Un juriste anglais dans la Communauté européenne - article ; n°2 ; vol.30, pg 493-504
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1978 - Volume 30 - Numéro 2 - Pages 493-504
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1978
Nombre de lectures 18
Langue Français

Extrait

Kurt Lipstein
Un juriste anglais dans la Communauté européenne
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 30 N°2, Avril-juin 1978. pp. 493-504.
Citer ce document / Cite this document :
Lipstein Kurt. Un juriste anglais dans la Communauté européenne. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 30 N°2, Avril-
juin 1978. pp. 493-504.
doi : 10.3406/ridc.1978.18444
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1978_num_30_2_18444UN JURISTE ANGLAIS
DANS LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE
par
Kurt LIPSTEIN
Professeur honoraire à l'Université de Cambridge
Fellow of Clare College
Professeur associé à de Paris I
I. — Introduction
Un brocard anglais dit que la common law est une « maîtresse
difficile » et les juristes continentaux ont éprouvé de temps en temps un
sentiment d'exaspération quand ils avaient à traiter avec leurs collègues
d'Outre-Manche. En fait, il m'est souvent arrivé qu'après avoir expliqué
certains problèmes techniques difficiles qui nous opposent — certes pas
au fond — on m'ait posé la question : pourquoi, dans les conditions
actuelles, alors que la Grande-Bretagne a rejoint la C.E.E., les Anglais
— et je suppose que ce terme inclut ici, dans un sens non technique, les
Ecossais, les Irlandais du Nord et les résidents de l'île de Man ainsi que
les citoyens de la République irlandaise — n'essaient-ils pas de rendre
leur droit plus conforme à celui des autres Etats membres ? Ainsi res
terait uniquement intact le droit des îles anglo-normandes, dont le droit
féodal et franco-normand serait le seul compatible avec la notion de
telle qu'elle a cours dans la Communauté.
IL — La base politique de la common law
En fait, les choses ne sont pas aussi simples que cela. Il ne faut pas
oublier que la réception du droit romain par les nouveaux Etats, grands
et petits, alors en pleine évolution, fut influencée au Moyen Age par
des motifs politiques. L'introduction d'un système de droit unique, appli
qué par un corps centralisé de fonctionnaires et de tribunaux, fournissait
le moyen de supplanter la multiplicité de droits locaux appliqués au nom
d'un grand nombre de barons féodaux. Ce motif — et non pas la pré
tention qu'il constituait le droit du Saint Empire romain germanique dont
(*) Texte de la communication présentée lors de l'Assemblée générale de la
Société de législation comparée, le 17 mars 1978. UN JURISTE ANGLAIS 494
la qualité, dans la forme élaborée en Italie était supérieure aux autres
droits — assurait son adoption et son caractère permanent. Mais, alors
qu'il se développait et s'installait à travers l'Europe de l'Ouest, entre
1200 et 1500, un système semblable avait déjè été créé en Angleterre
grâce au génie des premiers rois normands. En face d'une opposition
féodale puissante dont les racines plongeaient dans des juridictions local
es, la nouvelle autorité royale concentrait un noyau croissant de pouv
oirs, à son siège à Westminster, en créant un corps de juges centralisé
qui exerçait leurs pouvoirs à travers tout le pays en appliquant un système
de droit unique et uniforme, appelé « common law ». Il fut allégué que
ce système était identique aux anciennes lois d'Edouard dit le Confess
eur.
Ainsi, quand le droit romain, dans la forme élaborée par les profes
seurs en Italie, est arrivé en Angleterre dans la valise d'un prêtre savant
(Vacarius), sa fonction politique comme force d'unification avait été
remplie pendant plus de cent ans par la common law nationale. Par
conséquent, une autre tâche lui fut confiée : celle de l'enseignement, dans
les deux universités du pays, des praticiens appelés à exercer leurs fonc
tions devant les tribunaux ecclésiastiques, qui appliquaient le droit canon,
et la Cour d'Amirauté, qui appliquait la lex mercatoria, et non
celui des juristes en général qui devaient exercer leur profession devant
les tribunaux ordinaires. Ceux-ci recevaient leur instruction en tant qu'ap
prentis attachés aux cours de Westminster. Pendant les siècles suivants,
le droit romain servit de soutien à des tendances autoritaires en fournis
sant une procédure inquisitoriale (Star Chamber), de base pour l'exercice
séculaire des droits divins des rois ainsi que pour quelques mesures de
réforme personnelles et, plus généralement, au cours des xvm6 et xixe
siècles, de système de droit subsidiaire apte à combler certaines lacunes
dans la common law (1). Aucune de ces fonctions n'a assuré au droit
romain une position de supériorité et quelques-unes l'ont fait tomber
dans un mépris perpétuel.
III. — Droit non écrit - Avantages
Ainsi peut-on dire qu'aujourd'hui la common law constitue une
partie plus authentique du patrimoine national que l'on ne peut l'affirmer
à propos du droit romain commun ou de la plupart des codes européens,
à l'exception peut-être du Code civil français. En outre, c'est un phéno
mène curieux que de constater qu'un droit non écrit semble conserver
sa popularité sur une plus longue période et qu'il demeure, par consé
quent, plus stable qu'un droit écrit. La Constitution du Royaume Uni en
fournit un exemple. Il me semble qu'une explication possible est l'absence
de certitude d'un droit non écrit dans certaines limites, qui permet une
certaine flexibilité en assurant néanmoins la continuité des règles fonda
mentales à travers des périodes et des circonstances différentes. Si cette
(1) Taylor v. Caldwell (1863) 3 B. & S. 826. LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE 495 DANS
hypothèse est correcte elle peut servir aussi à expliquer en grande partie
la manière anglaise de traiter la loi écrite, dont nous parlerons ci-dessous.
Cette flexibilité se manifeste non seulement dans la jurisprudence, mais
aussi dans la vie constitutionnelle. Ainsi, le fait qu'un pair du Royaume
ne puisse être nommé Premier ministre est devenu un usage dans la
constitution au cours des quatre-vingts dernières années. Dans la juri
sprudence, la conception de leurs fonctions dans l'application du droit par
les juges le démontre aussi. Tandis qu'un tribunal français interprète la
loi de nouveau dans chaque cas, un juge anglais soit applique un droit
bien établi aux faits prouvés devant lui, soit décide le droit pour la
première fois. Suivant une méthode inductive il examine la situation
particulière, en débat afin de déterminer si une règle, qui a déjà été établie
dans des circonstances proches mais différentes, peut ou doit néanmoins
être étendue à l'espèce présentée devant le tribunal. Ceci explique pour
quoi il est essentiel de le reproduire dans les recueils de jurisprudence,
tandis qu'il me semble qu'en France l'importance des faits est cachée par
la formulation et l'application d'une règle abstraite.
IV. — Droit non écrit - Limites d'une extension territoriale
S'il est vrai qu'un droit non écrit comme la common law tend à se
perpétuer, il est vrai aussi qu'il ne se prête pas à une extension à l'étran
ger. La raison en est claire : faute de règles écrites, une telle extension
exige l'exportation d'un cadre de juges et de juristes dont la formation
est basée sur la common law. Seule une colonisation fournit ces condit
ions favorables et l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Canada à l'excep
tion de la Province de Québec, et les Etats-Unis à l'exception de la Loui
siane en sont des témoignages vivants. D'autre part, dans les pays où la
common law a été reçue sans ces aides, il a paru nécessaire de la codif
ier. Nous avons donc Vlndian Contract, les autres codes indiens et les
éditions dites Revised Laws dans la plus grande partie des pays anglo
phones d'Afrique, des Indes de l'Ouest et ailleurs. Cela démontre qu'une
telle codification est possible, mais l'expérience a prouvé aussi que cette
technique tend à la pétrifier, car l'évolution ultérieure de la common law
ailleurs ne peut plus être absorbée. Cependant, c'est l'avantage de la
common law que son évolution dans un pays peut être entérinée dans
un autre et qu'ainsi se constitue un système de principes généraux du
droit ou de droits naturels concrets,

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