L'élection européenne au Danemark: Le vote eurosceptique

Jean-Claude Colliard

Description

Niveau: Supérieur, Master, Bac+5

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0 L'élection européenne au Danemark: Le vote eurosceptique Sous la direction de M. Jean-Claude Colliard L'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Science politique Tania Maria Juhl Master 2 Science politique Institutions et sociologie du politique Deuxième session L'université n'entend donner aucune approbation ou improbation aux opinions émises dans ce mémoire. Ces opinions doivent être considérés comme propres à leur auteur.

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Extrait

L’élection européenne au Danemark:
Le vote eurosceptique





Sous la direction de M. Jean-Claude Colliard
L’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Science politique







Tania Maria Juhl
Master 2 Science politique
Institutions et sociologie du politique
Deuxième session




L’université n’entend donner aucune approbation ou improbation aux opinions émises dans ce
mémoire. Ces opinions doivent être considérés comme propres à leur auteur.
0Christiansborg est déjà assez loin,
1mais aux yeux de Bruxelles, nous n’existons plus


La question que nous nous posons ici est la suivante : pourquoi les danois
apparaissent opposés à la construction européenne ? Sont-ils « contre l’Europe » ? Notre objet
de recherche est ce que la littérature académique nomme le « vote eurosceptique », c'est-à-dire
le vote pour un parti ou un mouvement anti-européen lors de l’élection du Parlement
européen. Plus précisément, nous allons nous intéresser aux deux mouvements eurosceptiques
danois, le Mouvement Populaire contre l’Union européenne (MPUE) et le Mouvement de Juin
(MJ), et à leurs électeurs.

Notre objet n’est pas ici d’établir les traits distinctifs de chacun, ni de faire une analyse de ces
mouvements en particulier, mais de les utiliser comme une entrée afin de comprendre le vote
eurosceptique au Danemark. Avant de nous attarder rapidement sur les deux mouvements, il
est important de noter que ce choix délimite notre recherche de manière arbitraire ;
l’ « euroscepticisme » ne peut pas se réduire à ces mouvements ni à leurs seuls électeurs. Par
conséquent, nous ne pouvons prétendre à une généralisation de nos résultats au-delà du cadre
pratique de notre terrain d’étude. La particularité de ces mouvements politiques est de ne pas
faire partie de la compétition politique de l’arène nationale danoise ; ils poursuivent
2uniquement la représentation au sein du Parlement Européen . Les deux mouvements sont
facilement mis dans le même panier d’eurosceptiques – ils entrent d’ailleurs le plus souvent en
alliance lors des élections – mais ils poursuivent en réalité des objectifs propres et se
positionnent par rapport à des moments différents de l’intégration du Danemark à l’Europe.

3Le Mouvement Populaire contre l’UE (MPUE) naît le 22 avril 1972, c'est-à-dire avant même
le référendum concernant l’adhésion du Danemark aux Communautés Européennes qui
4s’effectue le 2 octobre la même année . Il est représenté dès les premières élections au
Parlement Européen au suffrage universel, tenues en 1979, où il obtient 21 % des suffrages

1 Citation de l’entretien « Palle ». Christiansborg est le nom du batîment où siège le Folketing.
2 Il y a eu la discussion au sein des deux mouvements à savoir s’ils devaient se transformer en parti et viser le
représentation au niveau national, mais les différences idéologiques sont trop importantes.
3Au début il se nomme le Mouvement Populaire contre Les Communautés Economiques Européennes. Nous avons
choisi de nous tenir à son nom actuel afin d’éviter toute confusion.
4 Le référendum résulte dans un oui de 63,4 % avec une participation qui s’élève à 90,1%. Le Danemark rentre
erofficiellement dans les Communautés Européennes à partir du 1 Janvier 1973.
15exprimés, ce qui se traduit par 4 des 16 sièges qui appartiennent au Danemark . Le MPUE a
pour objectif le retrait du Danemark de la coopération européenne, caractérisé comme un
6« super-Etat » . La Liste de l’Unité, un parti de l’extrême gauche – qui n’arrive que tout juste
à dépasser la limite des 2% pour obtenir un siège au Parlement danois (Folketinget) – a choisi
de s’allier au MPUE lors des élections européennes. Les candidats de la Liste de l’Unité se
7présentent ainsi sous le nom du MPUE pour les européennes .

Le Mouvement de Juin (MJ), lui, naît le 23 août 1992 suite au rejet du Traité de Maastricht
qui s’est tenu le 2 juin. Le mouvement est une scission du Mouvement Populaire contre l’UE.
Il se présente pour la première fois aux élections européennes au 1994 où il obtient 15,2 % des
suffrages exprimés ce qui lui vaut 2 sièges. L’objectif exprimé est l’arrêt de l’intégration
européenne telle qu’elle se fait (et non pas le retrait) ; le MJ travaille pour une coopération
d’avantage transparente et démocratique. Le MJ est considéré comme une alternative plus
pragmatique et moins idéologique, susceptible de parler à un plus grand nombre
8d’eurosceptiques issus de tout bord . Ils ont, en effet, un discours avec des politiques
concrètes relatives à plusieurs problématiques européennes, à contrario du MPUE qui, lui, met
l’accent sur les dangers de l’UE : le protectionnisme européen, l’exploitation des pays en voie
9de développement et l’inégalité dans le monde…

Les deux mouvements politiques ont par conséquent une certaine pérennité dans le temps,
contrairement aux nombreuses listes nouvelles qui émergent par exemple en France lors de
chaque élection européenne (la liste « Pouvoir d’achat – Chômage – Taxes – Immigration –
Insécurité – Patrons voyous – Casse du service public. Où est la rupture ? Stop », la Liste
Antisioniste du comédien Dieudonné etc.). Les deux mouvements sont actifs dans le débat
public lors des campagnes pour les élections européennes ou les référendums. Hors des

5 La répartition des sièges au Parlement Européen a changé avec l’élargissement aux nouveaux pays membres entrés en
2005 et aujourd’hui le Danemark dispose de 14 sièges.
6Site officiel du Mouvement Populaire contre l’UE: www.folkebevaegelsen.dk
7Roger Buch et Kaspar M. Hansen « The Danes and Europe: From EC 1972 to Euro 2000 – Elections, Referendums and
Attitudes » in Scandinavian Political Studies, vol. 25, n˚ 1, 2001, p. 1-26. Roger Buch est professeur à l’Ecole de
journalisme au Danemark et spécialiste de la loi électorale et les partis politiques et Kaspar Møller Hansen est maître de
conference à l’université de Copenhague dans le département de Science Politique. Les membres de la Liste de l’Unité
sont libres et peuvent aussi se présenter comme candidat pour le MJ.
8Art.op.cit.
9 Claas de Vreese, Mette Tobiasen, « Conflict and Identity : Explaining Turnout and Anti-integrationist Voting in the
Danish 2004 Elections for the European Parliament » in Scandinavian Political Studies, vol. 30, n 1, 2007,pp. 87-114
210campagnes électorales, ils ont chacun un mensuel qui sort une fois par mois . En termes de
soutien électoral, les mouvements ont à certains moment obtenus environ un quart des votes
exprimés, mais depuis la fin des années quatre-vingt-dix, leur soutien décline de manière plus
ou moins stable En revanche, les partis traditionnels semblent gagner du terrain par rapport
aux mouvements anti-européens. La tendance se montre ainsi inversée au Danemark par
11rapport aux autres pays européens lors des élections européennes .

L’étude de ces deux mouvements politiques danois et de leurs électeurs présente plusieurs
intérêts. D’abord, il existe peu d’études universitaires sur les élections européennes au
Danemark. Le MPUE et le MJ sont les seuls mouvements en Europe qui sont organisés dans
le but des seules élections européennes. La Belgique connaît le Vlaams Bloch, mais celui-ci
s’est investit dans la politique nationale et locale et n’est pas spécialisé dans la même manière
que le sont le MPUE et le MJ au Danemark. Le United Kingdom Independance Party (UIKP),
lui aussi, malgré sa spécialisation dans le retrait de la Grande Bretagne de l’UE, participe aux
élections nationales. Ensuite, c’est un cas intéressant parce que le mouvement anti-UE existe
et fait partie intégrante de l’offre politique depuis le début, avant même l’adhésion effective
du Danemark en 1973. Enfin, généralement, les mouvements anti-européens sont de droite,
mais au Danemark il s’agit de deux mouvements situés à la gauche de l’échelle politique
(comme nous allons le voir). Il existe bien sur un parti anti-intégration sur l’aile droite, le Parti
du Peup