La Nuit des forains de Bergman Ingmar
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Fiche produite par le Centre de Documentation du Cinéma[s] Le France.
Site : abc-lefrance.com

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Langue Français

Extrait

La nuit des forains
Gycklamas aftonF d’Ingmar Bergman
FICHE FILM
Fiche technique
Suède - 1953 - 1h30
N. & B.
Réalisation et scénario :
Ingmar Bergman
Musique :
Karl-Birger Blomdahl
Interprètes :
Ake Grönberg
(Alberti)
Harriet Andersson
(Anne)
Hasse Eckman
(Franz)
Vanessa Redgrave
(Irina Shapira)
Résumé Critique
Anders Ek
(Frost) Le cirque Alberti, une troupe minable. Le Une œuvre magnifique, l’un des sommets
cocher raconte à Alberti l’histoire du clown de Bergman. Cette suite d’humiliations queGudrun Brost
Frost humilié par sa femme se baignant nue connaît la troupe du cirque Alberti est nar-
(Alma)
au milieu des soldats. Dans la petite ville où rée avec une exceptionnelle maîtrise par
Kiki le cirque s’installe, Alberti et sa jeune com- Bergman oscillant entre l’onirique (l’épisode
pagne, Anne, doivent quémander des cos- de la femme clown) et le baroque (Franz et(le nain)
tumes au directeur du théâtre qui les humi- Anne). On reconnaît les obsessions de
lie à son tour. Alberti ayant essayé de Bergman au rêve de régression du clown à
renouer avec son épouse qu’il avait aban- la fin du film. Jamais, sauf dans certains
donnée, Anne se donne, pour se venger, à Sternberg, on n’avait aussi parfaitement uti-
l’acteur Franz, en échange d’un bijou en toc. lisé le noir et blanc.
Ulcéré, Alberti défie Franz sur la piste dans Jean Tulard
un combat singulier qui tourne pour lui au Guide des films
calvaire…
L E F R A N C E
1D O C U M E N T S
Plutôt que la permanence de ces thèmes secoué cet enlacis mortel ? Voilà le scru- «Un vrai cirque !», dit-on parfois de des-
dans une œuvre encore mal connue, pule qui donne au malheur une si longue tinées par trop absurdes. Et pour cause !
c’est leur accord avec certaines ten- vie. Et qui supporterait les soufflets et Le cirque est souvent le lieu de ren-
dances les plus modernes du cinéma les avanies du temps, le tort de l’oppres- contre de tous les déclassés, des
contemporain, qui frappe dans La nuit seur, le mépris de l’homme fier, les déchus, de ceux qui ont choisi I‘indé-
des forains. Ne serait-ce que ce affres de l’amour méprisé, les aternoie- pendance romantique contre la sécurité
recours même au monde du cirque, du ments de la foi, l’insolence des gens en bourgeoise. Avec le monde de la danse,
spectacle, si souvent utilisé actuelle- place, et les coups de pied que le mérite celui du cirque est celui où les senti-
ment pour mieux démystifier les illu- patient accepte de l’indigne, quand lui ments, angoisses, joies, affleurent le
sions, les apparences de notre vie (je pourrait, à lui-même, se donner quittan- plus à fleur de peau, où le maquillage
songe notamment à Limelight, à Lola ce avec la pointe d’un petit couteau ? des personnalités est difficile à réaliser.
Montès, à certaines scènes de tous les Ainsi la conscience fait des lâches de Chacun s’y montre nu, avec ses ridi-
films de Fellini, à la moralité de Jeux nous tous.» A l’exception des «aternoie- cules efforts de décences, ses ambi-
d’été, tirée par le directeur de la troupe ments de la foi» (Dieu est curieusement tions frustées, ses caprices dérisoires.
de ballets, ou, dans le domaine littéraire, absent de cette méditation sur la vie), il Les forains de Bergman n’échappent
au début de L’or de la République et au n’est pas un fragment du texte de pas à la règle, d’autant qu’ils appartien-
Clowns d’Alfred Kern, pour ne citer que Shakespeare qui n’ait son correspondant nent aux plus authentiques dernières
des romans récents). Dans ce monde clair et précis dans le film. Tout au plus légions des gens du vovage, ceux qui,
absurde dont les ors et le clinquant des l’accent est-il mis sur la déchéance de la Ioin des plus grands chapiteaux du
costumes mettent en relief la misère dignité humaine, dignité bafouée tout au monde, vivent l’existence aventureuse
matérielle et la déchéance morale, les long de l’œuvre, mais d’abord et surtout et miteuse de petite ville à petite ville,
êtres sont désespérément seuls, murés dans la déjà classique séquence d’ouver- ou de village à village. La nuit des
dans leur solitude par leur égoïsme, la ture où le clown emporte dans ses bras forains n’acquiert son sens profond
terrible difficulté de communiquer, de se sa femme qui se baignait nue sous les que dans un contexte nordique, germa-
comprendre avec son prochain, d’une rires moqueurs d’artilleurs en nique ou scandinave.
cruelle lucidité avec eux-mêmes, lucidité manœuvre. Nulle surprise que le metteur en scène
qui en même temps qu’elle rend leur Inutile d’ajouter que la virtuosité stylis- ait recouru, pour nous conter sa
malheur plus évident, plus amer, plus tique de Bergman est toujours à la hau- pitoyable histoire, à Ia technique
irrémédiable, permet de l’assumer. Ces teur de ses ambitions. Qu’il accorde pay- appuyée du vieux cinéma allemand,
anges déchus et solitaires, acharnés à sages et saisons à l’atmosphère du avec ambiances écrasantes, sexualité
retrouver un équilibre perdu et à donner drame, qu’il compose plastiquement ses omniprésente, sueur, sang. Mânes de
un sens à leur vie et à leurs amours, images lors des longs entretiens à deux Dupont, Pabst, Murnau... Impossible
comment ne pas reconnaître dans leurs personnages, que sa caméra déambule pourtant de discerner le truc, le procé-
méditations celles des héros de Bardem agilement dans les coulisses d’un dé. Bergman a lui-même baptisé son
sur l’égoïsme, de Fellini sur la solitude et théâtre, qu’il ait recours, dans la séquen- film une goualante, c’est-à-dire une
l’incommunicabilité, d’Antonioni sur le ce déjà signalée, au montage court, au complainte nostalgique où l’image a
suicide, la solitude et l’amour, d’Astruc contrepoint sonore, à l’image surexpo- charge d’illustrer l’impossible quête du
dans Les mauvaises rencontres ou de sée, aux fondus au blanc, aucun de ses bonheur. Le génie de l’auteur crée tou-
Kurosawa dans Vivre ? Mais aucune procédés n’est jamais gratuit : tous sont jours à partir d’une vision, d’une
des œuvres que l’on est tenté de citer (ni d’une diabolique efficacité. Comme dans impression, qu’ensuite il développe dra-
aucun autre film de Bergman) ne va Le septième sceau, il s’agit moins matiquement jusqu’à ses ultimes
aussi loin dans le refuge de l’espoir et la d’un récit que d’une méditation : les conséquences. Et pour une fois, avec la
négation des raisons de vivre : la seule situations s’effacent derrière les person- seule exception de Rêves de femmes,
qui demeure est la peur de la mort. En nages, les personnages derrière les même si la démarche reste pesante,
fait La nuit des forains se présente idées. Pour qu’un tel cinéma conserve I’expression épouse si étroitement la
comme une paraphrase du monologue sur le spectateur son pouvoir d’envoûte- fabulation de base que l’image semble
d’Hamlet, qui ne surprend point chez un ment, il lui faut briller des feux rares du tomber comme un couperet.
auteur aussi nourri de Shakespeare. génie. Bergman y parvient avec constan- Avec Harriett Andersson, le mot «érotis-
Souvenez-vous : « Oui ! voilà l’obstacle ! ce. me» dévalué par un trop grand usage,
car dans ce dormir de la mort, quels Pierre Billard retrouve sa force percutante. Mais plus
rêves peuvent venir quand nous aurons Cinéma n°23 - Décembre 1957 encore nous frappe Ake Grönberg, pro-
L E F R A N C E
SALLE D'ART ET D'ESSAI
CLASSÉE RECHERCHE
8, RUE DE LA VALSE
42100 SAINT-ETIENNE
04.77.32.76.96 2RÉPONDEUR : 04.77.32.71.71
Fax : 04.77.25.11.83D O C U M E N T S
digieux dompteur dompté, symbole de l’interrogation qui domine l’un des plus œuvre qui semble en voie d’achèvement,
la faiblesse humaine impuissante, de la beaux films de l’histoire du cinéma, Le Bergman en précise Ie sens en 1968 :
douleur muette, que même la pire septième sceau s’ouvrant sur une par- «J’ai souvent cité la phrase d’O’Neill :
déchéance ne saurait écraser. Ce film tie d’échecs entre un chevalier, de Toute œuvre dramatique qui ne traite
bloc forme un tout si cohérent qu’on retour des croisades, et la Mort elle- pas des rapports des êtres humains avec
voit mal comment le désintégrer. Ni même. Au cours d’une quête désespé- Dieu est sans valeur. J’ai été très mal
l’image, ni le dialogue, ni la mise en rée (la sorcière, les flagellants), le che- compris. Je voulais dire que tout art est
situation, n’abusent un seul instant de valier ne trouvera

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