Tant qu il y aura de l argent, il n y en aura jamais assez pour tout le monde
4 pages
Français

Tant qu'il y aura de l'argent, il n'y en aura jamais assez pour tout le monde

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
4 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

témoignage exceptionnel

Informations

Publié par
Publié le 14 septembre 2012
Nombre de lectures 115
Langue Français

Extrait

“ La vraie div i n i t é de sBl anc s, c ’ e s tle méta lro nd e tle pes an tp apie r qu ’ ils appel le n t a rge n t.
Touiavii
D UM É T A LR O N D E TD UP E S A N T P A P I E R
Petite Bibliothèque en mal d’horreur E II SÉRIE- VOLUME X
Urs-Dominique SPRENGERpour, traducteur Aubier Flammarion (Paris, 1981) des discours de TOUIAVII, chef de tribu à Tiavéa, village de la petite île d’Oupolou dans les mers du Sud (Samoa orientales), nous apprend ceci : Erich SCHEURMANNepeignait, a vécu là-bas entr, qui 1914 et 1916. C’est lui qui à son retour publia en 1920Der Papalagi, traduisant de son propre chef ce qu’il nous présente comme le canevas de onze discours destinés par Touiavii – qui a eu l’occasion de visiter l’Europe – à mettre en garde ses concitoyens : lepapalagui*, qui pré-tend leur apporter la lumière par l’entremise de ses curés et de ses marchands, ne cherche qu’à les entraîner dans ses ténèbres. Médite donc, lecteur, sur l’état avancé de notre glorieuse «syphilisation », déjà longue-ment établi par Charles FOURIERet James JOYCE. Nous avons repris la traduction d’Orrlie qui devait paraître, vertigineusement illustrée, chez Vertige Graphic, hélas en rupture de ban…
* C’est-à-dire « celui qui déchire le ciel» : à l’hori-zon, la voile blanche du premier missionnaire arrivé dans leur île apparut aux Polynésiens à la manière d’un trou dans l’azur.
rond et le pesant papier pour éveiller notre concu-piscence. Il prétend nous rendre plus riches et plus heureux. Beaucoup d’entre nous ont déjà failli être aveuglés et touchés par cette redoutable maladie. Mais vous, vous croyez mes paroles, moi qui suis votre humble frère, et vous savez que je vous raconte la vérité en disant que l’argent ne rend jamais plus gai ou plus heureux, mais bien qu’il perturbe le cœur et sème la confusion dans la totalité de l’être, que personne n’en obtient jamais le moindre secours pour lui-même, que l’argent ne nous apportera pas plus de satisfac-tion, de vigueur ou de félicité – vous haïrez donc le métal rond et le pesant papier comme votre plus pire ennemi.
Papalagui avant qu’ils ne sachent parler, parce que jusque là ils ne savaient rien non plus de l’argent. Ah certes nous avons eu la préférence du Grand 11 Esprit pour nous avoir protégés de cetaitu! L’argent est unaitu, car il rend tout mauvais et tout le monde. Celui qui ne fait que toucher à l’argent succombe à son sortilège, et celui qui l’aime sera condamné à le servir et lui sacrifier toutes ses forces et toutes ses joies pour la durée de sa vie. Aimons nos nobles coutumes qui 12 méprisent l’homme qui demande unealofaen échange de son hospitalité ou pour chaque fruit qu’il te tend. Aimons nos coutumes qui ne per-mettent pas à l’un de posséder bien plus qu’un autre, ni à quelqu’un de posséder beaucoup quand l’autre n’a strictement rien. C’est ainsi que nous éviterons d’être en notre cœur semblable au Papa-lagui capable d’être heureux et joyeux, même quand son frère, à ses côtés, se sent triste et mal-heureux. Mais par-dessus tout tenons-nous à l’écart de l’argent. Le Papalagui fait miroiter aussi le métal
11. Mauvais esprit, diable. 12. Cadeau, présent en échange
C O U T E Z-M O Iavec l’esprit ouvert, pas cÉonnaître les horreurs de l’homme blanc et mes Frères pleins de bon sens, soyez tout ouïe et soyez reconnaissants de ne ses angoisses. – Vous m’êtes tous témoins, le mis-sionnaire nous a dit: Dieu est amour . Un bon chrétien doit toujours garder l’image de l’amour devant les yeux. C’est pourquoi le Blanc n’adresse ses prières qu’au g rand Dieu. F rères, il nous a menti et il nous a arnaqués, il a été suborné par le Papalagui pour nous tromper avec les paroles du Grand Esprit. P arce que le pesant papier et le métal rond, qu’ils a ppellent l’argent, c’est là la véritable divinité du Blanc. Parle à un Européen du dieu d’Amour – il fait la grimace et sourit. Il sourit de ta naïveté. de cette manière de penser . Mais tends-lui une pièce de métal rond et brillant ou une feuille de pesant papier – aussitôt ses yeux s’iiluminent et plein de salive lui dégouline de la bouche. L’argent est son amour unique, c’est son dieu. C’est à cela que tous les Blancs pensent, jusque dans leur sommeil. Beaucoup en ont les mains crochues et leur allure évoque les pattes du termite des bois à f orce de courir perpétuellement après le métal et le papier.
Beaucoup sont devenus aveugles à force de compter leur argent. Il sont nombreux à avoir sacrifié toute joie pour l’argent, et leur rire, leur honneur, leur âme, leur bonheur ; et même leur épouse et leurs enfants. Ceux-là ont presque tous échangé leur santé pour de l’argent. Ils le traînent sur eux dans leur pagne, tout plié dans des peaux dures. La nuit, ils le planquent au-dessous de leur enveloppe de nuit pour que personne ne puisse l’emporter. Ils y pensent nuit et jour, à chaque heure, chaque instant. Tous, tout le monde ! Les enfants, pareil ! Il faut y penser, c’est un ordre, une obligation morale. C’est ce que leur a appris leur mère leur apprend et que leur montre leur propre 1 père. Si tu passes dans les crevasses deSiamani, tu entends à chaque instant crier : « mark ! » Et encore une fois : « mark ! » En tous lieux on 2 3 entend ce cri. EnFafalic’est le franc, enPélétania le shilling, en Italie la lire. Mark, franc, shilling, lire, c’est tout la même chose. Ça signifie l’ar gent, l’argent, l’argent. L’argent est le seul vrai dieu du Papalagui, dans la mesur e où ce dieu est ce que nous vénérons au-dessus de tout.
1. L’Allemagne.
2. La France.
3. L’Angleterre.
d’honorable et qu’il n’est pas de bon g oût de se charger de tant de chaînes de coquillages, ce ne l’est pas plus de supporter la lourde charge de tant d’argent. Cela laisse les hommes hors d’haleine et entrave les mouvements naturels des membres. Mais nul Papalagui ne veut renoncer à l’argent. 9 Celui qui n’aime pas l’argent est ridiculisé,valea. « La richesse – c’est-à-dire avoir beaucoup d’argent – rend heureux », dit le Papalagui. Et encore que : « Le pays qui a le plus d’argent est le plus heureux.» Nous autres, frères à la peau lumineuse, nous sommes pauvres. Notre terre est la plus pauvre de toutes sous le soleil. Nous n’avons pas assez de métal rond et de pesant papier lourd pour remplir un bahut. Dans l’esprit du Papalagui, nous sommes de misérables mendiants. Et pourtant, quand je contemple vos yeux pour les comparee 10 à ceux des richesAlii, je trouve les leurs ternes, éteints et fatigués, tandis que les vôtr es resplen-dissent tel le plein jour et émettent des rayons de joie, de force, de vie et de santé. Des yeux comme les vôtres, je n’ai trouvé que chez les enfants du
9. Sot, stupide. 10. Monsieur, noble.
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents