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Le comptoir des étatsDelko ChristianLe comptoir des étatsLa prison a creusé quelques rides sur le visage de Rigobert mais sa jeunesse se voit encore .Trente cinq ans, une jeunesse sans histoire, une scolarité normale, fini à vingt cinq ans, unemploi assez bien payé chez Constrictors Co, Rigobert allait vers une vie stable et tranquille. La rencontre de Lisa avait apporté la joie au jeune homme ordinairement anxieux. En très pe ude temps, il a développé pour la jeune fille une grande passion. Mais la passion l’a rendu jaloux. La jalousie l’a poussé à la méfiance. La méfiance l’a amené à espionner Lisa. Lisa l’a conduit chez Jean.La folie meurtrière, quasi corolaire du grand amour ne s’est pas fait prié deux fois avant des’inviter dans la vie du jeune homme.Et, Rigobert défonça le crane de Jean.Sentence: huit ans de prison ferme.Les rues paraissent très grandes aux yeux de Rigobert. L’effet de la réclusion dans une pe titecellule ou de l’urbanisation ? Le tout nouveau ancien détenu ne saurait dire. Son regard estdevenu fuyant. L’impression d’être montré du doigt par tout le monde a son passage, estpersistante. « Tout le monde connaît-il mon histoire ou un ex détenu parait vraiment sidifférent ? » se demande continuellement le jeune homme, de plus en mal a l’aise. Il se promène depuis trente minutes, pour découvrir sa ville et se familiariser avec elle, mais ilregrette à présent. Le poids des regards est lourd. Comment passer inaperçu ?

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Publié le 04 janvier 2012
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Langue Français

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Le comptoir des états
Delko Christian
Le comptoir des états
La prison a creusé quelques rides sur le visage de Rigobert mais sa jeunesse se voit encore.
Trente cinq ans, une jeunesse sans histoire, une scolarité normale, fini à vingt cinq ans, un
emploi assez bien payé chez Constrictors Co, Rigobert allait vers une vie stable et tranquille.
La rencontre de Lisa avait apporté la joie au jeune homme ordinairement anxieux. En très peu
de temps, il a développé pour la jeune fille une grande passion. Mais la passion l’a rendu
jaloux. La jalousie l’a poussé à la méfiance. La méfiance l’a amené à espionner Lisa. Lisa l’a
conduit chez Jean.
La folie meurtrière, quasi corolaire du grand amour ne s’est pas fait prié deux fois avant de
s’inviter dans la vie du jeune homme.
Et, Rigobert défonça le crane de Jean.
Sentence: huit ans de prison ferme.
Les rues paraissent très grandes aux yeux de Rigobert. L’effet de la réclusion dans une petite
cellule ou de l’urbanisation ? Le tout nouveau ancien détenu ne saurait dire. Son regard est
devenu fuyant. L’impression d’être montré du doigt par tout le monde a son passage, est
persistante. « Tout le monde connaît-il mon histoire ou un ex détenu parait vraiment si
différent ? » se demande continuellement le jeune homme, de plus en mal a l’aise.
Il se promène depuis trente minutes, pour découvrir sa ville et se familiariser avec elle, mais il
regrette à présent. Le poids des regards est lourd. Comment passer inaperçu ? Rigobert ne le
sait plus. Les habits neufs qu’il porte étaient destiné a cela, mais pourtant…
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Le comptoir des états
Delko Christian
Les quelques bars qui s’ouvraient déjà en ce début de soirée attirèrent son attention. L’un deux,
« Sans Souci » l’a séduit. Il y entre, pour passer le temps et reprendre sa promenade à la nuit
complète.
Le bar est à moitie plein mais le comptoir libre. Le sourire du barman est rassurant.
-
une Guinness s’il vous plait.
La boisson fraiche, la première depuis huit ans, est accueillie avec délectation.
-
une autre s’il vous plait.
La remise à niveau a commencé. La prison prive de beaucoup de délices. Les premières gouttes
de la douce bière à l’arrière gout légèrement amer picotent les nerfs endormis depuis si
longtemps. Ils se réveillent. Rigobert revient à la vie. Ses oreilles se tendent. Les baffles
dissimulées dans les coins du bar, diffusent « emmène-moi » de Pierrette Adams. Rigobert se
retourne doucement. Deux femmes se trémoussent joyeusement aux bras de deux hommes sur
la piste.
-
une autre s’il vous plait, cria-t-il plus fort à l’attention du barman.
« Emmène-moi », la chanson préférée de Lisa. Elle la chuchota aux oreilles de Rigobert,
chaque fois que celui-ci la prenait dans ses bras. Et en prison, toute la première année,
Rigobert la murmurait chaque jour, et finissait en sanglots : « Lisa pourquoi ne m’as-tu pas
laissé t’emmener où je veux ? Pourquoi n’es-tu pas restée avec moi pour affronter les
ouragans, les orages ? Pourquoi a-t-il fallu que ce soit de toi que me viennent ces
obstacles ?»
La troisième bouteille, Rigobert l’a vidée d’un trait.
-
une autre s’il vous plait.
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Le comptoir des états
Delko Christian
Le barman était médusé. Il prend la bouteille, mais en la posant, il regarde son client bien en
face pour lui faire comprendre qu’il exagère. Rigobert s’empare sans ciller de sa bouteille.
-
combien je vous dois ?
-
trois mille francs.
-
Tenez ! un billet de cinq. Je prends une table au fond. Envoyez –m’en une autre là-bas.
La table choisie par Rigobert est loin des autres. Ça lui convient. La peur d’approcher ses
semblables est encore la. Pire, il est presque étranger dans sa ville natale. Aucun visage ne
lui est familier. Et d’ailleurs, oserait-il approcher une vieille connaissance ? Il ne s’est pas
pardonné son propre crime, alors la société l’aurait-elle fait ? Rigobert s’est fait une idée
depuis son incarcération : il ne se réconciliera jamais avec le monde.
Ce soir au « sans souci », l’honneur est aux couples. Le DJ ne fait qu’enchainer du zouk.
Les couples sur la piste sont gais. Enlacés, les yeux mis clos, ils se frottent tendrement les
uns aux autres, le visage rayonnant de bonheur et de satisfaction. Ils paraissent sans souci.
Le bar mérite vraiment son nom. En fait…pas pour tout le monde. Car Rigobert, seul dans
son coin, avait des soucis pour compagnons.
Les vieux souvenirs des moments de bonheur passé dans des endroits comme celui-ci avec
Lisa, ressurgissent. Rigobert ne veut pas d’eux. Il ne e veut pas de Lisa. Pas même en
souvenir. Trop douloureux. Il les noie dans sa bière et les avale pour qu’ils restent bien
enfouis au fond de son ventre. Mais ils émergent distinctement. Alors il voit Lisa… le teint
clair, des nattes… toujours nattes bien serrées sur la tête…la tête qu’elle balance toujours
en arrière … sur le coté droit quand elle souriait…son sourire, enfantin et gai…enjoliveur,
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Le comptoir des états
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charmant ! Lisa ressurgit, et se trémousse seul devant Rigobert…une invite…comme elle
l’a toujours fait.
Rigobert vide sa bouteille et en commande une autre. Le zouk continue. Le bonheur sur la
piste continue. Les souvenirs continuent d’affluer. A coup de longues rasades de bière,
Rigobert tente de les refouler…en vain.
Finalement, la bière a perdu de sa douceur. Rigobert pose la bouteille. Sa tête commence à
prendre du poids. Rigobert la pose, elle aussi, sur le rebord de la table. Ses paupières
s’abaissent. Plus de Lisa.
La lumière sur cette artère est très éclatante. Des néons, des néons partout, la diffusent en
mille couleurs: jaune, bleu, rouge, vert, violet… Les vitrines des boutiques appellent à la
lèche. Ca scintille de partout. Même les habits scintillent. Les visages aussi. Les visages,
Rigobert tente de voir un de plus prêt, mais personne ne s’intéresse à lui. Tout le monde
parait presser. « Mais où suis-je ? » se demande sans arrêts Rigobert. Ses souvenirs les plus
lointains remontent à son premier jour en prison. Les plus proches à sa sortie et à une
promenade dont il a rêvé depuis huit ans, dans le coin salle de la cellule où il a vécu ses
dernières années. Il se souvient avoir entamé cette promenade tant espérée, mais il ne sait
plus comment il a pu se retrouver sur cette artère lumineuse. Et sa mémoire, comme par
enchantement, refuse de remonter à son point de départ.
Rigobert continue a trainé, sous les lumières, curieux et dubitatif. Les enseignes ! Il
pourrait trouver un repère en lisant les enseignes des boutiques et alimentations. Le nez en
l’air, il tente de lire. « L’ame… per…due… » Lit-il sur la première enseigne, et en
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Le comptoir des états
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dessous : « boutique des souvenirs lointains »… « Saints encens, parfumez-vous, purifiez
votre ame »… la danse des couleurs diffusées par les néons rend difficile la lecture…et le
mot ame revenant souvent dans les noms de ces boutiques met mal a l’aise le promeneur.
L’ame sienne, perdue depuis si longtemps, torturée sans cesse par des remords
omniprésents, par un dégout avouée d’etre, ne veut pas qu’on lui rappelle son existence.
L’ame de Rigobert cherche une cachette. Elle pue. Aucun encens ne la sanctifiera. Jamais !
Les vitrines se succèdent, toujours éclatantes de mille couleurs vives. Vives et
captivantes…Rigobert, rendu a la liberté par les hommes, devint prisonnier des lumières.
Elles dansent, dansent sans cesse sous son regard et l’oblige à décrypter leur mouvement
pour lire leurs expressions… lesquelles se rapportent toujours a l’ame comme l’enseigne de
ce…bar : « le comptoir des états d’ame » et plus bas : « soulez votre ame de l’état de votre
choix ».
-
Qu’est-ce que c’est encore que ca ! murmure Rigobert, et il pousse la porte d’entrée
sans hésiter.
C’est une grande salle.
Un bar dancing.
Le bar, au coin droit de la salle est le seul endroit où règne un certain calme. En dehors de
ses limites, l’indescriptible.
Comment décrire un « essaim d’hommes » grouillant autour de rien, se tordant en désordre
dans tous les sens pour produire quelque chose qui se veut une danse ? Comment décrire
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des cris et sauts incontrôlés d’individus adultes ? Comment décrire une centaine
d’individus se mouvant, a la fois dans des expressions corporelles désordonnées ?...
Fous, les rires qui s’élèvent de cette salle ! Folle la danse qui s’y déroule ! Enfantins les
jeux qui s’y pratiquent…
Rigobert, hypnotique, s’avance, l’esprit en ébullition vers le comptoir. La chose qui se
trouve derrière, est tout sauf un homme. Une tête de singe pelé, a la différence que le
museau est celui d’un rat. Des membres de grenouille, un ventre d’enfant malnutri.
La présence de Rigobert ne l’a pas surpris. Ses yeux de tarsier, s’agrandissent ; les
membres batraciens se lèvent et…doucement, la chose qui se veut homme, fait une
révérence très correcte au nouveau venu.
-
Bienvenue « au comptoir des états d’âmes », cher Monsieur. Toutes nos spécialités sont
à votre disposition. La première est offerte par la maison.
Fou, se dit intérieurement, Rigobert. Un bar de fous. Mais il s’approche et s’assoie. Les
yeux grands ouverts, le curieux barman attend qu’il dise un mot. Un mot ! Tout ce qui
manque le plus a Rigobert, dont l’esprit en ébullition est parti cherché d’innombrables
réponses a des questions brulantes. Un mot ! Que dire à cet avorton de singe qui a appris
des manières d’hommes ? Un mot, finalement il en trouve. Celui que l’on dit toujours en ce
lieu, celui qui vient à l’esprit dès qu’on passe la porte d’un bar. Celui-là a réussi à fendre
l’esprit vide de Rigobert et à passer a travers ses lèvres :
-
une bière s’il vous plait.
-
Bon début ! sursauta le Cro-Magnon. Mais laquelle, ajoute-t-il en tendant une oreille.
-
Guinness !
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Je ne connais pas. C’est quoi c’est ?
-
Comment ca ? c’est une bière.
-
Je ne la connais pas celle-là. Elle agit comment ?
-
Je ne vous comprends pas.
-
Cette bière, gui…gui… quoi vous dites ?
-
Guinness ! vous êtes barman non ?
-
Comme tous ceux aux oreilles tordues qui me précèdent dans ma généalogie. Je suis né
derrière ce comptoir. Alors cette bière, quel peut etre son effet ?
-
Elle saoule comme tout autre.
-
Mais comment ?
-
Je ne sais pas comment vous répondre. Une bière, ca saoule, c’est tout. Ca fait dormir,
ca fait tituber…vous êtes barman, vous devez voir ça constamment.
Le Cro-Magnon se renfrogne. Pas vraiment satisfait de la réponse de l’homo sapiens
sapiens.
-
Bien. Puisqu’il n’existe pas de Guinness ici, je vous sers quoi.
-
Un castel alors.
-
C’est encore une bière ? il n’y en pas ici. Quoi d’autre ?
-
Gala ou Beaufort.
-
D’où sortez-vous vos marques de boisson ? elles n’existent pas par ici. Jamais vu, de
toute ma vie de barman.
-
Bien. Vous vendez quoi alors?
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Nous soulons les âmes des états qui sont là-haut. Regardez nos échantillons et
choisissez. Vous aurez la soirée de votre vie.
Rigobert lève la tète. « Joie », lit-il sur la première étiquette. « Folie » sur une autre plus
loin et puis « bonheur », « rire », « désir », « amour », « mélancolie »…
-
Voila ce que nous vendons ici, dit le bout de singe, interrompant Rigobert dans sa
surprenante découverte. Un seul verre de nos spécialités vous plonge dans l’état que
vous voulez. On avait aussi la haine mais la municipalité a interdit. Faut dire qu’elle a
raison. Alors vous choisissez ?
-
Je ne comprends rien à tout ça. Je suis venu boire une bière.
-
Et moi je propose mieux. Un état de votre choix. Ici on boit pour se mettre dans un état
bien défini. Par exemple, vous êtes triste, et vous voulez etre joyeux, je vous sers un
verre de joie. Voyez-vous le monsieur là-bas, qui n’arrête pas de sauter ? il était arrivé
en pleurant. Sa femme est morte. Je lui ai servi un verre de joie. Maintenant, il a tout
oublié, et jubile sans arrêt. Vous aussi, vous avez grand besoin d’un remontant pareil.
Vous avez triste mine. Je vous sers ?
-
Non ! c’est presqu’un cri qu’a poussé Rigobert. L’idée de se retrouver à sautiller sur la
piste, ne l’enchante pas.
-
Alors, un verre de folie ? l’occasion de réaliser tous vos fantasmes en une soirée.
-
Je ne veux pas devenir fou.
-
Un verre de rire alors. « la journée la plus perdue est celle au cours de laquelle on n’a
pas ri » a dit quelqu’un. Vous, vous paressez n’avoir jamais ri de votre vie. Toute une
vie perdue. Rattrapez tout ca en une soirée. Vous en dites ?
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Les fous peuvent parfois vous faire entendre raison à travers leurs délires. Toute sa vie,
Rigobert s’est mis dans un carcan d’austérité que le rire n’a presque jamais infiltré. Lisa
l’avait fissuré, hélas, pas pour longtemps, et l’amertume qui l’a succédé a ôté tout envie de
faire une nouvelle expérience.
-
Non merci, pas de rire.
-
Je vous comprends. La tristesse qui se lit dans votre regard, fait suite à la haine. La
haine vous a écarté du monde, mais le monde vous manque, alors vous en devenez
triste. A la source de cela, laissez-moi deviner, il y eut l’amour. Un grand amour. J’ai
toujours lu cela dans les yeux des buveurs d’amour. Apres le premier verre, ils sont les
hommes les plus heureux sur terre. Ils câlinent partout, ils rient, ils dansent,…après ils
en deviennent saouls alors le contrôle leur échappe. Vive les dégâts. Le lendemain, ils
sont les plus malheureux. Ils ne veulent rien d’autre qu’un verre de mélancolie, qu’ils
boivent seuls, assis à ce comptoir. Ca ne vous tente pas non plus ?
-
Non !
-
Alors une nouvelle expérience amoureuse ?
-
Non plus d’amour pour moi. J’en ai déjà assez souffert. Gardez vos breuvages. Je
rentre.
-
Il ya une dernière chose dont vous n’avez jamais fait l’expérience de toute votre vie.
C’est cela la cause de vos maux. Attendez-moi une seconde s’il vous plait. Je vous ferai
revenir à la vie.
Le métis d’homme et du singe, se retourne et arrache une bouteille au placard. Il pose.
Rigobert s’empresse de lire l’étiquette :
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« Tolérance ! »
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Oui, la clef d’une vie heureuse. Aime ce que tu aimes, mais tolère ce que tu n’aimes
pas, et tu vivras a la parallèle des problèmes. Buvez-en un verre pour vous réconcilier
avec le monde, et recommencer à vivre.
Rigobert dit oui
« Sans souci » s’est presque vidé. Il ne reste que des dormeurs, comme Rigobert au fond du
bar. Le barman entreprend de vider les lieux. Ceux qu’il réveille, s’en vont, titubant et
maugréant…leurs désaccords surement.
***
Au « comptoir des états d’âmes », le Cro-Magnon vient de tendre à Rigobert, un verre
rempli de ce qu’il appelle « Tolérance ». Rigobert regarde longuement dedans. Quel effet ?
Quel effet auras-tu sur moi ? Il la porte a ses lèvres. Doucement. Hésitant.
Les lèvres tremblent. Elles tremblent fort, alors elles craquent. Le verre s’oriente vers la
brèche qui se découvre…
***
Le barman de Sans Souci arrive lourdement auprès de la table de Rigobert. Il pose une
main fraiche sur le bras nu. Le dormeur se réveille en sursaut. Hagard !
-
Nous fermons, monsieur.
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Où suis-je ?
-
Au bar Sans Souci.
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Ah bon ! merci.
Rigobert n’a plus refermé les yeux. Son rêve tournait, rembobinait et tournait, encore et
encore jusqu’au petit matin.
Des coups discrets à la porte. Rigobert se lève, et ouvre…
Lisa n’a pas vieillie. Elle s’est juste un peu empâtée, mais sa jeunesse et sa beauté n’en ont
pas été altérées.
Rigobert n’en croit pas ses yeux. Lesquels voulaient justement s’agrandir, surprise oblige,
mais ils sont plutôt rabattus…sur Lisa qui vient de se laisser tomber à genou à ses pieds.
Les mains agrippées à la cheville de Rigobert, Lisa se liquéfie sur son pied, par vagues de
spasmes silencieux.
Au bout d’une minute, une minute au cours de laquelle tout parait suspendu pour une
transformation de l’ordre existant, une minute qui en parait mille, interminable ; au bout de
cette minute, Rigobert laisse s’afficher un tendre sourire, vide d’une longue respiration, le
souffle d’une vie qui vient de prendre fin ; au bout de cette minute, il se courbe, relève
Lisa, essuie ses larmes et l’embrasse. Il la serre, il la serre fort contre son cœur.
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