le paysage doit être considéré comme une ressource. Cela implique de remplacer lapproche sectorielle qui découle des différentes politiques publiques spécialisées, par une approche véritablement « ressourcielle » c'est-à-dire qui considère le paysage dans son ensemble comme une « méta » ressource fondée sur une combinaison de ressources primaires. (3°)gestion par ressource implique une analyse détaillée de la gouvernance du paysageLa , afin de mettre en évidence les rôles joués par lensemble des acteurs qui gravitent autour de cette ressource. Ces postulats de départ nous ont conduits à organiser la recherche autour de trois principales opérations : •mobilisables pour lusage et la gestion desIdentification des règles ressources matérielles et immatérielles qui fondent le paysage au travers dune analyse des règles juridiques et des politiques publiques qui sy appliquent. •Identification des règles mobilisées et des acteurs les mobilisant dans le cadre de 4 études de cas au travers de lanalyse de rivalités dusage des services paysagers.
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•Identification des modalités de régulation de ces rivalités in situ Notre hypothèse principale est que la coordination entre les acteurs internes au périmètre du paysage considéré – par exemple les fournisseurs de produits du terroir, les hôteliers, les «paysagistes » – nest pas suffisante pour assurer une régulation des usages du paysage et que seule limplication des acteurs usagers externes au paysage considéré – cest-à-dire les observateurs, les voyagistes et les fournisseurs de chemin, etc. – garantit une régulation de ces rivalités dusage. La définition retenue du paysage considérée comme une ressource permet deux développements principaux, qui ont fondé la présente recherche: (1°) Laction des acteurs par rapport à cette ressource est influencée, dune part, par les droits dont ils disposent et, dautre part, par les différentes politiques publiques en la matière. Lapproche « ressourcielle » du paysage permet dappliquer au paysage le cadre danalyse des régimes institutionnels de ressources naturelles (RIRN) développé par Knoepfel, Kissling-Näf et Varone (2001). Cette recherche se proposait de montrer que, pour atteindre une 1d ablerecours aux politiques publiques seules ne suffit pas. Elle du paysage, le gouvernance ur nest possible que si les acteurs détenteurs des droits dusage sur la ressource sont consultés, par exemple dans le cadre de structures de gestion paysagères comme les parcs naturels régionaux (si certains de ces acteurs ont été inclus jusquà présents, ce nest souvent pas pour leur statut de détenteurs de droits sur la ressource, mais pour des raisons pragmatiques visant à intégrer le maximum de participants). (2°) Le grand nombre dacteurs gravitant autour de la ressource paysage et les différents droits quils mobilisent pour défendre leurs intérêts sont la cause de rivalités dusage (voire de conflits). Une typologie des acteurs détenteurs de droits dusage sur la ressource est proposée dans cette recherche. On se propose ainsi de montrer que plusieurs de ces acteurs sont extérieurs au territoire du paysage considéré (allochtones). Plus précisément, trois objectifs étaient assignés à cette recherche : •sur la base dune analyse des rivalités paysagères, mettre en évidence les catégories dacteurs qui utilisent ou influencent la ressource paysage ; •mettre en évidence les règles institutionnelles qui légitiment les actions des différentes catégories dacteurs rivaux et mettre en évidence les éventuelles incohérences de ces règles ; •proposer des pistes pour une gestion moins conflictuelle du paysage. Sur le plan empirique, la recherche a porté sur deux pays la France et la Suisse et a été menée sur la base de deux études de cas choisis dans chacun de ces pays. Le travail a ainsi mobilisé une équipe française de luniversité de Tours (UMR CNRS 6173 CITERES) et une équipe de LIDHEAP (Institution de Hautes Etudes en Administration Publique) de Lausanne. Le travail a consisté dans un premier temps à analyser les règles juridiques de droit privé et de droit public, ainsi que les politiques publiques paysagères ou à incidence paysagère dans les deux pays considérés. Puis dans un second temps, une analyse des quatre études de cas a été réalisée par les équipes de recherche de chacun des pays. Enfin dans un troisième temps
1gouvernance » tel quil est utilisé ici fait référence aux processus de priseLa définition du terme de « de décision, en tenant compte des différents acteurs qui y prennent part :« Governance is the interactions among structures, processes and traditions that determine how power and responsibilities are exercised, how decisions are taken, and how citizens or other stakeholders have their say »(Grahamet al.2003).
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lanalyse comparative des résultats a été réalisée au sein de léquipe française (UMR Citères) en collaboration avec léquipe suisse. Ce rapport rend compte du déroulement du travail et des résultats obtenus. Il constitue lun des produits de valorisation du travail mené. A côté de ce rapport de synthèse, les quatre études de cas sont en voie de publication sous forme de « working paper » de lIDHEAP. En outre cette recherche fera, au cours de lannée 2010, lobjet darticles soumis à des revues internationales (commeLandscape and Urban Planning, Environmental Management, Agriculture ecosystems and environment, etc.) et nationales (commePolitique et Management Public,Aménagement et nature,Annales de la recherche urbaine,Développement durable et territoire, etc). On trouvera dans un premier chapitre lexplicitation du cadre conceptuel qui a sous tendu la recherche menée. Les bases essentielles de ce chapitre sont issues du travail de thèse de JD Gerber (Gerber, 2006) et du travail de valorisation pour le PNR48 du Fonds national pour la Recherche Suisse (Knoepfel, Gerber, 2008). Dans un second chapitre seront présentés lanalyse des régimes nationaux du paysage dans les deux pays considérés ainsi que des éléments de comparaison. Un troisième chapitre sera consacré à la présentation synthétique des quatre études de cas tandis quun dernier chapitre permettra de présenter lanalyse comparative des études de cas ainsi que la vérification des hypothèses. En conclusion on reviendra sur les apports de la recherche et sur les recommandations que lon peut en tirer au regard de la gestion des paysages.
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Chapitre 1 : Le cadre de la recherche menée
Chapitre 1.LE CADRE DE LA RECHERCHE MENÉE2
La recherche a visé à appliquer le cadre conceptuel de « régime institutionnel de ressources naturelles » développé par léquipe de recherche de lIDHEAP à Lausanne (CH) sous la direction de P. Knoepfel. Ce cadre mis au point pour des ressources telles que leau, le sol, la forêt, etc., a été adapté à une ressource à la fois matérielle et immatérielle, le paysage, construite à partir de la combinaison de ressources naturelles et culturelles. Ce projet de recherche sest inscrit en prolongement des travaux menés sur la ressource « paysage » par Jean David Gerber dans le cadre de son travail de doctorat (Gerber, 2006), lui-même réalisé dans le cadre du PNR 48 du Fonds National pour la Recherche Suisse. Après avoir (I) présenté rapidement lapproche des régimes institutionnels des ressources naturelles, nous rappellerons (II) loriginalité de lapproche retenue qui tient à plusieurs éléments : la définition du paysage considéré comme une ressource qui fournit des services ou prestation paysagère, les rivalités dusage de ces services, ainsi que les acteurs en rivalités. Puis (III) nous présenterons les hypothèses qui ont orientées lanalyse à partir du cadre des régimes institutionnels de ressources naturelles dans les deux pays et les quatre études de cas pour enfin (IV) rappeler les différentes étapes du déroulement de la recherche.
I. lapproche des régimes institutionnelsDeveloppement durable et paysage : de ressources naturelles (RIRN)
La notion de « Régime Institutionnel de Ressources Naturelles »3ou RIRN (Knoepfel, Kissling-Naef, Varone, 2001) sappuie sur les concepts et méthodes delanalyse des politiques publiques denvironnement développés à lIDHEAP (Knoepfel, Larrue, Varone, 2001) et deléconomie institutionnelle des ressources naturelles développée aux Etats Unis sous limpulsion dElinor Ostrom (Ostrom, 1990). Le développement du cadre danalyse des régimes institutionnels des ressources naturelles (RIRN) résulte du « double constat (1) des limites de lanalyse en terme de politiques environnementales sectorielles orientées vers la limitation des émissions et (2) des insuffisances de lapproche de léconomie institutionnelle des ressources naturelles en termes de régimes de propriété régulant un usage local unique et homogène de la ressource. » (Nahrath, 2003 : 27). Un régime institutionnel est défini comme un cadre institutionnel qui combine les principaux éléments des politiques publiques de protection et/ou dexploitation dune ressource naturelle avec larrangement spécifique des droits dusage et de propriété des biens et services fournis par cette même ressource (Kissling-Näf & Varone 2000 : 8). Il fait référence à lensemble des règles formelles et dans certains cas informelles (Bonnefond, 2009) en vigueur, relevant du droit privé comme du droit public (législations formulées dans le cadre de programmes de politiques publiques). Ces règles régissent le comportement des acteurs détenteurs dun droit – de propriété, daccès ou dusage – portant sur une ressource naturelle ou, le cas échéant, sur un nombre déterminé de biens et services fournis par elle. 2Ce chapitre a été principalement écrit par JD Gerber et M. Bonnefond avec une contribution de C. Larrue, P. Knoepfel. 3la première fois dans différents articles : Kissling-Näf et Varone, 2000 ;On retrouve cette notion pour Knoepfel, Kissling-Näf, Varone, 2001
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Chapitre 1 : Le cadre de la recherche menée
Par son caractère institutionnalisé, un régime de ressource est doté dune stabilité garantissant une régularité et une certaine prévisibilité des modes de régulation de la ressource, ainsi que des décisions et des sanctions découlant de sa mise en œuvre. Le régime institutionnel de ressources naturelles repose donc sur deux éléments principaux que sont le système régulatif (SR) et les politiques publiques (PP). Les « régimes institutionnels des ressources » constituent le cadre théorique permettant de combiner dune part, lanalyse de lensemble des politiques publiques de protection et dexploitation des ressources du territoire (Policy Design-PD) et dautre part lanalyse de la définition et de la distribution des droits de propriété (titre de propriété, droit dusage, droit de disposition) des ressources du territoire (Système Régulatif-SR) (Knoepfel, Kissling-Näf, Varone, 2001). Le cadre danalyse part du principe que les apports disciplinaires de léconomie institutionnelle et de lanalyse des politiques publiques peuvent être complémentaire et fournir des éléments explicatifs nouveaux. Cependant, il faut tenir compte des enseignements et des lacunes de chacun des deux cadres initiaux. S. Nahrath avance dans sa thèse un certain nombre dintérêts propre à lutilisation du cadre danalyse des RIRN (Nahrath, 2003 : 27-28) dans lanalyse des processus de régulation des usages des ressources naturelles. Le cadre danalyse des RIRN permet dabord de dépasser lapproche sectorielle centrée sur la gestion des charges et dadopter une perspective centrée sur la gestion des systèmes de ressources naturelles afin de mieux comprendre les problèmes et enjeux relatifs à la gestion durable de lenvironnement. Il permet ensuite de prendre en compte simultanément toutes les politiques publiques dexploitation et de protection des ressources grâce au concept dePolicy designet non pas de rester cantonner à lapproche sectorielle de lanalyse des politiques publiques. Enfin, le concept deSystèmerégulatifpermet une compréhension des processus de régulation des usages par lanalyse de lensemble des droits de propriété (droits de propriété formelle, droits de disposition et droits dusages) qui contribuent à lorientation des comportements des utilisateurs de la ressource. Ainsi, par régime institutionnel de ressource naturelle on entend un cadre théorique permettant de combiner – pour un périmètre de ressource donné – , dune part, lanalyse de lensemble des politiques publiques de protection et dexploitation dune ressource, soit le policy design(PD), et dautre part, lanalyse de la définition et de la distribution des droits de propriété (titres de propriété formels, droits de disposition et droits dusages) sur (des unités de) la ressource, soit lesystème régulatif(SR) (Kissling & Varone 2000, Nahrath 2003).
A.Présentation du cadre danalyse des RIRN
Le RIRN est composé, comme nous venons de le stipuler, dunPolicy Designet dunSystème Régulatif, dont les éléments centraux sont exposés dans le Tableau 1suivant.
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(ensemble des droits de propriété) protection) Définition du problème social et des objectifs politiques Droits de propriété formelle Instruments Droits de disposition Groupes cibles Droits dusages Arrangement politico-administratif de mise en œuvre Hypothèse causale et dintervention Les régimes institutionnels sont liés par des relations causales avec les usages et la ressource sous la forme dunechaîne circulairedinterdépendance. (Figure 1). Figure 1 : Champ de lanalyse dun régime institutionnel de ressource naturelle (Nahrath, 2003 : 29)
Le postulat central des régimes institutionnels peut sexprimer sous la forme dunerelation circulaireentre : (1) le régime institutionnel existant, (2) linfluence (ou non) que ce dernier exerce sur les modalités dusages des acteurs (sur- ou sous-exploitation de la ressource) (3) létat de la ressource elle-même (niveau de dégradation, stocks à disposition, capacité dauto-reproduction, respectivement possibilité de recyclage), ainsi que son impact en retour sur lorganisation du régime (par exemple modification des règles du PD et/ou du SR comme conséquence dune surexploitation, dune distribution sociale de la ressource devenue politiquement insoutenable). (Nahrath, 2003)
1.Le Système Régulatif
Lesystème régulatifest composé des règles relatives à la définition de linstitution même de la propriété, ainsi que des droits (et des devoirs) incombant aux titulaires de ces droits
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