Le vignoble angevin à la fin du Moyen Âge : étude de rentabilité - article ; n°1 ; vol.2, pg 81-99
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Description

Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public - Année 1971 - Volume 2 - Numéro 1 - Pages 81-99
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1971
Nombre de lectures 58
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Michel Le Mené
Le vignoble angevin à la fin du Moyen Âge : étude de rentabilité
In: Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public. 2e congrès,
Grenoble, 1971. pp. 81-99.
Citer ce document / Cite this document :
Le Mené Michel. Le vignoble angevin à la fin du Moyen Âge : étude de rentabilité. In: Actes des congrès de la Société des
historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public. 2e congrès, Grenoble, 1971. pp. 81-99.
doi : 10.3406/shmes.1971.1223
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/shmes_1261-9078_1978_act_2_1_122381
LE VIGNOBLE ANGEVIN A LA FIN DU MOYEN AGE
— étude de rentabilité —
par Michel Le Mené
Dès le Xlle siècle, la culture de la vigne est très développée en Anjou. Elle
prospère partout, aussi bien au sud de la Loire où elle trouve sa terre de pré
dilection, qu'au nord du fleuve d'où elle a complètement disparu.
Le plus vieux cépage connu est le chenin blanc, souvent appelé pineau
blanc. Il en est fait mention dès le Xle siècle à Bouchemaine près d'Angers.
C'est un cépage rustique qui résiste bien aux gelées. Sa réputation est telle
qu'on l'utilise en Touraine, vers 1445, lors de la reconstruction du vignoble.
Le chenin rouge est plus répandu ; il donne un vin de consommation courante
le Clairet.
Les travaux viticoles ne présentent aucune particularité régionale. Le dé-
chaussage, la taille, le bêchage et le binage sont ici comme ailleurs les quatre
opérations usuelles de la vigne. Dès novembre, on chausse les ceps en rame
nant la terre au pied et en protégeant les racines et les radicelles de l'action
des gelées ; puis on épand la fumure autour des jeunes souches ; les vieilles
n'en reçoivent pas. Sitôt la chute des feuilles ou dès les premiers jours de fé
vrier, on taille la vigne. En mars, on bêche à la houe et on renouvelle les ceps
coulards et peu fructifères soit en plantant des chevelues que l'on achète ou
que l'on produit, soit encore en enfouissant partiellement un sarment tenant
au pied mère pour le faire raciner, soit enfin en couchant entièrement la sou
che dans le sol. Chacun des trois procédés a ses inconvénients : les jeunes
greffes ne fructifient qu'au bout de cinq ans, le marcottage épuise la souche
mère, et le provignage, plus rentable est souvent délicat et partant plus coû
teux. Bien que ce dernier terme figure le plus souvent dans les textes, tout
laisse à penser que le marcottage est la méthode la plus utilisée en Anjou. En
mai, on bine une première fois puis on repasse une seconde fois pour aérer les
jeunes plants. La vendange intervient entre le 20 septembre et le 10 octobre ;
l'absence de séries interdit malheureusement toute étude phénologique et
nous prive de renseignements sur les températures estivales qui influent sur
la production.
Avec le XI Ve siècle, le vignoble angevin entre dans le cycle des crises. La
conjoncture générale lui est défavorable. La guerre, la dépression démograp
hique, un trop fort accroissement de l'encépagement he conjuguent pour 82
ruiner un travail, qui, pour porter ses fruits, demande une continuité dans
l'effort, un respect des techniques et du calendrier de la végétation, une atten
tion de tous les instants.
Il ne serait pas équitable d'attribuer aux événements militaires la totale res
ponsabilité de la crise qui secoue le vignoble dans la seconde moitié du XlVe
siècle. L'augmentation des "façons" de la vigne, des préparations des vendang
es et des frais de transport jointe à la multiplication des Jaxes font que la
culture devient de moins en moins rentable. Le déséquilibre provient en grande
partie d'une surproduction relative et d'un manque de main -d'oeuvre. Les guer
res ne font que précipiter l'évolution.
Le manque de main-d'oeuvre est particulièrement ressenti dans la banlieue
d'Angers où le faire-valoir direct domine largement. La corvée d'entretien des
vignes est inconnue et le closier, s'il effectue quelques travaux, n'a généralement
qu'un rôle de surveillance. Les seigneurs, par l'intermédiaire de leurs régisseurs,
recrutent chaque lundi la main-d'oeuvre nécessaire. Lors de l'embauche ils di
scutent le prix du salaire pour la semaine et offrent un pot de vin aux travailleurs.
Les équipes ont de petits effectifs. Dans les clos de moyenne superficie (30
quartiers) ; à Pire, à Porée, à Challe.... elles atteignent en moyenne trois à quat
re travailleurs agricoles par jour ; dans les clos plus grands, comme celui d'
d'Aigrefoin (116 quartiers), l'équipe journalière n'excède pas douze personnes. Equipes hebdomadaires de bêcheurs
Porée Pirée Porretiere Chesnaye Morin i Challe Aigrefoin
36q. 30q. 30q. 40q. 26q. Année 35q. H6q.
fourch. moyen. fourch. moyen. fourch. moyen. fourch. moyen. fourch. moyen. fourch. moyen. fourch. moyen.
12 12 7 16 18 16 26
17 33 19 23 1360 24 20 52
32 44 30 40 26 28 72
27 24 26 22 12 14 26 52'
14 32 30 1361 30 22 20 CO
38 37 44 32 32 28 115
16 12 24 12 12 13
22 22 30 1362 24 23 20
• 37 37 26 37 24 34
10 25 18 16 10 9
1363 15 18 17 26 18 26
48 32 26 28 36 26 84
La situation tient au recrutement local et personnalisé : le régisseur embauc
he de préférence des travailleurs familiers. Le travail repose alors sur une con
fiance réciproque et évite la surveillance qu'exigerait l'emploi d'une équipe
nombreuse et anonyme. Mais ce n'est cependant pas de volonté délibérée que
le régisseur réduit à si peu de bras l'équipe quotidienne ; l'état du marché du
travail explique beaucoup mieux cette contingence. Les mouvements de trou
pes assez fréquents à l'époque provoquent la fuite des cultivateurs vers les si
tes protégés ; la dépression démographique aggrave encore les difficultés de
recrutement ; enfin la densité du vignoble - en particulier du vignoble ur
bain - est telle qu'il est impossible d'effectuer les travaux nécessaires à la vigne
en un laps de temps limité, d'autant qu'à la saison propice à la culture des t
âcherons sont eux-mêmes occupés à préparer leur propre lopin de vigne. Force
est donc de prendre ses précautions et de commencer très tôt les "façons" à
l'aide de petites équipes journalières.
Les conséquences du manque de main-d'oeuvre sont fort graves. L'obliga
tion de recourir à de petits effectifs allonge considérablement la durée des
travaux. A Porée, par exemple, le déchaussage occupe les quatre premières
semaines de novembre ; la taille débute dès les premiers jours de décembre,
parfois plus tôt, et se prolonge sur six semaines entrecoupées de poses dues
aux intempéries hivernales ; le bêchage commence en février pour s'achever
en avril ; le binage prend tout le mois de mai et tout le mois de juin. Les tr
avaux s'étalent ainsi sur plus de vingt semaines, du mois de novembre jusqu'au
mois de juillet. Le calendrier des travaux est essentiellement fonction du mar
ché du travail ; il a pour but d'éviter une flambée des salaires qui ne manquer
ait pas de se produire si tous les producteurs attendaient la saison propice
pour commencer la mise en culture. Malgré ces précautions, dans le vignoble
proche d'Angers, l'obligation de terminer la taille en temps utile entrafne une
augmentation régulière des rémunérations au fur et à mesure que les semaines
s'écoulent ; à Porée, en 1360, le salaire quotidien s'élève de 14 deniers à la
saint Hilaire à 16 deniers à la saint Julien et à 18 deniers à la Chandeleur ;
la même année, à Pirée, il passe de 12 deniers à 16 puis à 20 deniers.
L'augmentation est de moins en moins visible à mesure qu'on s'éloigne
d'Angers. Elle ne se retrouve pas dans les travaux de bêchage qu'on n'est pas
tenu d'effectuer dans des délais impératifs.
En conséquence, le calendrier des travaux de la vigne n'épouse que sommai
rement le cycle de la végétation. Certes, il n'est pas impossible de tailler dès la
dernière semaine de novembre, mais la taille trop précoce expose les pousses
hâtives aux gelées hivernales et printanières et les avantages d'une ré

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