La lecture à portée de main
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
Je m'inscrisDécouvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
Je m'inscrisDescription
Sujets
Informations
Publié par | Revue-internationale-de-droit-compare |
Publié le | 01 janvier 1981 |
Nombre de lectures | 7 |
Langue | Français |
Poids de l'ouvrage | 1 Mo |
Extrait
Hubert Izbedski
L'évolution des droits des citoyens en Pologne populaire (1944-
1980)
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 33 N°4, Octobre-décembre 1981. pp. 989-1011.
Citer ce document / Cite this document :
Izbedski Hubert. L'évolution des droits des citoyens en Pologne populaire (1944-1980). In: Revue internationale de droit
comparé. Vol. 33 N°4, Octobre-décembre 1981. pp. 989-1011.
doi : 10.3406/ridc.1981.3230
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1981_num_33_4_3230L'EVOLUTION DES DROITS DES CITOYENS
EN POLOGNE POPULAIRE (1944-1980)
par
Hubert IZDEBSKI
Professeur à la Faculté de droit et d'administration de Varsovie
I. INTRODUCTION
Cette étude dont le titre évoque le problème le plus fondamental
du droit public pourrait être conçue de diverses manières. On pourrait
la concevoir du point de vue de la doctrine, du point de vue des textes
législatifs ou du point de vue de l'histoire politique. On pourrait
également soit s'occuper de l'ensemble de la position du citoyen face à
l'État, soit réduire l'analyse à des manifestations choisies, caractérisant
cette position.
Il importe alors en premier lieu de préciser l'objet de l'étude et
d'indiquer la méthode d'aborder les problèmes. Ce que l'on va présenter
est un essai d'analyse des sources juridiques, de la doctrine et des
expressions particulières des droits et des libertés publiques au cours de
trente-six ans d'évolution de la Pologne populaire. On exclut donc en
principe trois autres grands thèmes relatifs à la position du citoyen face à
son État, à savoir les devoirs du citoyen, sa participation au pouvoir et les
garanties institutionnelles du principe de la légalité dont le citoyen peut
disposer. Néanmoins, il faut se rappeler toujours que tous ces thèmes sont
étroitement mêlés.
Quant à la méthode, son point de départ est juridique ce sont les
textes constitutionnels et législatifs. Le fond des textes ne peut être
expliqué sans leur analyse doctrinale, dont l'évolution reflète des
changements s'opérant sur le plan politique beaucoup plus vite que les
transformations législatives. Il faut aussi confronter les textes avec la
pratique en essayant de caractériser les manifestations réelles des droits
des citoyens. La construction de notre étude sera également fondée sur
cette méthode d'investigation. 990 L'ÉVOLUTION DES DROITS DES CITOYENS
L'étude n'est qu'un aperçu des droits et des libertés constitutionnelles
de l'individu en Pologne après la IIe guerre mondiale. Étant sommaire,
elle ne peut être ni exhaustive, ni détaillée. La vie enrichit et transforme
sans cesse, notamment depuis l'été 1980, le fond des droits ainsi que
l'optique dans laquelle on aborde les problèmes envisagés. Cela veut
également dire qu'un historique des droits fondamentaux en Pologne
populaire achevé à la fin du mois de janvier 1981 n'est pas identique à
celui que l'on aurait pu faire il y a quelques années, ou que l'on ferait dans
quelques années (1).
IL SOURCES JURIDIQUES
1. Actes constitutionnels
La source primaire et considérée comme fondamentale du droit de la
Pologne populaire fut le Manifeste du Comité Polonais de Libération
Nationale publié le 22 juillet 1944. Ce Manifeste, dit « de juillet », a
déclaré illégale et nulle la Constitution autoritaire de 1935 sur laquelle se
fondaient l'existence et le fonctionnement du gouvernement en exil de
Londres. Il a rétabli les principes démocratiques fondamentaux de la
Constitution antérieure du 17 mars 1921. Il a également déclaré le
rétablissement de toutes les libertés démocratiques, de l'égalité des
citoyens et des libertés des organisations politiques et syndicales, de la
presse et de la conscience. Le Manifeste indiquait pourtant les limites de
ces libertés — elles ne pouvaient pas servir aux ennemis de la démocratie.
On a formulé ainsi pour la première fois une conception nouvelle des
libertés publiques propre au régime naissant de la démocratie populaire.
Le Manifeste de juillet évoquait aussi les droits économiques et sociaux, à
savoir le droit à la sécurité sociale et le droit à l'éducation, en prévoyant
l'introduction du niveau minimum de vie garanti par l'Etat.
Si l'on compare les principes du Manifeste avec ceux de la
Constitution de 1921, on peut constater que le Manifeste n'a fait que
mentionner les libertés les plus importantes, en précisant cependant leurs
limites. D'un autre côté, il a esquissé les droits économiques et sociaux
d'une manière plus large que la Constitution. Il a, par ailleurs, annoncé les
réformes fondamentales — la réforme agraire et la nationalisation de la
grande industrie, qui devaient agir dans la même direction.
Les principes démocratiques de la Constitution de 1921 étant remis
en vigueur, ses dispositions relatives aux droits et libertés conservaient
(1) Cela explique pourquoi, aujourd'hui, on ne peut trouver suffisants les articles d'A.
BURDA : « Rozwöj podstawowych praw, wolnosci i obowiazköw obywatelskich w Polsce
Ludowej » (« Le développement des droits, des libertés et des devoirs fondamentaux des
citoyens en Pologne populaire ») in Prawa i obowiqzki obywateli w Polsce i w swiecie (Les
droits et les devoirs des citoyens en Pologne et dans le monde), Varsovie, 1974, pp. 227-253
et d'A. LOPATKA : « Rozwöj podstawowych praw i obowiazköw obywateli PRL » (« Le
développement des droits et devoirs fondamentaux des citoyens de la R.P.P. ») in
Podstawowe prawa i obowiqzki obywateli PRL w okresie budowy rozwinietego spoleczenstwa
socjalistycznego (Les droits et les devoirs des citoyens de la R.P.P. dans la
période de l'édification de la société avancée socialiste), Varsovie, 1976, pp. 3-15, ainsi que
le livre de B. DOBKOWSKI, Konstytucyjne prawa i obowiqzki obywateli PRL (Les droits et
les devoirs constitutionnels des citoyens de la R.P.P.), 1979, p. 99 et s. EN POLOGNE POPULAIRE (1944-1980) 991
leur valeur juridique sauf, comme on croyait généralement, celles qui
avaient protégé la grande et moyenne propriété privée.
Cette opinion a été exprimée d'une manière indirecte par la Diète
Constituante élue en 1947. Cette Diète a voté le 22 février 1947 la
« Déclaration pour la réalisation des droits et des libertés des citoyens »,
qui n'était pas une loi et n'était pas publiée dans le Journal des Lois.
C'était une déclaration d'intention par laquelle la Diète déclarait que les
droits et les libertés fondamentales qu'elle a énuméres à titre d'exemples
restaient en vigueur. On y évoquait les libertés classiques ainsi que les
droits économiques et sociaux dont, pour la première fois, le droit au
travail. La Diète a annoncé en même temps que les lois devraient
« empêcher de tirer parti des droits et des libertés des citoyens pour la
lutte contre le régime démocratique de la République polonaise ». On a
ainsi précisé les limites des libertés publiques. Le 22 juillet 1952, la Diète a
voté la Constitution de la République populaire de Pologne. Elle
s'inspirait de la Constitution soviétique de 1936, y compris pour la
conception des droits et des libertés. Le chapitre 7 de la Constitution,
intitulé « Les et les devoirs fondamentaux des citoyens » commenç
ait par la disposition suivante : « La République populaire de Pologne,
en affermissant et en multipliant les conquêtes du peuple travailleur,
consolide et élargit les droits et les libertés des citoyens ». Les dispositions
concernant les droits économiques et sociaux ont été placées devant le
principe d'égalité et devant les dispositions concernant les libertés. Un
autre trait typique pour les constitutions dites socialistes était l'insertion,
dans ce chapitre, des « garanties matérielles », c'est-à-dire des disposi
tions obligeant les autorités à fournir les moyens qui garantissent aux
citoyens l'exercice de leurs droits. Par contraste avec les dispositions des
années 1944 et 1947, on n'a inséré aucune disposition générale précisant
les limites de l'exercice des libertés — sauf