Les illusions du « made in France »
1 page
Français

Les illusions du « made in France »

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
1 page
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

Les illusions du « made in France »

Informations

Publié par
Nombre de lectures 160
Langue Français

Extrait

Les Echos Envoyez vos contributions àidees@lesechos.fr
Les illusions du « made in France » e Premier ministre aLA CHRONIQUEs ’ é t a i td o m e s t i q u e présenté les grandesDU CERCLE DESdégradé. En réalité, le pro-Lête du marché intérieur orientations du pro-ÉCONOMISTESblème est bien plus com-gramme de recon-PAR LIONEL FONTAGNÉp a se tp l e x e ,n ’ac e l a quéchappé au rapport Jego […] [qui]soutiendra lessous-titré « En finir avec la projets valorisant les res-m o n d i a l i s a t i o na n o -C’est la qualité sources et faisant appel auxnyme ». Il se pourrait bien qualifications nationales. »que les produits français des produits et la Nous sommes le 2 décem-ne soient pas français, qu’il capacité à les offrir bre 1981. Vingt-huit ans ety ait tromperie sur la mar-dans des conditions une désinflation compéti-chandiseenquelquesorte. tive plus tard, on peut lireL’Observatoire relève ici compétitives sur le site du gouverne-que, sur dix ans, la part des ment qu’« il est importantqui sont gagescomposants importés d’inciter les producteurs àdans la production en de succès être plus responsables etFrance a augmenté aux transparents sur l’originepour les économiesdépens de la valeur ajou-géographique des produitstée en France. Ce que à hauts revenus. qu’ils vendent »et qu’ill’Observatoire relève fort entend promouvoir lejustementn’estninouveau m a r q u a g e« ma d ei nn ii s o l é.L e sré su l t at s France ».récemment présentés par Quand l’industrie vala Commission améri-mal,l’excèsd’importations cainepour le commerce est incriminé, en phase avec une opinioninternational (Usitc) montrent que, au écrasante des Français. Selon une enquêteniveau mondial et en moyenne, un peu plus Sofres réalisée du 30 au 31 mars dernier, seu-de 20 % de la valeur des exportations revient lementunFrançaissurdixconsidéraitquela àdes importations intermédiaires. Le chiffre priorité des entreprises françaises était dele plus élevé est celui du Mexique (50 %) et le résister à la concurrence internationale enplus bas celui de l’Europe (environ 15 %). produisant dans des localisations à bas coût.Cette estimation intègre le fait qu’une partie A l’inverse, 88 % des sondés répondaientde nos importations comprend… de la que la priorité était de produire en France etvaleur ajoutée nationale, qui doit être que le rôle de l’Etat était d’encourager celadécomptée. par des aides à la relocalisation et un labelEn réalité, le problème est l’exportation. « made in France ».Dans la mesure où la France ne représente L’origine des produits a plusieurs dimen-que 5 % du revenu – et donc de la demande – sions. Laissons de côté les produits ayantau niveau mondial, l’équation de l’emploi une origine géographique contrôlée neindustriel est finalement fort complexe : représentant qu’une petite partie de notrecomment convaincre les consommateurs consommation. Pour tout le reste, se poseétrangers d’acheter des produits fabriqués, avant tout une question de sécurité, de qua-au moins pour partie, en France ? De nom-lité, d’innocuité. Des normes sanitaires etbreuses marques françaises attestent d’un techniques gèrent le commerce internatio-savoir-faire, d’une qualité, d’une innovation nal de ces biens, et l’Europe est en celes rendant attractives sur les marchés les domaine bien équipée ; le « made inplusdynamiques.Plusgénéralement,c’estla France » n’apporte ici aucune garantie sup-qualité des produits et la capacité à les offrir plémentaire. La deuxième dimension est ledans des conditions compétitives qui sont coût de transport des produits et plus géné-gages de succès pour les économies à hauts ralement le contenu carbone de notre con-revenus. N’oublions pas que le succès com-sommation, malheureusement difficile àmercialallemandàl’exportations’appuiesur établir. La troisième dimension est sociale :une qualité ressentie élevée et sur l’importa-les conditions de travail sont généralementtion croissante de composants en prove-moins bonnes dans les pays à bas coûts.nance de pays à plus bas coûts de salaires. Mais ici l’action la plus directe est d’imposerOn se rappelle que, surfant avec humour aux distributeurs une plus grande attentionsur l’opinion française, un constructeur à ces aspects. Enfin, la dernière dimensionautomobile avait fait la promotion de ses concerne l’activité industrielle en France etvéhicules en France avec le slogan « made in l’emploi. quality». A défaut d’être grammaticalement Le tout nouvel Observatoire du fabriquécorrecte, cette formule résume l’orientation en France a relevé que, en dix ans la part desnécessaire de notre politique industrielle. produits fabriqués en France avait reculé dans le marché intérieur tandis que les pro-Lionel Fontagné est professeur ducteurs français perdaient des parts deà l’Ecole d’économie de Paris marché à l’exportation, de telle sorte que le(université Paris-I) et membre rapport de la production à la consommationdu Cercle des économistes.
LA REVUE DU JOUR Notre pays dans trente ans Le propos.La Datar a une grande tradition de prospective. Après avoir, depuis les années 1960, successivement imaginé la France en 2000, puis en 2015, puis en 2020, tout comme, plus largement, les territoires à l’horizon 2030, la célèbre Délégation à l’aménagement du territoire (et, désormais, à l’attractivité régionale) remet le couvert de l’expertise et du débroussaillage de l’avenir pour 2040. Un nouveau programme d’études et de controverses prospectives a été lancé pour dessiner la France de demain, dans une Europe économique plus intégrée et dans un monde toujours davantage urbanisé. La nouvelle revue de la délégation rend compte de travaux et d’analyses qui vont de la localisation des activités de R&D aux choix résidentiels des ménages, en passant par la place de la nature dans les politiques d’aménagement ou encore les territoires à base économique résidentielle et touristique. L’intérêt.Constitué de textes courts et clairs, le volume est concis dans la forme, large dans l’ambition. On retiendra, par exemple, la contribution de Karine Hurel sur les nouvelles méthodes de cartographie (avec, notamment, des cartogrammes qui déforment les espaces en fonction des populations qui y résident). On retiendra aussi l’article de Florian Muzard sur les enjeux et les stratégies de l’aménagement du territoire, dans un contexte d’extension urbaine, de concentration métropolitaine et de nouvelles ruralités. Cette publication, servie par une iconographie et des illustrations de qualité, se retrouve en texte intégral sur le site http://territoires2040.datar.gouv.fr/. La citation.« L’époque est dite incertaine mais fait pourtant grand cas de ses capacités paradoxales d’anticipation »(Martin Vanier, professeur de géographie). J. D. Datar, « Territoires 2040. Aménager le changement », Revue d’études et de prospective, n° 1, La Documentation française, 2010, 20 euros.
IDÉES JEUDI 14 OCTOBRE 2010LES ECHOS
15
LIVRES Internet à l’heure de la disgrâce Péril pour la créativité et la pensée, fermeture et surveillance croissantes, réseaux sociaux douteux. Un réquisitoire à travers trois ouvrages en anglais. Danger pour l’humanité ? Depuis un célèbre article « Google nous rend stupide », Nicholas Carr fait (comme l’on dit aujourd’hui) le buzz. Pour produire son livre critique d’Inter-net, l’essayiste s’est, partiellement, déconnecté, avant d’ouvrir à nouveau son blog (www.roughtype.com). Sa plongée dans l’histoire de la connais-sance et dans les résultats des neuros-ciences n’aboutit pas à de la jérémiade technophobe. Les gadgets digitaux qui nous occupent sont des expériences neurobiologiques. Le monde hypertexte amène à se concentrer sur l’événement, le clic et le clinquant. Du déluge de don-nées et d’images, les cerveaux adoles-cents sortiraient endommagés. Mais, comme le rappelle Carr, toute nouvelle technologie a un impact sur nos façons devoiretderaisonner.L’alphabet,lescar-tes, les montres ont changé le monde. Internet aussi. Dans ces pages, on en apprend beaucoup sur la « plasticité neurologique » de l’homme, à traversTHE SHALLOWS : WHAT des exemples concrets comme celui duTHE INTERNET IS DOING chauffeur de taxi dont le travail reposeTO OUR BRAINS, davantage maintenant sur son GPS queparNicholas Carr, sursamémoire.CarrdéploreledéclinduNew York, W.W. Norton, livre imprimé et l’essor du sabir des SMS.2010, 276 pages. Addiction, distraction, dispersion, carac-térisent assurément la pensée Internet. IlACCESS CONTROLLED. n’en reste pas moins que toutes ces TICTHE SHAPING OF agencent une nouvelle manière de vivre.POWER, RIGHTS, AND Pour Carr, nous perdons en concentra-RULE IN CYBERSPACE, tion, en réflexion et en contemplation. IlparRonald Deibert, John est probablement plus juste de dire quePalfrey, Rafal Rohozinski, nous changeons. Profondément.Jonathan Zittrain (dir.), Cambridge, MIT Press, 2010, Danger pour les libertés ?617 pages. La démocratie numérique mondiale, rêvée hier, n’est probablement pas pourTHE FACEBOOK EFFECT : demain. Des savants d’Internet, réunisTHE INSIDE STORY en une OpenNet Intiative (http://open-OF THE COMPANY THAT net.net/), expertisent les niveaux de con-IS CONNECTING trôle et d’atteinte aux libertés dansTHE WORLD, 65 pays (de l’Azerbaïdjan à la Nouvelle-parDavid Kirkpatrick, Zélande). Des ces études fouillées, il res-New York, Simon & Schuster, sort que de nouveaux murs et de nou-2010, 372 pages. veaux filtres apparaissent dans les régi-m e sau to r i t a i re s(q u if e r m e nte t censurent), mais aussi, sous d’autres for-mes, dans les démocraties (qui veulent « réguler »).La surveillance en ligneDanger Facebook ?informations personnelles collectées, sur s’étend, légitimée par la lutte contre leFacebook connecte, selon Facebook,les conséquences inattendues (des licen-terrorisme ou la pédopornographie. Sur10 % de l’humanité. Tout ceci provoqueciements parfois) de la divulgation de sa tous les continents, mais avec une inten-bien des appétits et des fantasmes. La fic-vie privée. Facebook, c’est aussi une aven-sité variée, s’observe une« colonisation »tureentrepreneuriale,assurantsaprospé-tion s’en mêle même, avec un film sur d’Internet par les Etats, inquiets d’unl’entreprise et son créateur, le jeune mil-rité et de nouveaux marchés de publicité. cyberespace qui repose sur des infras-liardaire Mark Zuckerberg. Le journalisteC’est, certainement, un vecteur de muta-tructures globales et privées. Les Fran-David Kirkpatrick revient sur le célèbretion des modes de vie. L’avenir, qui pour-çais, dont on apprend qu’ils passeraient,réseau social. Dans cette biographierait être assombri par des concurrents au total, un milliard d’heures par moisdétaillée qui s’intéresse bien moins à(Twitter)etparledurcissementdelalégis-sur la toile, vivent dans un des pays lesl’homme culotté qu’à son entreprise, lelation, n’a rien d’évident. Il y a en tout cas plus libres, mais où, débats sur la vidéo-lecteur pénètre véritablement dans Face-un côté sombre et un côté clair dans cette surveillance et Hadopi l’illustrant, lebook, ses locaux, ses dirigeants, ses pro-aventure.C’estledoubleeffetFacebook.A sujet est de plus en plus disputé. Lesjets. En une demi-décennie, la montée ensuivre sur la page qui lui est dédiée auteurs signalent la« militarisation »puissancedeceréseausocial,dénoncéou (www.facebook.com/thefacebookeffect). grandissante d’Internet. Démocrates, ilsdédaigné pour voyeurisme et exhibition-rappellent que Staline considérait que lenisme, a été accompagnée de multiplesJULIEN DAMON EST PROFESSEUR ASSOCIÉ téléphone était contre-révolutionnaire.polémiques sur le contrôle et la vente desÀ SCIENCES PO (MASTER URBANISME).
Rassurer Obélix (et les autres) Au milieu du duel enfiévré écolos-climatosceptiques, une série de textes qui ramène le débat à sa juste mesure. onne nouvelle : le ciel ne va pas« LE CIEL NE VA PASquelques prédictions alarmistes faus-nous tomber sur la tête. Sans ver-NOUS TOMBERses (la famine généralisée envisagée B ser dans l’écoscepticisme polémi-SUR LA TÊTE ».pour l’Asie dès les années 1990) ou que, une quinzaine de contributionsQUINZE GRANDSencore les errements des« résumés tirées d’un colloque de géographieSCIENTIFIQUESpour les décideurs »diffusés par le tenu à l’automne 2009 veulent nousGÉOGRAPHESGIEC. On goûtera le rappel des excès, ramener sur terre. Réunis par deuxNOUS RASSURENTdes jérémiades, voire des caricatures. professeurs de la Sorbonne, Sylvie Bru-SUR NOTRE AVENIRAl Gore et le commandant Cousteau nel et Jean-Robert Pitte, les auteursparSylvie Brunel,sont, en ces espèces, à l’honneur. Quel-proposent une mise en garde bienve-Jean-Robert Pitte (dir.), Paris,ques flèches plus dures et plus inhabi-nue contre les« climatomillénaristes »,JC Lattès, 2010, 353 pages, 19 euros.tuelles sont décochées, par exemple et l’« écocatastrophisme »(le sujet sus-sur une Datar qui ignorerait un quart cite des néologismes frappants). Alorsdu territoire (les forêts). Le sujet de que le développement durable prendsouvent, à dessein, détonnant, il n’y al’environnement, que les géographes certains traits d’une religion (avecpas déni de réalité quant aux problè-entendent d’abord comme le milieu liturgie, prêtres et ferveur), il importemes et tendances à l’œuvre. Au sujet dedans lequel vivent les hommes, est tou-d’écouter les voix dissonantes.l’eau, les inégalités sont incontestable-jours source de belles controverses. Les textes sont rassemblés sous troisment abyssales (un Américain con-Face à la dramatisation à outrance, titres qui sont trois thèses. Il n’y a pas,somme quatre fois plus d’eau qu’unces analyses veulent trier ce que sont tout d’abord, de nature sans humanitéEuropéen, vingt fois plus qu’un Afri-les dangers réels et les menaces fantas-(ce que tendraient à oublier les tenantscain) et les soucis sont tout à faitmées. Elles invitent, en somme, à de la d’une écologie radicale qui sanctifie lasérieux pour un accès efficient à la res-juste mesure. A rebours d’une vision nature). Ensuite, nous ne sommes passource. C’est, néanmoins, davantagesombre de l’avenir et noire de l’huma-trop nombreux (ce que pensent pour-l’organisation politique et sociale quinité, ces signatures appellent à ne pas tant nombre de néomalthusiens).compte que les conséquences de l’acti-dénoncer l’action humaine et son Enfin, des solutions existent (extensionvité humaine.intelligence prédatrice, mais à faire et intensification des cultures pouvant,On appréciera la relecture critiqueconfiance à la croissance et au progrès par exemple, contribuer à la réductiondes nombreux rapports qui jalonnent(technologique et humain). de la malnutrition). Si le propos estl’histoire de l’écologie, la reprise deJ. D.
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents