Sur un Etat tiers bien peu discret : les États-Unis confrontés au statut de la Cour pénale internationale - article ; n°1 ; vol.49, pg 32-70
40 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Sur un Etat tiers bien peu discret : les États-Unis confrontés au statut de la Cour pénale internationale - article ; n°1 ; vol.49, pg 32-70

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
40 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Annuaire français de droit international - Année 2003 - Volume 49 - Numéro 1 - Pages 32-70
39 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2003
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Mme le Professeur Frédérique
Coulée
Sur un Etat tiers bien peu discret : les États-Unis confrontés au
statut de la Cour pénale internationale
In: Annuaire français de droit international, volume 49, 2003. pp. 32-70.
Citer ce document / Cite this document :
Coulée Frédérique. Sur un Etat tiers bien peu discret : les États-Unis confrontés au statut de la Cour pénale internationale. In:
Annuaire français de droit international, volume 49, 2003. pp. 32-70.
doi : 10.3406/afdi.2003.3742
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_2003_num_49_1_3742ANNUAIRE FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL
XLIX - 2003 - CNRS Éditions, Paris
SUR UN ETAT TIERS BIEN PEU DISCRET :
LES ÉTATS-UNIS CONFRONTÉS AU STATUT
DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE
Frédérique COULÉE
L'hostilité manifestée par les États-Unis à l'égard de la Cour pénale
internationale est à replacer dans le contexte des rapports ambigus qu'entretient
la superpuissance avec le droit international et, plus spécialement avec la justice
internationale. Dénoncer une tendance à faire du droit international l'instrument
malléable d'une politique étrangère marquée par l'unilatéralisme et la
préservation de l'intérêt national relève du lieu commun. En vertu de cette
approche particulièrement visible dans le domaine du recours à la force et en
matière économique, les États-Unis prétendent parfois imposer leur volonté aux
autres États ou faire prévaloir l'application de leur législation au-delà de leurs
frontières. On se souvient à cet égard de Ylran and Libya Sanctions Act et du
Cuban Liberty and Democratic Solidarity Act, plus connus sous les dénominations
de lois d'Amato et Helms-Burton et du régime de sanctions d'application
extratenïtoriale établi, qui ont suscité, parmi d'autres, les vives réactions de
l'Union européenne.
La stratégie américaine dans les grandes négociations internationales pour
être moins connue n'en est pas moins constante : une puissance inégalée dans les
faits tente de traduire cette réalité en supériorité juridiquement reconnue par les
autres États. Les États-Unis essaient ainsi d'imposer leurs vues lors de la
négociation et, en fonction de l'adéquation entre le texte finalement adopté et leurs
aspirations, après avoir infléchi la négociation de façon souvent déterminante 1,
décident de devenir partie, souvent avec d'importantes réserves ou de demeurer
étrangers au traité. La Charte des Nations Unies et le traité sur la non-
prolifération des armes nucléaires illustrent bien cette reconnaissance en faveur
des États-Unis (avec d'autres) d'un statut particulier déterminé par un surcroît de
puissance. Des instruments plus récents révèlent cependant un succès plus
incertain de la démarche américaine. La négociation de la convention d'Ottawa du
18 septembre 1997 sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du
transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, pourtant initiée par cet
État, a démontré qu'il ne pouvait pas toujours faire prévaloir sa volonté.
Une fois le traité conclu, si les États-Unis ne refusent pas de se lier, les
exemples abondent où ils reviennent sur la parole donnée, interprètent leurs
obligations de façon peu exigeante ou dénoncent unilatéralement
(*) Frédérique COULÉE, professeur à l'Université d'Orléans. L'auteur remercie Olivier BARRAT,
chargé de mission auprès du directeur des affaires juridiques au ministère des affaires étrangères et
Géraldine MATTIOLI, chargée de campagne « Justice internationale » à Human Rights Watch.
1. Concernant des négociations particulièrement marquées par l'influence des États-Unis, voy.
Pierre KLEIN, « The effects of US predominance on the elaboration of treaty regimes and on the evolution
of the law of treaties » spec. pp. 365-366 in Michael BYERS and Georg NOLTE (éd.), United States Hege
mony and the Foundations of International Law, Cambridge University Press, 2003, XVII et 531 p. LES ÉTATS-UNIS ET LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE 33
engagements2, notamment en matière de désarmement3, de protection de
l'environnement 4. En matière de protection des droits de l'homme, les États-Unis
n'ont pas ratifié nombre de traités internationaux importants ou se sont engagés
en formulant de très larges réserves, écartant de la sorte toute modification
de leur droit interne5. Dans ces divers domaines, l'attitude américaine, qu'elle
soit constitutive d'une violation du droit international ou qu'elle soit simplement
jugée inopportune par l'exemple qu'elle véhicule et les choix qu'elle traduit, a
souvent suscité de vives réactions tant institutionnelles qu'étatiques, les alliés
les plus proches des États-Unis étant bien souvent les plus acerbes. La force de
ces réactions justifie que l'on s'arrête un instant sur une telle approche. Avoir
pour objectif, dans le cadre d'une négociation, de promouvoir et de préserver ses
propres intérêts est une démarche banale qui pourrait définir la politique
juridique extérieure de n'importe quel État 6. De même, le droit d'un État de
ne pas devenir partie à un traité n'a pas à être démontré. Prétendre imposer
ses intérêts dans la méconnaissance la plus complète de ceux des autres, y
compris en empêchant une négociation d'aboutir est, au moins quant à la
méthode, plus exceptionnel. Il peut également devenir inconvenant de vouloir
pour les autres, y compris par des voies non conventionnelles et en usant des
privilèges qui découlent du statut de membre permanent du Conseil de sécurité,
des obligations que l'on écarte systématiquement pour soi-même. À trop souvent
2. Pierre BUHLER, « Les États-Unis et le droit international », Commentaire, n° 103, automne 2003,
pp. 549-562.
3. Le 13 octobre 1999, le Sénat américain rejetait la ratification du traité d'interdiction complète
des essais nucléaires. Bien que la négociation ait pris en compte toutes les préoccupations américaines,
la non-ratification américaine bloque l'entrée en vigueur de ce traité. Les États-Unis demeurent hostiles
à un système de vérification et veulent se préserver une marge de manœuvre qui leur permettrait de
reprendre des essais qui, allant au-delà d'une simple simulation, pourraient ne pas être en parfaite
conformité avec cet instrument. Le 13 décembre 2001, le Président G. W. BUSH annonçait le retrait des
États-Unis du traité relatif aux missiles anti-balistiques (ABM). Quelques jours plus tôt, la Conférence
sur l'interdiction des armes bactériologiques s'était achevée sans résultat tangible, les États-Unis s'étant
opposés à toute mesure contraignante en matière de vérification. Le projet de protocole sur la vérifica
tion à adjoindre à la convention de 1972 était ainsi compromis. Finalement, le 13 juin 2002, après un
préavis de six mois et afin de mettre en œuvre leur projet de bouclier anti-missiles, les États-Unis
dénonçaient le traité ABM. La convention d'Ottawa sur les mines antipersonnel met en place un système
d'interdiction totale que les États-Unis ne sont pas prêts à accepter. Ils sont en revanche partie au proto
cole II à la convention de Genève de 1980 sur les armes produisant des effets traumatiques, qui met en
place des interdictions partielles et des limitations d'emploi.
4. Le 13 mars 2001, le Président G. W. BUSH réaffirmait son opposition au protocole de Kyoto et sa
décision de ne pas le ratifier. Il renonçait en outre à réglementer les émissions de dioxyde de carbone aux
États-Unis. Les États-Unis s'étaient pourtant engagés à réduire de 7 % leurs émissions entre 1990 et
2010. Par ailleurs, les États-Unis ne sont pas devenus partie à la convention de Rio sur la diversité biolo
gique du 5 juin 1992 qu'ils ont signée le 4 juin 1993.
5. Les États-Unis ne sont pas partie au pacte des Nations Unies sur les droits économiques, sociaux
et culturels de 1966, à la convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents