Du « Lais » au « Testament » - article ; n°1 ; vol.32, pg 39-50
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Description

Cahiers de l'Association internationale des études francaises - Année 1980 - Volume 32 - Numéro 1 - Pages 39-50
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1980
Nombre de lectures 26
Langue Français

Extrait

Guiseppe Di Stefano
Du « Lais » au « Testament »
In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1980, N°32. pp. 39-50.
Citer ce document / Cite this document :
Di Stefano Guiseppe. Du « Lais » au « Testament ». In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1980,
N°32. pp. 39-50.
doi : 10.3406/caief.1980.1206
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/caief_0571-5865_1980_num_32_1_1206« LAIS » AU « TESTAMENT » DU
Communication de M. Giuseppe DI STEFANO
(Montréal)
au XXXIe Congrès de l'Association, le 24 juillet 1979
1. - Les études villoniennes se portent bien. « Le Moyen
Français » publiera prochainement la bibliographie des vingt
dernières années. On y verra que la moyenne annuelle est
de 19 à 20 titres avec des pointes de trente travaux (en 1975).
Toutes les tendances de la critique actuelle sont représentées.
C'est pourquoi je voudrais faire d'abord le point sur ce que
j'entends par travail critique.
Il me semble que le phénomène « texte » doit être abordé
sur la base des hypothèses de travail suivantes : le texte est
le lieu où se trouvent engagés des rapports entre un auteur
et d'autres auteurs ; à tout le moins, un auteur inscrit son
texte dans une lignée que viendra prolonger sa propre pro
duction ; un texte est aussi, et non pas alternativement, un
rapport de signes entre eux — le rapport avec le réfèrent
étant une inconnue du système de décodification ; un texte
est en plus un rapport entre des signes et des lecteurs qui
finissent par engendrer, par leur lecture, un « après-texte »
et qui peuvent à leur tour devenir ainsi des auteurs ; la
parution d'un texte agit sur sa propre tradition, en lui impo
sant un rajustement, sinon une restructuration.
Grâce à ce prolongement qu'est son après-texte, l'œuvre
connaît une extension sur l'axe chronologique, le premier
lecteur étant l'auteur au moment même où il compose et lors
qu'il se relit — ceci parfois au moment de composer un
deuxième texte : nous savons que Villon, au moment où il GIUSEPPE DI STEFANO 40
écrivait le Testament, avait sous les yeux le Lais. Et, fait
capital à l'époque médiévale, n'oublions pas ces lecteurs que
furent les scribes, lecteurs qui ont pu infléchir de manière
décisive, par leur lecture-copie, la trajectoire du texte dans le
temps.
2. - Ceci dit, la production de Villon constitue à bien des
égards un cas privilégié. A un corpus mince (nous ne pouvons
homologuer, jusqu'à plus ample informé, la récente proposi
tion d'intégrer au corpus un lot des meilleures farces) corre
spond un parcours de créativité dans le temps qui est, lui
aussi, restreint. Si nous prenons comme points de repère les
dates fournies par les textes eux-mêmes, on dénombre, de
Гап 1456 (pour le Lais) à l'an 1461 (pour le Testament), cinq
ans d'activité créatrice, même si nous savons par ailleurs que
le Testament a accueilli et absorbé des éléments d'une pro
duction antérieure, indépendante et dispersée (d'où la longue
polémique sur l'unité du Testament). Villon a donc dû réamén
ager, en vue de l'enchâssement de ces éléments dans le Tes
tament, sinon la forme, du moins le contenu, les rapports
qu'entretiennent ces signes aussi bien entre eux-mêmes qu'avec
le texte d'accueil.
Je pense en particulier à la portion du Testament dédiée à
Robert d'Estouteville, et à la ballade correspondante. S'il est
vrai que la ballade elle-même a été composée à l'origine ind
épendamment du Testament, le texte, tout en exploitant les
mêmes signes organisés en ballade, a subi, moyennant une
intervention d'auteur destinée à effectuer un resémantisation
du système d'information et dictée probablement par un rev
irement de la fortune du dédicataire, le texte, dis-je, a subi
une restructuration portant sur les rapports de ses éléments
à la fois à l'intérieur de la ballade et avec l'entourage repré
senté aussi bien par le Testament que par le Lais (L. 163-4,
T. 1368 seq.). Le texte est réemployé dans la mesure où il
s'offre dès son premier emploi aux décodifications des lec
teurs (pour la ballade en question, on verra l'intervention
de S. Cigada dans le débat — débat qui naît du fait même
que réfèrent historique et réfèrent littéraire semblent se che- « LAIS » AU « TESTAMENT » 41 DU
vaucher), mais avant tout parce qu'il constitue une réserve
de disponibilités qui permet sa récupération et son transfert
par l'auteur lui-même.
3. - Pour ce qui est des rapports entre le Lais et le Testa
ment, les critiques s'accordent sur deux points :
a) Villon, pendant qu'il composait le Testament, avait sous
les yeux un exemplaire du Lais ;
b) Le Lais est considéré comme une « esquisse », une
« ébauche » du Testament, à telle enseigne que le Testament
apparaît comme le produit d'une expérience braquée sur des
textes antérieurs appartenant aussi bien à la tradition litté
raire préexistante qu'à la production de l'auteur.
Toutefois, le Lais, en raison de sa complétude, se présente
moins comme une esquisse que comme Yopus minus auquel
on ne saurait nier le statut de texte achevé, qui doit son unité
au je narrateur qui parcourt et clôt l'espace textuel, de la pre
mière strophe, qui fixe la date du document et l'identité du
testateur, à la dernière, qui clôt le texte de manière parfai
tement compatible avec sa qualité de document juridique,
l'espace poétique inhérent au texte étant ainsi délimité.
Du point de vue de la tradition littéraire, aussi bien le Lais
que le Testament s'inscrivent dans une lignée qu'il est aisé
d'identifier et qui va du Testament par esbatement de Des
champs ou de l'Amant trespassé attribué à Pierre de Haute-
ville jusqu'à la production que l'œuvre de Villon est destinée
à susciter.
Or, Villon renvoie explicitement dans le Testament au
Lais. Il y a un réseau de correspondances intertextuelles qui
peut être identifié à l'aide du lexique de Burger et du com
mentaire qui accompagne l'édition Rychner-Henry.
On peut travailler sur ces matériaux. Faisons-en une sélec
tion en prenant les mots dans leur sens premier.
4. - Du fait même de ces correspondances, le Testament
réécrit le Lais. La réécriture récupère toutefois deux sections
seulement du texte antérieur : compte tenu du schéma tripar- GIUSEPPE DI STEFANO 42
tite qu'on assigne traditionnellement au Lais (l'amant martyr,
le lais, l'entr 'oubli), seuls les deux premiers éléments seront
récupérés dans le Testament. Soit dit en passant, cette récu
pération sélective du texte par son propre auteur rejoint
l'état du texte dans les rédactions courtes fournies par les
témoins С et I, qui semblent refléter une option de rédacteur
(c'est mon avis) plus qu'une option de lecteur-scribe ou un
simple « accident ».
Du Lais, Villon fera passer dans le Testament l'organisa
tion prosodique de base (vers octosyllabiques groupés en
huitains), schéma dans lequel seront enchâssés ces éléments
formels nouveaux que sont les pièces à forme fixe. Cette
technique de composition permet de récupérer des éléments
poétiques « préfabriqués », dirais-je presque, en faisant
converger dans le texte l'expérience poétique accumulée lors
du précédent effort de création.
Le Testament se présente ainsi, du moins en partie, comme
une œuvre bâtie sur des textes repris tels quels et reséman-
tisés au besoin en fonction de leur nouvelle collocation (c'est
le cas des poèmes à forme fixe) ou sur des textes (c'est le
cas du Lais) dont certains éléments sont récupérés par une
opération qui tient à la fois de la citation et de la réécriture
à l'aide d'une série d'incidents (T. 257) qui finissent par
dilater le texte.
Prenons la strophe XI du Lais. Il y a deux légataires,
Ythier Marchant et Jehan le Cornu, et un seul legs. Villon
fera co

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