Lecture analytique « L es Animaux malades de la Peste »
2 pages
Français

Lecture analytique « L es Animaux malades de la Peste »

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
2 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

Découvrez sur ce document une lecture analytique très complète de la fable de la Fontaine Les Animaux malades de la Peste.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 3 839
Licence : En savoir +
Paternité, pas d'utilisation commerciale, partage des conditions initiales à l'identique
Langue Français

Extrait

 Lecture analytique «  eL snAauimmax delades  al tseP  e  ,»  Fables, VII, 1
Éléments pour une introduction:(présentation du texte: n‘oubliez pas de présenter auparavant l’auteur et les fables en général) Fable très célèbre, qui ouvre le second recueil desFables, publié en 1778, « Les Animaux malades de la Peste » est pourtant inconnue des livres d’Esope et de PLhÉèdre: La FoMnatadianme es dees t Mproonbteasbpleanm e»n, ta iun sspeiuriél  ddu HVaIuIde elnitv,r eq,u ia nan pounçblaiiét  usens  aArtppolluosg uluesx ue q ux7u.e451 ne ’ pître « A celui du premier recueil mais aussi un coloris plus voluptueux et plus sensuel. Or, cette fable placée en première position offre le tableau particulièrement sombre d’un univers frappé par la peste et un point de vue très pessimiste, sans illusion, sur la société humaine…
I La dramatisation Nous nous intéresserons d’abord à montrer en quoi cette fable, dans sa progression, multiplie les effets qui vont saisir, intéresser et émouvoir le lecteur. Ce travail de dramatisation apparaît tout d’abord dans la composition de la fable.
1°) La construction de la fable. - Le récit est amplement développé puisqu’il occupe presque totalité du texte (v.1-62). Les deux derniers vers constituent la moralité (63-64), mise en valeur par cette brièveté même. - La situation initiale, évoquant d’abord la cause du « mal » (1-5), puis ses effets (6-14), s’étend du vers 1 au vers 14: la description de la peste, reprend un des thèmes les plus utilisés dans la littérature antique ( Sophocle dans sa tragédieŒdipe Roi, LucrèceDe la Nature, VirgileLes Géorgiques) etmultiplie les points de vue, ce qu’attestent les pluriels ainsi que le pronom « tous » répété. La maladie mort aux animaux lane fait pas qu’apporter: elle leur retire aussi tous leurs instincts vitaux: la faim (v. 10), l’amour (14), la joie (14). La Fontaine mêle à la fois les connotations sombres (« mal », « crimes », « mouraient », « Achéron », « frappés ») et les touches plus tendres et idylliques1 vers 12 à 14: « des et innocente douce « », tourterelles », « amour », « joie ». - L’action n’est vraiment lancée qu’au vers 15 et elle sera essentiellement prise en chargepar le discours rapporté, tantôt directement (paroles du lion, du renard, de l’âne), tantôt indirectement (v44-48 et 55-62). - C’est encore en recourant aux discours rapportés que la narration va rendre compte de la résolution: paroles de l’âne et du reste de la cour audiscours indirect libre avec des (55-62, tournures exclamatives (v. 60), des formules populaires (« on cria haro sur le baudet ») , ce qui traduit une certaine distance ironique de la part du narrateur, qui semble rester silencieux. Ce silence contribue également à ménager lesuspens, puisque rien n’annonce ce qui va suivre. L’importance accordée dans le récit aux discours rapportés montre aussi quela parole est bien au centre de l’actionet que la peste est reléguée à l’arrière-plan. -L’antithèse « sa peccadille2/ cas pendable3», mise en valeur par les répétitions sonores inversées (ca, p, d) soulignela rapidité et l’absurdité du dénouement. - La situation finale évoque la mort du loup en un seul hémistiche: « on le lui fit bien voir ». Cet 1qui relève de l’amour tendre et simple, comme dans ces petits poèmes à sujet pastoral dans la littérature antique appelés «idylles ». 2Petite faute 3Qui rend digne d’être pendu.
euphémisme succède à des expressions hyperboliques (« rien que la mort », « expier son forfait », soulignée par la diérèse d’ « expi-er »).de chute en est d’autant plus souligné.L’effet
2°) Le bestiaire et la progression des discours a) utilisation de la symbolique traditionnelle des animaux: de très nombreuses figures du bestiaire sont convoquées (loup, renard, tourterelle, lion, tigre, ours, mâtins, âne) et toutes sont employées avec leur valeursymbolique conventionnelle. Ainsi la tourterelle symbolise l’amour simple et tendre, le renard la ruse et la flatterie, l’âne la bêtise, etc. Mais lahiérarchie animale renvoie à la hiérarchie humaine: le lion bien évidemment désigne le roi, le renard le courtisan, le « tigre », « l’ours », et « les autres puissances » (v.45) les grands seigneurs, les mâtins les petits seigneurs ou les bourgeois. L’ordre d’intervention des personnagessuit d’ailleurs cette hiérarchie: on passe du lion, qui a l’initiative de la parole, au « baudet ». Les humains ne sont pas absents (le berger, v. 29, 39-40, les moines, v.50) mais il n’apparaissent qu’à l’arrière-plan, comme s’il ne constituaient qu’un monde à part (« ces gens-là »), et n’ont pas de prise sur les animaux ( « sur les animaux/Se font un chimérique empire »).
b) La progression du discours des principaux protagonistes est intéressante parce qu’elle est révélatrice du rapport de forces en jeu: * Le lion entame son discours en envisageant les causes du « céleste courroux » (19) qui a valu cette « infortune » (17), puis évoque les enseignements de l’histoire (21-22). C’est donc en sage et en connaisseur qu’il se pose. Plus piquante est l’évolution du discours lorsqu’il s’agit d’examiner l’ « état de conscience » de chacun (v.24): ilcommence par accentuer ses propres fautes nulle « dévoré j’ai », force moutons mes appétits gloutons », «avec des hyperboles (« offense ») et la présence appuyée du « je » (« pour moi », « mes », etc.). L’extrême brièveté du vers 29 (3 syllabes: « Le berger »), associé à « Même » (v.28) renforce la gravité de la dernière faute avouée. par atténuer sa fauteMais le lion finit, imperceptiblement,, avec la tournure hypothétique « s’il le faut » (30) et la conjonction « mais ». * Le renard maîtrise lui aussi parfaitement la conduite de son discours. En bon flatteur, il va valoriser l’interlocuteur (« trop bon roi », « vos scrupules », « vos délicatesses ») tout en dénigrant ses victimes par antithèse, ce que va souligner l’emploi d’une gradation (« moutons, canailles, sotte espèce ») au vers 36. Il transforme le verbe « dévorer » employé par le lion (v. 26) par le terme «croquer » (37) beaucoup plus léger. Progressivement, la faute est déplacée sur la victime, en particulier « le berger », « digne de tous les maux » (40). L'expression « sotte espèce » paraît anticiper l'intervention de l'âne. * L'évolution du discours del'âne semble au contraire suivre un mouvement inverse:sa "faute" est liée au hasard, aux circonstances (v.50, 51) et à sa fantaisie dont il n'est même pas réellement responsable ("quelque diable me poussant"). Son repas est minime et limité ("la largeur de ma langue"). Mais il commet l'erreur de terminer en soulignant sa faute ("puisqu'il faut parler net") tout en reprenant l'expression du lion "nulle offense" (v.27) par "nul droit" (v. 54). La progression des discours est donc révélatrice des forces en jeu et prépare la logique du dénouement. 3°) Les procédés de la dramatisation II sont nombreux non seulement dans la description de la peste mais dans l'ensemble du récit. a) effet d'attente,rrateemed inttini: alapanoher de "mal", qui génère deuxpériphrasespour désigner la peste (v. 1 et 2). Il y a une sorte de réticence à désigner directement la peste (cf la parenthèse du vers 4, qui fait prétérition) qui ne peut que la mettre en valeur au début du vers 4 et ainsi renforcer l'idée de terreur.
b) emploi denombreuses expressions au pluriel(exemples à relever non seulement au début de la fable mais dans la suite, par ex. v. 45 à 49): l'idée d'omniprésence de la peste, qui frappe partout et tout le monde, en est renforcée. Le croisement encsaih ,emavec la reprise de « tous » (« Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés ») ainsi que lestournures négatives(« nul mets », « ni loups ni renards », « plus d'amour... plus de joie ») contribuent à ce même effet. b)hyperboles: « terreur », « sa fureur », « les crimes de la terre », « enrichir en un jour l’Achéron4», « tous étaient frappés », « force moutons », « le plus coupable » , « offense », « canaille », « sotte espèce », « digne de tous maux », « cas pendable », « crime abominable »... c)ons:datiarG animal,/ ce pelé, ce galeux » (57-58).« moutons, canaille, sotte espèce » (36), « ce maudit d) répétitions qui créent un htemyrsouvent binaire martelant la phrase: « mal » répété 2 fois (1-2), « ni loups ni renards », « la douce et l'innocente proie », « plus d'amour, plus de joie », etc. Les phrases nominales et les infinitifs accélèrent aussi le rythme de la phrase. d)a snoitarétillen R: « répand... terreur...fureur...crimes...terre...enrichir... l'Achéron... mouraient... frappés, etc. » e)oomyxre », avec antéposition de l'adjectif qui le met en valeur) et constructions(« mourante vie antithétiques comme « peccadille / cas pendable » (59), « puissant ou misérable », « blanc ou noir ». Tous ces procédés contribuent à renforcer l'expressivité de la fable, à non seulement en renforcer le tour dramatique mais aussi à introduire un décalage ironique. f)vocabulaire épique:champ lexical de la guerre et de la mort.
II Les messages de La Fontaine: la morale et ses cibles
1°) Les deux vers de moralité: - la brièvetéde la moralité, qui intervient sans transition immédiatement après le récit, renforce son caractèrelapidaire, percutant. - structuresbinaires et antithétiques:« puissant ou misérable », « blanc ou noir ».  - Emploi de la 2e personne du pluriel(vous) quilepretni te euqiplimle directement l'ensemble des  lecteurs. - Les verbes au futur (« serez », rendront »), là où on attendrait des présents de vérité générale, donnent une allure prophétique aux vers de moralité.
2°) Mais la morale n'apparaît pas que dans la moralité. Le discours de La Fontaine est perceptible dans l'ensemble de la fable et ses cibles sont multiples: a)Dénonciation de la justice,elle dépend de considérations préalables (tournurequi est injuste: hypothétique « selon que ») et elle est relative, c'est-à-dire qu'elle peut prononcer des jugements totalement opposés (« blanc ou noir » , « peccadille/cas pendable »). b)Dénonciation du pouvoir:les premiers intervenants sont des « puissances » (v.45), auxquelles on ne peut qu' « applaudir » (43). Terme repris dans la moralité « puissant ou misérable »: il n'y a pas d'autre alternative, en dehors du pouvoir, on n'existe pas. En même temps, les considérations du fabuliste ne se limitent pas à cette dénonciation du pouvoir: apparaît en filigranelriéotha uob ud eassimé cire5:le pouvoir et la cohésion sociale ne se maintiennent qu'en chargeant le plus faible. A cet égard, le pessimisme de La Fontaine sur l'humanité est frappant. c) Satire de la cour:l'intervention des animaux, on l'a vu, rend compte de la hiérarchie à la cour. Celui qui a une place centrale, c'est évidemment le courtisan flatteur, le renard, dont la parole a presque autant de force que celle du roi (« ainsi dit le renard ») et qui est soutenu par l'ensemble de la cour (« et flatteurs d'applaudir »). Les contemporains de La Fontaine pouvaient y voir une allusion à peine voilée au fonctionnement de la vie de cour à Versailles.
4PrononcerAkhéron. 5Hébreux, sacrifiait, en le chargeant de tous les péchés d'Israël.bouc que le prêtre, chez les
d)Une dénonciation politique:on peut voir, comme Madame de Sévigné l'a fait, dans le sort de l'âne une allusion à la disgrâce de Pomponne6, révoqué par Louis XIV. d)Une dénonciation des discours trompeurs: II y a dans les paroles du lion, du renard, du loup  eidorap enu - du discours religieux,des termes moraux, volontiers employés par les prédicateurs et lesavec directeurs de conscience : « péchés », « infortune », « coupable », « céleste courroux », « guérison commune », « dévouements », « sans indulgence », « l'état de notre conscience », « offense », « scrupules », « délicatesse », « péché », « maux », « pardonnables offenses », « dévouer », « peccadille », « petits saints »... - du discours judiciaire:«tint conseil», «coupable», voyons sans indulgence», «offense», «s'accuse», «justice», «coupable», «les gens querelleurs», «crier haro», «harangue», «cas pendable », « peccadille ». Orc'est celui qui précisément, ne maîtrise pas ce code du langage:l'âne, on a vu qu'il achevait son discours en insistant sur sa faute. L/expression vieillie « j ' a i souvenance» confirme qu'il se livre davantage à la fantaisie de ses humeurs. e) Plus discrètement aussi, et à travers le discours du renard, se profileit  euqohmmc or iesuneud  e'l erctiqi supérieur aux animaux:ces gens-là qui sur les animaux / Se font un chimérique empire ». Il y a une sorte« d'humiliation de la vanité de l'homme, qui néanmoins se fait « dévorer » par le lion, et qui se croit au centre de l'univers (cf l'introduction aux fables que nous avions faite en cours).
Fable riche à plusieurs titres donc, non seulement dans le travail de la narration mais aussi à travers les dénonciations multiples qui s'y profilent.
6Secrétaire d'État des affaires étrangères en 1671. Mme de Sévigné le défendra également dans ses lettres. Le problème de cette interprétation, c'est que Pomponne est disgracié en 1779 seulement, alors que la publication du second recueil date de 1678. On peut voir plus simplement une allusion à la disgrâce de Fouquet auquel La Fontaine est toujours resté fidèle.
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents