Les droits européens face à la procréation médicalement assistée : primauté de la technique ou primauté de la personne ? - article ; n°1 ; vol.46, pg 141-152
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Les droits européens face à la procréation médicalement assistée : primauté de la technique ou primauté de la personne ? - article ; n°1 ; vol.46, pg 141-152

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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1994 - Volume 46 - Numéro 1 - Pages 141-152
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 11
Langue Français

Extrait

M. Roberto Anderno
Les droits européens face à la procréation médicalement
assistée : primauté de la technique ou primauté de la personne
?
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 46 N°1, Janvier-mars 1994. pp. 141-152.
Citer ce document / Cite this document :
Anderno Roberto. Les droits européens face à la procréation médicalement assistée : primauté de la technique ou primauté de
la personne ?. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 46 N°1, Janvier-mars 1994. pp. 141-152.
doi : 10.3406/ridc.1994.4815
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1994_num_46_1_4815R.I.D.C. 1-1994
LES DROITS NATIONAUX EUROPÉENS
FACE A LA PROCRÉATION
MÉDICALEMENT ASSISTÉE :
PRIMAUTÉ DE LA TECHNIQUE
OU DE LA PERSONNE ?
Roberto ANDORNO
Docteur en droit, chercheur du « Consejo Nacional
de Investigaciones Cientificas y Técnicas » (CONICET)
de la République Argentine
Depuis un peu plus d'une décennie, les juristes se trouvent acteurs
d'un débat inattendu et complexe entre les sciences biomédicales et le
droit : la biologie et la médecine, dont les développements techniques
en matière de procréation artificielle ne cessent d'avancer, opèrent des
modifications dans la structure familiale et sociale en marge des principes
juridiques établis, en modifiant la représentation classique de la valeur
accordée à la personne, à sa « corporéité », au sens de la procréation et
à la famille fondée sur les liens du sang.
A son tour, le droit, élaboré pour résoudre les conflits entre les
particuliers, ou entre les particuliers et l'État, se trouve dans l'incapacité
de faire face à une situation pour laquelle il n'était pas préparé : la science
et la technique, alliées jusqu'alors à la dignité de la personne, semblent
aujourd'hui entrer en conflit avec elle, comme le manifestent certaines
pratiques biomédicales.
Les techniques de procréation artificielle — ou de procréation médica
lement assistée (PMA) — sont peut-être le meilleur exemple de ce phéno
mène. Une partie de ces nouveaux problèmes sont dus, d'une part, au
remplacement, à travers la fécondation « in vitro » (FIVETE), de la famille
fondée sur les liens du sang par une famille « artificielle », reconstituée
à partir de gamètes de sujets anonymes ; d'autre part, aux manipulations
de l'embryon humain, et à la prédétermination du patrimoine génétique
des citoyens de demain.
Quel est le rôle du droit dans ce conflit ? Doit-il se plier à tous les
développements possibles ou, au contraire, doit-il établir une hiérarchie 142 REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARE 1-1994
de valeurs entre les différentes pratiques médicales pour décider lesquelles
peuvent être encouragées et lesquelles, au contraire, doivent être réfutées ?
Notre intention est d'exposer d'une façon synthétique les deux cou
rants législatifs représentés en Europe dans ce domaine du droit et ensuite,
de faire un bilan global des solutions proposées, en formulant quelques
principes propres à un système juridique respectueux de la personne.
I. — L'EUROPE ET LA PROCREATION ARTIFICIELLE :
DEUX POSITIONS OPPOSÉES
Ces dernières années, quelques pays d'Europe ont adopté des lois
en matière de procréation artificielle, en suivant des orientations très
variées, non seulement en ce qui concerne la nature — pénale ou civile
— des législations, mais aussi quant à la philosophie de base dans la
perspective de laquelle ces nouvelles techniques sont considérées.
Une vision schématique de la situation permet d'affirmer l'existence
de deux tendances législatives : l'une, qui fait prévaloir les développements
techniques (l'Espagne, le Royaume-Uni et la France) et l'autre, qui met
en relief l'intérêt des personnes concernées par les nouvelles pratiques,
et tout spécialement, l'intérêt de l'enfant qui en est issu (l'Allemagne,
l'Autriche, la Suède, la Norvège et la Suisse).
A. — La primauté de la technique
Les législations qui accordent la priorité au développement scientif
ique présentent certaines caractéristiques communes :
— Acceptation de principe de toutes les variantes techniques possi
bles, en particulier celles qui impliquent l'emploi de gamètes étrangers
au couple, tant masculins que féminins.
— Anonymat du donneur de gamètes, sans possibilité pour l'enfant
d'avoir accès à l'identité de son père ou de sa mère biologiques.
— Le respect de la vie embryonnaire est retardé dans le temps,
généralement jusqu'à quatorze jours après la fécondation. Comme consé
quence, il existe une ample liberté dans la manipulation des embryons
et dans la création d'embryons en surnombre, qui peuvent être congelés,
donnés à un autre couple, utilisés dans la recherche, voire détruits.
— Une grande souplesse, voire même l'omission de conditions spé
ciales à remplir par les éventuels destinataires des PMA.
Se situent dans cette ligne les législations espagnole, britannique et
les projets de loi adoptés en France par l'Assemblée Nationale en novembre
1992.
L'Espagne a réglementé la matière par la loi n° 35/1988 sur la « repro
duction humaine assistée » du 22 novembre 1988. L'article 1°, alinéa 2
de la loi dispose que « les techniques de reproduction assistée ont comme
objectif fondamental l'action médicale face à la stérilité humaine, pour
faciliter la procréation quand d'autres thérapies ont été écartées comme
inadéquates ou inefficaces ». L'article 3e reprend cette idée : « la féconda- R. ANDORNO : PROCRÉATION MÉDICALEMENT ASSISTÉE 143
tion d'ovules humains dans une finalité autre que la procréation humaine
est interdite ».
Néanmoins, le même article 1er neutralise la valeur des principes
énoncés quand il précise que « ces techniques peuvent aussi être utilisées
dans la prévention et le traitement des maladies d'origine génétique ou
héréditaire » (al. 3), ce qui comporte, à travers l'élimination des embryons
risquant d'être malades, la mise en pratique d'un eugénisme pré-implanta-
toire. En même temps, on dispose que « la recherche et l'expérimentation
sur des gamètes et des ovules humaines fécondées peuvent être autorisées »
(al. 4) (1). Il s'agit donc de techniques à finalités multiples, la procréation
étant seulement un des buts poursuivis parmi d'autres, malgré les énoncés
initiaux.
A propos du statut juridique de l'embryon, le législateur espagnol
adopte la thèse qui établit une discrimination entre le pré-embryon (ju
squ'au 14e jour à partir de la fécondation) et l'embryon (une fois ce terme
passé). La manipulation du pré-embryon (congélation, expérimentation,
etc.) bénéficie de plus de facilités que celle de l'embryon (2).
En ce qui concerne les usagères des techniques, la loi semble reconnaît
re une valeur absolue à la volonté individuelle : « Toute femme peut être
réceptrice ou usagère des techniques régulées par la présente loi » (art. 6).
On exige seulement qu'elle ait au moins dix-huit ans et une pleine capacité
d'exercice. La femme célibataire peut donc réclamer l'accès à la procréat
ion artificielle. L'insémination post mortem est admise (art. 9, al. 2). La
maternité de substitution ou « location d'utérus », en revanche, n'est pas
acceptée (art. 10).
L'article 5 de la loi admet le recours à des gamètes masculins et
féminins de tierces personnes. Le contrat est gratuit, secret et révocable.
L'enfant n'a le droit de connaître l'identité de son père génétique qu'au
« cas exceptionnel où cela est exigé par des circonstances extraordinaires
comportant un péril certain pour la vie de l'enfant (...) et à condition que
cela soit indispensable pour éviter le danger » (art. 5, al. 5). Par ailleurs,
les membres du couple ayant fait recours à des gamètes de tiers, ne
peuvent pas désavo

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