Droit des affaires et religions - article ; n°4 ; vol.53, pg 1239-910
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Revue internationale de droit comparé - Année 2001 - Volume 53 - Numéro 4 - Pages 1239-910
La vie économique et sociale avait été en Europe régie, comme on sait, durant de longs siècles par un droit d'inspiration religieuse. Tel est encore le cas à l'époque actuelle d'un grand nombre de pays arabo-musul-mans, l'apparition dans la plupart de ces pays de banques dites islamiques depuis une trentaine d'années en est le signe le plus tangible. Institutions religieuses et entreprises de crédit tout à la fois, les établissements de ce type opèrent dans le strict respect des enseignements de la Chari'a qui condamne la perception d'intérêt sous n'importe quelle l'orme ; la rémunération du crédit est alors assurée par des mécanismes juridiques de substitution. Ailleurs, dans les pays séculiers d'Europe et d'Amérique, les religions continuent par le biais des idéologies qu'elles portent à influencer le droit. La morale de l'efficacité économique théorisée par de grands juristes contemporains pourrait bien avoir ses racines dans les croyances jadis répandues dans les sectes puritaines de la nouvelle Angleterre que le succès dans le travail, le gain et la richesse sont la manifestation de la gloire de Dieu. Cependant, un autre courant se dessine en Europe, où l'on perçoit à travers une conception nouvelle du rapport contractuel, la prise en compte par le droit de valeurs morales inspirées de l'humanisme chrétien : la protection de la partie la plus faible dans une relation d'affaires, le respect de la dignité des personnes qui y sont impliquées, la solidarité entre contractants sont des exigences nouvelles qui infléchissent de plus en plus les règles et les solutions du droit positif.
Economie life in Europe was for many centuries governed by a law derived from religious sources, as we know. Today, this is still the case for a great number of Arab — Muslim countries, where the appearance of « Islamic banks » some thirty years ago is a tangible demonstration. These organisations — at the same time religions institutions and lending businesses — maintain in their operations a strict respect for the teaching of the Chari'a which condemns the receipt of any form of interest ; compensation for loan services is therefore channelled through legalistic mechanisms of substitution. Elsewhere, in the non-religious states of Europe and America, religions continue to influence law through the ideological biases they spread. For example, the imperative of economie efficiency currently favoured by our best contemporary legal thinkers could be seen to have its roots in the traditional beliefs of Puritans in New England, among whom success at work, productivite and the creation of great wealth were thought to manifest the glory of God. Meanwhile, another current has developed in Europe. One finds it in the new conception of contractual relationships, where law is taking into account values derived from Christian humanism : protection of the weaker party in business deals, respect for individual dignity of business partners, and solidarity between them when they contract, are newly-developed requi-rements that are having a growing influence on rules and outcomes under the positive law.
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2001
Nombre de lectures 51
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Professeur Selim Jahel
Droit des affaires et religions
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 53 N°4, Octobre-décembre 2001. pp. 879-910.
Citer ce document / Cite this document :
Jahel Selim. Droit des affaires et religions. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 53 N°4, Octobre-décembre 2001. pp.
879-910.
doi : 10.3406/ridc.2001.17899
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_2001_num_53_4_17899Résumé
La vie économique et sociale avait été en Europe régie, comme on sait, durant de longs siècles par un
droit d'inspiration religieuse. Tel est encore le cas à l'époque actuelle d'un grand nombre de pays arabo-
musul-mans, l'apparition dans la plupart de ces pays de banques dites islamiques depuis une trentaine
d'années en est le signe le plus tangible. Institutions religieuses et entreprises de crédit tout à la fois, les
établissements de ce type opèrent dans le strict respect des enseignements de la Chari'a qui condamne
la perception d'intérêt sous n'importe quelle l'orme ; la rémunération du crédit est alors assurée par des
mécanismes juridiques de substitution.
Ailleurs, dans les pays séculiers d'Europe et d'Amérique, les religions continuent par le biais des
idéologies qu'elles portent à influencer le droit. La morale de l'efficacité économique théorisée par de
grands juristes contemporains pourrait bien avoir ses racines dans les croyances jadis répandues dans
les sectes puritaines de la nouvelle Angleterre que le succès dans le travail, le gain et la richesse sont
la manifestation de la gloire de Dieu. Cependant, un autre courant se dessine en Europe, où l'on perçoit
à travers une conception nouvelle du rapport contractuel, la prise en compte par le droit de valeurs
morales inspirées de l'humanisme chrétien : la protection de la partie la plus faible dans une relation
d'affaires, le respect de la dignité des personnes qui y sont impliquées, la solidarité entre contractants
sont des exigences nouvelles qui infléchissent de plus en plus les règles et les solutions du droit positif.
Abstract
Economie life in Europe was for many centuries governed by a law derived from religious sources, as
we know. Today, this is still the case for a great number of Arab — Muslim countries, where the
appearance of « Islamic banks » some thirty years ago is a tangible demonstration. These organisations
— at the same time religions institutions and lending businesses — maintain in their operations a strict
respect for the teaching of the Chari'a which condemns the receipt of any form of interest ;
compensation for loan services is therefore channelled through legalistic mechanisms of substitution.
Elsewhere, in the non-religious states of Europe and America, religions continue to influence law
through the ideological biases they spread. For example, the imperative of economie efficiency currently
favoured by our best contemporary legal thinkers could be seen to have its roots in the traditional beliefs
of Puritans in New England, among whom success at work, productivite and the creation of great wealth
were thought to manifest the glory of God.
Meanwhile, another current has developed in Europe. One finds it in the new conception of contractual
relationships, where law is taking into account values derived from Christian humanism : protection of
the weaker party in business deals, respect for individual dignity of business partners, and solidarity
between them when they contract, are newly-developed requi-rements that are having a growing
influence on rules and outcomes under the positive law.R.I.D.C. 4-2001
DROIT DES AFFAIRES ET RELIGIONS *
Sélim JAHEL**
Tandis qu'à leurs œuvres perverses
Les hommes courent haletants...
Théophile Gautier
La vie économique et sociale avait été en Europe régie, comme on
sait, durant de longs siècles par un droit d'inspiration religieuse. Tel est
encore le cas à l'époque actuelle d'un grand nombre de pays arabo-musul-
mans, l'apparition dans la plupart de ces pays de banques dites islamiques
depuis une trentaine d'années en est le signe le plus tangible. Institutions
religieuses et entreprises de crédit tout à la fois, les établissements de ce
type opèrent dans le strict respect des enseignements de la Chari'a qui
condamne la perception d'intérêt sous n'importe quelle l'orme ; la rémunérat
ion du crédit est alors assurée par des mécanismes juridiques de substitution.
Ailleurs, dans les pays séculiers d'Europe et d'Amérique, les religions
continuent par le biais des idéologies qu'elles portent à influencer le droit.
La morale de l'efficacité économique théorisée par de grands juristes
contemporains pourrait bien avoir ses racines dans les croyances jadis
répandues dans les sectes puritaines de la nouvelle Angleterre que le succès
dans le travail, le gain et la richesse sont la manifestation de la gloire de
Dieu. Cependant, un autre courant se dessine en Europe, où l'on perçoit
à travers une conception nouvelle du rapport contractuel, la prise en compte
par le droit de valeurs morales inspirées de l'humanisme chrétien : la protec
tion de la partie la plus faible dans une relation d'affaires, le respect de
la dignité des personnes qui y sont impliquées, la solidarité entre contractants
sont des exigences nouvelles qui infléchissent de plus en plus les règles
et les solutions du droit positif.
Economie life in Europe was for many centuries governed by a law
derived from religious sources, as we know. Today, this is still the case
* Ce texte a été établi à partir d'un rapport présenté par l'auteur au colloque « Droit
et Religion» tenu à l'Université Saint Joseph de Beyrouth, les 18 et 19 mai 2000.
** Professeur à Panthéon-Assas Paris II. 1
880 REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARE 4-2001
for a great number of Arab — Muslim countries, where the appearance
of « Islamic banks » some thirty years ago is a tangible demonstration.
These organisations — at the same time religious institutions and lending
businesses — maintain in their operations a strict respect for the teaching
of the Chari'a which condemns the receipt of any form of interest ; compens
ation for loan services is therefore channelled through legalistic mecha
nisms of substitution.
Elsewhere, in the non-religious states of Europe and America, religions
continue to influence law through the ideological biases they spread. For
example, the imperative of economic efficiency currently favoured by our
best contemporary legal thinkers could be seen to have its roots in the
traditional beliefs of Puritans in New England, among whom success at
work, productivity and the creation of great wealth were thought to manifest
the glory of God.
Meanwhile, another current has developed in Europe. One finds it in
the new conception of contractual relationships, where law is taking into
account values derived from Christian humanism : protection of the weaker
party in business deals, respect for individual dignity of business partners,
and solidarity between them when they contract, are newly-developed requi
rements that are having a growing influence on rules and outcomes under
the positive law.
Il est grand le mystère qui entoure les rapports du droit à la religion,
peut être faut-il pour mieux comprendre, faire ici la part de la pure
conviction : « Heureux ceux qui croient sans voir » (Saint Jean, 20, 25).
Nous n'avons pas la prétention de percer un tel mystère. Avancer dans
ce labyrinthe, y placer quelques jalons, braquer les phares de la religion
pourrait peut-être aider à faire progresser la justice. C'est à cela, que
tendent ces quelques réflexions.
Il est sûr que dans les sociétés primitives, la religion a servi de
vecteur à la règle de droit pour la lancer et l'imposer au respect des
peuples. Ainsi, selon Ibn Khaldoun, c'est « l'influence de la loi religieuse »
qui a permis aux arabes de s'unir et de se constituer un royaume [. L'État
de droit a commencé par être un État religieux. Cependant, dans les pays
sécularisés comme sont les grandes démocraties occidentales, le droit est
en principe séparé de la religion et du système moral qu'elle impose. La
question n'en reste pas moins posée de savoir s'il en est réellement
indépendant, s'il n'en subit pas encore des influences2.
Celles-ci sont toujours visibles dans les systèmes juridiques des pays
arabo- musulmans, ceux d'entre eux, en particulier, qui se proclament Etats
islamiques, où la religion continue, du moins officiellement, à exercer
son emp

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