Commedia dell Arte et théâtre bourgeois - article ; n°1 ; vol.15, pg 237-246
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Description

Cahiers de l'Association internationale des études francaises - Année 1963 - Volume 15 - Numéro 1 - Pages 237-246
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1963
Nombre de lectures 61
Langue Français

Extrait

Professeur Marcel Paquot
Commedia dell'Arte et théâtre bourgeois
In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1963, N°15. pp. 237-246.
Citer ce document / Cite this document :
Paquot Marcel. Commedia dell'Arte et théâtre bourgeois. In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises,
1963, N°15. pp. 237-246.
doi : 10.3406/caief.1963.2257
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/caief_0571-5865_1963_num_15_1_2257COMMEDIA DELL'ARTE ET THÉÂTRE
BOURGEOIS
Communication de M. M. PAQUOT
{Liège)
au XIVe Congrès de Г Association, le 27 juillet 1962.
Dans le fonds des manuscrits français de la Bibliothèque
Nationale, figure, inventorié sous le numéro 9240, un recueil
collectif dont les folios 52 à 57 contiennent un texte ano
nyme (1) que j'ai publié, en l'analysant, au tome XVIII
(1931) de la Revue du Seizième siècle.
Je soulignais alors l'intérêt structural d'une œuvre où,
pour le divertissement d'un milieu bourgeois, se conjuguent
des influences latine, italienne et française, par l'union de
l'épithalame, de la Commedia dell'arte et du ballet nuptial.
Si je reviens à ce texte, c'est que je me propose maintenant
d'y voir, plutôt qu'un écrit littéraire, un témoignage porté
sur la culture intellectuelle de la bourgeoisie provinciale.
Or donc, le 4 mars 1601, à Chalon-sur-Saône, il y eut fête
chez l'avocat Bernard qui épousait Mademoiselle Jeanne
Depontoux. La mariée était-elle jeune et jolie ? Le libretto
est muet sur ce point. Mais pudique et chaste, cela est hors de
doute ; et pourvue de biens négociables, ce qui ne pouvait
laisser indifférent un robin de Bourgogne ; et digne d'être
traitée en dame, puisqu'on lui dédia un divertissement pareil
à ceux dont les cours honoraient le mariage des grands.
Thoinot-Arbeau avait écrit, en 1588, dans son Orcheso-
graphie publiée à Langres : « les rois et princes commandent
(1) Ballet fait aux nopces de M. l'advocat Bernard. MARCEL PAQUOT 238
dances et mascarades pour festoier... ; nous practiquons telles
rejouissances aux jours de la celebration des nopces » ; tou
tefois, on ne possédait de cette époque aucun « livre » de spec
tacle bourgeois. En voici un, et qui ne manque pas de signi
fication.
A l'encontre de l'opéra italien, auquel le ballet de cour, la
pièce à machines et français doivent tant, la Comme-
dia dell'arte, théâtre d'origine aulique et d'essence populaire,
n'a pas exercé d'influence sur les réjouissances princières.
Tout au plus deux divertissements font-ils allusion aux trou
pes d'outre-monts qui jouaient alors à l'improvisade au ha
sard de leurs pérégrinations dans la province française. Et ces
témoignages sont de trente-cinq années postérieurs à celui
que nous apporte le ballet de Chalon.
L'un des témoignages est dû au poète Bordier, auteur des
Vers pour le Ballet du Roy representant les Comédiens italiens
publiés dans un programme sans nom et sans date que Lacroix
(Ballets et Mascarades de Cour, t. V, p. 243 à 254), situe avec
vraisemblance vers 1636.
Les entrées présentaient une douzaine de personnages :
Pantalon, Harlequin, le Dotour, le Capitan, plus des galants
affadis et comme émasculés. Peu attentif au soin de mettre en
lumière les caractères distinctifs de chacun de ces types, le
poète les marquait tous d'un même esprit de galanterie alambi-
quée. Témoin ce couplet, attribué au Capitan, pour « l'astre
en clairté » qu'est Lydie :
Amour, plus à craindre que Mars,
Trempe la poincte de ses dards
En des yeux si remplis de charmes,
Que sans se plaindre et soupirer,
Mon cœur ne peut plus endurer
L'effort de si puissantes armes.
Les interprètes d'un court divertissement de la même
époque, joué sous le titre La Comédie italienne, Boutade
(Lacroix, t. V, p. 255 à 261), ne sont pas mieux traités.
Du Capitan napolitain : COMMEDIA DELL'ARTE ET THEATRE BOURGEOIS 239
Aussi doux en la paix, que fier dans les combats,
Je suis l'amour du sexe et l'effroy de la guerre ;
Mes coups sont plus mortels que celuy du tonnerre,
Mais j'ay pour ma Philis mille charmans appas.
Les dons qu'elle a de la nature
Approchent fort de ma bravuře,
Que si je suis à elle, ainsi qu'elle est à moy,
Dans ce trocq de nos cœurs, quel est son avantage ?
Mars sera mon goujat, il subira ma loi,
Et le petit Amour luy servira de page...
au savant docteur de Bologne :
Je sçay le mouvement des cieux,
Je ce que sçavent les hommes
Qui vivent au siècle où nous sommes,
Et ce qu'ont sçeu tous nos ayeux.
Je sçay la nature des choses,
J'en sçay les effets par leurs causes
Et jusqu'où s'étend le pouvoir
Du ciel, de l'esprit et de l'ame ;
Mais quel est le cœur d'une femme ?
Je ne l'ay jamais pu savoir...
du Messer Pantalon qui, sous le masque d'un tâcheron suc
combant de fatigue, se révèle « généreux garçon », sachant
fort bien
De l'amour ou de Mars pratiquer la milice
Et dans l'occasion en faire l'exercice,
aux Scaramouches gambadeurs, non moins fidèles en amour
qu'experts à varier leurs mines :
Ils sçavent changer de visage,
Tantôt triste, tantôt moqueur,
Et pourtant ils ont l'avantage
De ne changer jamais de cœur..
tous, quels qu'ils soient, badinent et leurs propos s'insèrent
dans une trame galante.
Polichinelle échappe seul à l'afféterie, et c'est pour faire
l'éloge de sa subtilité : 240 MARCEL PAQUOT
Parle qui voudra de Briguelle,
De Scaramouche ou Trivelin,
On ne voit point d'esprit si fin
Que celuy de Polichinelle :
II dit ce qu'il pense tout haut,
II sçait se taire quand il faut ;
S'il porte un double nez, ce n'est pas sans mystère.
Relevons aussi la méconnaissance d'un trait essentiel des
acteurs de la Commedia deU'arte. Dans les Vers pour le
Ballet du Roy, Bordier leur prête ce propos :
Bien que chacun de nous aille contrefaisant
Tantost le sérieux, et tantost le plaisant,
Nos humeurs ne sont point volages.
Ce que nous en faisons, c'est pour faire advouer
Que selon le besoin nous sçavons bien jouer
Différents personnages.
Or un comédien se cantonnait de longues années dans le jeu
d'un masque, d'où résultait la continuité de l'interprétation.
L'on cite le cas de Zanotti qui incarna le personnage amoureux
d'Ottavio jusqu'à soixante-dix ans, de Tiberio Fiorilli qui,
à quatre-vingt-trois, brillait toujours dans les saillies de Sca
ramouche, performance surpassée par Giovanni Pâlies ini
qu'on applaudissait encore à quatre-vingt-sept dans le rôle
de Pedrolino (2).
Bordier tint cependant à rappeler que l'art de ces acteurs
rend leurs langues muettes.
Un troisième libretto, Le Libraire du Pont Neuf ou les
Romans, Ballet, publié sans nom ni lieu ni date, et qui pourr
ait se situer vers 1643 (Lacroix, t. VI, p. 59 à 71), comporte,
sous le titre « Récit des Comédiens italiens », un texte que
ces artistes chantèrent dans leur langue. C'était de l'italien
composé pour être entendu sur le champ par un public
français :
Belle donne, belle donne,
О sembianze gloriose
(2) G. Attinger, L'Esprit de la Commedia deU'arte dans le théâtre franç
ais, 1950, p. 44. COMMEDIA DELL'ARTE ET THEATRE BOURGEOIS 24 1
Délie stelle radiose,
Vedete le nostre pêne.
О ch'ama non ben conviene
Di cantare, o di ballare,
Perché ? Perch'essendo in tante pêne
Dovřete sempře sospirare...
Rehaussée de lazzi, cette langue facile devait servir aux
plaisanteries de Molière ; mais ce ne fut pas celle du « diver
timento » inséré dans le spectacle qui nous occupe.
A Chalon, on vit d'abord pénétrer dans la salle les porte-
flambeaux d'Apollon et d'Aglaia, l'aînée des Grâces. Après les
porte-flambeaux venaient des musiciens, c'est-à-dire des
chanteurs, qui exécutèrent quelques couplets.
Ensuite, nous dit le programme, entrait « un Buratin à la
façon de ceux que l'on voit à la Comédie italienne ». Comme il
entreprenait de faire un discours en italien, survenait « un
Dottor habillé en Pantalon », lequel dis

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