LES INSUFFISANCES DU DROIT CONCERNANT LA REPARATION DES DOMMAGES ENVIRONNEMENTAUX
9 pages
Français

LES INSUFFISANCES DU DROIT CONCERNANT LA REPARATION DES DOMMAGES ENVIRONNEMENTAUX

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
9 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

LES INSUFFISANCES DU DROIT CONCERNANT LA REPARATION DES DOMMAGES ENVIRONNEMENTAUX Discipline: Droit de l’environnement Par Lionel Darnel KONABEKA EKAMBO APETO Profil : -Master 2 (DESS) en Droit de l’Administration territoriale -Doctorat en Droit international C’était il y a treize ans. Le 12 décembre 1999, l’Erika faisait naufrage au large des côtes bretonnes et déversait des centaines de milliers de tonnes de fioul dans les eaux, au final c’étaient près de 400kilomètres de côtes qui étaient souillées et environ 150 000 oiseaux mazoutés. Le 25 septembre 2012, la Cour de cassation à condamné Total à payer une amende de 375 000 euros au titre du préjudice écologique. Qu’est-ce que le « dommage environnemental » ? La loi ne définit pas cette notion de dommage environnemental. Le dommage écologique se caractérise par une détérioration des ressources naturelles, qu’elles soient protégées ou non, de leurs interactions. En portant atteinte à la fois aux écosystèmes et aux services qu’ils offrent aux hommes, il revêt une double dimension écologique et anthropique. Par ailleurs, le dommage écologique, dans la mesure où il affecte des biens non appropriés, il doit être distingué du dommage matériel ou moral. La notion de dommage écologique pose d’abord la question de la nature de l’environnement. L’idée qu’existe un dommage écologique, c’est-à-dire undommage à l’environnement. En principe, l’environnement est une construction historique et sociale.

Informations

Publié par
Publié le 06 janvier 2015
Nombre de lectures 23
Langue Français

Extrait

LES INSUFFISANCES DU DROIT CONCERNANT LA REPARATION DES DOMMAGES ENVIRONNEMENTAUX
Discipline: Droit de l’environnement
Par Lionel Darnel KONABEKA EKAMBO APETO Profil : -Master 2 (DESS) en Droit de l’Administration territoriale -Doctorat en Droit international
C’était il y a treize ans. Le 12 décembre 1999, l’Erika faisait naufrage au large des côtes bretonnes et déversait des centaines de milliers de tonnes de fioul dans les eaux, au final c’étaient près de 400kilomètres de côtes qui étaient souillées et environ 150 000 oiseaux mazoutés. Le 25 septembre 2012, la Cour de cassation à condamné Total à payer une amende de 375 000 euros au titre du préjudice écologique.
Qu’est-ce que le « dommage environnemental » ? La loi ne définit pas cette notion de dommage environnemental. Le dommage écologique se caractérise par une détérioration des ressources naturelles,qu’elles soient protégées ou non, de leurs interactions. Enportant atteinte à la fois aux écosystèmes et aux services qu’ils offrent aux hommes, il revêt unedouble dimension écologique et anthropique.Par ailleurs, le dommage écologique, dans la mesure où il affecte des biens non appropriés, il doit être distingué du dommage matériel ou moral. La notion de dommage écologique pose d’abord la question de la nature de l’environnement. L’idée qu’existe un dommage écologique, c’est-à-dire undommage àl’environnement. En principe, l’environnement est une construction historique et sociale. L’environnement ne disposant pas de statut juridique clairement défini, les atteintes qui lui sont portées s’adaptent avec peine aux critères « classiques » de définition du préjudice, qui doit être direct, personnel et certain. Dès lors qu’on reconnaîtrait l’existence d’un préjudice écologique, par définition collectif, la question se pose de savoir qui peut se trouver investi de la capacité d’en demander réparation. Poser cette question revient, implicitement, à s’interroger sur les modalités de représentation d’un bien collectif et par là inappropriable.
Selon les termes de l’article 4 de la Charte de l’environnement« toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement », ce qui montre que la responsabilité d’une personne pourrait être engagée en cas d’atteinte à l’environnement. Par ailleurs, au niveau communautaire, la directive de 2004, transposée en France par la Loi er 1 août 2008 relative à la responsabilité environnementale, a instauré un régime hybride fondé à la fois sur une nouvelle police de l’environnement et sur des principes plus classiques de responsabilité visant notamment à réparer, sur le fondement du principe « pollueur-
payeur», les « dommages causés à l’environnement » (articles L. 161-1 et suivants du Code de l’Environnement).
Le droit de la responsabilité civile permet aussi la réparation d’un dommage environnemental. Ainsi pour qu’un dommage donne lieu à réparation, il faut au préalable établir le lien de causalité entre le fait supposé générateur et le dommage. Mais le lien de causalité pose des difficultés évidentes en matière environnementale dans la mesure où le dommage causé à l’environnement est souvent un dommage diffus qui ne peut pas toujours être rapporté avec certitude à un ou plusieurs faits générateurs. C’est le cas, notamment, en matière de pollution ou d’atteintes aux espèces. En matière de réparation des dommages environnementaux, les outils juridiques actuels sont-ils efficaces ?
Nous verrons dans un premier temps que la notion même de dommage écologique est difficile à appréhender (I) puis, dans un second temps, que les régimes juridiques concernant la réparation des dommages environnementaux sont ineffectifs (II)
I/
La difficile appréhension de la notion de dommage écologique
La difficulté pour établir le caractère personnel du dommage environnemental (A) et choisir un fondement de réparation approprié (B) rend bien souvent impossible la réparation du préjudice.
A- L’absence du caractère personnel du dommage environnemental
Les difficultés juridiques soulevées par une demande de réparation d’un dommage environnemental résultent notamment de l’absence de caractère personnel du dommage. En principe, un dommage, pour être réparable, doit normalement avoir un caractère personnel. C’est une condition essentielle à la recevabilité de l’action en justice, en effet, une victime ne peut pas se prévaloir d’un dommage qui ne lui serait pas personnel.
Cela suppose de revoir ce que renferme réellement la notion de dommage environnemental. Il faut bien différencier le dommage proprement « écologique » des autres types de dommages. Ainsi, on peut avoir une même atteinte à l’environnement qui serait susceptible d’entraîner plusieurs types de conséquences.
Tout d’abord, l’atteinte à l’environnement peut être à l’origine de préjudices subjectifs individuels, subis directement par des personnes physiques ou morales,il s’agit souvent de dommage matériel (pertes économiques) ou corporel (atteinte à la santé), mais il peut également s’agir d’un préjudice moral. Par exemple, la pollution d’une rivière par une installation industrielle entraînera des nuisances pour les voisins. La réparation de ce dommage ne soulève, a priori, aucune difficulté juridique, les victimes, clairement identifiées, peuvent invoquer un dommage personnel, et sont donc recevables à agir en justice. Dans ce cas de figure, le préjudice est évaluable en argent, soit du fait qu’il ait une valeur marchande, soit que l’on puisse utiliser des méthodes d’évaluation déterminées. Cette même atteinte à l’environnement peut également constituer un dommage objectif, affectant exclusivement la nature sans pour autant qu’une personne ne soit victime, de façon directe et immédiate. La pollution de la rivière peut, aussi, avoir causé la disparition d’une espèce rare, et donc provoquer une atteinte à la biodiversité.
Il est coutume de distinguer quatre types d’atteinte à la nature : aux sols, à l’air, à l’eau et aux espèces. Ainsi, de tels dommages ne se rattachant à aucune personne en particulier, leur réparation est pourtant soumise au principe traditionnel du droit civil, selon lequel le dommage doit avoir un caractère personnel, ce qui rend difficile leur réparation.
Enfin, entre le préjudice individuel et le dommage écologique, on trouve le préjudice subjectif collectif. Cette notion vise les dommages portés à l’homme, mais d’une façon indirecte et collective, à travers une atteinte aux « services écologiques » rendus aux êtres humains par la nature. C’est, par exemple, à ce type de dommage que se réfère l’arrêt de la Cour d’appel de Paris en 2010 dans l’affaire de l’Erika, en jugeant que« toute atteinte non négligeable au milieu naturel constitue une agression pour la collectivité des hommes qui vivent en interaction avec lui ».
A la différence du dommage écologique « pur », il s’agit bien de préjudices causés à l’homme. Mais le lien avec une personne étant très faible, il est difficile de trouver une victime susceptible d’engager une action en justice.
L’exigence de préjudice personnel représente donc un obstacle majeur à la prise en compte de ce que l’on a coutume d’appeler le « dommage écologique pur ». On peut aisément affirmer que le « dommage écologique n’ouvre pas en tant que tel droit à réparation ».
Autre difficulté qui se pose au juge c’est de devoir trouver une modalité de réparation qui serait approprié au préjudice écologique.
B- la complexe détermination des modalités d’une juste réparation
En d ro itd e l’en viro n n em enet,n visagerla rép aratio nd ’u n d o m m agen e rep résen te-ipl as d éjà l’aveud ’u n échec ?En effet, le d o m m agecau séà la n atu reest d ifficilem enrtép arable,vo ire irréversiblel,effortdevantporterenprioritésurlaprévention.Toutdevraitêtremisenœuvrepouréviterledommage,pourempêchersasurvenancec,onformémenàtladage«mieuxvautp réven ir qu e gu érir ».
Ilexisteessentiellementrtoismoyensderéparationdudommageécologique:la remise en état,la réparation par équivalent en natureetla réparation par équivalent monétaire.
La remise en état semble pour le moins être une réparation incomplète. Si la réparation en nature (remise en état et/ou réparation par équivalent en nature) semble être la méthode à privilégier en matière d’environnement, la remise en état, seule, demeure pourtant insuffisante. Ainsi, la destruction d’une espèce a nécessairement des répercussions, au-delà de l’espèce même, sur les fonctions écologiques assurées par l’espèce. Par exemple, la destruction d’abeilles, si elle a un impact sur l’espèce à laquelle elles appartiennent, engendre également une perturbation de la pollinisation des plantes, ainsi qu’une rupture dans le fonctionnement normal de la chaîne alimentaire. Or, si le retour à un étatex anteest parfois concevable pour le support directement affecté par le dommage écologique, il n’est souvent pas possible, s’agissant des équilibres écologiques, d’effacer les conséquences du dommage écologique intervenues entre sa date de survenance et le moment où la remise en état du support directement affecté aura produit ses effets. Ainsi, pour un même dommage écologique, il conviendra d’envisager non seulement une remise en état de l’élément de l’environnement directement affecté par l’atteinte, mais également une réparation par équivalent des fonctions écologiques et des équilibres biologiques qui ont été perturbés.
De plus, la réparation en équivalent pécuniaire est quant à elle inadaptée au dommage écologique. D’une part, elle conduit à monétariser artificiellement des biens environnementaux qui sont difficilement quantifiables. Les tâtonnements du juge judiciaire dans cet exercice montrent bien la difficulté à chiffrer le dommage écologique.
Au final, on peut voir que le juge ne dispose pas réellement d’outils efficaces pour réparer la perte de diversité biologique puisque le dommage causé à la faune et la flore n’est pas aisément évaluable ni d’ailleurs, le plus souvent, réparable en argent.
Une autre question cruciale demeure : quel sera le fondement juridique de l’obligation de réparation ?Au nom de quelle règle juridique précise le responsable d’une atteinte à l’environnement serait-il obligé de la réparer ?
Nous verrons dans cette seconde partie qu’il existe deux grands régimes généraux permettant de fonder l’engagement de la responsabilité environnementale. Il s’agit, premièrement, de laLoi du 1er août 2008 sur la Responsabilité Environnementale(LRE), qui repose sur l’intervention du Préfet. Puis dudroit commun de la responsabilité civile, devant les juridictions judiciaires. Or, aucun de ces régimes n’est réellement satisfaisant. En effet, depuis 2008, la loi sur la responsabilité environnementale n’a quasiment jamais été appliquée. Quant au droit civil de la responsabilité environnementale, il souffre de nombreuses ambiguïtés qu’une jurisprudence fragmentée peut difficilement résoudre.
II/ L’ineffectivité des régimes juridiques quant à la réparation des dommages environnementaux en vigueur :
La loi sur la responsabilité environnementale du 1er août 2008 n’épuise pas à elle seule la question de la réparation du dommage environnemental et laisse dans ce domaine une large place au droit civil de la responsabilité.
Nous verrons que la loi sur la responsabilité environnementale et le droit civil de la responsabilité sont inadaptés en matière de réparation des dommages environnementaux (A) puis qu’une articulation entre ces deux régimes pourrait contribuer à améliorer cet état des choses (B)
A- La coexistence de deux régimes juridiques
Issu e d ’u n e d irective d u 21 avril 2004, la lo i d u 1er ao ût 2008 su r la respo n sabilité environnementale(LREs),annonçaitambitieuesteprometteuse.
To u t d ’abo rd ,le d o m m ag eco n cern éest bien le d o m m ageo ppo sitio nau xn viro n n em en taplar d o m m ag es cau sés au x perso nonuesau x bien s à la su ite d e la d ég rad atio n d e l’en viro n n em en t. En effet, selo n les term es d u co n sid éran t14 d e la d irective 2004/35/CE, celle-ci« ne s’applique pas aux dommages corporels, aux dommages aux biens privés, ni aux pertes économiques et n’affecte pas les droits résultant de ces catégories de dommages ». ElledonneensuiteunfondemenjturidiqueprécisàuneobligationgénéralederéparationdecedommageenvironnementalE.lleutilise,enfin,envuedelaréparation,lestechniquesefficacesissu esd u d ro it d e la po lice ad m in istrativei,n spiréesd e la po lice d es in stallatio n s classées, et en particu lier les po u vo irs d e co n train te d u préfet.
Jusqu'àprésent,quasimentaucuncasdapplicationdelaLREnaétérecensé.Cet«échec»delaLRE,dumoinscomptetenudesattentesquelleavaitsuscitées,résultenotammendtufait d e so n cham pd ’applicatio nlim ité.En effet, elle est, seu lem en tr, éservéeau x d o m m ag es lesplusgraves,etuniquementpourcertaciantéesgoriesdatteintes.
C’est l’article L. 161-1 du Code de l’Environnement, qui énumère de manière limitative les catégories de dommages qui relèvent de ce régime. Il s’agit des dommages qui : - « Créent un risque d’atteintegraveà la santé humaine du fait de la contamination des sols » -« Affectentgravementl’état écologique, chimique ou quantitatif ou le potentiel écologique des eaux ».  De nombreux dommages sont exclus tels que les dommages résultant de certaines activités ayant été autorisées ou encore la « pollution à caractère diffus ».
Finalement, la loi fixe aussi des limites dans le temps, puisque ce régime ne s’applique pas «lorsque le fait générateur du dommage est survenu avant le 30 avril 2007 » ou « lorsque le fait générateur du dommage résulte d’une activité ayant définitivement cessé avant le 30 avril 2007 » (article L. 161-5).
On peut donc constater que la plupart des atteintes à l’environnement échappent ainsi, en réalité, au régime institué par la Loi sur la Responsabilité Environnementale.
Le droit civil de la responsabilité, quant à lui, s’illustre par des difficultés persistantes devant le juge judiciaire Dans la majorité des cas, c’est sur le fondement du droit civil, et donc devant les juridictions judiciaires, que la responsabilité environnementale est mise en cause. La plupart des actions en réparation de dommages environnementaux sont portées soit devant le juge civil, soit devant le juge pénal par des parties civiles, comme par exemple dans l’explosion de l’usine d’AZF. On retrouve alors souvent, le fondement juridique de l’action, dans les régimes traditionnels de responsabilité, pour faute ou sans faute, prévus aux articles 1382 et suivants du Code Civil ou, parfois, dans la théorie jurisprudentielle des troubles anormaux du voisinage.
On peut remarquer une inadaptation du droit civil, en l’état, à la problématique de la responsabilité environnementale, ce qui amènent les juridictions à adopter des solutions diverses, parfois contradictoires notamment sur le fondement juridique de la réparation, celle des parties recevables à demander réparation, celle de la nature du préjudice réparable, ou encore celle des modalités de la réparation.
Les juridictions (notamment judiciaires) tentent, aujourd’hui, de combler par voie jurisprudentielle les lacunes du droit positif, à savoir l’exigence du caractère personnel du dommage. Cette méthode jurisprudentielle présente toutefois des limites. Certes, quelques décisions ponctuelles ont pu être perçues comme marquant des progrès, comme dans l’affaire de l’Erika qui entend réparer le dommage écologique. Mais ces tentatives jurisprudentielles, rendues de manière dispersée, contribuent à des solutions parfois discutables. Ainsi, par exemple, dans l’affaire de l’Erika, le tribunal correctionnel a évalué le dommage subi par le département en se référant au montant d’une taxe départementale, selon un calcul très théorique « étrangement déconnecté de touteconsidération écologique» comme l’a fait remarquer Agathe Van Lang dans son article paru dans l’ADJA « Affaire de l’Erika : la considération du préjudice écologique par le juge judiciaire ». Pour le dommage environnemental subi par les associations, la Cour prend, par exemple, en compte le nombre d’adhérents, la notoriété ou la spécificité de leur action. On observe, donc, une confusion évidente entre le préjudice écologique et le préjudice moral des parties civiles.
Et ces erreurs dans le raisonnement conduisent nécessairement à des erreurs dans la nature des mesures de réparation, qui ne seront pas adéquates.Réparer un préjudice moral ne peut s’apparenter à la réparation du dommage environnemental. Par le biais de la notion de «dommage écologique », les juges visent souvent en réalité une atteinte à l’image d’une collectivité territoriale ou à l’intérêt moral d’une association. Il existe aussi le risque de cumuler des indemnisations, et donc de rendre inefficaces la réparation du préjudice. Plusieurs parties sont susceptibles d’avoir subi un préjudice moral du fait d’une pollution, comme par exemple, des associations de protection de la nature ou des collectivités territoriales. Elles pourront, cependant, toutes prétendre à être indemnisées du même dommage environnemental. Par conséquent, le besoin de clarification est évident, puisque le droit civil de la responsabilité ne permet pas, à l’heure actuelle, de répondre clairement à l’objectif de réparation des atteintes à l’environnement. Le juge judiciaire, lorsqu’il statue en matière de réparation des atteintes à l’environnement, avance souvent à l’aveugle, et ce sans aucune indication de la part du législateur. Cela s’explique par le fait que ce «droit en construction» de la réparation des atteintes à l’environnement présente encore de nombreuses zones d’ombre.
Pourtant, si la loi du 1er août 2008 pose les fondements et constitue un socle solide en matière de responsabilité environnementale, on peut voir que son champ d’application demeure limité. C’est, donc, la responsabilité civile, qui sera appelée à jouer un rôle essentiel à chaque fois que l’on sortira des limites de la LRE.
En principe, le droit commun de la responsabilité s’applique aux dommages qui ne sont pas considérés comme « graves ». La LRE, qui sur le plan de la nature du dommage, exige un certain degré de gravité alors que le droit commun de la responsabilité est applicable à tout dommage (même si, dans les faits, un seuil de gravité est également requis par les juges). Par conséquent, un dommage qui, au sens de la Loi de 2008, ne serait pas considéré comme «grave » relèverait du droit commun, alors même qu’un dommage relève d’une catégorie couverte par la LRE, il peut se voir appliquer le droit commun dès lors qu’il n’atteint pas un niveau de gravité suffisant.
Cette distinction peut être une insécurité juridique pour deux raisons. D’une part, la notion même de « dommage grave » semble être floue. D’autre part, ce sont deux autorités différentes qui sont appelées à qualifier un dommage de « grave » ou « non grave ». Si le dommage est considéré comme grave, il sera nécessaire de se tourner vers le préfet, et de s’adresser au juge administratif en cas de recours, si le dommage n’est pas grave au sens de la LRE, la personne qui souhaite intenter une action doit s’adresser au juge judiciaire
On peut alors se demander s’il serait possible de cumuler les deux régimes. Autrement dit, même confronté à un dommage grave, peut-on d’appliquer le droit commun. Tout d’abord, la solution inverse, donnant un caractère exclusif à la LRE, présenterait des inconvénients. En effet, cela reviendrait à dire que le juge judiciaire ne serait pas compétent en cas de dommages graves et cette solution serait source d’une grande insécurité sur la compétence du juge. Il faudrait donc, commencer par s’interroger sur le degré de gravité du dommage avant de savoir si l’action pourrait être recevable. En outre, des situations de conflits négatifs pourront se produire, dans le cas où le juge judiciaire déclinerait sa compétence, alors que le préfet considérerait pour sa part que le dommage n’est pas d’une gravité suffisante pour relever du champ de la LRE.
En réalité, la directive de 2004 ne semble pas empêcher d’aller plus loin sur le terrain du droit commun. L’intérêt d’un cumul apparaît notamment sur la question de l’étendue de la réparation. En effet, alors qu’en droit civil prévaut le principe de la réparation intégrale, la LRE ne donne au préfet que la simple possibilité, et non l’obligation, de prendre des mesures pour contraindre les exploitants à remettre le site dans son état initial. Certains auteurs font remarquer, dès lors, que les mesures de réparation issues de la nouvelle police administrative de la LRE pourront être limitées, et que, même après intervention du préfet, il est possible que le juge judiciaire puisse ordonner dans le cadre du droit commun des mesures complémentaires de réparation des dommages visés par la LRE.
En pratique, on suppose que le juge judiciaire conservera la plénitude de sa compétence. En cas d’atteintes à l’environnement, il est le plus souvent saisi, dans le cadre d’un procès complexe, d’une multitude de demandes en réparation. Ces demandes en réparations émanent de nombreuses parties, se prévalant de préjudices différents, il appartiendra alors au juge, lorsqu’elles porteront sur la réparation du dommage environnemental, de tenir compte, le cas échéant, de l’éventuelle intervention du préfet au titre de la LRE. Et ainsi pour déterminer l’étendue du dommage, le juge pourrait procéder, si besoin, à des « abattements » sur les prétentions des parties, en déduisant la partie du dommage ayant déjà été en tout ou partie réparé et/ou indemnisé.
Loin d’attiser une sorte de concurrence entre ces deux régimes, il est légitime d’instaurer une convergence d’actions qui se complèteraient et il est du ressort de la jurisprudence d’apporter les précisions qui s’imposent dans ce domaine.
Si aujourd’hui le droit de la réparation des dommages environnementaux est lacunaire, la doctrine préconise une véritable réforme. Il s’agit surtout de mieux définir les modalités de la réparation du préjudice écologique, notamment devant le juge civil.
B- Vers un meilleur encadrement de la réparation du dommage environnemental
L’effectiv itéd e la rép aratio nd es d o m m ag eséco lo g iqu esp asseraitn écessairem enpt ar la m o d ificatio nd e la lég islatio nactu elle.Il seraitp lu s o p p o rtu nd e réfo rm erle d ro itciv ilp lu tôt qu e la lo i su r lraesp o n sabilité en v iro n n em en tale d u 1er ao ût 2008.
IlauraitétépossiblethéoriquementdélargirlechampsdapplicationdelaLRE.Cependant,cettev o ien ’estp as v éritablem enetn v isag eablep, u isqu ’u n em o d ificatio nd e la lo i d u 1er ao ût 2008 serait co n fro n tée à d eu x o bstacles. D’u n e p art, elle est issu e d ’u n e d irectiv e co m m u n au tairelted o n c d ’u n e lég islatio nn ég o ciéeen tre 27 Etats. D’au tre p art, elle,t résu rep o sesu r u n équ ilibre co m p lexe,d an s lequ el l’im p o rtan ced es p réro g ativ esd e p u issan ce p u bliqu eco n féréesau p réfetn ’a été en v isag éequ e d an su n cham plim ité,celu id es d o m m ag es les p lu s g rav es.
Il est d ev en up rim o rd ialqu e les m o d alitésd e la rép aratio nd u d o m m ag een v iro n n em en tal d ev an tle ju g e civ ild o iv en têtre d éfin iesav ecclartéd an sla lo i, p o u rm ettrefin au x hésitatio n s d e la ju risp ru d en ce. Il fau tpeanrticu lier acco rd er la p rio rité à la rép aratio n en n atu re. Eneffet,leplussouvent,lesjuridictionsjudiciairesordonnentuneréparationparéquivalent monétaire,etsepolsaequestiondesavociormmentchiffrer,enargent,unptreéljudice.
Parallèlement, se pose aussi la question de l’usage de ces indemnités puisque les bénéficiaires de ces sommes ne sont pas tenus de les affecter à une action réparatrice, du fait du principe de la libre disposition de la réparation, ils peuvent parfaitement utiliser ces indemnités pour un tout autre usage.
C’est la jurisprudence, qui a apporté des précisions, en laissant le choix au juge, dans le cadre de son pouvoir souverain, la possibilité d’opter pour une réparation par équivalent monétaire ou en nature. C’est cette lacune des textes qui a conduit le juge, en pratique, à privilégier le versement de dommages et intérêts en matière de dommage environnemental.
En outre, la doctrine soutient la proposition qui viserait à ce que le juge puisse faire cesser le fait dommageable ou supprimer la cause du dommage. Il serait ainsi possible d’entendre largement la réparation en nature et y inclure la cessation du trouble. Ce pouvoir d’ordonner la cessation de l’illicite est habituellement reconnu au juge dans le cadre de l’action pour trouble anormal de voisinage. Pourtant, la jurisprudence ne distingue pas toujours clairement la cessation de l’illicite et la réparation en nature. En matière environnementale, la réparation en nature doit englober les mesures de prévention des dommages environnementaux. Dans le cadre de la LRE, la responsabilité environnementale a vocation à s’appliquer en cas de « menace imminente de dommage » (article L. 162-3 du code de l’environnement). Tout comme, sur le terrain du droit commun, le juge doit pouvoir faire cesser un trouble illicite et prendre des mesures nécessaires pour empêcher la réalisation du dommage.
Discipline: Droit de l’environnement Par Lionel Darnel KONABEKA EKAMBO APETO Profil : -Master 2 (DESS) en Droit de l’Administration territoriale -Doctorat en Droit international
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents