Sur la forme du sonnet mallarméen - article ; n°1 ; vol.56, pg 217-229
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Description

Cahiers de l'Association internationale des études francaises - Année 2004 - Volume 56 - Numéro 1 - Pages 217-229
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2004
Nombre de lectures 18
Langue Français

Extrait

Jacques Roubaud
Sur la forme du sonnet mallarméen
In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 2004, N°56. pp. 217-229.
Citer ce document / Cite this document :
Roubaud Jacques. Sur la forme du sonnet mallarméen. In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 2004,
N°56. pp. 217-229.
doi : 10.3406/caief.2004.1540
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/caief_0571-5865_2004_num_56_1_1540SUR LA FORME DU SONNET
MALLARMÉEN
Communication de M. Jacques ROUBAUD
(École des Hautes Études en Sciences Sociales)
au IVe Congrès de l'Association, le 8 juillet 2003
L'Appendice du Selon Mallarmé de Paul Bénichou, livre
essentiel pour la compréhension de l'œuvre du poète,
s'achève par trois brèves pages sur la forme du sonnet. Je
me propose de les reprendre un peu différemment.
Mallarmé, on le sait, a employé deux types de sonnets :
le premier vient de la tradition du sonnet en langue fran
çaise, inaugurée par Marot et illustrée, entre bien d'autres,
par Ronsard, Du Bellay, Jodelle. Le second est un emprunt
à la variété dite « shakespearienne » du sonnet en anglais.
Je ne vais envisager qu'un seul aspect de la forme: la dis
position des rimes dans les sonnets de quatorze vers (les
sonnets de Mallarmé ont tous quatorze vers). Dans le cas
du sonnet « à la française » je distinguerai, dans la nota
tion des rimes, les quatrains et les tercets. Les rimes des
quatrains seront notées par les lettres a et b (éventuell
ement a', b1, s'il y a lieu) ; les rimes des tercets par les lettres
c, d, et e. Les sonnets « shakespeariens » ont toujours la
même disposition, en trois quatrains suivis d'un couplet
final, qui sera notée abab cdcd efef gg.
Une remarque préliminaire: j'éviterai de parler de son
net régulier, notion plutôt chimérique, qui change avec le
temps, et les métriciens. 218 JACQUES ROUBAUD
La forme du sonnet en France au XIXe siècle : parcours
rapide
Un poète qui, en 1830 ou peu après, entreprend de com
poser un ou des sonnets (c'est une chose qui, de nouveau,
se fait) est confronté à une question difficile : quelles sont
les règles de cette forme, depuis si longtemps plus ou
moins tombée en désuétude ?
Les traités de versification qui traitent de la question
sont peu nombreux, peu précis, et donnent des indica
tions souvent contradictoires. Les vers de Boileau, par
exemple, consacrés au sonnet, très connus et souvent
cités, ne sont guère éclairants. Mais ils ont eu une grande
influence sur les sonnettistes, et leur vague relatif permet
beaucoup de variations dans la forme.
Il y a une autre solution : bien que les œuvres des son
nettistes du premier âge du sonnet ne soient pas faciles à
trouver, il en apparaît quelques-uns dans les anthologies.
C'est là, ou chez les premiers poètes à se hasarder à en
composer, en tout premier lieu Sainte-Beuve, que la plu
part puisent leurs modèles. Sainte-Beuve lui-même écrit,
en ce qui concerne la forme, « à la manière », dit-il, « de
notre vieux Ronsard ». Les deux variantes de quatrains et
les deux variantes de tercets qui dominent dans l'œuvre
du maître de la Pléiade, sont aussi ceux qu'emploie Mal
herbe et qu'on retrouve, comme choix dominants, au
moins jusqu'à 1914.
Ce sont :
- pour les quatrains: abba abba et abab abab ;
-les tercets: ccd eed et ccd ede.
Il reste que certains ne se satisfont pas de l'absence
d'une norme reconnue. Gautier, en 1836 déjà, attire l'atten
tion des « jeunes », auxquels il reproche de faire un peu
n'importe quoi, sur les recommandations de Guillaume
Colletet, dans son Traité du Sonnet de 1655. Pour beaucoup
(pas tous, loin de là !) Gautier, qui se substitue rapide
ment à Sainte-Beuve comme chef d'école des sonnettistes,
est celui qui va, au moins jusqu'en 1872, dire le vrai de la
forme. FORME DU SONNET MALLARMÉEN 219 LA
Que dit donc Colletet, explicitement ou implicitement?
- Le sonnet a 14 vers.
- П est divisé en deux parties :
- la première partie (sans nom particulier) est elle-
même divisée en deux quatrains.
- la seconde partie, nommée sizain, en deux tercets.
Remarque : Colletet traite les deux parties comme indé
pendantes (formellement). La pratique du sonnet d'avant
1830, comme après, confirme largement un des aspects de
cette indépendance: la reprise, dans la seconde partie, des
rimes de la première, est rare.
- Il y a une disposition privilégiée dans les quatrains: ils
sont à rimes embrassées, abba.
- Il ne doit y avoir que deux rimes distinctes dans les
quatrains. On est tenté d'en conclure que leur « formule »
est : abba abba. En fait, ce qu'énonce Colletet n'interdit
pas une autre solution, qui n'a pas été négligée : abba
baab. Mais la première formule, qui domine largement au
xvpne siècle, est encore très importante dans le sonnet fran
çais du xdc*™.
- Colletet n'interdit pas toutes les autres manières dont
on pourrait disposer les deux rimes des quatrains, sauf les
quatrains en rimes plates, aabb aabb. On peut donc,
d'après lui, mélanger comme on veut les quatrains alter
nés (abab abab) et embrassés (abba), ce qui permet pas
mal de variantes.
- En ce qui concerne le sizain (les tercets) la figure
recommandée est : ccd eed (qui est effectivement celle que
Ronsard emploie de préférence ; celle aussi des premiers
sonnets en langue française (Marot)).
- Sont admises aussi, en principe, d'autres organisat
ions des tercets mais il est dit que « presque toujours » les
vers 9 et 10 riment ensemble et que les autres vers ont
généralement l'organisation d'un quatrain alterné, soit :
ccd ede (c'est bien ce qui se passe dans la tradition dont
Colletet rend compte de manière normative). En fait Gaut
ier ne respecte pas cette règle : il termine souvent ses son
nets par deux vers rimant ensemble. 220 JACQUES ROUBAUD
- La configuration à deux rimes alternantes, cdc dcd, est
mentionnée mais guère recommandée. C'est l'une des
deux formules préférées par le sonnet de langue italienne.
La formule cde cde (comme d'autres variantes à trois
rimes) est refusée parce qu'elle viole la règle d'alternance
des rimes, à laquelle la prosodie française est restée sou
mise jusque très avant dans le XIXe siècle.
Colletet introduit la notion, peu précise, de sonnets
« irréguliers, licencieux ou libertins ». Il donne pour
exemple (à ne pas suivre) les sonnets de François May-
nard. Ce qu'il désigne ainsi sont les dispositions de qua
trains qui n'entrent pas dans les variétés recommandées
ou tolérées. Elles sont nombreuses (et certes pas toutes
utilisées par Maynard, loin de là).
Gautier n'ayant pas, à ma connaissance, précisé sa pen
sée sur la question, on ne peut estimer qu'indirectement
ce qu'il a retenu du traité de Colletet. On sait qu'il
condamnait les « sonnets libertins ».
On dispose à ce sujet du témoignage de Baudelaire qui,
en 1859, écrit, de sa première entrevue avec cet écrivain :
« Quand il me vit un volume de poésies à la main, sa
noble figure s'illumina d'un joli sourire ; il tendit le bras
avec une sorte d'avidité enfantine; car c'est chose curieuse
combien cet homme, qui sait tout exprimer et qui a plus
que tout autre le droit d'être blasé, a la curiosité facile et
darde vivement son regard sur le non-moi. Après avoir
rapidement feuilleté le volume, (sans doute un recueil,
Vers, de 1843), il me fit remarquer que les poëtes en ques
tion se permettaient trop souvent des sonnets libertins,
c'est-à-dire non orthodoxes et s'affranchissaient volontiers
de la règle de la quadruple rime ». Dans sa préface à la
troisième édition des Fleurs du mal, Gautier signale « un
assez grand nombre de sonnets qui non seulement
n'avaient pas la quadruple rime, mais encore où les rimes
étaient enlacées d'une façon tout à fait irrégulière ». Dans
ses Portraits et souvenirs littéraires 1885, il prône le « sonnet
orthodoxe comme l'on fait Pétrarque, Félicaja, Ronsard,
Du Bellay, Sainte-Beuve », et excuse Baudelaire parce que FORME DU SONNET MALLARMÉEN 221 LA
si nombre de s

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