La procédure civile comme instrument de réforme sociale - article ; n°3 ; vol.28, pg 449-460
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1976 - Volume 28 - Numéro 3 - Pages 449-460
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1976
Nombre de lectures 71
Langue Français

Extrait

Hans Smit
La procédure civile comme instrument de réforme sociale
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 28 N°3, Juillet-septembre 1976. pp. 449-460.
Citer ce document / Cite this document :
Smit Hans. La procédure civile comme instrument de réforme sociale. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 28 N°3,
Juillet-septembre 1976. pp. 449-460.
doi : 10.3406/ridc.1976.16711
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1976_num_28_3_16711I
PROCÉDURE CIVILE LA
COMME INSTRUMENT DE RÉFORME SOCIALE
Hans SMIT
Professeur à la Faculté de droic de l'Université de Columbia
Professeur associé à de Paris
I. — Introduction
Un eminent professeur hollandais, annotant un jour une décision
de la Cour de cassation sur un sujet de procédure civile, fît remarquer que
l'importance de l'arrêt résidait plus dans le fait que l'affaire avait été
tranchée que dans le sens où elle l'avait été. Et il prétendait que cette
remarque valait, de façon générale, pour toutes les questions de pro
cédure. On peut pourtant penser que, malgré toute sa réputation, ce
professeur avait tort.
Il existe une conception du rôle de la procédure civile qui peut être
qualifiée de naïve. Selon cette conception, le droit substantiel définit
les droits et obligations des citoyens tandis que la procédure civile s'oc
cupe seulement des moyens permettant d'établir les faits qui donnent
naissance à ces droits et obligations. Il en serait, au fond, pour les règles
de procédure comme pour celles du Code de la route, mais la loi exige
que l'on tienne sa droite ou sa gauche : on peut toujours arriver à des
tination en roulant d'un côté ou de l'autre de la route.
Cette conception du rôle de la procédure est totalement étrangère
aux traditions de la common law. Bien que le célèbre adage « no writ,
no right » n'ait plus sa place dans un système qui a cessé de limiter le
nombre des actions, la vieille idée selon laquelle des droits nouveaux
se trouvent créés par les juges à l'occasion d'instances judiciaires conserve
encore une grande actualité aux Etats-Unis. On peut, en effet, soutenir
que les droits les plus importants qui sont actuellement reconnus aux
(*) Conférence prononcée le 10 mai 1976, à Reid Hall, annexe de l'Université
de Columbia à Paris, sous les auspices de la Fondation Currier et de la Columbia
Law School Alumni Association à Paris.
L'auteur exprime sa reconnaissance à Sylvie Thietart, assistante à
de Paris I, pour les corrections qu'elle a apportées au texte. LA PROCEDURE CIVILE 450
citoyens trouvent Leur origine dans des actions introduites devant les
tribunaux (1).
La manière dont sont résolus les problèmes de procédure peut,
en fait, affecter le comportement des citoyens et leur situation jur
idique de plusieurs façons.
Tout d'abord, il est clair qu'une personne peut régler sa conduite
de manière à éviter les conséquences qu'entraînerait l'application normale
de certaines règles de procédure. Par exemple, un individu peut limiter
ses activités en un pays ou en un lieu donné pour éviter d'être cité en
justice en ce pays ou en ce lieu (2).
De même, les règles de procédure peuvent rendre plus difficile le
succès de certaines actions. On peut, par exemple, décourager une action
fondée sur la négligence en obligeant le demandeur à prouver l'absence
de négligence de sa part (3) ou en exigeant de lui le versement d'une
caution pour les frais du procès lorsqu'il engage une action dont l'issue
est douteuse (4). Dans ce cas, le citoyen prudent sera amené à tenir
compte, même dans son activité de tous les jours et sur le plan extra
judiciaire, des difficultés auxquelles il risque d'être confronté s'il se
trouve engagé dans un procès.
Finalement, toutes les règles de procédure ne sont qu'un reflet
des jugements portés sur les valeurs sociales, exactement de la même
manière que les règles de droil substantiel. Les règles, par exemple, qui
limitent l'information que l'on peut obtenir de son adversaire (5) consti
tuent un compromis entre le désir d'aboutir à la vérité absolue et
celui de protéger une personne dans son intimité et de ne pas l'inciter
à falsifier les faits. De même, les règles qui n'accordent au juge qu'un
rôle passif témoignent du souci de ne pas donner des pouvoirs trop impor-
(1) A titre d'exemple, on peut citer les arrêts Brown v. Board of Education,
347 US 483 (1954), qui déclare inconstitutionnelle la ségrégation dans l'enseign
ement ; Baker v. Can 396 U.S. 186 (1962), qui pose le principe « one man, one vote ».
De même, en droit privé, les tribunaux continuent à avoir un rôle créateur. V. par
ex., le développement de la jurisprudence qui a élaboré la responsabilité sans faute
des fabricants pour les produits défectueux. Codling v. Paglia, 32 N.Y. 2d 330
(1973).
(2) La règle, en droit américain, est qu'une personne doit être citée devant
le tribunal du lieu où l'assignation lui a été délivrée en personne. A cette règle,
on a ajouté d'autres dispositions qui donnent compétence au tribunal du lieu où
se déroulent ses activités. V. par ex., Smit, « Common and Civil Law Rules of In
Personam Adjudicatory Authority : An Analysis of Underlying Policies », 21
International and Comparative Law Quarterly 335 (1972).
(3) La Cour Suprême des Etats-Unis a décidé que les tribunaux fédéraux
devaient appliquer la loi de l'Etat (en l'espèce celui de New York) lorsque leur
compétence d'attribution se trouvait fondée sur une différence de citoyenneté. Alors
que les tribunaux fédéraux peuvent normalement appliquer leurs propres règles de
procédure, la Cour a donc estimé que cette règle était de nature « substantielle »,
en ce sens qu'elle affectait les droits substantiels des parties. Palmer v. Hoffman,
318 U.S. 109 (1943).
(4) La Cour Suprême a aussi jugé que cette règle était de nature « substant
ielle ». Cohen v. Beneficial Industrial Loan Corp., 337 U.S. 541 (1949).
(5) V.. p. ex.. Federal Rules of Civil Procedure, Rule 30 (d). INSTRUMENT DE RÉFORME SOCIALE COMME
tants aux autorités judiciaires et de la volonté de laisser aux parties
un certain pouvoir de contrôle sur leur propre procès.
De tels conflits entre plusieurs valeurs sociales également import
antes se trouvent, en fait, à la base de la plupart des règles de procé
dure civile. La nature technique de ces règles peut rendre difficile l'a
ppréhension exacte des valeurs en jeu, mais il ne fait aucun doute
que l'analyse propre des jugements sociaux, qui se trouvent incorporés
dans ces règles est indispensable à leur compréhension et à leur appli
cation.
Il en est ainsi notamment des règles de procédure qui ont été
élaborées ces dernières années, afin de faciliter la revendication de leurs
droits par des personnes qui, sans cela, continueraient d'être privées
de toute protection réelle. L'importance sociale de ces règles est évi
dente dans la mesure où elles transforment des droits n'ayant qu'une
existence formelle et apparente en droits effectifs et susceptibles d'être
mis en œuvre. Elles reflètent le souci de la société de protéger les
droits des personnes qui, normalement, ne pourraient introduire une
instance pour les faire reconnaître. Mais elles vont encore plus loin,
puisqu'elles donnent aux tribunaux un rôle prééminent dans la défense
d'intérêts publics. Elles reposent, en fait, sur une double idée : celle
d'abord, qu'il est mauvais de laisser certains droits sans protection sous
le prétexte que les personnes intéressées n'engagent pas de procès —
et celle, ensuite, que la protection efficace de ces droits doit être assurée
par les tribunaux et non par une autre institution gouvernementale, par
exemple administrative. Ce deuxième aspect revêt une importance pri
mordiale pour l'organisation de la société en général : car il va de soi
que l'attribution aux tribunaux de fonctions supplémentaires soulève un
certain nombre de questions sur le rôle, le recrutement et la formation <

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