LES CARNETS DE GUERRE D UN POILU BELGE
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LES CARNETS DE GUERRE D'UN POILU BELGE

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Description

Dans "Les Carnets de Guerre d'un Poilu belge", notre personnage raconte sa vie de militaire dans l'armée de sa majesté le roi Albert Ier en 1914 et 1915. Envoyé au Front, il participe à la défense des villes belges et est fortement impliqué dans la Bataille de l'Yser.
Ce texte, facile d'accès, écrit en "je" et à l'indicatif présent, permet aux lecteurs de prendre conscience de ce que nos hommes ont vécu pendant la Grande Guerre, de leurs souffrances et des dangers qu'ils ont courus.

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Publié le 29 janvier 2014
Nombre de lectures 338
Licence : Tous droits réservés
Langue Français

Extrait

Les Carnets de Guerre d’un Poilu
belge
SION & GATELiège. 4 août 1914.
Retranchés derrière les murs de protection de notre Fort, mes hommes et moi attendons
l’armée allemande de pied ferme. A une petite centaine de mètres de nous, les canons de notre
compagnie tonnent sans arrêt pour retarder l’avancée de nos ennemis.
- Mon lieutenant, puis-je vous poser une question ? me demande soudain le soldat de
première classe Comtesse.
- Allez-y, Comtesse. Je vous écoute.
L’homme de troupe d’une quarantaine d’années s’exprime difficilement, plus habile pour
manier son fusil que pour prononcer les quelques mots qu’il veut m’adresser. Je l’ai placé juste à
côté de moi parce qu’il est grand et qu’il m’inspire confiance. Lorsque je dois quitter ma position
pour mieux organiser mes hommes ou aller prendre nos ordres, il est de taille à occuper sa place
et la mienne.
- Mon lieutenant, j’ai peur de mourir. Pensez-vous qu’on va y passer aujourd’hui ?
- Ce qui doit arriver arrivera, Comtesse : nous n’y pouvons rien. Mais les Allemands sont
encore loin.
Le pessimisme de Comtesse me touche au plus haut point. En tant qu’officier, je dois garder
mon sang-froid. Tel est mon rôle. Mais il est réellement impressionnant qu’un homme si costaud
ait si peur de mourir.
Il y a deux heures, le général Leman a annoncé à tous les officiers que les troupes
prussiennes se trouvent encore à quelques kilomètres de Liège, mais que, ce soir, elles auront
encore progressé, malgré les escarmouches mises sur pied par nos troupes d’élite et les
nombreux guet-apens dans lesquels nos ennemis tombent, abattus par des fusils bien cachés
dont il perçoivent trop tard la funeste présence.
Alors que j’écris ces lignes en cette fin d’après-midi, j’ai l’impression d’aimer ma patrie plus
que les autres jours. Je suis prêt à lui donner ma vie pour empêcher l’envahisseur de la détruire.
Mais je sais que le combat est déséquilibré. A cent contre un, on peut résister un temps en étant
habile et courageux. Mais tôt ou tard, pourtant, le nombre triomphera de la vertu et notre position
sera prise sans que nous puissions rien y faire.
Liège. 6 août 1914.
La ville des Princes-Évêques est tombée aujourd’hui. Nos hommes ont évacué toute
l’agglomération en quatrième vitesse. Seules les garnisons des douze Forts, dont la mienne, sont
maintenues en place afin de retarder au maximum l’armée allemande.
Il y a deux ans, lors de mon incorporation, j’ai décidé de devenir officier de réserve et donc
d’exercer un rôle actif au sein de nos forces militaires. Ce choix n’a pas été difficile pour moi
car je suis monarchiste et je crois que sans le Roi, la Belgique n’existerait pas vraiment.
Originaire de la région de Charleroi, j’ai été intégré, après mon instruction, à la troisième
Division de Liège et attaché spécialement à la défense du Fort de Flémalle. C’est de là que je vous
écris ces lignes aujourd’hui.
Je fais partie de ceux qui estiment qu’en refusant le deux août au général Ludwig le passage
de ses troupes sur notre territoire, le gouvernement a pris une bonne décision. La seule possible
afin de garantir l’inviolable neutralité que nous revendiquons depuis de nombreuses années.
Secrètement, dit-on ici, le roi Albert espérait que l’Allemagne contournerait la Belgique pour
envahir la France par d’autres points stratégiques. Mais il ne fallait pas rêver. Pourquoi les chefs
de l’armée allemande auraient-ils pris soin de ménager la petite Belgique alors qu’ils étaient en
route pour attaquer la grande France ? 
Si cet acte de résistance du Roi et des autorités politiques n’est pas sans conséquence sur ma
vie personnelle, je l’accepte néanmoins avec philosophie… surtout en ce moment où,
contrairement à ce que l’on aurait pu imaginer, le moral de mes soldats et de mes sous-officiers
se porte nettement mieux qu’il y a deux jours. Le fait que les Allemands ne réussissent pas à
s’emparer de nos positions est de nature à leur donner confiance.
- Vous croyez qu’on tiendra combien de jours, mon lieutenant ? m’a demandé tout à l’heure le
sergent Guignet, l’œil vif.
- Je ne sais pas, mais le plus longtemps possible en tout cas. C’est la mission que le Roi nous a
confiée. Nous essayerons de la remplir le plus longtemps possible.     
Liège. 14 août 1914.
Notre Fort, comme ceux de Loncin et d’Hollogne, résiste encore et encore aux attaques
allemandes. Bien que nous luttions à armes inégales, nous avons de plus en plus l’impression
d’être imbattables. Notre moral est en acier trempé, et nous faisons subir, derrière nos remparts
de pierre, de lourdes pertes à l’armée ennemie.
Incapables de nous abattre en nous affrontant dans un dangereux face-à-face, les troupes
allemandes sont en train de nous contourner par le Nord et le Sud. Lors de la réunion des officiers
à laquelle j’ai assisté ce matin, le capitaine Durieux, qui dirige notre Compagnie, a été clair à ce
sujet : 
- Notre Fort est devenu une sorte d’îlot condamné à disparaître dans un avenir proche. La ville
de Liège est tombée il y a huit jours déjà et nous sommes encerclés de toutes parts.
Si nous ne voulons pas tous mourir ou finir prisonniers, nous allons devoir tenter une percée
pour rejoindre une ville encore debout. Comme moi, le major est d’avis que nous devrions sortir
de nuit, mais le général Leman n’a encore rien décidé à ce sujet. Quant à notre destination future,
elle reste également un mystère ! Je crois que notre objectif sera d’aller combattre du côté de
Gembloux ou de Bruxelles !
Liège. 16 août 1914.
Hier, le Fort de Loncin, dirigé par le général, Leman est tombé. Notre chef a été capturé et,
désormais, nous sommes livrés à nous-mêmes.
Nous avons résisté pendant douze jours sous les coups de butoir des Prussiens. Mais la cause
est entendue. Dans une demi-heure, notre Bataillon partira en direction de Namur où nos troupes
résistent vaillamment. Notre fort va tomber, mais notre pays n’est pas encore K.O.
Lors de la réunion de ce matin, le capitaine nous a annoncé que notre repli serait stratégique.
- Il n’est pas question de battre en retraite sans tenter de retarder l’avancée de l’armée
allemande, a-t-il martelé à plusieurs reprises. Vous utiliserez la technique de la volte-face tout au
long de votre marche. Entendu.
- A vos ordres, mon capitaine.
- Rompez, Messieurs, et à vos postes, conclut-il pour nous congédier.
De retour près de mes hommes, j’ai rassemblé les sous-officiers et je leur ai rappelé, pour le
principe, en quoi consiste la volte-face.
- A certains moments, certaines sections reviendront en arrière et tendront des pièges à
l’avant-garde de l’armée allemande. Répétez à vos hommes de ne pas prendre de risques inutiles
et de viser juste.
Attentifs, les sergents ont enregistré toutes les informations que je leur ai communiquées. Il
en va de leur propre vie et de celle des hommes dont ils ont la charge.
- Nous devrons régulièrement attendre l’ennemi et lui adresser un feu nourri, ai-je encore
précisé avant de mettre un terme à la réunion.
Il est possible que nous mourions tous lors de ces mouvements insolites et que je sois en train
de rédiger les dernières lignes de ces Carnets de Guerre. De toute façon, vous saurez bientôt si je
m’en suis sorti et, surtout, dans quel état. 
Huy. 17 août 1914.
Arrivés dans Huy, nous avons effectué une volte-face qui a surpris les deux Compagnies qui
nous suivent depuis que nous avons quitté Flémalle. Le combat a été rude, mais la plupart d’entre
nous s’en sont sortis indemnes. Tapis dans les maisons désertes, nous avons arrosé de pruneaux
mortels les Allemands qui avançaient franc battant et à découvert. Le carnage a laissé des traces
chez nos ennemis, mais également parmi nous. Mes hommes ont puisé dans cette attaque-
surprise une envie nouvelle de lutter, renforcée par une rencontre salutaire et inattendue. Alors
que nous approchions de Couthuin, nous avons été accostés par une importante troupe de
cavaliers français : culottes rouges, vestes bleues et casques blancs.
Heureuse

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