Réduction collective et individuelle du temps de travail  : que souhaitent les salariés ?
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En mars 1995, moins d'un quart des salariés à temps complet se déclarent prêts à réduire proportionnellement leur temps de travail et leur salaire. Les plus aisés, les plus diplômés, et les femmes, particulièrement avec de jeunes enfants, y sont relativement plus favorables, à l'inverse des salariés les plus jeunes et des parents de familles nombreuses. Lorsque cette réduction du temps de travail sans compensation financière permet de maintenir ou d'augmenter les effectifs de l'établissement, la moitié des salariés à temps complet s'y déclarent favorables. Les salariés à temps complet n'ont pas le même avis sur la réduction du temps de travail sans compensation salariale, selon qu'elle est collective ou individuelle (passage à temps partiel). Ainsi 58 % des partisans de la réduction collective ne souhaiteraient pas travailler à temps partiel. La population des salariés à temps complet, favorables à la fois à la réduction collective et au temps partiel, ressemble à celle des travailleurs à temps partiel « choisi » : des femmes plutôt employées, entre 25 et 39 ans, avec de jeunes enfants. Souvent dictée par les besoins de l'entreprise, la durée du travail des individus ne coïncide pas naturellement avec celle qu'ils désirent. Ainsi, quelques 850 000 salariés à temps partiel souhaiteraient travailler à temps complet tandis qu'un peu plus de 2 millions de salariés à temps plein préféreraient un emploi à temps partiel. D'autre part, une majorité de salariés accepteraient une contrainte horaire supplémentaire compensée plutôt par un salaire plus élevé que par une durée de travail plus courte, dès lors qu'elle ne modifie pas le rythme de travail actuel. C'est particulièrement vrai lorsqu'eux-mêmes ou leur conjoint possèdent peu d'atouts sur le marché du travail.

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Langue Français

Extrait

MARCHÉ DU TRAVAIL
Réduction collective ou individuelle
du temps de travail :
que souhaitent les salariés ?
Jean-David En mars 1995, moins d’un quart des salariés à temps complet se déclarent prêts à
Fermanian, réduire proportionnellement leur temps de travail et leur salaire. Les plus aisés,
Bénédicte les plus diplômés, et les femmes, particulièrement avec de jeunes enfants, y sont
Galtier et relativement plus favorables, à l’inverse des salariés les plus jeunes et des parents
Sylvie Lagarde* de familles nombreuses. Lorsque cette réduction du temps de travail sans
compensation financière permet de maintenir ou d’augmenter les effectifs de
l’établissement, la moitié des salariés à temps complet s’y déclarent favorables.
Les salariés à temps complet n’ont pas le même avis sur la réduction du temps
de travail sans compensation salariale, selon qu’elle est collective ou individuelle
(passage à temps partiel). Ainsi 58 % des partisans de la réduction collective ne
souhaiteraient pas travailler à temps partiel. La population des salariés à temps
complet favorables, à la fois, à la réduction collective et au temps partiel ressemble
à celle des travailleurs à temps partiel « choisi » : des femmes plutôt employées,
entre 25 et 39 ans, avec de jeunes enfants.
Souvent dictée par les besoins de l’entreprise, la durée du travail des individus ne
coïncide pas naturellement avec celle qu’ils désirent. Ainsi, quelques 850 000 salariés
à temps partiel souhaiteraient travailler à temps complet tandis qu’un peu plus de
2 millions de salariés à temps plein préféreraient un emploi à temps partiel.
D’autre part, une majorité de salariés accepterait une contrainte horaire
supplémentaire compensée plutôt par un salaire plus élevé que par une durée de
* Jean-David Ferma- travail plus courte, dès lors qu’elle ne modifie pas le rythme de travail actuel.
nian appartient à la
division Emploi de l’In- C’est particulièrement vrai lorsqu’eux-mêmes ou leur conjoint possèdent peu
see, Bénédicte Galtier d’atouts sur le marché du travail.
au CSERC et à l’Univer-
sité de Marne-la-Vallée,
Sylvie Lagarde à la di-
vision Exploitation des
fichiers administratifs u cours de la première moitié des années 90, durée de la vie active. Ces mesures peuvent se
sur l’emploi et les reve- Ales multiples formes de réduction et décliner à divers niveaux (l’individu, l’atelier,
nus de l’Insee.
d’aménagement de la durée du travail se sont l’entreprise, la branche d’activité, l’économie
Les noms et dates entre développées : accords de modulation, réduction toute entière) et peuvent avoir des implica-
parenthèses renvoient à
individuelle par le développement du temps tions variées : le taux de compensation sala-la bibliographie en fin
d’article. partiel, dispositifs concernant la réduction de la riale, l’aménagement des horaires ou encore
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 321-322, 1999 - 1/2 161l’importance des embauches accompagnant ou la formulation des questions, à la conjoncture, à
non la réduction de la durée du travail. la place de la réduction du temps de travail sur
les scènes politiques et médiatiques, comme le
Ces dispositifs modifient les conditions de tra- prouvent les autres enquêtes réalisées sur ce
vail et de rémunération des salariés qu’il est thème.
donc utile d’interroger sur leurs aspirations en
la matière. Qui est prêt à accepter de travailler
La réduction collective du temps de travailmoins, et dans quel cadre ? Existe-t-il pour cer-
sans compensation salarialetains des normes de temps de travail qui déter-
minent une résistance à sa réduction ? Quelles mieux acceptée par les femmes,
concessions les salariés sont-ils prêts à faire ou quand le salaire est élevé...
concernant les horaires de travail ?
En mars 1995, près de 23 % des salariés à temps
Des enquêtes antérieures ont montré que le ni- complet se disent prêts à accepter une réduction
veau de revenu et le degré de compensation sa- du temps de travail concernant l’ensemble du
lariale déterminent largement l’acceptation de personnel de leur établissement avec une ré-
la réduction du temps de travail. L’enquête sur duction correspondante de leur salaire annuel
la durée du travail réalisée en 1995 par l’Insee (voir question 1 de l’enquête en encadré 1). Ce
en complément de l’enquête Emploi annuelle, chiffre vaut moins par son niveau que par la di-
permet de repérer et confronter les opinions des versité des situations qu’il recouvre.
salariés vis-à-vis de diverses modalités de ré-
duction du temps de travail qui se traduisent
toutes par une baisse proportionnelle du sa-
laire : réduction collective sans compensation Encadré 1
salariale, avec engagement ou non de maintenir
LES QUESTIONS SUR LA RÉDUCTIONles effectifs de l’établissement, réduction indi-
DU TEMPS DE TRAVAIL
viduelle via le temps partiel. Cette enquête pré-
sente l’intérêt de comparer les options des
Question 1 (Q1) : Accepteriez-vous une réduction
salariés face à ces différentes modalités selon
de l’horaire concernant l’ensemble du personnel de
leurs diverses caractéristiques socio-démogra- votre établissement, avec une réduction correspon-
phiques, notamment en contrôlant l’effet du sa- dante de votre salaire annuel ?
laire. Il convient toutefois de rester prudent
Question 2 (Q2) : Si non, si cela permettait de
vis-à-vis de ces résultats ; ils ne traduisent pas
maintenir ou d’augmenter les effectifs de votre éta-
forcément les attitudes que les salariés adopte-
blissement, l’accepteriez-vous ?
raient en situation réelle de réduction du temps
de travail. Leurs opinions sont très sensibles à
Tableau 1
Opinions concernant la réduction du temps de travail sans compensation (par âge)
En %
15 à 24 ans 25 à 34ans 35 à 44 ans 45 à 54 ans 55 et plus Ensemble
Hommes
Oui à Q1 11,4 17,4 20,8 21,4 23,5 19,5
si non, Oui à Q2 33,7 37,2 38,4 37,6 42,5 37,8
Oui à Q1 ou Q2 41,2 47,7 50,7 50,5 55,7 49,5
Femmes
Oui à Q1 15,4 29,9 27,3 26,4 24,0 26,9
si non, Oui à Q2 39,9 41,9 37,7 39,5 43,5 40,0
Oui à Q1 ou Q2 48,7 58,6 54,0 55,0 56,3 55,5
Q1 - Accepteriez-vous une réduction de l’horaire concernant l’ensemble du personnel de votre établissement, avec une réduction
correspondante de votre salaire annuel ?
Q2 - Si non, si cela permettait de maintenir ou d’augmenter les effectifs de votre établissement, l’accepteriez-vous ?
Champ : salariés à temps complet.
Source : enquête complémentaire à l’enquête Emploi de mars 1995, Insee.
162 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 321-322, 1999 - 1/2Ainsi, le degré d’acceptation de la réduction du Cependant , l’acceptation de la réduction col-
temps de travail sans compensation augmente lective du temps de travail sans compensation,
avec l’âge chez les hommes salariés, en lien semble dépendre de façon déterminante du sa-
avec l’accroissement des revenus au cours de la laire net. Le taux d’acceptation croît avec le sa-
carrière (cf. tableau 1). Les femmes semblent laire, jusqu’au seuil de 15 000 francs mensuels,
adopter une autre logique : à partir de 35 ans, el- soit quasiment le dernier décile de la distribu-
les deviennent de plus en plus réticentes à tion salariale. La perte de revenu occasionnée
l’échange de salaire contre du temps libre. Tou- par l’absence de compensation est d’autant plus
tefois, à tout âge, elles sont plus favorables à redoutée que les revenus sont faibles (cf. gra-
cette proposition que les hommes, particulière- phique I).
ment entre 25 et 35 ans, où le souhait de se consa-
crer à la vie de famille est sans doute plus vif. Les ouvriers, groupe essentiellement masculin
mais aussi pour lequel la culture de lutte et
d’avancées sociales est la plus forte, sont les
moins favorables à cette réduction collective
Graphique I
sans compensation (cf. tableau 2). Les plus
Acceptation de la réduction
forts taux de refus sont exprimés par les moins
du temps de travail selon le salaire mensuel
qualifiés, dans les petites structures profession-
nelles artisanales et agricoles. La faiblesse du
salaire moyen de ces catégories explique sans
doute une large partie de leurs opinions. De
plus, la réduction collective du temps de travail
semble d’application difficile dans ces petites
structures.
Les employés dans leur ensemble se situent
dan

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