Revue d histoire littéraire de la France
720 pages
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Revue d'histoire littéraire de la France

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Revues- dHistoite littétaite de la France PUBLIEE par la Société d'Histoire littéraire de la France 11^ —Année. 1904. PARIS LIBRAIRIE ARMAND COLIN 5, RUE DE MÉZIÈRES 4904 va 2 a Revue dHistoire littéraire Francede la LA COMEDIE DE MOLIERE L'HOMME DANS L'ŒUVRE Ça été un progrès pour la critique que d'éclairer l'étude des œuvres par Tétude de la vie de leurs auteurs. Mais ne va-t-on pas bien loin aujourd'hui quand on tend à substituer l'indiscrétion biographique sérieuse des textes et l'admiration naïveà l'étude à pour les belles choses? Peut-être serait-il bon de savourer Le Lac de Lamartine avant de se demander quel était le vrai nom d'Elvire, et de se laisser prendre aux entrailles par Les Nuits de Musset plutôt que d'approfondir la vilaine histoire des Amants Venise.de Mais, si l'on objecte qu'à coup sur Lamartine songeait à M°^ Charles, Musset à George Sand, et tous deux à ce que leur avait fait éprouver femmela aimée, du moins plus de réserve s'im- pose-t-elle quand il s'agit d'écrivains moins « » moinspersonnels et « subjectifs », comme étaient nos grands écrivains du xvu^ siècle. On peut être des fervents de Molière sans donner dans les excès du Moliérisme. I Tous les lettrés savent ce que c'est que Moliérisme, célébréce par les uns, honni par les autres. C'est une sorte de religion litté- raire, dont l'auteur de et du dontTartuffe Misanthrope est le dieu, Edouard Fournier et le bibliophile Jacob ont les aventureuxété prophètes, dont M.

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Revues-
dHistoite littétaite
de la France
PUBLIEE
par la Société d'Histoire littéraire de la France
11^ —Année. 1904.
PARIS
LIBRAIRIE ARMAND COLIN
5, RUE DE MÉZIÈRES
4904va
2
aRevue
dHistoire littéraire
Francede la
LA COMEDIE DE MOLIERE
L'HOMME DANS L'ŒUVRE
Ça été un progrès pour la critique que d'éclairer l'étude des
œuvres par Tétude de la vie de leurs auteurs. Mais ne va-t-on pas
bien loin aujourd'hui quand on tend à substituer l'indiscrétion
biographique sérieuse des textes et l'admiration naïveà l'étude à
pour les belles choses? Peut-être serait-il bon de savourer Le Lac
de Lamartine avant de se demander quel était le vrai nom d'Elvire,
et de se laisser prendre aux entrailles par Les Nuits de Musset
plutôt que d'approfondir la vilaine histoire des Amants Venise.de
Mais, si l'on objecte qu'à coup sur Lamartine songeait à
M°^ Charles, Musset à George Sand, et tous deux à ce que leur
avait fait éprouver femmela aimée, du moins plus de réserve s'im-
pose-t-elle quand il s'agit d'écrivains moins « » moinspersonnels et
« subjectifs », comme étaient nos grands écrivains du xvu^ siècle.
On peut être des fervents de Molière sans donner dans les excès
du Moliérisme.
I
Tous les lettrés savent ce que c'est que Moliérisme, célébréce
par les uns, honni par les autres. C'est une sorte de religion litté-
raire, dont l'auteur de et du dontTartuffe Misanthrope est le dieu,
Edouard Fournier et le bibliophile Jacob ont les aventureuxété
prophètes, dont M. Georges Monval, escorté d'une armée de
Kev. — 1d'hist. littér. de la Franck (11« Ann.)- XI.2 REVUE d'histoire LITTÉRAIRE DE LA FRANCE.
lévites, est le très respectable grand prêtre, à laquelle la revue Le
Moliériste a pendant dix ans servi de temple. Cette religion a eu
ses fanatiques, sacrifiant à leur dieu toutes nos g-loires littéraires
et anathématisant tous ceux qui n'en parlaient pas avec une suffi-
sante vénération. Elle a eu ses bigots, portant comme une relique
un morceau de la mâchoire sacrée, ou proposant de mettre dans
chaque alcôve un buste de leur idole ladont contemplation suffi-
rait à réintégrer la beauté dans notre pauvre race enlaidie. Elle a
eu ses amis des menues pratiques, ne soupçonnant pas qu'il pût
avoir un autre culte que de réciter de fades litanies d'épithètes,y
d'offrir au dieu de menues offrandes, comme des notes surou tel
ustensile de son mobilier ou telle pièce de sa garde-robe. Mais elle
a eu aussi ses dévots éclairés qui ont voulu vraiment connaître et
connaître, qui ont vraiment aimé et fait aimer celuifaire qu'ils
voulaient servir. Ne maugréons pas trop contre le fatras des publi-
cations moUéresques. Bien des documents ont vu le jour, dont on
aisément passé, et bien des recherches ontse serait été pompeu-
sement étalées, dont le profil net est des plus minces; mais c'est
là l'inévitable rançon des trouvailles décisives que font de temps à
Beffara, des Jal, des Eudore Soulié. Sans le zèle, parfoisautre des
des Moliéristes, des matériaux eussent manqué, et pourindiscret,
la chronologie moliéresque qu'a établie M. Monval, et pour les
Molandcopieuses études biographiques qu'ont écrites et Mesnard,
la belle édition que Despois avait commencée, queet pour
Mesnard, après lui, a menée à bonne fin. Avoir apporté quelques
à monuments, voilà quipierres, si petites soient-elles, ces justifie
d'érudits improvisés; sètre efforcés, même en vain,beaucoup
d'autres, voilà qui fait excuser les plus maladroits.d'en apporter
Seulement, tant de collaborations diverses ne vont pas sans
Dans des chantiers encombrés d'ouvriers béné-quelque confusion.
l'architecte a fort à faire pour distinguer le travail qui estvoles,
pour refuser lesde celui qui ne l'est point, et matériauxrecevable
sans rapport avec l'édifice à construire.ou inutiles, ou fragiles, ou
force de vigilance, défendre l'unité et la solidité de laIl faut, à
des faitsde Molière contre l'intrusion étrangers et desbiographie
surtout défendre la clarté et les belleshvpothèses hâtives; il faut
son œuvre contre les explications qui obscurcissentproportions de
comme ailleurs, « rien n'estles additions qui déforment. Iciet
ami et Molière aurait souventplus dangereux qu'un ignorant »,
ceux de ses historiens et commentateurs qui ontlieu d'adresser à
adressait Dieu « Seigneur, pré-prière que Voltaire à :du goût la
à mes ennemis, je m'en charge ».servez-moi de mes amis; quantLA COMÉDIE DE MOLIÈRE. l'hOMME DAΫS l'cELVRE. 3
Faut-il choisir, entre tant de points où se montrent les dangers
intempérante érudition, celui ces dangersd'une où sont peut-être
plus grands, celui s'impose le plus impérieusementle où un éla-
gage, j'allais dire un échenillage, sévère, je choisirai les rapports
entre la vie même de Molière et ses écrits, l'évaluation, toujours
délicate, de ce que l'auteur peut avoir versé de son àmesi dans
l'àme de ses personnages, le chapitre d'une étude sur Molière
auquel on pourrait donner ce titre concis : l'homme dans l'œuvre.
ici.C'est ce chapitre que j'esquisserai brièvement
— —Au reste et je dois le déclarer bien vite ce n'est pas aux
Moliéristes seuls que je vais avoir affaire. En dehors d'eux et bien
avant eux, parmi les adversaires comme parmi les plus chauds
partisans de Molière, on a trop souvent cherché à expliquer son
œuvre par sa vie et à deviner sa vie d'après son œuvre. C'est
—Edouard Fournier qui a écrit Le Roman de Molière, et Dieu sait
—et les travailleurs sérieux aussi combien ce touche-à-tout,
d'ailleurs étonnamment érudit, s'entendait à corser un roman,
conune à embrouiller une question ! Mais c'est Weiss qui voulua
trouver lugubres les pièces les plus gaies de Molière, parce qu'il
trouvait lugubre son existence de comédien; ce sont les venimeux
auteurs d'Elomire hijpocondre ou de La Fameuse comédienne qui
ont voulu établir entre la vie et les écrits de Molière de trop signi-
ficatives concordances; c'est même Larroumet, l'auteur diligentG.
et si bien intentionné de La Comédie de Molière, ou Paul Mesnard,
l'excellent éditeur et historien de notre grand comique, qui par-
fois projettent sur l'œuvre admirée par eux quelques lueurs
troubles empruntées à l'étude de la biographie, ou sur la biogra-
phie quelques lueurs incertaines empruntées à l'étude de l'œuvre.
défaut tantUn où tombent d'écrivains, et des meilleurs, est
sans doute inévitable. Raison de plus pour nous mettre en garde
contre lui.
II
— —Tout d'abord et pour prévenir les malentendus possibles
disons que nous estimons très grande, et pour les dramaturges
plus que pour la plupart des écrivains, pour Molière plus que pour
la plupart des dramaturges, l'influence de la vie sur l'œuvre. Quel-
ques-unes des comédies de Molière n'existeraient point, si tels
ou tels incidents ne s'étaient produits, heureux ou malheureux
pour leur auteur. Ni La Critique de CÉcole des Femmes ni Llm-
promptu de Versailles ne seraient nés, s'il n'avait fallu répondre4 REVUE D HISTOIRE LITTÉRAIRE DE LA FRANCE.
aux pédants, aux jaloux et aux « grands comédiens » de l'Hôtel
de Bourgogne, qu'avait également exaspérés le succès de ISEcole
des Femmes. La Princesse comique.d'Elide, Mélicerte, La Pastorale
Les Amants magnifiques, œuvres d'accord avec les goûts dupeu
poète, ne pouvaient jaillir spontanément de sa veine et en sont
sortis sur un ordre exprès du roi pour compléter Les Plaisirs de
nie enchantée, Le Ballet des Muses et Le Divertissement royal.
D'autres pièces, plus dignes de Molière, et dont l'idée, vraiment
comique, se serait sans doute traduite un jour ou l'autre sur son
théâtre, n'en ont pas moins été faites pour le roi, elles aussi, et
doivent aux décors, aux machines, aux ballets dont elles devaient
de leur caractèreêtre accompagnées une partie de leur forme et :
Le Mariage et Le Sicilien, où

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