L implication des parents dans la scolarité des filles et des garçons : des intentions à la pratique
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L'implication des parents dans la scolarité des filles et des garçons : des intentions à la pratique

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En 1992, les parents préféraient une formation technique ou scientifique pour leurs garçons et envisageaient un niveau d'études globalement plus élevé pour leurs filles que pour leurs fils. Ce constat est toujours vrai à la rentrée scolaire 2003. Mais si on s'intéresse plus précisément au souhait d'un baccalauréat scientifique car c'est la filière la plus rentable des filières générales sur le marché du travail, alors les parents sont plus ambitieux concernant l'avenir de leurs garçons. Les ambitions scolaires des parents sont inégalement liées à la réussite scolaire selon qu'il s'agit d'une fille ou d'un garçon : à niveau d'études donné, les filles sont moins poussées vers la filière scientifique lorsqu'elles sont bonnes élèves. Par ailleurs, alors que la taille de la fratrie n'est jamais discriminante pour les garçons, elle influe significativement sur les orientations souhaitées pour les filles. Enfin, c'est parmi les parents les plus diplômés que les projets scolaires sont les plus homogènes entre les sexes. Ces ambitions différenciées pour les filles et les garçons ne se traduisent pas à première vue dans le comportement des parents en termes de suivi et d'implication dans la scolarité de leurs enfants. Cependant, si les parents aident en moyenne autant les filles que les garçons dans leur travail scolaire, ils seraient plutôt moins investis dans la scolarité de leurs filles que dans celle de leurs fils si l'on prend en compte, outre le suivi des devoirs, le contrôle actif du travail scolaire ou la participation au choix des options et au processus d'orientation. Toutefois, lorsque les parents sont plus disponibles, le comportement vis-à-vis des filles se rapproche de celui adopté vis-à-vis des garçons. Il s'agirait donc moins d'un modèle d'éducation différent selon le sexe de l'enfant que d'un arbitrage fait au profit des garçons en comptant sur l'autonomie des filles.

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Langue Français

Extrait

ÉDUCA TION
L ’implication des parents dans
la scolarité des fi lles et des garçons :
des intentions à la pratique
Marie Gouyon* et Sophie Guérin**
En 1992, les parents préféraient une formation technique ou scientifi que pour leurs gar-
çons et envisageaient un niveau d’études globalement plus élevé pour leurs fi lles que
pour leurs fi ls. Ce constat est toujours vrai à la rentrée scolaire 2003. Mais si on s’in-
téresse plus précisément au souhait d’un baccalauréat scientifi que car c’est la fi lière la
plus rentable des fi lières générales sur le marché du travail, alors les parents sont plus
ambitieux concernant l’avenir de leurs garçons.
Les ambitions scolaires des parents sont inégalement liées à la réussite scolaire selon
qu’il s’agit d’une fi lle ou d’un garçon : à niveau d’études donné, les fi lles sont moins
poussées vers la fi lière scientifi que lorsqu’elles sont bonnes élèves. Par ailleurs, alors
que la taille de la fratrie n’est jamais discriminante pour les garçons, elle infl ue signifi ca-
tivement sur les orientations souhaitées pour les fi lles. Enfi n, c’est parmi les parents les
plus diplômés que les projets scolaires sont les plus homogènes entre les sexes.
Ces ambitions dif férenciées pour les fi lles et les garçons ne se traduisent pas à première
vue dans le comportement des parents en termes de suivi et d’implication dans la scola-
rité de leurs enfants. Cependant, si les parents aident en moyenne autant les fi lles que les
garçons dans leur travail scolaire, ils seraient plutôt moins investis dans la scolarité de
leurs fi lles que dans celle de leurs fi ls si l’on prend en compte, outre le suivi des devoirs,
le contrôle actif du travail scolaire ou la participation au choix des options et au proces-
sus d’orientation. Toutefois, lorsque les parents sont plus disponibles, le comportement
vis-à-vis des fi lles se rapproche de celui adopté vis-à-vis des garçons. Il s’agirait donc
moins d’un modèle d’éducation différent selon le sexe de l’enfant que d’un arbitrage fait
au profi t des garçons en comptant sur l’autonomie des fi lles.

* Au moment de la rédaction de cet article, Marie Gouyon appartenait à la Division Conditions de vie de ménages, INSEE.
** Au moment de la rédaction de cet article, Sophie Guérin appartenait à la Division Études Sociales, INSEE.
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 398-399, 2006 59our la première fois en 2005, le projet de tielle des sexes serait poursuivie dans le cadre de Ploi d’orientation et de programme pour l’école où les enseignants n’adopteraient pas le
l’avenir de l’École propose, parmi une série de même comportement vis-à-vis des élèves selon
cibles chiffrées pour améliorer le système édu- leur sexe. Des études ont en effet montré que
catif, l’objectif d’augmenter de 20 % la propor- les interactions entre enseignants et élèves sont
tion de jeunes fi lles dans les fi lières scientifi - plus fréquentes avec les garçons (Kelly, 1988),
ques générales et technologiques. Les inégalités dont on tolère plus d’indiscipline et d’interven-
entre fi lles et garçons en termes d’éducation ont tions en classe, alors que les fi lles se doivent
en effet longtemps été laissées de côté par les d’être dociles et travailleuses. L’évaluation et
politiques comme par les sociologues pour met- les commentaires concernant le travail scolaire
tre l’accent sur les inégalités sociales à l’école. varient également avec le sexe de l’enfant : les
Depuis les années 1990, quelques études sur les fi lles sont plus souvent jugées sur la présenta-
différences de parcours éducatifs selon le sexe tion et la quantité de travail fournie et les gar-
ont cependant été publiées. Au départ, cet inté- çons sur la richesse des idées (Spear, 1984).
rêt nouveau a été suscité par le développement Peut-être les enfants intègrent-ils les interpré-
particulièrement rapide de la scolarisation des tations de leurs enseignants, expliquant ainsi
efi lles au cours du XX siècle, et le rattrapage en partie qu’à résultats scolaires identiques les
opéré par ces dernières en termes de réussite fi lles ont moins confi ance en elles que les gar-
scolaire. çons (Mosconi, 1999). Enfi n, l’hypothèse d’une
plus grande pression des parents sur les études
Mais parallèlement, les disparités d’orientation des fi ls est parfois émise, mais également d’un
et des profi ls de scolarisation n’ont pas été effa- comportement différent des fi lles, qui, laissées
cées et même si, de la maternelle à l’université plus autonomes dans leurs décisions, seraient
et dans tous les milieux sociaux, les fi lles sont plus sujettes à la sous-évaluation de leurs capa-
aujourd’hui meilleures élèves, leurs diffi cultés cités (Caille, Lemaire et Vrolant, 2002).
d’insertion sur le marché du travail restent plus
importantes (Baudelot et Establet, 1992). Ces Il semble donc légitime de s’interroger sur le
auteurs constatent que les fi lles effectuent des rôle des parents dans la construction de ces dif-
choix d’orientation moins rentables sur le mar- férences et d’étudier de plus près certaines pra-
ché du travail que les garçons, en particulier en tiques éducatives au sein des familles selon le
restant à distance des fi lières d’excellence scien- sexe de l’enfant. Ainsi, Terrail (1992b) met l’ac-
tifi ques. De même, Caille, Lemaire et Vrolant cent sur la famille comme déterminante dans
ont montré plus récemment (2002) qu’à origine la relation entre l’enfant et l’école, et dans la
sociale et niveau de réussite scolaire identiques, réussite scolaire. Il souligne les différences de
les garçons choisissent plus souvent l’orien- comportements des parents et des enfants sui-
tation en première scientifi que que les fi lles. vant leur sexe, et leur infl uence sur les résultats
Dans la suite de leurs études, les bachelières de scolaires à partir d’une enquête réalisée auprès
la fi lière scientifi que s’orientent encore, toutes èmed’élèves en fi n de 5 en 1988 (1) . P ar mi les
choses égales par ailleurs, beaucoup moins sou- deux parents, la mère aurait un rôle privilégié
vent que les garçons dans une fi lière sélective d’écoute et de suivi, surtout avec ses fi lles. Les
que ce soit en classe préparatoire aux grandes
garçons seraient plus surveillés, mais pas forcé-
écoles (CPGE) ou en institut universitaire de
ment plus aidés. Les fi lles auraient par ailleurs
technologie (IUT) (Lemaire, 2004).
un rapport meilleur avec l’institution scolaire.
Enfi n, l’intérêt parental infl uerait de façon très
Ce paradoxe, depuis régulièrement souligné,
1sensible sur la réussite à l’école.
entre meilleure réussite scolaire et « auto-éli-
mination » des fi lles des fi lières les plus presti-
Les tra vaux analysant les pratiques éducatives
gieuses, peut être expliqué de manière positive :
parentales en se focalisant sur le sexe de l’en-
elles feraient des choix « raisonnés et raisonna-
fant ont cependant été assez rares en France, on
bles » en intégrant très tôt les contraintes futures
peut citer l’article de Duru-Bellat et Jarousse
liées aux opportunités professionnelles qui leur
en 1996, ainsi que celui de Barnet-Verzat et sont offertes et à leur vie familiale (Duru-Bellat,
Wolff en 2003 principalement réalisés à partir 1999). Cependant, l’infl uence d’une socialisa-
des données de l’enquête Efforts éducatifs des tion différente dans l’enfance est également
souvent évoquée : on apprendrait aux fi lles la
ème1. Évaluation pédagogique en fi n de 5 , enqu

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