L activité réduite favorise-t-elle la sortie du chômage ?
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Avec la diversité croissante des formes d'emploi et l'évolution des règles de gestion des demandeurs d'emploi, la distinction entre l'emploi et le chômage est devenue plus floue. En particulier, les demandeurs inscrits à l'ANPE sont susceptibles de continuer à percevoir leur allocation tout en exerçant une « activité réduite ». Sur une période de trois ans, un chômeur sur deux serait concerné par cette situation à un moment ou à un autre. L'influence de la durée passée au chômage et celle du motif d'inscription apparaissent déterminantes pour les pratiques d'activités réduites. C'est au bout d'un an de chômage que la pratique d'activité réduite est la plus intensive, et cette pratique est plus fréquente parmi les individus entrés au chômage à l'issue d'un CDD et ayant donc de ce fait connu la précarité. L'influence des pratiques d'activités réduites sur la transition vers l'emploi s'avère complexe et différente selon le genre : se conjuguent des effets immédiats et des effets persistants de pratiques passés. Même si l'effet immédiat peut en être parfois négatif, il semble que ces pratiques rendent moins difficile l'insertion future sur le marché du travail.

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Langue Français

Extrait

MARCHÉ DU TRAVAIL
L’activité réduite favorise-t-elle
la sortie du chômage ?
Pierre Granier Avec la diversité croissante des formes d’emploi et l’évolution des règles de gestion
et Xavier des demandeurs d’emploi, la distinction entre l’emploi et le chômage est devenue
Joutard* plus floue. En particulier, les demandeurs inscrits à l’ANPE sont susceptibles
de continuer à percevoir leur allocation tout en exerçant une « activité réduite ».
Sur une période de trois ans, un chômeur sur deux serait concerné par cette
situation à un moment ou à un autre.
L’influence de la durée passée au chômage et celle du motif d’inscription
apparaissent déterminantes pour les pratiques d’activités réduites.
C’est au bout d’un an de chômage que la pratique d’activité réduite
est la plus intensive, et cette pratique est plus fréquente parmi les individus
entrés au chômage à l’issue d’un CDD et ayant donc, de ce fait, connu
la précarité. L’influence des pratiques d’activités réduites sur la transition
vers l’emploi s’avère complexe et différente selon le sexe : se conjuguent
des effets immédiats et des effets persistants de pratiques passées. Même
si l’effet immédiat peut en être parfois négatif, il semble que ces pratiques
rendent moins difficile l’insertion future sur le marché du travail.
ortement amorcé dans les années 80, le une logique de réduction des coûts de produc-* Pierre Granier et Xavier
Joutard appartiennent F mouvement de flexibilisation du marché du tion dont on espère des effets positifs sur l’em-
au GREQAM. Ils sont
travail s’est poursuivi et développé durant l’ac- ploi au niveau microéconomique comme
Maître de Conférences
tuelle décennie. Cette orientation, largement fa- macroéconomique. Le second argument est da-à l’Université de la
Méditerranée à Mar- vorisée par les pouvoirs publics, a pris des formes vantage axé sur l’offre de travail. Il s’agit par ce
seille.
multiples : forte progression des contrats à durée biais de limiter les risques d’inemployabilité
déterminée, souvent subventionnés, et recours des chômeurs, dus par exemple à l’érosion de
accru au temps partiel qui explique à lui seul la leur capital humain, en facilitant leur insertion
baisse de la durée moyenne du travail observée en sur le marché du travail, et plus particulière-
France depuis 15 ans (CSERC, 1996 ; Dares, ment celle de certaines catégories de popula-
1996). tion les plus exposées au chômage de longue
durée et à l’exclusion. Dans cette perspective, de
Deux principaux arguments peuvent être invo- nombreux travaux empiriques se sont efforcés
Les noms et dates entre qués pour justifier ce mouvement. Le premier d’évaluer précisément l’impact des différents
parenthèses renvoient à
tient à la compétitivité des entreprises. La flexi- dispositifs instaurant cette flexibilité (Fougèrela bibliographie en fin
d’article. bilité du marché du travail s’inscrit alors dans et Kamionka, 1992 ; Bonnal et al.,1994, 1997).
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 321-322 1999 - 1/2 133Cette évolution du marché du travail, caractéri- perdues pour le chômeur mais simplement re-
sée par la multiplication des successions d’épi- portées, le bénéfice du cumul en activité réduite
sodes d’emploi, souvent non satisfaisants (1), n’étant possible que dans la limite de 18 mois
et d’épisodes de chômage, trouve une illustra- indemnisés.
tion dans la forte progression du nombre de
demandeurs d’emploi exerçant une activité ré- Ces dispositions réglementaires visent claire-
duite, même si ces pratiques d’activités occa- ment à encourager les allocataires à exercer une
sionnelles ne peuvent sans doute pas être dans activité réduite tout en poursuivant leur recherche
leur ensemble assimilées à des situations d’em- d’emploi. Ce mécanisme d’intéressement inter-
ploi d’attente (certains salariés se satisfont de vient à deux niveaux : d’une part au niveau du cu-
leur statut d’intérimaire). mul partiel du revenu d’activité et de l’allocation
chômage, d’autre part au niveau du report des
Le fichier historique des demandeurs d’em- journées non indemnisées qui a également pour
plois inscrits à l’ANPE renseigne sur ces prati- effet de retarder la dégressivité de l’allocation
ques d’activités occasionnelles ou réduites (2) unique dégressive (AUD). Ce mécanisme de re-
exercées par les individus souhaitant demeurer port rend délicat le calcul du taux de prélèvement
inscrits au fichier et continuant donc à prospec- implicite sur le revenu d’activité réduite. Si
ter le marché du travail. Or, ce fichier révèle l’on néglige ce mécanisme, le taux de prélève-
une très forte extension de ces pratiques depuis ment implicite est exactement égal au ratio de
le début des années 90. Ainsi, 60 000 chômeurs remplacement (entendu ici comme le taux d’in-
déclaraient exercer une activité intermittente demnisation) et décroît comme lui avec la du-
en janvier 1991. Ils étaient 137 000 un an plus rée du chômage (cf. encadré 1).
tard et 231 600 en janvier 1994 soit environ
13 % des allocataires du régime d’assurance Savoir si ces pratiques favorisent l’insertion sur le
chômage. Il est encore plus frappant de consta- marché du travail et facilitent la reprise d’un em-
ter qu’au sein d’un échantillon de demandeurs ploi ou si, à l’inverse, elles rendent cette insertion
d’emploi inscrits à l’ANPE en 1993, près de 45 % plus délicate est l’une des questions essentielles
déclarent avoir exercé une activité réduite depuis qui se posent. D’un coté, la pratique d’activités ré-
le début de l’épisode de chômage. Ce développe- duites participe au processus d’appariement entre
ment des activités réduites, s’il est bien évidem- employeur et chômeur et peut contribuer à limiter
ment à mettre en relation avec le mouvement de l’influence des facteurs d’exclusion progressive
flexibilité engagé par les entreprises, n’est sans des chômeurs de longue durée (perte de capital hu-
doute pas non plus étranger aux comportements main, déficit croissant de socialisation). D’un autre
individuels liés aux évolutions de la réglementa- côté, cette pratique limite le temps que les deman-
tion en la matière. L’évolution la plus radicale deurs d’emplois peuvent consacrer à leur effort
dans la réglementation a lieu en 1986. Jusqu’à de recherche et peut, en outre, constituer un signal
cette date, seuls les demandeurs d’emploi exer- négatif aux yeux des employeurs potentiels.
çant une activité non professionnelle pouvaient,
après avis de la commission paritaire, prétendre La présente étude n’apporte que des éléments de
continuer à recevoir une allocation chômage. Le réponses partiels à cette question concernant
tournant de 1986 autorise, sans examen par la l’impact des pratiques d’activités réduites sur les
commission paritaire et sous certaines conditions trajectoires ultérieures des individus concernés.
qui ont évolué depuis, le cumul partiel du revenu Ni les caractéristiques ni la durée des emplois
tiré de l’exercice d’une activité réduite et des in- éventuellement recouvrés ne sont considérées, ce
demnités de chômage. Actuellement, un chômeur qui, à l’évidence, constitue une limite importante.
exerçant une activité réduite continue à percevoir
une indemnité chômage s’il consacre à cette acti-
1. Ainsi, près de 40 % des travailleurs occupant un emploi à
vité moins de 136 heures par mois et si le revenu temps partiel en 1996 déclarent souhaiter travailler davantage
qu’il en tire est inférieur à 70 % de la rémunéra- (CSERC, 1998).
2. Dans ce fichier, un demandeur d’emploi exerce une activitétion brute de référence (3). Si ces deux conditions
réduite s’il déclare occuper un emploi mais ne demande pas sa
sont satisfaites, l’indemnité versée, ou plus exac- radiatio

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