1. Augustines de l Hôtel-Dieu de Québec
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  • cours - matière potentielle : des épidémies
  • cours - matière potentielle : des siècles pour les soins d' hygiène
  • cours - matière potentielle : des siècles
  • cours - matière potentielle : des derniers moments de la vie
  • cours - matière potentielle : des dernières années
1 1 Les Augustines de l'Hôtel-Dieu de Québec Avant 1639 Le Concile de Nicée (325) impose aux évêques l'obligation de favoriser la fondation de maisons-Dieux. La Congrégation des Sœurs Augustines fait remonter ses origines au VIIème siècle, à l'Hôtel-Dieu de Paris fondé par saint Landry. A partir de cette fondation, vont apparaître de nouveaux monastères où l'on appliquera également la Règle de Saint- Augustin : vie contemplative et service hospitalier y seront intimement liés.
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Les Augustines de l’Hôtel-Dieu de Québec Avant 1639 Le Concile de Nicée (325) impose aux évêques l'obligation de favoriser la fondation de maisons-Dieux. La Congrégation des Sœurs Augustines fait remonter ses origines au VIIème siècle, à l'Hôtel-Dieu de Paris fondé par saint Landry. A partir de cette fondation, vont apparaître de nouveaux monastères où l’on appliquera également la Règle de Saint-Augustin : vie contemplative et service hospitalier y seront intimement liés. Au cours des siècles qui ont suivi, on a pu toutefois noter un certain relâchement et même des désordres dans la gestion des hôtes-Dieux et dans la conduite des communautés religieuses. (cf. section sur l’Hôtel-Dieu de Paris) Pour corriger ces abus, le Concile de Trente (1545-1563) imposera un train de réformes à l’intention des communautés hospitalières. Au début duXVIIe siècle, sous l’influence des écrits de sainte Thérèse d’Avila, cette religieuse espagnole qui a connu au cours de sa vie plusieurs expériences mystiques qu'elle a exposées en détail dans une œuvre littéraire abondante (et pour qui la conversion des Indiens d’Amérique était une priorité), on voit apparaître en France un mouvement de mysticismequi se concrétisera par l’arrivée à Paris, de religieuses Carmélites espagnoles, protégées du cardinal de Bérulle. Cette communauté deviendra le centre le plus actif de mysticisme en France. Le mouvement mystique voudra, comme en Espagne, faire de l’action coloniale française en Amérique avant tout un mouvement de conversion des nations indiennes. Le mysticisme français influencera profondément la vie religieuse en Nouvelle-France (Duchesse d’Aiguillon, Catherine de Saint-Augustin, Marie de l’Incarnation.) Dans un tel contexte, la fondation de l’Hôtel-Dieu de Québec s’était réalisée surtout avec l’intention de convertir les nations autochtones. C’est d’ailleurs pourquoi les Augustines à leur arrivée en Nouvelle-France ont été dirigées à Sillery, là où se trouvait un important village indien, mais qui était trop éloigné de Québec pour que les colons puissent espérer y recevoir des soins des hospitalières. La mission des Augustines à Sillery n’a pas pu se poursuivre au-delà de 1644 pour deux raisons : la variole qui a décimé à cette époque les nations indiennes (non-immunisées comme l’étaient les Européens) était une maladie dont la mortalité était très élevée et qui était tout à fait résistante au traitement. Les Indiens se sont rapidement rendu compte que malgré les efforts héroïques des Augustines, on mourrait à l’Hôtel-Dieu autant que dans les villages. D’autant plus que ceux qui étaient hospitalisés pour une autre pathologie que la variole, contractaient rapidement cette maladie au contact de ceux qui en souffraient. Il n’est donc pas étonnant que le nombre des Indiens hospitalisés à Sillery a diminué au cours des dernières années. Malgré tout, le facteur le plus important dans le départ des Augustines de Sillery aura été les assauts des Iroquois dans le secteur habité par ces religieuses et où elles se trouvaient alors sans défense. À leur retour à Québec, les Augustines ont entrepris de soigner avec zèle et compétence également les colons et les Indiens, retrouvant par là la mission première de leur Institut. Pendant ce temps, en France, d’autres mouvements religieux comme le jansénisme, le molinosisme, le quiétisme prenaient naissance en réaction aux excès du mysticisme. D’ailleurs, à ce moment, avec l’arrivée de Jean Talon à Québec en 1665, comme le dira Micheline d’Allaire, « la grande aventure coloniale s’est substituée à l’aventure missionnaire. »
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La Duchesse d'Aiguillon Marie-Madeleine de Wignerod, duchesse d'Aiguillon, nièce du cardinal Richelieu, (ministre de Louis XIII), veuve à 18 ans, devient à la demande de son oncle, une habituée de la cour de Versailles. Elle devient une sympathisante des mouvements mystiques et entre même au noviciat du Carmel. Mais le cardinal Richelieu s'y oppose et elle doit retourner à la cour. Elle continue toutefois à supporter financièrement le Carmel de Paris. (On l'appelle la seconde fondatrice du Carme.) Sous la conduite spirituelle de saint Vincent de Paul, promoteur et initiateur de nombreuses œuvres de charité, elle se sent attirée par les missions du Canada que faisaient connaître à la cour les Relations des Jésuites. Après avoir lu cet ouvrage, elle écrit au Père Lejeune qu'elle veut établir ces religieuses hospitalières en Nouvelle-France. Elle y envoie, en 1637, six ouvriers pour y défricher des terres en prévision de la construction d’un hôtel-Dieu. Le cardinal Richelieu ajoute un financement à long terme sous forme de rente. La Compagnie des Cent-Associés cède une concession de sept arpents dans l'enclos de Québec pour y construire le monastère. Pour exécuter ce projet, elle choisit les Hospitalières de l'Hôtel-Dieu de Dieppe. Le 16 avril 1637, elle donne, pour la fondation de l’Hôtel-Dieu de Québec, 22 400 livres, le 5 janvier 1638, 18 000 livres. Donc, jonction de quatre facteurs ; l’esprit de charité de la duchesse, son influence à la cour par le biais de son oncle, le cardinal Richelieu, sa connaissance de la Nouvelle France grâce aux Jésuites et le rôle essentiel de l'Hôtel-Dieu de Dieppe, un des établissements prééminents en France. En mai 1639, à Dieppe, trois Augustines sont choisies au sort parmi les volontaires pour fonder un hôtel-Dieu en Nouvelle-France. Au moment du départ de Dieppe pour Québec, les Augustines reçoivent une lettre d'Anne d'Autriche, reine de France, qui les assure de la protection royale. La duchesse d'Aiguillon leur écrit aussi le 16 avril 1639 : « J'ai bien du regret de ne pouvoir vous embrasser vous et vos bonnes sœurs qui passent avec vous. » (Sylvia Évrar, François Rousseau. Marcel Trudel) Arrivée des Augustines à Québec À l'arrivée à Québec des trois fondatrices, (sœurs Saint-Ignace, Saint-Bernard et Saint-er Bonaventure) le 1 août 1639, on tire du canon, on pavoise, on organise un cortège, on complimente les Augustines mais on les loge dans une maison sans nourriture et sans meuble sur la place d'Armes Elles se font donner des branches d'arbre pour leur servir de lits mais elles sont infestées de chenilles dons les Augustines sont bientôt couvertes. Rien n’est prêt, ni hôpital ni monastère. Le bâtiment qu’on leur avait promis est encore en chantier. Le 14 juin 1640, incendie de la maison des jésuites et de l'église Notre-Dame. Les Augustines doivent 2
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évacuer leur résidence de la place d'Armes qui est occupée par les jésuites. On leur attribue une toute petite maison sur la grève du fleuve en bas du fort d'un seul étage et qui n'avait que trois chambres. Un an après leur arrivée à Québec, on les convainc de se rendre à Sillery qui est à l'époque assez éloignée de Québec (4km). Sillery Les autorités avaient fait construire à Sillery un petit bâtiment pour y loger les trois Augustines, mais en y arrivant à l'automne de 1640, elles se rendent compte que la maison qui leur servira de cloître et d'hôpital est encore inachevée et qu'elles doivent en prévision de l'hiver qui approche, boucher les ouvertures avec de la paille. Elles écriront à leurs sœurs restées en France : « Ce que nous avons souffert en ce temps-là de froid et de misère ne se peut pas s'exprimer ». Éloignées de Québec, manquant des plus élémentaires nécessités, elles doivent maintenant prendre soin des Amérindiens malades de la variole qu'on leur amène par centaines. Fléau redoutable, la variole est la plus virulente des maladies qui ont décimé les populations amérindiennes lors de la conquête du Nouveau Monde. D'après les Augustines qui en prenaient soin à l'époque, « Les malades étaient très infectés et cette corruption les avait tous pourris. Il flottait dans la salle une odeur nauséabonde, l'air était devenu vraiment irrespirable. Il se formait des ulcères et des chancres sur tout le corps en si grande quantité qu'on ne savait par où les prendre. » Les augustines qui sont débordées, – elles passent les nuits à lessiver les pansements souillés, – affaiblies, mal nourries, tombent elles-mêmes sérieusement malades : La supérieure crache le sang en abondance et la dernière arrivée, sœur Suppli de Sainte-Marie, issue d'une famille riche et noble, ne peut supporter les rigueurs de cette existence pénible et meurt après seulement une année en Nouvelle-France.Avec le temps toutefois, la situation des Augustines de Sillery devient plus supportable:nombre des religieuses augmente, l'hôpital devient plus confortable et le l'épidémie de variole s'affaiblit. Mais le malheur cette fois vient d'une autre direction. Dès le début de la colonie, les Français – à tort ou à raison – se sont immiscés dans les guerres amérindiennes. Alliés des Amérindiens chez qui ils étaient installés, ils se retrouvent en conflit avec les nations iroquoises qui sont sorties victorieuses des premiers combats et menacent sérieusement les installations françaises situées en dehors des fortifications. Mai 1644, le gouverneur Montmagny reçoit un message : Les Iroquois sont en marche sur Sillery et veulent enlever les Filles-Blanches. Quelques semaines après cette nouvelle, des Français et des Indiens circulant dans les forêts aux environs de la résidence des Augustines tombent dans une embuscade, sont pris et massacrés. Le gouverneur Montmagny se rend à Sillery pour annoncer aux Augustines qu'il ne pouvait leur assurer la protection puisqu'il faudrait dangereusement dégarnir le fort Saint-Louis. Il leur recommande de rentrer à Québec sur le champ. Retour à Québec À Québec, tout est à recommencer dans un même scénario. On demande d’abord aux Augustines de s'installer dans une « petite chaumine répugnante remplie de crapauds, 3
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de vers et d'insectes ». Elles prennent sur-le-champ la décision de construire l’hôpital sur le site qui leur avait été attribué à leur départ de Dieppe, un vaste promontoire qui avance sur la rivière Saint-Charles, entre la rue Saint-Jean et la rue des Pauvres, (l’emplacement actuel). Les Augustines doivent en terminer la construction avant l'hiver et les ouvriers sont maladroits et peu nombreux. Pour accélérer la besogne, elles participent elles-mêmes aux travaux, charrient les pierres et halent les cordages des grues. Rien n'y fait : l'Hôtel-Dieu ne sera qu'à demi complété et on devra encore une fois fermer les ouvertures à la hâte. Un autre hiver glacial en perspective d'autant plus que la cheminée mal construite est à peu près inutilisable. Dans ce nouvel environnement cependant, les Augustines voient leur clientèle se modifier. En France, comme dans toute l'Europe d'ailleurs, l'hôpital était réservé exclusivement aux pauvres, puisque les classes plus aisées recevaient la visite de leur médecin à domicile. À Québec au contraire, les riches bourgeois, les officiers, les ecclésiastiques ne peuvent pas consulter de médecins comme ils l'auraient fait en France – puisqu'il n'y en a pas. Comme l’a écrit le bénédictin Pasquier Quesnel : « C'est une coutume dans ce pays que tout le monde se fait mener à l'Hôtel-Dieu dans la maladie, grands, riches et tous les ecclésiastiques et cela à cause de la commodité des remèdes qui s'y trouvent à propos et à cause des soins tout particuliers que les religieuses ont des malades » Ils se présentent donc, comme le font les pauvres, à l'Hôtel-Dieu pour tous leurs problèmes de santé. L'isolement, l'absence de médecin en Nouvelle-France contraignent les Augustines à développer rapidement une compétence clinique autonome qui est vite reconnue. Elles aménagent un jardin de simples, entre l'Hôtel-Dieu et la rue Saint-Jean : la sœur apothicairesseycueille des plantes médicinales et compose des médicaments dont certains sont devenus réputés. On venait de loin consulter l'apothicairesse de l'Hôtel-Dieu, même de Halifax après la Conquête. Ces soins donnés en externe, pour des malades qui n'étaient pas hospitalisés à l'Hôtel-Dieu, constituaient une première et n'avaient pas leur équivalent en France. Comme on le verra, ce caractère unique d'autonomie et d'universalité des soins marquera grandement l'institution dans son évolution future.Ces nouvelles responsabilités toutefois augmentent la charge de travail. Les Augustines sont peu nombreuses d'autant plus que leur taux de mortalité demeure élevé, surtout au cours des épidémies où elles sont les plus exposées. (« Lors de l'épidémie de petite vérole de 1703, cinq de nos sœurs sont mortes en soignant les malades, la plus jeune avait vingt ans, la plus vieille en avait trente-deux. » Annales.) Car c'était la période des grandes épidémies qui frappaient les Amérindiens encore mal immunisés vis-à-vis ces nouvelles maladies, épidémies qui frappaient aussi les passagers des navires arrivant de France et ayant séjourné dans les conditions les plus insalubres, épidémies qui frappaient enfin les Québécois eux-mêmes, affaiblis par les disettes qui sévissaient à cette période dans toute la Nouvelle-France : les Augustines doivent, sans le secours d'un seul médecin, établir dans leur petit hôpital, privé des plus élémentaires ressources, une nouvelle façon de soigner. En outre, trois d'entre elles n'ont plus la force de supporter les rigueurs et les appréhensions de la vie conventuelle à Québec et retournent en France dans leur monastère d'origine. Car les Augustines demeurent toujours inquiètes. En effet, depuis les années de Sillery, la menace iroquoise ne s'est pas atténuée. Bien au contraire.Les guerriers iroquois poursuivent leurs avancées victorieuses, déciment la nation huronne, passent avec ostentation en canot en face de Québec pour s'en prendre aux résidents de l'Île d'Orléans. Les Augustines apprennent avec effroi que leurs voisins immédiats Guillaume et Guillemette Couillard ont perdu leurs deux jeunes fils et un neveu aux mains des Iroquois. La rumeur circule qu'une armée d'Iroquois s'apprête à investir Québec. Un vent de
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panique souffle sur la petite ville. Le grand tremblement de terre de 1663 achève enfin de miner la confiance des habitants qui vivent une atmosphère de fin du monde. L'avenir de la colonie est menacé et les Augustines font des préparatifs pour retourner en France. Jean Talon Depuis assez longtemps déjà, les dirigeants de la Nouvelle-France, laïques et religieux, se succédaient à la cour de Louis XIV pour faire état de la situation catastrophique de la colonie. Leurs efforts finirent par porter fruit en 1665 alors que Québec reçoit d'un coup, un grand administrateur, l'intendant Jean Talon et le régiment de Carignan-Salière, formé de troupes aguerries, qui par des campagnes successives mettront enfin un terme au problème iroquois et inaugurent une des rares périodes de paix et de sécurité pour la Nouvelle-France. De son côté, Jean Talon, intendant infatigable, assure le peuplement de la colonie et son développement économique. Il fait entreprendre de vastes explorations et grâce à sa vision, les trois quarts du continent nord-américain, à l’Ouest et au Sud, passeront en quelques années sous la domination française. Pour employer les mots de Jean Talon lui-même, « Québec est maintenant la capitale d'un grand royaume. » Un vent d'optimisme souffle sur la Nouvelle-France et il s'agit là sûrement d'un des beaux moments d'enthousiasme et de fierté qu'ait connus la ville de Québec au cours de ses 400 ans d'histoire. Vis-à-vis l'Hôtel-Dieu, Jean Talon sera toujours un bienfaiteur fidèle et généreux.Dès son arrivée, il avancera les fonds pour la construction d'une autre salle de malades, la salle des hommes, où les Augustines s'empresseront de suspendre son portrait peint par le frère Luc. Il fera aménager un système de canalisation qui acheminera l'eau à l’Hôtel-Dieu et au monastère et fera remplacer les foyers peu efficaces dans les grands froids d'hiver par de solides poêles en fonte. Grâce à la politique nataliste de l'intendant, les novices québécoises prendront rapidement la relève des dix-sept Augustines venues de France. De plus, il se charge de recruter lui-même un médecin pour l'Hôtel-Dieu, Jean de Bonamour, le premier véritable médecin canadien. Enfin, même après son retour en France, il s'assurera que les subsides royaux destinés à l'Hôtel-Dieu parviennent régulièrement à destination. Comme l'a écrit le grand historien Marcel Trudel : « l'Hôtel-Dieu doit de grandes faveurs à Jean Talon. » À partir de ce moment, même si l'Hôtel-Dieu a connu des périodes très difficiles,après la Conquête par exemple, il n'a jamais été question, comme ce fut le cas dans les années antérieures, de fermer les portes de l'établissement. Pendant trois siècles, les Augustines ont pu poursuivre, sur la lancée de leurs sœurs des années sombres, leur œuvre de miséricorde auprès des malades. Philosophie de soins des Augustines Ces femmes admirables ont aussi perpétué fidèlement pendant ces trois siècles, un modèle de soins incomparable basé avant tout sur la tradition, la doctrine et la mission de leur Institut, les Augustines de la Miséricorde. Comme leur nom l'indique, la relation de filiation des Augustines avec saint Augustin est manifeste depuis la fondation de l'Institut en France au VIIe siècle.Saint Augustin a toujours été reconnu comme le Glorieux Père et Patriarche de l'Ordre et la règle dite de saint Augustin fondée sur la douceur, la compassion, la paix et le silence servira de base à leur action monastique. L'œuvre de saint Augustin est abondante, son enseignement est riche, toujours actuel et s'applique
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notamment à ceux et celles qui se destinent aux soins des malades. Pour s’en convaincre, on n’a que se reporter à la section intitulée « Saint Augustin » où l’on trouvera un grand nombre de passages extraites de l’œuvre du philosophe se rapportant au soin des malades. On peut penser que c'est à partir de cette belle phrase de saint Augustin que les Augustines du XIIe siècle se sont donné l'appellation d'Augustines de laMiséricordeCeux et: « celles qui, avec attention et avec bonté, fournissent aux autres tout ce qui est nécessaire pour résister aux maladies et aux souffrances, sont appelés miséricordieux. Le nom de miséricordevient en effet de ce qu'elle rend sensible à la misère et qu'elle remplit de pitié le cœur de celui qui s'afflige du mal d'autrui. » C'est donc à juste titre que saint Augustin est surnommé le philosophe du cœur. Car il enseigne que c'est avec le cœur que l'on doit d'abord soigner les malades.Dans son style imagé, saint Augustin décrit aussi le feu de la charité qui jaillit du verre d'eau que l'on offre au pauvre.Voilà l'image qui a donné naissance aux armoiries des Augustinesl'on voit la main d'une augustine portant le cœur qui soigne et d'où jaillit le feu de la charité. À gauche, l'olivier, arbre de la miséricorde. C'est aussi la constitution de l'Ordre des Augustines qui a déterminé leur engagement total et permanent vis-à-vis le soin des malades. Par exemple, en plus des trois vœux habituels prononcés par les autres communautés religieuses, les Augustines en font un quatrième, celui de servir les pauvres malades jusqu'à la fin de leurs jours. L'Ordre des Augustines est également depuis 1630, une communauté cloîtrée, ce qui est un gage de stabilité dans le milieu et par conséquent, de connaissance des familles québécoises. L'engagement des Augustines vis-à-vis les malades s'est manifesté de diverses façons mais rien n'est plus saisissant que la mort de ces héroïques jeunes femmes au cours des épidémies qui ont frappé la Nouvelle-France. Une autre particularité fondamentale de l'Ordre est le rôle central que joue le respect du malade dans les soins donnés par les augustines. Ce thème si actuel revient continuellement dans la Constitution et les règlements de l'Institut. Ces documents sont clairs et je cite : « C'est le Christ lui-même qui est mystiquement caché dans le pauvre malade et laisser languir un malade, c'est s'attaquer au Fils de Dieu. » C'est donc la présence mystique du Christ dans chaque malade qui est le fondement de la philosophie des soins des augustines. Le frère Luc dont on se souviendra qu'il avait déjà peint le portrait de Jean Talon, a aussi réalisé une œuvre qui illustre cette belle doctrine de la mystique présence. Cette peinture maintenant célèbre fut placée à l'époque dans la salle des hommes face au portrait de Jean Talon, sans doute comme source de motivation pour les Augustines dans leurs tâches quotidiennes de soignantes. Plusieurs règlements s'appuient sur cette croyance pour préconiser des soins « tendres, joyeux et pleins de compassion ». Mais c'est vraiment au moment des repas, au cours de la très belle cérémonie dite de la serte, que s'illustrait bien la belle doctrine de la mystique présence.À l'heure du repas, les Augustines pénètrent en rang dans la salle des malades. Les plus jeunes d’abord. La supérieure entre la dernière et se place derrière la table où sont disposés les plats de service. Chaque Augustine se range devant le lit de son malade et s'incline profondément devant lui en signe de respect. Ce moment était, j'en suis sûr, très émouvant et pour l'augustine et pour le malade.Elle lui lave les mains, lui apporte la nourriture, l'aide à manger. À la fin du repas, elle s'incline de nouveau et les Augustines quittent la salle processionnellement. Les règlements reviennent inlassablement sur le sujet : « L’augustine doit avoir un visage doux et joyeux, une promptitude remplie d’allégresse, évitant l'insensibilité au mal
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d'autrui que la longue fréquentation des malades a coutume d’engendrer si on n’est pas sur ses gardes, prenant des sentiments tendres et pleins de compassion en telles sorte que les malades sachent que nous les servons sans dégout, ainsi plutôt avec plaisir pour longue et fâcheuse que puisse être sa maladie.»Mais l'Institut est avant tout, on le comprendra bien, une communauté de moniales chrétiennes pour qui les pratiques de dévotion religieuse constituent la part la plus décisive de leur vie. Si chaque augustine possède une spiritualité personnelle qui est très riche, elle participe aussi aux belles cérémonies du culte rehaussées de chant grégorien dont la qualité exceptionnelle à l'Hôtel-Dieu, a été maintes fois reconnue. À ce sujet, une augustine se rappelait le temps où l'on pouvait compter à l'église plus de 200 religieuses. Les plus jeunes d'entre elles, peut-être un peu brimées par les règlements sévères de l'époque, laissaient par contre au moment du chant, libre cours à leur enthousiasme, enflaient leur voix et donnaient aux hymnes une ardeur et une beauté qui ne manquaient jamais d'étonner – et même d'émouvoir– leurs sœurs les plus âgées. Si les Augustines ont tous les jours généreusement partagé cette richesse spirituelle avec leurs malades, c'est bien au cours des derniers moments de la vie que ces secours peuvent devenir les plus nécessaires. Les règlements de l'Institut le montrent bien : « L’assistance des mourants est entièrement du devoir de l’hospitalière pour se tenir assidûment auprès de leur lit et de ne jamais les laisser seuls dans cette extrémité. Pour leur donner le soulagement requis pour le corps et l’assistance d'une grande charité pour l'âme. » Parmi les éléments de soins auxquels s'attachaient les augustines, deux d'entre eux retiennent l'attention par les implications qu'ils peuvent avoir sur notre situation hospitalière actuelle : je veux parler du silence et de la propreté. Le silence Les Augustines ont toujours attaché une grande importance au calme et à la paix dans les salles de malades de l’Hôtel-Dieu. Elles se rappellent ce qu’a écrit leur Père et Glorieux Patriarche, saint Augustin, à ce sujet : « Ô paix, tu es la sérénité de l'esprit, la tranquillité de l'âme, la droiture du cœur, le lien de l'affection, l'union de la charité. Tu es ce bien immense qui détruit les artifices, apaise les guerres, arrête les colères, brise l'orgueil, calme les discordes, plaît à tous, est l'objet des désirs de tous. Ô paix, tu ne sais pas t'élever. Heureux qui te possède ! Ô paix, parmi les choses crées, tu es si bonne, si admirable, si glorieuse, qu'on ne peut désirer rien de plus doux, qu'on ne peut désirer rien de plus délectable, qu'on ne peut désirer rien de plus utile. » Les règlements de l’Institut sont clairs : « L’augustine doit tenir l'hôpital paisible afin d'éviter que le bruit ne fasse souffrir les pauvres malades. » Il y a toujours eu dans les salles de malades à l’Hôtel-Dieu des périodes de silence absolu comme de midi à 14h par exemple. Au monastère, le silence est essentiel et il y avait sur les murs des affiches de bois noir où l’on pouvait lire «Ô silence, Source de tout bien !» Les Augustines elles-mêmes pratiquaient régulièrement la méditation chrétienne dans le cadre de leurs dévotions quotidiennes. Ces pratiques spirituelles les amenaient à se convaincre que le silence est la première étape du traitement des malades et que c’est par là – par le silence intérieur – que s’exerce d’abord le pouvoir de guérison de la nature. 7
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Pour ceux qui ont connu l’Hôtel-Dieu à cette époque se rappelleront que le personnel chuchotait pour ne pas indisposer les malades et que tout était fait pour éviter le bruit dont on connaît l’effet néfaste sur l’évolution des patients hospitalisés (OMS) et qui double le risque de cardiopathie ischémique. À l’inverse on connaît les effets bénéfiques de silence, surtout du silence intérieur, sur la symptomatologie et même sut la guérison des malades. Dean Ornish, un cardiologue de réputation internationale a mis au point, il y a plus de trente ans une méthode de modification radicale du mode de vie des malades porteurs de maladie coronarienne. Cette méthode réclame des malades des changements diététiques, une prescription d’exercice modérée (trente minutes de marche par jour) et des périodes quotidiennes de « silence intérieur » obtenues par la pratique du yoga, de la méditation et de « l’imagerie ». De façon inattendue, la pratique de cette méthode a conduit à la désobstruction des artères coronariennes atteintes d’artériosclérose, Plus récemment, une étude a pu révéler des modifications majeures dans l’évolution du cancer de la prostate chez les sujets suivis par le Dr Ornish. À l’échelle cellulaire, les malades qui suivent cette méthode de façon continue présentent des modifications bénéfiques en particulier au niveau de leurs télomères, modifications indicatrices d’une espérance de vie positive. Chez ces mêmes sujets, on a pu détecter dans plus de 500 gènes, des changements régulateurs dans le sens d’une prévention des maladies chroniques. Des techniques du même ordre ont récemment été appliquées dans un contexte de soins palliatifs, à la Maison Michel Sarrazin de Québec par Nicole Senécal, professeure-formatrice de yoga, chez des malades cancéreux. « La pratique d’exercices appropriés à leur état, de modifications de la respiration, de la méditation et de l’imagerie a conduit chez ces malades à une réduction des douleurs chroniques, à un meilleur sommeil, à une diminution du niveau d’anxiété et de dépression. La pratique d’exercices appropriés à leur état, associée à une respiration profonde et contrôlée et à des techniques respiratoires énergisantes et intériorisées, a conduit chez ces malades à une réduction des douleurs chroniques, à une diminution des incapacités fonctionnelles, à un regain d’énergie, de vie et d’autonomie ; le diaphragme se détend et induit une aisance de la respiration et une capacité d’oxygénation supérieure, un meilleur sommeil et contribue également à une diminution du niveau d’anxiété et de dépression. De plus, la pratique de l’imagerie, de la relaxation, du lâcher-prise et de la méditation, favorise le silence intérieur contribuant à une réduction de l’appréhension face à leur propre finalité et à un contact plus intime avec eux-mêmes.somme, En toutes ces techniques soutiennent un mieux-être, une vie spirituelle propre à chacun et une qualité de vie plus acceptable dans le contexte d’une maladie cancéreuse. » a écrit Nicole Senécal. La propreté Mêmes recommandations pour la propreté. Les Augustines ont toujours été reconnues au cours des siècles pour les soins d'hygiène donnés à leurs malades et pour la propreté éclatante de leurs salles. Saint Augustin l’ordonne : « Que votre porte s'ouvre aux … étrangers et aux malades ; recevez les avec joie, lavez leurs pieds, purifiez leur tête, nettoyer leurs souillures, et jamais ne détournez votre main du pauvre malade. » La constitution de l’Institut est claire : « Pour les Augustines, il n'y a de permis qu'un seul luxe, celui de la propreté ; mais celle-ci doit être exquise. » Et les règlements à ce sujet sont répétitifs : « Les Augustines doivent être propres et nettes en leurs habits et leur personne, ayant soin de se laver fréquemment les mains et la
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bouche. Elles doivent laver les fort malades, leur faire couper les ongles et la barbe quand il est nécessaire par le chirurgien. » « Le devoir de la religieuse est de pourvoir et de prendre garde à tout ce qui touche l'hôpital, de le tenir fort net, de faire bruler parfois quelques parfums, de faire vider au plutôt les immondices, ouvrir en son temps les fenêtres pour prendre l'air, de ne jamais laisser trainer aucun linge. Que les couvertures et les courtines soient propres, d'une bonne étoffe et d'une couleur agréable. » Les visiteurs à Québec sont unanimes. Le Suédois Pehr Kalm : « Dans l’hôpital, tout est propre, net et en ordre. » Le père Pierre-François-Xavier Charlevoix : « Les malades sont bien servis, tout est bien commode et d'une grande propreté. » Pas de bactérie C. difficile sur les étages à cette époque ! Conclusion On vient de le voir, les Augustines de l'Hôtel-Dieu ont pu édifier sous l'impulsion de leurs sœurs aînées des années sombres, une philosophie unique de distribution de soins dont nous avons tout avantage à nous inspirer aujourd'hui. Une philosophie basée sur leur spiritualité, sur l’enseignement de saint Augustin, sur une constitution qui demande un incomparable respect du malade, sur leur courage et leur abnégation, sur leur autonomie et leur compétence acquises pendant les années (majoritaires) où il n’y avait pas de médecins en Nouvelle-France. Ces femmes admirables sont des femmes bien de chez nous – ce sont en somme nos tantes et nos grand-tantes – qui ont prodigué pendant trois siècles et demi, à toutes les familles de Québec sans exception, des soins de santé, je le répète, inégalés à l'époque, nulle part ailleurs au monde.
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