Publications de l'École française de Rome - Année 1986 - Volume 88 - Numéro 1 - Pages 119-132La tragédie romaine fait de l'aveu juridique un usage détourné. Car l'aveu en dehors du contexte théâtral ouvre une séquence où le coupable qui a avoué un crime s'offre à la sentence des juges. Or dans une tragédie comme la Phèdre de Sénèque, les aveux qui y sont faits diffèrent de deux façons de l'aveu juridique. D'abord on y avoue non seulement des crimes réalisés, mais des crimes envisagés et plus généralement un état criminel. Aveu de la personne et non de l'action. Ensuite le héros, l'héroïne, qui avouent, se constituent en même temps leur propre juge. Avouer c'est se condamner. Car le crime tragique ne relève pas des tribunaux des hommes, il est au-delà de la justice humaine, il est inexpiable. C'est pourquoi l'aveu tragique ouvre une séquence non de jugement mais de métamorphose. L'aveu tragique fait basculer le héros dans la monstruosité. La parole d'aveu s'apparente donc à un performatif, c'est un acte par lequel le héros se transforme lui-même en objet d'horreur, que l'humanité ne pourra qu'expulser sans pouvoir le juger. 14 pages Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.
L'aveu dans la tragédie romaine In: L'aveu. Antiquité et Moyen ge. Actes de la table ronde de Rome (28-30 mars 1984). Rome : École Française de Rome, 1986. pp. 119-132. (Publications de l'École française de Rome, 88)
Résumé La tragédie romaine fait de l'aveu juridique un usage détourné. Car l'aveu en dehors du contexte théâtral ouvre une séquence où le coupable qui a avoué un crime s'offre à la sentence des juges. Or dans une tragédie comme la Phèdre de Sénèque, les aveux qui y sont faits diffèrent de deux façons de l'aveu juridique. D'abord on y avoue non seulement des crimes réalisés, mais des crimes envisagés et plus généralement un état criminel. Aveu de la personne et non de l'action. Ensuite le héros, l'héroïne, qui avouent, se constituent en même temps leur propre juge. Avouer c'est se condamner. Car le crime tragique ne relève pas des tribunaux des hommes, il est au-delà de la justice humaine, il est inexpiable. C'est pourquoi l'aveu tragique ouvre une séquence non de jugement mais de métamorphose. L'aveu tragique fait basculer le héros dans la monstruosité. La parole d'aveu s'apparente donc à un performatif, c'est un acte par lequel le héros se transforme lui-même en objet d'horreur, que l'humanité ne pourra qu'expulser sans pouvoir le juger.
Citer ce document / Cite this document : Dupont Florence. L'aveu dans la tragédie romaine. In: L'aveu. Antiquité et Moyen ge. Actes de la table ronde de Rome (28-30 mars 1984). Rome : École Française de Rome, 1986. pp. 119-132. (Publications de l'École française de Rome, 88) http://www.persee.fr/web/ouvrage home/prescript/a _ _ _ _ _ _ s/ rticle/efr 0000-0000 1986 act 88 1 2842